BOSSE, Abraham, Le Peintre converty aux precises et universelles regles de son art avec un raisonnement abregé au sujet des Tableaux, Bas-reliefs et autres ornemens que l'on peut faire sur les diverses superficies des Bastimens. Et quelques Advertissements contre les erreurs que des nouveaux écrivains veulent introduire dans la pratique de ces Arts, Paris, Abraham Bosse, 1667.
Flora Herbert
[1] Le Blanc, 1997, p. 99-108.
Dedication
Aux curieux de l’art, de l’architecture, de la peinture et de la sculpture
Dédicace(s) at n.p.
Avertissement at 1
Raisonnement at 57
Lettre at 67
Catalogue at 71
BOSSE, Abraham, Le peintre converty aux précises et universelles règles de son art. Sentiments sur la distinction des diverses manières de peinture, WEIGERT, Roger-Armand (éd.), Paris, Hermann, 1964.
BOSSE, Abraham, Traité des pratiques géométrales et perspectives enseignées dans l'Académie royale de la peinture et sculpture ; Discours sur la manière universelle de Desargues ; Le peintre converti aux précises et universelles règles de son art, Genève, Minkoff Reprint, 1973.
LE BLANC, Marianne, « Abraham Bosse et Léonard de Vinci. Les débats sur les fondements de la peinture dans les premiers temps de l'Académie », Revue d’esthétique. La naissance de la théorie de l’art en France 1640-1720, 31-32, 1997, p. 99-107.
DÉMORIS, René, « Le Sueur et la théorie de son temps : Abraham Bosse et Hilaire Pader », dans SERROY, Jean (éd.), Littérature et Peinture au temps de Le Sueur, Actes du colloque de Grenoble, Grenoble, Musée de Grenoble, 2003, p. 25-34.
LE BLANC, Marianne, D’acide et d’encre : Abraham Bosse (1604?-1676) et son siècle en perspectives, Paris, CNRS Éd., 2004.
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QUOTATIONS
Aux curieux de l’Art de l’Architecture et de La Peinture et de la Sculpture. Messieurs J’ay creû ne pouvoir dédier ce petit Ouvrage qu’à vous puisque ne prenant d’autre interest dans ces questions que vous instruire & de profiter dans les connoissances que vous avez
Aux curieux de l’Art de l’Architecture et de La Peinture et de la Sculpture. Messieurs J’ay creû ne pouvoir dédier ce petit Ouvrage qu’à vous puisque ne prenant d’autre interest dans ces questions que vous instruire & de profiter dans les connoissances que vous avez ; Il sera facile de vous détromper des erreurs vulgaires, & de vous perfectionner dans les veritables Regles, sur lesquelles la pratique doit estre fondée
La "pratique" est liée aux "règles" sur lesquelles le peintre doit se fonder
Conceptual field(s)
Il s'agit des "règles" qui fondent une pratique raisonnée
Conceptual field(s)
[…] Aux curieux de l’Art de l’Architecture et de La Peinture et de la Sculpture. Messieurs J’ay creû ne pouvoir dédier ce petit Ouvrage qu’à vous puisque ne prenant d’autre interest dans ces questions que vous instruire & de profiter dans les connoissances que vous avez ; Il sera facile de vous détromper des erreurs vulgaires, & de vous perfectionner dans les veritables Regles, sur lesquelles la pratique doit estre fondée ; Et quoy qu’il se trouve beaucoup de personnes d’un avis contraire, si l’on considere que c’est par un interest particulier, ou quelque autre passion injuste, qu’ils s’opposent à une vérité connuë, sensible & démontrée ; Je ne doute point que toutes les indiferentes & curieuses comme vous, MESSIEURS, de la seule vérité, & de la perfection des beaux Arts, ne reçoivent favorablement ce petit Ouvrage [...].
Aux curieux de l’Art de l’Architecture et de La Peinture et de la Sculpture. Messieurs J’ay creû ne pouvoir dédier ce petit Ouvrage qu’à vous puisque ne prenant d’autre interest dans ces questions que vous instruire & de profiter dans les connoissances que vous avez ; Il sera facile de vous détromper des erreurs vulgaires, & de vous perfectionner dans les veritables Regles, sur lesquelles la pratique doit estre fondée ; Et quoy qu’il se trouve beaucoup de personnes d’un avis contraire, si l’on considere que c’est par un interest particulier, ou quelque autre passion injuste, qu’ils s’opposent à une vérité connuë, sensible & démontrée ; Je ne doute point que toutes les indiferentes & curieuses comme vous, MESSIEURS, de la seule vérité, & de la perfection des beaux Arts, ne reçoivent favorablement ce petit Ouvrage [...].
Qu’ayant fait apprendre à dessiner & à peindre, à un jeune homme qui luy appartenoit ; Premierement par la pratique ordinaire, qui est à dire simplement à veuë d’œil ; puis ensuitte par celle des veritables Regles ; de prier ce Peintre de l’en vouloir exactement interoger.
Qu’ayant fait apprendre à dessiner & à peindre, à un jeune homme qui luy appartenoit ; Premierement par la pratique ordinaire, qui est à dire simplement à veuë d’œil ; puis ensuitte par celle des veritables Regles ; de prier ce Peintre de l’en vouloir exactement interoger.
Ce qu’ayant fait, & reconneû que ce Disciple sçavoit ces Regles precises & universelles, que luy [le peintre] mesme ignoroit ; aprés avoir en deux ou trois Conferances sur ce sujet longtemps contesté contre ; il avoüa franchement & de bonne foy son erreur ; mais en revanche il donna à ce Disciple de belles & bonnes instructions sur l’élection du bon goust ou choix des beaux objets sur l’Histoire, & aussi sur le Coloris
Le terme "coloris" est ici employé au sujet du choix du peintre.
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Le terme "histoire" est employé par rapport à la question des choix que le peintre doit faire
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Ce qu’ayant fait, & reconneû que ce Disciple sçavoit ces Regles precises & universelles, que luy [le peintre] mesme ignoroit
il donna à ce Disciple de belles & bonnes instructions sur l’élection du bon goust ou choix des beaux objets sur l’Histoire, & aussi sur le Coloris
mais en revanche il donna à ce Disciple de belles & bonnes instructions sur l’élection du bon goust ou choix des beaux objets sur l’Histoire, & aussi sur le Coloris.
L’ARCHITECTE.
[...] la pluspart des Peintres mesmes tenus pour tres-excellents, ne sçavent souvent ny Geometrie pratique, ny moins encore la Theorique ; & par consequent ignorent ce que l’on nomme Assiettes ou Plans, profils & élevations des Corps solides. Il y a encore bien d'autres choses dont ces Peintres n'ont d'ordinaire aucune notion [...].
Bosse distingue ici la géométrie pratique et théorique.
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[ndr : L’ARCHITECTE] Or, Monsieur, comme la pluspart des Peintres ne sçavent d’ordinaire que copier purement à veue d’œil les objets de Relief, tant naturels qu’autres, sans en sçavoir les mesures (qui leur est ce me semble un assez grand deffaut) [...]
LE DISCIPLE.
Pour satisfaire à vostre desir [ndr : la question posée par le peintre au disciple concernant son apprentissage], je vous diray que lors que je commencé à pourtraire ou dessiner, ce fut sur de tres-bonnes Estampes ou tailles douces, gravées au burin, & d’autres à l’eau forte, & ce avec du charbon, afin de pouvoir facilement effacer les faux traits que je ferois ; [...]
[…] [ndr : Le Disciple, évoquant les étapes de son apprentissage] Ensuite, estant venu à copier des Figures humaines entieres, sur des Estampes, & aussi d’après celles que l’on nomme icy Academies, il m’avertit qu’il falloit d’abord en faire à veuë-d’œil l’esquisse ou l’ordonnance de leurs plus grosses parties, en commençant par la teste, & finissant aux pieds, pour aprés en arrester les contours au net, & le plus correctement que le pourrois
Le terme "contour" est ici utilisé dans l'expression "arrester les contours au net" et est employé au sujet de la question de l'apprentissage du dessin.
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[ndr : Le Disciple, évoquant les étapes de son apprentissage] Ensuite, estant venu à copier des Figures humaines entieres, sur des Estampes, & aussi d’après celles que l’on nomme icy Academies, il m’avertit qu’il falloit d’abord en faire à veuë-d’œil l’esquisse ou l’ordonnance de leurs plus grosses parties, en commençant par la teste, & finissant aux pieds, pour aprés en arrester les contours au net, & le plus correctement que le pourrois
'Ordonnance" se réfère à l'apprentissage du peintre qui doit dessiner les parties du corps humain en commençant par la tête
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[…] [ndr : Le Disciple, évoquant les étapes de son apprentissage] Ensuite, estant venu à copier des Figures humaines entieres, sur des Estampes, & aussi d’après celles que l’on nomme icy Academies, il m’avertit qu’il falloit d’abord en faire à veuë-d’œil l’esquisse ou l’ordonnance de leurs plus grosses parties, en commençant par la teste, & finissant aux pieds, pour aprés en arrester les contours au net, & le plus correctement que le pourrois ; & lors encore que j’alois à la corection à luy ou à d’autres de l’Academie, on me disoit aussi quelquefois que j’avois fait le total de la figure, ou trop trape ou trop sevelte, & le mesme de quelques parties & de plus mal placées. […]
[ndr : Le Disciple, évoquant les étapes de son apprentissage] Ensuite, estant venu à copier des Figures humaines entieres, sur des Estampes, & aussi d’après celles que l’on nomme icy Academies, il m’avertit qu’il falloit d’abord en faire à veuë-d’œil l’esquisse ou l’ordonnance de leurs plus grosses parties, en commençant par la teste, & finissant aux pieds, pour aprés en arrester les contours au net, & le plus correctement que le pourrois ; & lors encore que j’alois à la corection à luy ou à d’autres de l’Academie, on me disoit aussi quelquefois que j’avois fait le total de la figure, ou trop trape ou trop sevelte, & le mesme de quelques parties & de plus mal placées. […]
LE PEINTRE.
Je vous avoüe que je n’y trouve rien à reprendre n’y a ajoûter, puisque c’est ainsi que j’ay esté enseigné ; à la réserve des instructions en détail, de sçavoir manier la plume, le crayon & le peinceau, & donner les coups forts & artistes des Touches, dont vous ne nous avez rien dit.
LE DISCIPLE.
Je n’ay pas trouvé à propos de parler de ce détail, puisque les bonnes tailles douces & les dessins ont d’ordinaire toutes ces choses, desquelles je parleray en expliquant la pratique sur le Relief & sur le naturel.
"Touche" est associé à plume, crayon et pinceau. Le terme figure dans l'expression "donner des coups forts et artistes des Touches"
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LE DISCIPLE.
Au lieu de m’étendre pour cela sur les bons bas Reliefs & rondes Bosses, je le feray sur le naturel ; duquel je ne diray autre chose, sinon que l’on m’a averty qu’ayant fort pratiqué d’aprés ces Sculptures, c’estoit avoir tres-bien fait, puis que cela me rendoit bien plus pratique & plus prompt à dessiner le naturel, d’autant qu’il ne demeure pas long-temps sans changer & s’apesantir.
[...] [ndr : Le Disciple, à propos de son apprentissage du dessin] Pour donc dessiner sur ce naturel, soit en l’Academie ou ailleurs ; l’on ne me donna point d’autres preceptes, que ceux que j’avois eüs pour copier les Estampes, Desseins, Academies & Tableaux ; & sur ce qu’il m’arrivoit souvent de n’avoir pas assez de papier pour y achever les pieds de la figure ou Academie, comme je m’en plaignois à mon Maistre, il me disoit, que je n’avois qu’à faire mon Ordonnance plus petite.
Et lors qu’il la consideroit en quelque sorte de netteté dessinée au charbon, pour me la corriger par la confrontation du modelle ; il me disoit comme devant, vous avez fait vostre figure ou trop courte, ou trop sevelte, ou bien mis quelque partie hors de sa place, ou renduë trop grosse ou deliée à proportion des autres. [...]
[...] [ndr : Le Disciple, à propos de son apprentissage du dessin : dessiner d’après le naturel] D’autres particuliers, tant Professeurs qu’estudians, me disoient aussi qu’il ne falloit pas dessiner correctement ma figure suivant le modelle, mais qu’il en falloit charger ou regrossir plusieurs parties [...].
LE PEINTRE.
Jusques-là, je n’ay rien encore à vous dire, & sur tout pour cette correction du modelle ; puisque c’est une chose qui meriteroit bien un tres-ample reçit pour la bien décider ; & c’est ce qui n’a point encore este fait que selon des Goust differants.
[...] [ndr : Le Disciple, à propos de son apprentissage du dessin] Pour donc dessiner sur ce naturel, soit en l’Academie ou ailleurs ; l’on ne me donna point d’autres preceptes, que ceux que j’avois eüs pour copier les Estampes, Desseins, Academies & Tableaux ;
Le terme "académie" est ici employé au sujet de l'apprentissage du dessin du disciple.
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[...] [ndr : Le Disciple, à propos de son apprentissage du dessin] Pour donc dessiner sur ce naturel, soit en l’Academie ou ailleurs ; l’on ne me donna point d’autres preceptes, que ceux que j’avois eüs pour copier les Estampes, Desseins, Academies & Tableaux ; & sur ce qu’il m’arrivoit souvent de n’avoir pas assez de papier pour y achever les pieds de la figure ou Academie, comme je m’en plaignois à mon Maistre, il me disoit, que je n’avois qu’à faire mon Ordonnance plus petite.
Et lors qu’il la consideroit en quelque sorte de netteté dessinée au charbon, pour me la corriger par la confrontation du modelle ; il me disoit comme devant, vous avez fait vostre figure ou trop courte, ou trop sevelte, ou bien mis quelque partie hors de sa place, ou renduë trop grosse ou deliée à proportion des autres.
[...] [ndr : Le Disciple, à propos de son apprentissage du dessin] Pour donc dessiner sur ce naturel, soit en l’Academie ou ailleurs ; l’on ne me donna point d’autres preceptes, que ceux que j’avois eüs pour copier les Estampes, Desseins, Academies & Tableaux ; & sur ce qu’il m’arrivoit souvent de n’avoir pas assez de papier pour y achever les pieds de la figure ou Academie, comme je m’en plaignois à mon Maistre, il me disoit, que je n’avois qu’à faire mon Ordonnance plus petite.
Et lors qu’il la consideroit en quelque sorte de netteté dessinée au charbon, pour me la corriger par la confrontation du modelle ; il me disoit comme devant, vous avez fait vostre figure ou trop courte, ou trop sevelte, ou bien mis quelque partie hors de sa place, ou renduë trop grosse ou deliée à proportion des autres. [...]
[...] [ndr : Le Disciple, à propos de son apprentissage du dessin : dessiner d’après le naturel] D’autres particuliers, tant Professeurs qu’estudians, me disoient aussi qu’il ne falloit pas dessiner correctement ma figure suivant le modelle, mais qu’il en falloit charger ou regrossir plusieurs parties [...].
LE PEINTRE.
Jusques-là, je n’ay rien encore à vous dire, & sur tout pour cette correction du modelle ; puisque c’est une chose qui meriteroit bien un tres-ample reçit pour la bien décider ; & c’est ce qui n’a point encore este fait que selon des Goust differants.
LE DISCIPLE.
Je m’en vais vous le reciter, aprés vous avoir averty que l’on m’a assuré que pour sçavoir bien copier des Estampes, Desseins, Peintures, Sculptures, Architectures, & autres objets naturels ; soit de mesme grandeur, que les Geomettres nomment égaux & semblables ; soit plus grands ou plus petits, que l’on dit simplement semblables ; qu’il y a trois choses lesquelles il faut judicieusement considerer, sçavoir, son objet fixe, l’œil qui le regarde, puis la section d’un plan, que l’on suppose intervenir entre l’œil & cét objet ; qui est le papier, Toille, Verre, &c. que l’on nomme d’ordinaire le Tableau, & se souvenir sur tout en imitant le naturel ou relief quel qu’il soit, que l’on doit prendre une distance si raisonnable de l’œil à l’objet, ou section ; qui est comme j’ay dit la place du Dessein ou Tableau
Le tableau est considéré comme la section d'un plan situé entre l'œil et l'objet, de sa place dans la pratique du peintre. Il peut être en papier, toile, verre etc.
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LE DISCIPLE.
Je m’en vais vous le reciter, aprés vous avoir averty que l’on m’a assuré que pour sçavoir bien copier des Estampes, Desseins, Peintures, Sculptures, Architectures, & autres objets naturels ; soit de mesme grandeur, que les Geomettres nomment égaux & semblables ; soit plus grands ou plus petits, que l’on dit simplement semblables ; qu’il y a trois choses lesquelles il faut judicieusement considerer, sçavoir, son objet fixe, l’œil qui le regarde, puis la section d’un plan, que l’on suppose intervenir entre l’œil & cét objet ; qui est le papier, Toille, Verre, &c. que l’on nomme d’ordinaire le Tableau, & se souvenir sur tout en imitant le naturel ou relief quel qu’il soit, que l’on doit prendre une distance si raisonnable de l’œil à l’objet, ou section ; qui est comme j’ay dit la place du Dessein ou Tableau, que l’on puisse aisément & facilement embrasser ou voir, l’un & l’autre, d’une seule œillade, sans estre obligé de varier la teste en aucune façon, ny forcer la prunelle des yeux, & par ainsi si l’œil du Peintre ou dessinateur est bon & bien conduit, il tracera precisement sur son dessein & Tableau, les endroits où l’on s’imagine que les rayons venant de l’objet à son œil, passent dans cette Section & Tableau ; car la distance de l’œil à Elle, soit qu’elle se rencontre plus grande ou plus petite que celle de l’œil au naturel, elles seront toûjours proportionnées à la hauteur & largeur de cette Section, Verre ou transparence ; comme cela est clairement expliqué aux Traitez de Perspective & Leçons de l’Academie, que Mr Bosse a données au Public.
"L'objet" désigne l'objet à représenter par le peintre
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LE DISCIPLE.
Permettez-moy, s'il vous plaist, Monsieur, de vous demander si de dessiner un objet à veuë d’œil ou par les regles de Perspective, il s'y doit trouver de la difference entre deux desseins d'un mesme sujet & objet ; & si ils ne doivent pas estre égaux & semblables.
LE DISCIPLE.
Je sçay bien que les mots que j’ay cittez [ndr : termes ayant trait à la perspective évoqués précédemment : démonstration, section, égaux et semblables, élévation d’œil, distance, etc.] ne sont que paroles mais d’avoüer qu’en leur signification elles ne servent de rien à l’Art, je ne le puis, à cause que c’est vous mesme qui vous [ndr : Le Peintre, à qui répond le Disciple] en devriez servir envers moy, ayant la bonté de me vouloir instruire, car seulement pour ce simple commencement de dessiner à veuë d’œil, pouvez-vous trouver à redire qu’un Disciple sçache avant que de travailler, trouver les moyens de s’y prendre par ordre & raison
LE DISCIPLE.
Je sçay bien que les mots que j’ay cittez [ndr : termes ayant trait à la perspective évoqués précédemment : démonstration, section, égaux et semblables, élévation d’œil, distance, etc.] ne sont que paroles mais d’avoüer qu’en leur signification elles ne servent de rien à l’Art, je ne le puis, à cause que c’est vous mesme qui vous [ndr : Le Peintre, à qui répond le Disciple] en devriez servir envers moy, ayant la bonté de me vouloir instruire, car seulement pour ce simple commencement de dessiner à veuë d’œil, pouvez-vous trouver à redire qu’un Disciple sçache avant que de travailler, trouver les moyens de s’y prendre par ordre & raison ; & aussi de s’en expliquer si il est obligé, en disant premierement ; que son Original ou objet est éloigné de son œil de tant de mesures ; & que ce qu’il veut coppier, doit estre ou aussi grand, ou plus grand ou plus petit de tant que cét Original ; & mesme parler en termes que les Gens d’Estude qui possedent les Elemens d’Euclide, les puissent entendre, attendu que ce qui est le precis commencement de la dessinature ou pourtraiture Geometrale & Perspective, y est démontré.
Vous sçavez aussi que ce qui doit faire mieux connoistre & entendre le vray d’un Art, fondé sur des principes certains ; c’est d’en rendre raison d’un bout à l’autre ; car pour exemple, lors que je n’avois encore dessiné qu’à veuë d’œil, sans aucun ordre reglé, qui m’eust demandé quelle distance avez vous prise pour coppier vostre Original, & en quel endroit estoit vostre papier ou Toille, puis le placement de vostre œil, & aussi de combien est plus grande ou plus petite vostre coppie ; je ne l’aurois pû dire que tres-imparfaitement ; car la plus grande partie qui dessinent sans Regle, ne conçoivent point cette Section ou Coupe de Tableau supposée, se faire sur le Papier, Carte ou Toile, que l’on nomme le Tableau ; lequel on suppose y estre placé entre l’œil du Dessinateur & l’objet, & que les rayonnemens qui viennent de l’objet à l’œil y font leurs point d’intersections proportionnées à iceluy.
"Original" signifie l'objet à représenter en tenant compte des règles de la perspective
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ce qui est le precis commencement de la dessinature ou pourtraiture Geometrale & Perspective, y est démontré.
Vous sçavez aussi que ce qui doit faire mieux connoistre & entendre le vray d’un Art, fondé sur des principes certains ; c’est d’en rendre raison d’un bout à l’autre ; car pour exemple, lors que je n’avois encore dessiné qu’à veuë d’œil, sans aucun ordre reglé, qui m’eust demandé quelle distance avez vous prise pour coppier vostre Original, & en quel endroit estoit vostre papier ou Toille, puis le placement de vostre œil, & aussi de combien est plus grande ou plus petite vostre coppie
Vous sçavez aussi que ce qui doit faire mieux connoistre & entendre le vray d’un Art, fondé sur des principes certains ; c’est d’en rendre raison d’un bout à l’autre ; car pour exemple, lors que je n’avois encore dessiné qu’à veuë d’œil, sans aucun ordre reglé, qui m’eust demandé quelle distance avez vous prise pour coppier vostre Original, & en quel endroit estoit vostre papier ou Toille, puis le placement de vostre œil, & aussi de combien est plus grande ou plus petite vostre coppie ; je ne l’aurois pû dire que tres-imparfaitement
Vous sçavez aussi que ce qui doit faire mieux connoistre & entendre le vray d’un Art, fondé sur des principes certains ; c’est d’en rendre raison d’un bout à l’autre ; car pour exemple, lors que je n’avois encore dessiné qu’à veuë d’œil, sans aucun ordre reglé, qui m’eust demandé quelle distance avez vous prise pour coppier vostre Original, & en quel endroit estoit vostre papier ou Toille, puis le placement de vostre œil, & aussi de combien est plus grande ou plus petite vostre coppie ; je ne l’aurois pû dire que tres-imparfaitement ; car la plus grande partie qui dessinent sans Regle, ne conçoivent point cette Section ou Coupe de Tableau supposée, se faire sur le Papier, Carte ou Toile, que l’on nomme le Tableau ; lequel on suppose y estre placé entre l’œil du Dessinateur & l’objet, & que les rayonnemens qui viennent de l’objet à l’œil y font leurs point d’intersections proportionnées à iceluy.
LE PEINTRE.
Donc suivant vostre raisonnement, l’on devroit sçavoir les regles de Perspective avant que de commencer à portraire ou dessiner à veuë d’œil.
Il s'agit ici de la pratique du dessin "à vue d'œil"
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LE PEINTRE.
Donc suivant vostre raisonnement, l’on devroit sçavoir les regles de Perspective avant que de commencer à portraire ou dessiner à veuë d’œil.
LE DISCIPLE.
Je le prétend pas, Monsieur, bien que ce fust un tres-grand avantage à celuy qui les sçauroit ; mais comme d’ordinaire on occupe de bonne-heure la tendre jeunesse à pourtraire, & qu’elle n’a pas l’esprit assez fort pour les comprendre, il la faut épargner en cela pour quelque temps ; neantmoins, il est ce me semble toûjours à propos, de luy donner d’abord l’intelligence du peu qu’il luy en est necessaire, jusques à ce qu’elle y soit plus forte, & qu’elle ait exercé son œil à bien voir son Original
LE PEINTRE.
Donc suivant vostre raisonnement, l’on devroit sçavoir les regles de Perspective avant que de commencer à portraire ou dessiner à veuë d’œil.
LE DISCIPLE.
Je le prétend pas, Monsieur, bien que ce fust un tres-grand avantage à celuy qui les sçauroit ; mais comme d’ordinaire on occupe de bonne-heure la tendre jeunesse à pourtraire, & qu’elle n’a pas l’esprit assez fort pour les comprendre, il la faut épargner en cela pour quelque temps ; neantmoins, il est ce me semble toûjours à propos, de luy donner d’abord l’intelligence du peu qu’il luy en est necessaire, jusques à ce qu’elle y soit plus forte, & qu’elle ait exercé son œil à bien voir son Original, & la main a en former la copie, & ce d’un endroit & distance déterminée ; pour le rendre plûtost le Maistre de son ouvrage, qu’elle de luy ; afin d’en venir ensuitte à des particularitez plus ou moins essentielles selon selon sa force.
LE DISCIPLE.
Si ces contestations avoient à se former sur des choses de Goust ou d’opinion, j’aurois peine à croire que l’on les pust facilement resoudre, mais comme ce que je pretend vous dire est démonstratif, il n’y aura comme je croy aucun lieu de contester.
LE DISCIPLE.
[...]
Premierement je dis, au sujet de dessiner correctement à veuë d’œil d’aprés le naturel, une chose que vous sçavez ne devoir estre contestée, (qui est) que les parties d’un objet élevé ou abaissé au dessus de nostre œil ou horizon, & mesme scituées d’un & d’autre costé d’iceluy, apparoissent à l’œil plus petites, & aussi plus foibles en leur force de couleur, d’où resulte que celuy qui n’a eu aucune instruction ny avis, qu’il ne les faut pas ainsi diminuer, ne manquera pas de les diminuer & affoiblir
LE DISCIPLE.
[...]
Premierement je dis, au sujet de dessiner correctement à veuë d’œil d’aprés le naturel, une chose que vous sçavez ne devoir estre contestée, (qui est) que les parties d’un objet élevé ou abaissé au dessus de nostre œil ou horizon, & mesme scituées d’un & d’autre costé d’iceluy, apparoissent à l’œil plus petites, & aussi plus foibles en leur force de couleur, d’où resulte que celuy qui n’a eu aucune instruction ny avis, qu’il ne les faut pas ainsi diminuer, ne manquera pas de les diminuer & affoiblir, & ainsi faisant, sa coppie ne luy fera pas la mesme vision que son Naturel ou Original
LE DISCIPLE.
[...]
Premierement je dis, au sujet de dessiner correctement à veuë d’œil d’aprés le naturel, une chose que vous sçavez ne devoir estre contestée, (qui est) que les parties d’un objet élevé ou abaissé au dessus de nostre œil ou horizon, & mesme scituées d’un & d’autre costé d’iceluy, apparoissent à l’œil plus petites, & aussi plus foibles en leur force de couleur, d’où resulte que celuy qui n’a eu aucune instruction ny avis, qu’il ne les faut pas ainsi diminuer, ne manquera pas de les diminuer & affoiblir, & ainsi faisant, sa coppie ne luy fera pas la mesme vision que son Naturel ou Original ; Qui est ce que l’on pretend qu’elle fasse ; car au contraire elle sera differente, à cause de cette diminution qu’il ne falloit pas faire, puisque n’ayant rien diminué à la coppie, cette diminution se fera de l’œil à elle mesme, ainsi que de l’œil au naturel, qui n’est pas non plus diminué
Le terme affaiblir est ici associé à diminuer ; ces termes se raportent à la question de la perspective aérienne.
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LE DISCIPLE.
[...]
Premierement je dis, au sujet de dessiner correctement à veuë d’œil d’aprés le naturel, une chose que vous sçavez ne devoir estre contestée, (qui est) que les parties d’un objet élevé ou abaissé au dessus de nostre œil ou horizon, & mesme scituées d’un & d’autre costé d’iceluy, apparoissent à l’œil plus petites, & aussi plus foibles en leur force de couleur, d’où resulte que celuy qui n’a eu aucune instruction ny avis, qu’il ne les faut pas ainsi diminuer, ne manquera pas de les diminuer & affoiblir, & ainsi faisant, sa coppie ne luy fera pas la mesme vision que son Naturel ou Original ; Qui est ce que l’on pretend qu’elle fasse ; car au contraire elle sera differente, à cause de cette diminution qu’il ne falloit pas faire, puisque n’ayant rien diminué à la coppie, cette diminution se fera de l’œil à elle mesme, ainsi que de l’œil au naturel, qui n’est pas non plus diminué
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LE DISCIPLE.
[...]
Premierement je dis, au sujet de dessiner correctement à veuë d’œil d’aprés le naturel, une chose que vous sçavez ne devoir estre contestée, (qui est) que les parties d’un objet élevé ou abaissé au dessus de nostre œil ou horizon, & mesme scituées d’un & d’autre costé d’iceluy, apparoissent à l’œil plus petites, & aussi plus foibles en leur force de couleur, d’où resulte que celuy qui n’a eu aucune instruction ny avis, qu’il ne les faut pas ainsi diminuer, ne manquera pas de les diminuer & affoiblir, & ainsi faisant, sa coppie ne luy fera pas la mesme vision que son Naturel ou Original ; Qui est ce que l’on pretend qu’elle fasse ; car au contraire elle sera differente, à cause de cette diminution qu’il ne falloit pas faire, puisque n’ayant rien diminué à la coppie, cette diminution se fera de l’œil à elle mesme, ainsi que de l’œil au naturel, qui n’est pas non plus diminué : Mais comme ces particularitez sont amplement expliquées dans le Traité des Leçons de l’Academie fait par Monsieur Bosse, aux Estampes ou Planches, 51. 58. 59. 60. & 61 [ndr : BOSSE Abraham, Traité des pratiques géométrales et perspectives enseignées dans l’Académie Royale et de peinture et de sculpture, Paris, 1665]. Et mesme reconnoistre sur ce que je viens d’avancer, que celuy qui entend dire & qui voit que les objets les plus éloignez de son œil luy apparoissent plus petits, ne tombe encore dans l’erreur de les representer ainsi.
BOSSE, Abraham, [Planche 51], estampe, dans BOSSE, Abraham, Le Peintre converty aux precises et universelles regles de son art avec un raisonnement abregé au sujet des Tableaux, Bas-reliefs et autres ornemens que l'on peut faire sur les diverses superficies des Bastimens. Et quelques Advertissements contre les erreurs que des nouveaux écrivains veulent introduire dans la pratique de ces Arts, Paris, Abraham Bosse, 1667, p. 13.
BOSSE, Abraham, [Planche 58], estampe, dans BOSSE, Abraham, Le Peintre converty aux precises et universelles regles de son art avec un raisonnement abregé au sujet des Tableaux, Bas-reliefs et autres ornemens que l'on peut faire sur les diverses superficies des Bastimens. Et quelques Advertissements contre les erreurs que des nouveaux écrivains veulent introduire dans la pratique de ces Arts, Paris, Abraham Bosse, 1667, p. 13.
BOSSE, Abraham, [Planche 59], estampe, dans BOSSE, Abraham, Le Peintre converty aux precises et universelles regles de son art avec un raisonnement abregé au sujet des Tableaux, Bas-reliefs et autres ornemens que l'on peut faire sur les diverses superficies des Bastimens. Et quelques Advertissements contre les erreurs que des nouveaux écrivains veulent introduire dans la pratique de ces Arts, Paris, Abraham Bosse, 1667, p. 13.
BOSSE, Abraham, [Planche 60], estampe, dans BOSSE, Abraham, Le Peintre converty aux precises et universelles regles de son art avec un raisonnement abregé au sujet des Tableaux, Bas-reliefs et autres ornemens que l'on peut faire sur les diverses superficies des Bastimens. Et quelques Advertissements contre les erreurs que des nouveaux écrivains veulent introduire dans la pratique de ces Arts, Paris, Abraham Bosse, 1667, p. 13.
BOSSE, Abraham, [Planche 61], estampe, dans BOSSE, Abraham, Le Peintre converty aux precises et universelles regles de son art avec un raisonnement abregé au sujet des Tableaux, Bas-reliefs et autres ornemens que l'on peut faire sur les diverses superficies des Bastimens. Et quelques Advertissements contre les erreurs que des nouveaux écrivains veulent introduire dans la pratique de ces Arts, Paris, Abraham Bosse, 1667, p. 13.
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sa coppie ne luy fera pas la mesme vision que son Naturel ou Original ; Qui est ce que l’on pretend qu’elle fasse
Le terme "copie" se rapporte ici à "copier d'après le naturel".
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LE DISCIPLE.
Vous [ndr : le disciple s’adresse ici au peintre] devez donc en cela demeurer, s’il vous plaist, d’accord, qu’il ne faut pas dessiner le relief ou naturel comme l’œil le voit, & ce qui le confirmera encore mieux, c’est la pratique de representer le relief & naturel par mesures perspectives ; car vous avez témoigné en sçavoir les Regles.
LE DISCIPLE.
Vous [ndr : le disciple s’adresse ici au peintre] devez donc en cela demeurer, s’il vous plaist, d’accord, qu’il ne faut pas dessiner le relief ou naturel comme l’œil le voit, & ce qui le confirmera encore mieux, c’est la pratique de representer le relief & naturel par mesures perspectives ; car vous avez témoigné en sçavoir les Regles.
Mais permettez-moy à present de douter si vous les entendez universellement ; qui est d’en sçavoir premierement faire le geometral de la distribution par devis ou autrement, d’un ample nombre des differents objets, composez de superficies plattes & courbes, & en suitte de la place de leurs jours ombres & ombrages, à quelque jour ou lumiere que ce soit, pour ensuitte faire une dégradation Perspective de leurs plans & élevations, & en traiter encore par cette mesme regle Perspective, l’affoiblissement de leurs touches, teintes ou couleurs ; afin de leur faire faire par ce moyen le veritable effet de relief.
Le terme "dégradation" se rapporte à la perspective
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LE DISCIPLE.
[...] J’ay dit, qu’il n’est point ordinaire à plusieurs Peintres, Graveurs, Dessinateurs, & autres ; de concevoir que les Tableaux ou desseins qu’ils font, doivent estre conceüs placez entre l’espace qui est contenu depuis leurs yeux jusques à leurs objets naturels ; & qu’il faut faire en sorte, que la distance en soit raisonnablement grande, afin que l’œil les embrasse facilement d’une seule œillade.
LE DISCIPLE.
[...] J’ay dit, qu’il n’est point ordinaire à plusieurs Peintres, Graveurs, Dessinateurs, & autres ; de concevoir que les Tableaux ou desseins qu’ils font, doivent estre conceüs placez entre l’espace qui est contenu depuis leurs yeux jusques à leurs objets naturels ; & qu’il faut faire en sorte, que la distance en soit raisonnablement grande, afin que l’œil les embrasse facilement d’une seule œillade.
Mais sur cela il arrive à ces Messieurs ; que comme il leur est ordinaire de regarder, un nombre de figures humaines, plûtost châcune à part que toutes ensemble.
Ils en ont fait & font le mesme de châque Colonne, Pilastre & semblables parties de Bastimens ; en sorte que venant comme par force à pratiquer ce que les regles de perspective leurs prescrivent, infatuez de cette vision par parties, & davantage estans la pluspart enflez de bonne opinion d’eux mesmes ; ils concluënt que ce que ces Regles leur produisent de vray à leurs yeux est absolument faux ; & le tout faute d’estre éclairez de la démonstration, & de prendre comme j’ay dit, des distances & des élevations d’œil raisonnables, lors qu’ils veulent representer quelques objets en Perspective ; ce qu’ils font avec une conduite si peu reglée, que cela fait pitié.
Le terme "démonstration" se rapporte à la maîtrise des règles de la perspective
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ARISTE.
C’est comme je vous ay dit, un jeune homme, auquel ayant remarqué du genie en vostre Art [ndr : Ariste s’adresse ici au peintre], j’ay voulu luy estre un support pour s’y perfectionner, & en rechercher les meilleures voyes ; mais comme il est jeune, & qu’il n’a pas encore entré à fonds dans la connoissance du bon Goust des objets à distinction des autres ; j’ay souhaité que vous me fissiez la faveur de sonder ce qu’il en sçait, & de l’avertir, s’il vous plaist de ses deffauts.
LE PEINTRE.
Cela est vray, Monsieur, & ce que je trouve admirable touchant la peinture est cette grande diversité de manières, lesquelles quoy que souvent remplies de deffauts & de contrastes, on ne laisse pas d’y trouver des parties merveilleuses, soit en la composition ou invention des divers objets, & au Coloris & Touches du Peinceau ; & enfin au Goust du bel Antique, mais il y en a peu qui y ayent donne universellement.
AGESANDROS OF RHODES, ATHENODOROS et POLYDOROS, Laocoon et ses fils, 40 avant J.C. - 20 avant J.C., marbre, 208 x 163 x 112, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, Inv. 1059.
ANONYME, Antinoüs du Belvédère, le Lantin, v. 117 - v. 138, marbre, h. 195, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, MV_907_0_0.
ANONYME, Apollon du Belvédère, v. 130 - v. 140, marbre, h. 224, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, inv. 1015.
ANONYME, Flore Farnèse, IIe siècle après J.-C., marbre, h. 342, Napoli, Museo archeologico nazionale di Napoli, inv. 6409.
ANONYME, Hercule Commode, IIe siècle après J.-C., marbre, h. 212 , Vatican, Vatican, Museo Chiaramonti, inv. 1314.
ANONYME, Méléagre, IIe siècle après J.-C., marbre, h. 210, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, Inv. 490.
CLEOMENES, Vénus de Médicis, 1er siècle avant J.-C., marbre, h. 153, Firenze, Uffizi, Inv. 224.
GLYKON D'ATHÈNES, Hercule Farnèse, Ier siècle après J.-C., marbre, h. 317, Napoli, Museo archeologico nazionale di Napoli, inv. 6001.
Vénus du Belvédère
Le terme "antique" se rapporte ici au "goût"
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Le terme "manière" se rapporte ici à la diversité de styles
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LE PEINTRE.
Je ne croy pas, Monsieur, les [ndr : « les » renvoie aux « œuvres de feu Monsieur le Poussin », cf. la question posée par Ariste au peintre] pouvoir assez estimer, à moins d’avoir les mesmes lumieres que luy, mais autant que Dieu m’en a départy, je diray n’avoir jamais veu de Peintre si également universel & corect, ny qui eust un si grand & bon Goust que luy ; & de plus, le don de mieux exprimer l’air, les actions, & passions de ses figures ; ny enfin qui s’écartast plus du Goust moderne, & qui suivit mieux l’histoire tant sacrée que profane.
"Air" se rapporte ici au terme "figure", en association avec les termes "action" et "passion"
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Le terme "correct" se rapporte à Poussin et est associé au terme "universel"
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Le terme "goût" est associé à "grand", "bon" et "moderne"
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LE DISCIPLE.
Je croy que vous sçavez aussi, que la pratique de dessiner à l'ordinaire est de faire prestement un esquisse ou ébauche de l'histoire ou sujet que l'on desire representer ; selon que l'on se l'est formée dans l'imagination, en effaçant, changeant, & rechangeant, tant que l’on en ait trouvé quelque chose qui contente
LE DISCIPLE.
Je croy que vous sçavez aussi, que la pratique de dessiner à l'ordinaire est de faire prestement un esquisse ou ébauche de l'histoire ou sujet que l'on desire representer ; selon que l'on se l'est formée dans l'imagination, en effaçant, changeant, & rechangeant, tant que l’on en ait trouvé quelque chose qui contente ; puis aprés on vient à remettre le tout au net, en se servant tantost du Bas-relief, de la Ronde bosse, & du naturel ; & mesme en faisant de petits modelles revestus de cire à ébaucher & accompagnez de Drapperies.
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Le terme "histoire" est ici employé pour désigner le sujet à représenter
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Il s'agit ici des petits modèles en cire utilisés par le peintre pour placer sa compostion et étudier les draperies
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LE PEINTRE.
Dites-moy, je vous prie, comment pretendriez vous de faire autrement, qu’aprés avoir arresté un dessein, de se servir dans un Astelier où lieu de travail, d’un modelle ou manequin, & luy donner ou faire faire l’action des figures de ce dessein, pour d’aprés luy le dessiner & peindre sur vôtre Toile, plus ou moins grand ; & mesme y trouver aussi par ce moyen, les jours & ombres necessaires.
Je sçay bien qu’il y en a, dont la maniere est de modeller en petit toutes les parties ou figures de leur sujet, afin de les scituer ensuitte comme ils desirent, les posant sur un Ais ou Table unie & mise de niveau ; pour ensuitte les approchant d’une assez large fenestre, si c’est un sujet qui doive estre éclairé d’un grand jour, les copier ou imiter à veuë d’œil, d’un endroit déterminé.
"Imiter" à vue d'œil est employé dans cette citation pour signifier l'observation d'un objet que le peintre doit représenter
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[ndr : LE DISCIPLE]
[…] De plus, Monsieur, vous n’avez point encore déterminé dans cét Astelier ou lieu de travail du Peintre, comment il placera son Modelle ou Manequin, pour toutes les actions des figures qu’il voudra faire dans son grand Tableau, ny l’endroit où il se doit mettre pour les voir & les imiter ; car par ce moyen il arrivera s’il ne sçait les regles ; qu’il placera & dessinera le tout sans ordre ny raison ; & de plus la place des jours & ombres toutes contraires, puis qu’il y a bien de la difference du jour d’une fenestre à celuy d’une Campagne, puis du Coloris par les reflections causées des murs & autres corps placez dans cét Atelier. […]
"Atelier" est employé ici comme lieu de travail et au sujet de la question de l'éclairage.
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Le terme "coloris" est ici associé à celui de réflexion" (au sujet de l'éclairage de l'atelier)
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[ndr : LE DISCIPLE]
[…] Pour la première [ndr : la première manière, cf. passage qui précède], voicy comme je m’y prends ; je commence d’abord ayant déterminé l’histoire ou sujet que j’ay composée dans mon imagination, supposant avoir l’intelligence de la belle proportion des objets.
[ndr : LE DISCIPLE]
[...] j’y dessine ce que je me suis formé dans l’esprit ou imagination
[ndr : LE DISCIPLE]
[...] j’y dessine ce que je me suis formé dans l’esprit ou imagination
[ndr : LE DISCIPLE]
Premierement, on dégrade cette Table par quarrez en forme d’Echicquier, dont leur grandeur à chacun doit estre proportionné à la mesure qui aura servy à modeller vos Figures, Architectures, & autres objets Geometraux servant à composer vostre sujet ou histoire ; lesquelles Figures, Architectures, &c. on place sur ces quarrez, conformément à cette composition d’histoire.
Le terme "composition" est ici associé au terme "histoire".
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LE DISCIPLE.
Je vous diray que j’ay commencé à peindre depuis un an, premierement de Grizazille ou de blanc & noir à l’huile, d’aprés des Sculptures & sujets d’histoires de ma composition ; & ensuitte avec des couleurs depuis huit mois ou environ : pratique en laquelle je me trouve un peu entrepris, non lors qu’il s’agit de copier ou imiter des Tableaux colorez, mais le naturel, & sur tout en grand.
LE DISCIPLE
En voicy quelques morceaux [ndr : dans le passage qui précède, le disciple montre au peintre ses dessins et peintures], desquels je vous supplie de m’en vouloir dire ce qui vous en semble, & le tout sans m’épargner ; car je sçay bien que cela est d’une autre nature que les regles Geometrales & Perspectives que j’ay apprises, & desquelles je prends la liberté d’avancer qu’elles ne sont pas pour en demander les sentimens d’aucun, puisqu’elles sont de démonstration ; mais en ce qui regarde le choix des objets, je sçay que c’est une chose de concert avec ceux qui ont beaucoup veu & pratiqué ; pour moy ce que j’en puis sçavoir, ne vient que de ce que j’en ay leu dans un petit Traité des sentimens de Monsieur Bosse, sur les diverses manieres de Peinture, dedié à Messieurs de l’Academie Royale de la Peinture & Sculpture [ndr : éd. 1649] ; & dans celuy des Leçons qu’il y a données quatre années de suitte gratuitement [ndr : éd. 1665].
Le terme "démonstration" se trouve opposé à "sentimens"
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mais en ce qui regarde le choix des objets, je sçay que c’est une chose de concert avec ceux qui ont beaucoup veu & pratiqué
LE PEINTRE.
En verité voicy de beaux & bons desseins, & d’un tres-bon Goust ; car vous sçavez bien qu’un Peintre ou semblable dessinateur, pourroit estre devenu un precis imitateur de toutes sortes d’objets, & mesme jusques à en pouvoir composer de semblables d’invention ou de ressouvenir
LE PEINTRE.
En verité voicy de beaux & bons desseins, & d’un tres-bon Goust ; car vous sçavez bien qu’un Peintre ou semblable dessinateur, pourroit estre devenu un precis imitateur de toutes sortes d’objets, & mesme jusques à en pouvoir composer de semblables d’invention ou de ressouvenir, qui ne seroit pas des plus estimés, s’il ignoroit ce qu’entre nous on nomme le bon ou grand Goust ; quoy qu’à le bien prendre il le deust estre, puisque sans contredit celuy qui est exact dessinateur de tous les objets qu’il pourroit avoir devant l’œil, auroit bien un plus grand avantage pour s’avancer à sçavoir en quoy consiste ce grand Goust, que celuy qui le sçauroit sans avoir l’acquisition du premier.
Mais revenons à voir ces desseins & aussi vos figures d’Academie [...] vous y avez bien observé aussi le toucher fort & foible, pour y exprimer le relief.
LE PEINTRE.
Vostre pensée estoit fort bonne, car je vous assure, que la pluspart d’entre nous sont differents de Goust pour la proportion de leurs figures, & ainsi chacun estime le sien ; & comme nous nous trouvons à present reduits à parler de ce Goust des proportions, je prie, Monsieur, de ne se point ennuyer ny vous aussi, si ce que j’eu vais dire est un peu long.
ARISTE.
Monsieur, je suis tout preparé à vous entendre raisonner sur cette matiere tant qu’il vous plaira, puisque je sçay qu’elle n’est en partie fondée que sur des divers Gousts ou opinions.
LE PEINTRE.
Comme, Monsieur, a fort bien dit, que la belle proportion des figures humaines, autrement leur beauté, n’est point encore définie, & qu’ainsi tout ce que l’on en peut dire, n’est encore jusques à present que de pure opinion ou goust ; neantmoins avec sa permission, je ne laisseray pas d’avancer ; que nombre de personnes de sens, pourroient plûtost donner leur voix à la representation du corps d’un homme nud ou d’une femme, dont on en auroit recherché les proportions telles que je diray, que d’un autre tout contraire.
Car quand nous voyons une fille ou femme, qui nous semble belle de visage & de taille, & une autre toute contrefaite ou opposée à celle-là, nous la rejettons ou méprisons.
Mais afin de tâcher d’établir en gros pour cela quelque proportion aucunement raisonnée ; chacun sçait, que l’on dit communément qu’en fait de jambes, de testes & quelques autres parties du corps humain, que les plus grosses ne sont pas les meilleures.
[...]
Et pour moy je tiens, que comme nous ne sçavons pas bien encore toutes les belles pensées, meditations, & raisonnemens, sur la vision, qu’ont eus ces grands Architectes de l’Antiquité, & de la composition des membres ou parties de leurs Ordres de Colonnes en l’Architecture, sçavoir le Dorique, l’Ionique, & le Corinthien, qu’il en pourroit estre arrivé le mesme de leurs sçavants Sculpteurs sur la proportion de leurs belles figures, tant en Bas-reliefs, qu’en rondes Bosses.
Et pour moy, la pensée m’est venuë en voyant les excellens morceaux qui nous en restent, principalement à Rome ; que outre la belle & agreable proportion que l’on voit à la Venus de Medicis, à celle de Belvedere, à la Flore, au Commode, à l’Hercule de Farneze, au Meleagre, à l’Apollon, & au Lentin, puis en ce merveilleux ouvrage du l’Aocoom & de ses deux enfans, & à un grand nombre d’autres, qui sont tous differens au détail de leurs proportions, taille & air de testes, qu’ils estoient tres-sçavans en l’Anatomie & en la Physionomie, car j’ay remarqué dans les airs de testes de leurs diverses figures faites à plaisir, ou à volonté, qui representoient mesme des fleuves, une grave sagesse, douce, beninne, au lieu que la pluspart de nos Sculpteurs d’apresent, leurs donneroient volontiers un air de visage rustique et furieux.
AGESANDROS OF RHODES, ATHENODOROS et POLYDOROS, Laocoon et ses fils, 40 avant J.C. - 20 avant J.C., marbre, 208 x 163 x 112, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, Inv. 1059.
ANONYME, Antinoüs du Belvédère, le Lantin, v. 117 - v. 138, marbre, h. 195, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, MV_907_0_0.
ANONYME, Apollon du Belvédère, v. 130 - v. 140, marbre, h. 224, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, inv. 1015.
ANONYME, Flore Farnèse, IIe siècle après J.-C., marbre, h. 342, Napoli, Museo archeologico nazionale di Napoli, inv. 6409.
ANONYME, Hercule Commode, IIe siècle après J.-C., marbre, h. 212 , Vatican, Vatican, Museo Chiaramonti, inv. 1314.
ANONYME, Méléagre, IIe siècle après J.-C., marbre, h. 210, Vatican, Vatican, Museo Pio-Clementino, Inv. 490.
CLEOMENES, Vénus de Médicis, 1er siècle avant J.-C., marbre, h. 153, Firenze, Uffizi, Inv. 224.
GLYKON D'ATHÈNES, Hercule Farnèse, Ier siècle après J.-C., marbre, h. 317, Napoli, Museo archeologico nazionale di Napoli, inv. 6001.
Vénus du Belvédère
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ARISTE.
Monsieur, je suis tout preparé à vous entendre raisonner sur cette matiere tant qu’il vous plaira, puisque je sçay qu’elle n’est en partie fondée que sur des divers Gousts ou opinions.
LE PEINTRE.
Comme, Monsieur, a fort bien dit, que la belle proportion des figures humaines, autrement leur beauté, n’est point encore définie, & qu’ainsi tout ce que l’on en peut dire, n’est encore jusques à present que de pure opinion ou goust ; neantmoins avec sa permission, je ne laisseray pas d’avancer ; que nombre de personnes de sens, pourroient plûtost donner leur voix à la representation du corps d’un homme nud ou d’une femme, dont on en auroit recherché les proportions telles que je diray, que d’un autre tout contraire.
LE PEINTRE.
Comme, Monsieur, a fort bien dit, que la belle proportion des figures humaines, autrement leur beauté, n’est point encore définie, & qu’ainsi tout ce que l’on en peut dire, n’est encore jusques à present que de pure opinion ou goust
"Beauté" est associé à la "proportion des figures humaines" et au "goût".
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Et pour moy, la pensée m’est venuë en voyant les excellens morceaux qui nous en restent, principalement à Rome ; que outre la belle & agreable proportion que l’on voit à la Venus de Medicis, à celle de Belvedere, à la Flore, au Commode, à l’Hercule de Farneze, au Meleagre, à l’Apollon, & au Lentin, puis en ce merveilleux ouvrage du l’Aocoom & de ses deux enfans, & à un grand nombre d’autres, qui sont tous differens au détail de leurs proportions, taille & air de testes, qu’ils estoient tres-sçavans en l’Anatomie & en la Physionomie, car j’ay remarqué dans les airs de testes de leurs diverses figures faites à plaisir, ou à volonté, qui representoient mesme des fleuves, une grave sagesse, douce, beninne, au lieu que la pluspart de nos Sculpteurs d’apresent, leurs donneroient volontiers un air de visage rustique et furieux.
Le terme "air" est associé aux termes "teste" et "visage".
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[ndr : LE PEINTRE]
Mais pour en revenir à ces merveilleux Antiques, ce qui y est de tres-considerable à mon sens, c'est, que toute cette diversité de divinitez feintes & autres Statuës à plaisir, ou pour honnorer la memoire de quelques hommes Illustres, tout ne laisse pas d'en estre tres-beau & tres-agreable en leurs varietez.
J’ay autefois pris plaisir, de confronter ou opposer nostre naturel contre ces belles Sculptures [ndr : antiques], mais en verité, j’estois étonné d’y voir une si grande dissemblance.
Je remarqué bien aussi, qu’une partie de la diformité de ce naturel, venoit soit de l’un ou de l’autre Sexe, par le serrement de leurs Habits, Ceinture, Jartieres, Chausses & Souliers ; lesquelles sans contredit corrompent fort le naturel.
Le "naturel" est employé en comparaison avec les antiques au sujet de la question des proportions et de l'anatomie.
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Variété est lié à dissemblance
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[ndr : LE PEINTRE]
& me souvient avoir veu de cét Excellent Coloriste Paul Veronneze, une histoire d’un Moyse trouvé dans les eaux par la fille de Pharao, où elle & ses suivantes sont en partie vestuës & coiffées à la mode Venitienne, & laquelle avoit pour sa Garde deux Suisses vestus de Deüil, avec des Tocques sur leurs Testes, & en main des Halebardes.
[ndr : LE PEINTRE]
Depuis nous avons eu les Carraces, & sur tous Anibal, le Dominicain, le Guide, & autres Excellens Naturalistes, lesquels quoy qu’ils n’ayent pas tout à fait donné comme Raphaël dans ce grand goust de l’antique, ils n’ont pas laissé de choisir de tres-belles natures, & telles seront toûjours bien cheries, estimées & suivies.
CARRACCI, Annibale
CARRACCI, les
IL DOMENICHINO (Domenico Zampieri)
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio)
RENI, Guido
Antique (l'antique)
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CARRACCI, Annibale
CARRACCI, les
IL DOMENICHINO (Domenico Zampieri)
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio)
RENI, Guido
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[ndr : LE PEINTRE]
Depuis nous avons eu les Carraces, & sur tous Anibal, le Dominicain, le Guide, & autres Excellens Naturalistes, lesquels quoy qu’ils n’ayent pas tout à fait donné comme Raphaël dans ce grand goust de l’antique, ils n’ont pas laissé de choisir de tres-belles natures, & telles seront toûjours bien cheries, estimées & suivies.
Mais comme un recit plus étendu sur toutes ces belles natures, & manieres de dessiner & peindre de ces grands hommes, feroit bien un tres-gros Volume ; je parleray de nostre moderne Raphaël, l’incomparable feu Monsieur le Poussin de nostre nation ; lequel sans contredit est celuy qui a le plus donné dans ce Goust & diversité des proportions antiques, airs de testes, & expressions de ses figures & Architectures suivant l’histoire; non seulement par celles des yeux & du toucher, mais par l’oüye & le sentiment du cœur et de l’ame ; je diray encore, qu’il a esté le plus universel en representation de tous les objets de la belle nature, le plus égal & le plus achevé sans contredit qu’aucun dont on puisse voir des ouvrages.
CARRACCI, Annibale
CARRACCI, les
IL DOMENICHINO (Domenico Zampieri)
POUSSIN, Nicolas
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio)
RENI, Guido
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CARRACCI, Annibale
CARRACCI, les
IL DOMENICHINO (Domenico Zampieri)
POUSSIN, Nicolas
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio)
RENI, Guido
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je diray encore, qu’il a esté le plus universel en representation de tous les objets de la belle nature, le plus égal & le plus achevé sans contredit qu’aucun dont on puisse voir des ouvrages.
[ndr : LE PEINTRE]
[...] outre ces beaux & divers airs & proportions de ces figures & Bas-reliefs antiques, qu’il faut bien sinculquer dans l’imagination ou dans l’esprit, qu’il y a encore celles de l’agencement de leurs Drapperies ou vestemens, & autre choses d’usage.
Mais sur cela, il y a à mon avis plusieurs particularitez à décider, afin que le Peintre soit pleinement assuré de ce qu’il doit faire, depuis le commencement jusques à la fin : Premierement de considerer ou sçavoir, que tout ce que l’on fait du Travail de Peinture & tel autre, est de sujettion ou de volonté, de sorte que si on prescrit à un Dessinateur & à un Peintre, le sujet où [ndr : sic] l’histoire qu’il doit faire, & toutes les dépendances d’icelle, jusques aux vestemens ou drapperies des figures, forme de Bastimens, Païsages, Animaux, &c. il est obligé de suivre cette prescription : Si il a aussi à faire un autre sujet, & qu’on luy en laisse la pleine liberté sans aucune contrainte, il en peut user comme il luy plaira ; toutefois si c’est une Histoire Romaine ou Grecque ou d’autre nation, il me semble que ce que luy doit estre en quelque sorte une sujettion, puisque sans contredit il doit rechercher de donner à ces figures l’air de la Nation, leurs formes de vestemens & autres choses de leur mode ou usage, & mesme de leurs Bastimens & Païsages, en cas que l’action se soit passée en leur mesme pays.
Car si ce sont des actions, des Faits, ou des Exploits de Conquerans, ce sera un mélange de plusieurs figures & vestemens, mais non de Païsage & Bastimens ; & comme souvent il arrive, que les Peintres prenent des sujets si anciens ou éloignez de nous, qu’ils ne peuvent avoir aucuns memoires ny vestiges des airs de Testes, Figures, Coloris, Vestemens, & choses d’usages, & de sorte qu’ils tombent dans les fautes de ceux dont nous avons parlé, qui donnent des airs à leurs figures de Venitiens & Venitiennes, ou de Flamans & Flamandes, &c. à des histoires anciennes, saintes, profanes, & autres.
Mais les judicieux & bien avisez, qui ont leu les Histoires, tâchent de tout leur pouvoir de les suivre ponctuellement, ou si ils ne le peuvent ainsi que j’ay dit, à cause qu’ils n’en ont aucuns vestiges, enseignemens, ny memoires, ils se doivent détacher de toutes ces idées, qui leur peuvent venir dans l’esprit, qui ressemblent non seulement aux modernes, mais aux Grecques, aux Romains & autres, qui ne leur conviennent pas.
C’est en quoy a parfaitement bien reüssi le grand Raphaël, & son éleve Jules Romain & tels autres, & sur tout depuis peu nostre merveilleux & universel Peintre feu Monsieur le Poussin, ainsi que je l’ay dit cy devant.
Le terme "histoire" désigne le sujet à représenter.
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[ndr : LE PEINTRE]
[...] outre ces beaux & divers airs & proportions de ces figures & Bas-reliefs antiques, qu’il faut bien sinculquer dans l’imagination ou dans l’esprit, qu’il y a encore celles de l’agencement de leurs Drapperies ou vestemens, & autre choses d’usage.
Mais sur cela, il y a à mon avis plusieurs particularitez à décider, afin que le Peintre soit pleinement assuré de ce qu’il doit faire, depuis le commencement jusques à la fin : Premierement de considerer ou sçavoir, que tout ce que l’on fait du Travail de Peinture & tel autre, est de sujettion ou de volonté, de sorte que si on prescrit à un Dessinateur & à un Peintre, le sujet où [ndr : sic] l’histoire qu’il doit faire, & toutes les dépendances d’icelle, jusques aux vestemens ou drapperies des figures, forme de Bastimens, Païsages, Animaux, &c. il est obligé de suivre cette prescription
[ndr : LE PEINTRE]
[...] outre ces beaux & divers airs & proportions de ces figures & Bas-reliefs antiques, qu’il faut bien sinculquer dans l’imagination ou dans l’esprit, qu’il y a encore celles de l’agencement de leurs Drapperies ou vestemens, & autre choses d’usage.
Mais sur cela, il y a à mon avis plusieurs particularitez à décider, afin que le Peintre soit pleinement assuré de ce qu’il doit faire, depuis le commencement jusques à la fin : Premierement de considerer ou sçavoir, que tout ce que l’on fait du Travail de Peinture & tel autre, est de sujettion ou de volonté, de sorte que si on prescrit à un Dessinateur & à un Peintre, le sujet où [ndr : sic] l’histoire qu’il doit faire, & toutes les dépendances d’icelle, jusques aux vestemens ou drapperies des figures, forme de Bastimens, Païsages, Animaux, &c. il est obligé de suivre cette prescription : Si il a aussi à faire un autre sujet, & qu’on luy en laisse la pleine liberté sans aucune contrainte, il en peut user comme il luy plaira ; toutefois si c’est une Histoire Romaine ou Grecque ou d’autre nation, il me semble que ce que luy doit estre en quelque sorte une sujettion, puisque sans contredit il doit rechercher de donner à ces figures l’air de la Nation, leurs formes de vestemens & autres choses de leur mode ou usage, & mesme de leurs Bastimens & Païsages, en cas que l’action se soit passée en leur mesme pays.
Car si ce sont des actions, des Faits, ou des Exploits de Conquerans, ce sera un mélange de plusieurs figures & vestemens, mais non de Païsage & Bastimens ; & comme souvent il arrive, que les Peintres prenent des sujets si anciens ou éloignez de nous, qu’ils ne peuvent avoir aucuns memoires ny vestiges des airs de Testes, Figures, Coloris, Vestemens, & choses d’usages, & de sorte qu’ils tombent dans les fautes de ceux dont nous avons parlé, qui donnent des airs à leurs figures de Venitiens & Venitiennes, ou de Flamans & Flamandes, &c. à des histoires anciennes, saintes, profanes, & autres.
toutefois si c’est une Histoire Romaine ou Grecque ou d’autre nation, il me semble que ce que luy doit estre en quelque sorte une sujettion, puisque sans contredit il doit rechercher de donner à ces figures l’air de la Nation, leurs formes de vestemens & autres choses de leur mode ou usage, & mesme de leurs Bastimens & Païsages, en cas que l’action se soit passée en leur mesme pays.
Mais les judicieux & bien avisez, qui ont leu les Histoires, tâchent de tout leur pouvoir de les suivre ponctuellement, ou si ils ne le peuvent ainsi que j’ay dit, à cause qu’ils n’en ont aucuns vestiges, enseignemens, ny memoires, ils se doivent détacher de toutes ces idées, qui leur peuvent venir dans l’esprit, qui ressemblent non seulement aux modernes, mais aux Grecques, aux Romains & autres, qui ne leur conviennent pas.
[ndr : LE PEINTRE]
[...] l’on doit en cela estre tres-exact à observer toûjours l’air & la proportion de ces Sculptures antiques, suivant les divers âges, sexes, & conditions, & mesme ces fausses divinitez, pour bien exprimer plusieurs histoires ou fictions de la Metamorphose d’Ovide & autres Escrits des Poëtes tant Anciens que Modernes
L'air est associé à la proportion des sculptures antiques et à la notion de convenance par rapport au sujet
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ARISTE.
Monsieur, il faut avoüer que vous avez amplement satisfait à vostre revanche, & mesme avec usure ; car sans doute, c’est une chose tres-essentielle de bien observer ce que vous avez dit pour se former dans ce bon Goust ; & quoy qu’il soit mélé de choses d’opinion, il y en a beaucoup que je tiens fondée en démonstration, ne restant que ces belles proportions & diversitez de ces figures antiques de Sculptures, lesquelles neantmoins à les bien prendre, puis qu’elles ont le don de plaire au plus grand nombre des Sçavans en cét Art & autres, il semble que leur approbation doit passer en quelque sorte pour une démonstration.
[ndr : LE PEINTRE]
[...] lors que l’on voit en Italie & sur tout en la Lombardie & à Venise, les ouvrages de ces grands Peintres, le Titian, le Georgeon, Tintoret, P. Veroneze, le Palme, le Bassan, & autres Excellens Coloristes & tres-abondans en compositions de figures, cela surprend extremément la veuë, ce que ne font pas ainsi les Œuvres du grand Raphaël & autres de ce goust, mais en recompense ceux-cy ont cét avantage qu’elles s’insinüent doucement dans l’esprit, de sorte qu’elles y font un tel effet, que plus vous les revoyez plus vous en estes satisfaits, en ce que vous y découvrez toûjours de nouvelles beautez.
Et pour les autres, c’est tout le contraire, car osté le Colory & l’Artiste maniere de peindre l’on y trouve en la pluspart, les revoyant toüjours de differantes méprises et erreurs, tant contre l’histoire & usage, que contre les Regles de Perspective.
Pour celles d’Anibal Carrace & de ses Contemporains [...] leur imitation n’a garde d’estre si nuisible à vous détourner de ce bon Goust [...].
BASSANO, les
CARRACCI, Annibale
GIORGIONE (Giorgio da Castelfranco)
IL TINTORETTO (Jacopo Robusti)
NEGRETTI, Jacopo d'Antonio (Palma il Vecchio)
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio)
TIZIANO (Tiziano Vecellio)
VERONESE, Paolo (Paolo Caliari)
L'imitation des Carraches et ses contemporains est comprise comme néfaste pour le disciple
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[ndr : LE PEINTRE]
[...] Pour celles [ndr : les manières] d’Anibal Carrace & de ses Contemporains que j’ay cy-devant nommez, leur imitation n’a garde d’estre si nuisible à vous détourner de ce bon Goust ; ce qui ne fait pas que l’on ne se doive toûjours tenir sur la deffensive, crainte de tomber aprés dans une pratique Manieriste.
LE DISCIPLE.
Monsieur, je vous prie de me dire, ce que vous entendez par ce mot de Manieriste.
LE PEINTRE.
C’est que plusieurs Etudians, qui ayant pris ou la maniere de leurs Maistres, ou celle des Peintres, dont nous avons parlé, va tout premierement ou à une composition & proportion ou à un agencement de Drapperies, & Coloris composé contre l’ordre de cette nature ; & de plus, qui font que la pluspart de leurs figures se ressemblent en proportion de corps, les unes estant courtes & les autres trop Gresles, & toûjours d’un mesme Coloris, soit aussi des ombres trop foibles, & d’autres trop fortes ou brunes, bref en une infinité de manieres, qui font dire, voilà de la maniere d’un tel, & d’un tel.
Car à bien le prendre, lors qu’il ne s’agit que de representer purement en Peinture un objet naturel, au point que cette representation fasse à l’œil toute la mesme vision que luy, on n’en doit point connoistre la maniere.
Je sçay que plusieurs contesteront cette proposition, mais je sçay bien aussi, que ce sera contre justice ; car j’ay veu trois ou quatre Pourtraits de personnes differentes que nombre de Peintres n’ont pas creu estre d’une mesme main ou maniere, au contraire ont demandé de qui est celuy-cy, puis celuy-là ; mais la cause venoit de ce que ce Peintre avoit tellement imité corectement le naturel d’un châcun, qu’il n’y avoit laissé sur sa Toile aucune trace & maniement de Peinceau qui y formast maniere.
Et comme sur châque naturel qui a servy de modelle à faire ces Pourtraits, il n’y a point de maniere qu’à châcun la sienne (s’il faut parler ainsi) le mesme en doit-il estre de chacune de leurs representations si elles sont bien.
Je puis donc conclure avec raison, que sur un Pourtrait bien fait, il ne s’y doit trouver d’autres manieres que celles de son Naturel ou Original, & ainsi que tant plus il y en a moins, mieux luy doit-il ressembler.
Mais comme il est à propos de parler un peu de la maniere de Peindre & de Colorer, je serois bien content de voir quelque chose de ce que vous en avez fait.
Le terme "manière" se rapporte aux différentes manières des maîtres.
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[ndr : LE PEINTRE]
[...] Pour celles [ndr : les manières] d’Anibal Carrace & de ses Contemporains que j’ay cy-devant nommez, leur imitation n’a garde d’estre si nuisible à vous détourner de ce bon Goust ; ce qui ne fait pas que l’on ne se doive toûjours tenir sur la deffensive, crainte de tomber aprés dans une pratique Manieriste.
LE DISCIPLE.
Monsieur, je vous prie de me dire, ce que vous entendez par ce mot de Manieriste.
LE PEINTRE.
C’est que plusieurs Etudians, qui ayant pris ou la maniere de leurs Maistres, ou celle des Peintres, dont nous avons parlé, va tout premierement ou à une composition & proportion ou à un agencement de Drapperies, & Coloris composé contre l’ordre de cette nature ; & de plus, qui font que la pluspart de leurs figures se ressemblent en proportion de corps, les unes estant courtes & les autres trop Gresles, & toûjours d’un mesme Coloris, soit aussi des ombres trop foibles, & d’autres trop fortes ou brunes, bref en une infinité de manieres, qui font dire, voilà de la maniere d’un tel, & d’un tel.
LE DISCIPLE.
Monsieur, je vous prie de me dire, ce que vous entendez par ce mot de Manieriste.
LE PEINTRE.
C’est que plusieurs Etudians, qui ayant pris ou la maniere de leurs Maistres, ou celle des Peintres, dont nous avons parlé, va tout premierement ou à une composition & proportion ou à un agencement de Drapperies, & Coloris composé contre l’ordre de cette nature ; & de plus, qui font que la pluspart de leurs figures se ressemblent en proportion de corps, les unes estant courtes & les autres trop Gresles, & toûjours d’un mesme Coloris, soit aussi des ombres trop foibles, & d’autres trop fortes ou brunes, bref en une infinité de manieres, qui font dire, voilà de la maniere d’un tel, & d’un tel.
Car à bien le prendre, lors qu’il ne s’agit que de representer purement en Peinture un objet naturel, au point que cette representation fasse à l’œil toute la mesme vision que luy, on n’en doit point connoistre la maniere.
LE DISCIPLE.
Monsieur, je vous prie de me dire, ce que vous entendez par ce mot de Manieriste.
LE PEINTRE.
C’est que plusieurs Etudians, qui ayant pris ou la maniere de leurs Maistres, ou celle des Peintres, dont nous avons parlé, va tout premierement ou à une composition & proportion ou à un agencement de Drapperies, & Coloris composé contre l’ordre de cette nature ; & de plus, qui font que la pluspart de leurs figures se ressemblent en proportion de corps, les unes estant courtes & les autres trop Gresles, & toûjours d’un mesme Coloris, soit aussi des ombres trop foibles, & d’autres trop fortes ou brunes, bref en une infinité de manieres, qui font dire, voilà de la maniere d’un tel, & d’un tel.
Car à bien le prendre, lors qu’il ne s’agit que de representer purement en Peinture un objet naturel, au point que cette representation fasse à l’œil toute la mesme vision que luy, on n’en doit point connoistre la maniere.
Je sçay que plusieurs contesteront cette proposition, mais je sçay bien aussi, que ce sera contre justice ; car j’ay veu trois ou quatre Pourtraits de personnes differentes que nombre de Peintres n’ont pas creu estre d’une mesme main ou maniere, au contraire ont demandé de qui est celuy-cy, puis celuy-là ; mais la cause venoit de ce que ce Peintre avoit tellement imité corectement le naturel d’un châcun, qu’il n’y avoit laissé sur sa Toile aucune trace & maniement de Peinceau qui y formast maniere.
Et comme sur châque naturel qui a servy de modelle à faire ces Pourtraits, il n’y a point de maniere qu’à châcun la sienne (s’il faut parler ainsi) le mesme en doit-il estre de chacune de leurs representations si elles sont bien.
Je puis donc conclure avec raison, que sur un Pourtrait bien fait, il ne s’y doit trouver d’autres manieres que celles de son Naturel ou Original, & ainsi que tant plus il y en a moins, mieux luy doit-il ressembler.
Mais comme il est à propos de parler un peu de la maniere de Peindre & de Colorer, je serois bien content de voir quelque chose de ce que vous en avez fait.
LE PEINTRE.
C’est que plusieurs Etudians, qui ayant pris ou la maniere de leurs Maistres, ou celle des Peintres, dont nous avons parlé, va tout premierement ou à une composition & proportion ou à un agencement de Drapperies, & Coloris composé contre l’ordre de cette nature ; & de plus, qui font que la pluspart de leurs figures se ressemblent en proportion de corps, les unes estant courtes & les autres trop Gresles, & toûjours d’un mesme Coloris, soit aussi des ombres trop foibles, & d’autres trop fortes ou brunes, bref en une infinité de manieres, qui font dire, voilà de la maniere d’un tel, & d’un tel.
Car à bien le prendre, lors qu’il ne s’agit que de representer purement en Peinture un objet naturel, au point que cette representation fasse à l’œil toute la mesme vision que luy, on n’en doit point connoistre la maniere.
Je sçay que plusieurs contesteront cette proposition, mais je sçay bien aussi, que ce sera contre justice ; car j’ay veu trois ou quatre Pourtraits de personnes differentes que nombre de Peintres n’ont pas creu estre d’une mesme main ou maniere, au contraire ont demandé de qui est celuy-cy, puis celuy-là ; mais la cause venoit de ce que ce Peintre avoit tellement imité corectement le naturel d’un châcun, qu’il n’y avoit laissé sur sa Toile aucune trace & maniement de Peinceau qui y formast maniere.
BASSANO, les
CARRACCI, Annibale
GIORGIONE (Giorgio da Castelfranco)
IL TINTORETTO (Jacopo Robusti)
NEGRETTI, Jacopo d'Antonio (Palma il Vecchio)
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio)
TIZIANO (Tiziano Vecellio)
VERONESE, Paolo (Paolo Caliari)
Le terme pinceau est lié à la "manière" du peintre.
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Car à bien le prendre, lors qu’il ne s’agit que de representer purement en Peinture un objet naturel, au point que cette representation fasse à l’œil toute la mesme vision que luy, on n’en doit point connoistre la maniere.
Car à bien le prendre, lors qu’il ne s’agit que de representer purement en Peinture un objet naturel, au point que cette representation fasse à l’œil toute la mesme vision que luy, on n’en doit point connoistre la maniere.
Je sçay que plusieurs contesteront cette proposition, mais je sçay bien aussi, que ce sera contre justice ; car j’ay veu trois ou quatre Pourtraits de personnes differentes que nombre de Peintres n’ont pas creu estre d’une mesme main ou maniere, au contraire ont demandé de qui est celuy-cy, puis celuy-là ; mais la cause venoit de ce que ce Peintre avoit tellement imité corectement le naturel d’un châcun, qu’il n’y avoit laissé sur sa Toile aucune trace & maniement de Peinceau qui y formast maniere.
Et comme sur châque naturel qui a servy de modelle à faire ces Pourtraits, il n’y a point de maniere qu’à châcun la sienne (s’il faut parler ainsi) le mesme en doit-il estre de chacune de leurs representations si elles sont bien.
Je puis donc conclure avec raison, que sur un Pourtrait bien fait, il ne s’y doit trouver d’autres manieres que celles de son Naturel ou Original, & ainsi que tant plus il y en a moins, mieux luy doit-il ressembler.
Bosse aborde ici la question du portrait et de la capacité du peintre à bien imiter la nature au point que sa "manière" ne soit pas perceptible
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ce Peintre avoit tellement imité corectement le naturel d’un châcun, qu’il n’y avoit laissé sur sa Toile aucune trace & maniement de Peinceau qui y formast maniere.
car j’ay veu trois ou quatre Pourtraits de personnes differentes que nombre de Peintres n’ont pas creu estre d’une mesme main ou maniere, au contraire ont demandé de qui est celuy-cy, puis celuy-là ; mais la cause venoit de ce que ce Peintre avoit tellement imité corectement le naturel d’un châcun, qu’il n’y avoit laissé sur sa Toile aucune trace & maniement de Peinceau qui y formast maniere.
Je puis donc conclure avec raison, que sur un Pourtrait bien fait, il ne s’y doit trouver d’autres manieres que celles de son Naturel ou Original, & ainsi que tant plus il y en a moins, mieux luy doit-il ressembler.
[ndr : LE DISCIPLE]
Je n’ay jugé à propos de vous rapporter ce que j’ay coppié après des Tableaux, car tant bien seroient-ils imitez, cela (comme vous sçavez) n’est toûjours consideré que comme un ouvrage de Coppiste.
Le terme "copiste" se rapporte à la question de la valeur accordée à une copie.
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"Imité" renvoie au statut de l'œuvre considérée comme une copie
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LE PEINTRE.
En voicy encore [ndr : cf. le disciple montre ses peintures au peintre] qui ne sont pas mal, estans assez bien Colorez, mais en general deux choses y manquent, premierement l’union du Coloris, car vos jours, vos demies teintes, & teintes, puis les ombres & reflections, ne sont pas bien passées ou mélées les unes dans les autres vers leurs extremitez, qui fait qu’en s’en reculant de plus en plus, elles paroissent toutes separées les unes des autres, & tranchées en leur separations, & de plus vos demies teintes & teintes trop verdastres ; & aussi devez vous prendre garde de ne point en voulant imiter un Coloris d’une personne bazanée & rougeastre la faire comme de couleur de Brique ou de Rouge brun pur.
Pour la seconde [ndr : la seconde peinture, cf. le disciple montre au peintre ses peintures], vous devez songer à forcer la diminution de la couleur aux endroits tournans & fuyans de vos corps, soit des Testes & Figures, afin de leur faire faire leur effet de rondeur ou de relief, & qu’ils se détachent bien de leurs fonds, ny mesme qu’il ne s’y rencontre en eux des endroits, qui estant de la couleur dudit fonds ou autre couleur opposée derriere, ne la fasse paroistre à l’œil comme un endroit percé.
"Diminution" s'applique ici à la couleur et au rendu du relief.
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LE DISCIPLE.
Monsieur, voicy son explication, qui m’a servy de conduite pour exprimer ce que vous voyez peint sur cette Toile.
Premierement vous remarquerez, que le trait ou contour de cette Boule, a esté fait par Regle Perspective, laquelle ainsi que vous avez dit, n’est pas un rond fait au Compas, comme si elle estoit supposée placée, de sorte que l’œil du regardant ou point de veuë fust precisément conçeu passer dans son Centre, qui en ce cas seroit représentée dans un Cercle fait au Compas, mais non pas tracé de l’Intervale de son demy diamettre, puisqu’il est démontré, que l’œil ne peut pas toûjours embrasser la moitié d’un Cercle ny d’une Colonne ou Cilindre, ny par consequent d’une Boule, & le mesme d’autres solides un peu gros, composez ou terminez de superficies courbes.
Le terme est associé à "œil" et indique le "point de vue"
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[ndr : LE DISCIPLE]
Pour donc, Monsieur, en revenir à ce maniement de Peinceau & de Couleurs, afin de bien exprimer cette rondeur de Boule , Monsieur Bosse me fit entendre que pour representer de Peinture une supperficie ou surface platte, on couche d'ordinaire sa Couleur en menant le Peinceau de plat parallellement aux costez d'icelle, du droit tirant vers le gauche, ou de haut vers le bas, & le plus uniement & également noury de Couleur que l'on peut ; mais qu'il n'en estoit pas ainsi d'une Boule ou autre objet, qui tient du courbe ; car supposant comme j'ay dit, que la ligne Horizontale ou du Plan de l’œil, passe environ en la moitié de cette Boule, de force qu'il y ait autant ou approchant au dessus d'icelle ligne, qu'en dessous ; il faut premierement appliquer en sa place la couleur claire, puis celle des demies teintes, teintes, & ombres
[ndr : LE DISCIPLE]
Pour donc, Monsieur, en revenir à ce maniement de Peinceau & de Couleurs, afin de bien exprimer cette rondeur de Boule , Monsieur Bosse me fit entendre que pour representer de Peinture une supperficie ou surface platte, on couche d'ordinaire sa Couleur en menant le Peinceau de plat parallellement aux costez d'icelle, du droit tirant vers le gauche, ou de haut vers le bas, & le plus uniement & également noury de Couleur que l'on peut ; mais qu'il n'en estoit pas ainsi d'une Boule ou autre objet, qui tient du courbe ; car supposant comme j'ay dit, que la ligne Horizontale ou du Plan de l’œil, passe environ en la moitié de cette Boule, de force qu'il y ait autant ou approchant au dessus d'icelle ligne, qu'en dessous ; il faut premierement appliquer en sa place la couleur claire, puis celle des demies teintes, teintes, & ombres ; en maniant le Peinceau ou Broisse, du sens Perspectif que vont les Cercles Perspectifs que l'on peut concevoir tracez sur ladite Boule
[ndr : LE DISCIPLE]
Pour donc, Monsieur, en revenir à ce maniement de Peinceau & de Couleurs, afin de bien exprimer cette rondeur de Boule , Monsieur Bosse me fit entendre que pour representer de Peinture une supperficie ou surface platte, on couche d'ordinaire sa Couleur en menant le Peinceau de plat parallellement aux costez d'icelle, du droit tirant vers le gauche, ou de haut vers le bas, & le plus uniement & également noury de Couleur que l'on peut ; mais qu'il n'en estoit pas ainsi d'une Boule ou autre objet, qui tient du courbe ; car supposant comme j'ay dit, que la ligne Horizontale ou du Plan de l’œil, passe environ en la moitié de cette Boule, de force qu'il y ait autant ou approchant au dessus d'icelle ligne, qu'en dessous ; il faut premierement appliquer en sa place la couleur claire, puis celle des demies teintes, teintes, & ombres ; en maniant le Peinceau ou Broisse, du sens Perspectif que vont les Cercles Perspectifs que l'on peut concevoir tracez sur ladite Boule, premierement paralellement à l'horizon puis d'autres verticaux aussi Perspectifs, qui luy soient perpendiculaires en coupes & encore d'autres inclinez comme ceux d'une Sphere ; autrement on auroit trop de peine pour luy faire faire son effet de rondeur,
"Pinceau" est associé à "couleur" afin de bien representer le relief et la rondeur d'une boule
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[ndr : LE DISCIPLE]
Pour donc, Monsieur, en revenir à ce maniement de Peinceau & de Couleurs, afin de bien exprimer cette rondeur de Boule , Monsieur Bosse me fit entendre que pour representer de Peinture une supperficie ou surface platte, on couche d'ordinaire sa Couleur en menant le Peinceau de plat parallellement aux costez d'icelle, du droit tirant vers le gauche, ou de haut vers le bas, & le plus uniement & également noury de Couleur que l'on peut ; mais qu'il n'en estoit pas ainsi d'une Boule ou autre objet, qui tient du courbe ; car supposant comme j'ay dit, que la ligne Horizontale ou du Plan de l’œil, passe environ en la moitié de cette Boule, de force qu'il y ait autant ou approchant au dessus d'icelle ligne, qu'en dessous ; il faut premierement appliquer en sa place la couleur claire, puis celle des demies teintes, teintes, & ombres ; en maniant le Peinceau ou Broisse, du sens Perspectif que vont les Cercles Perspectifs que l'on peut concevoir tracez sur ladite Boule, premierement paralellement à l'horizon puis d'autres verticaux aussi Perspectifs, qui luy soient perpendiculaires en coupes & encore d'autres inclinez comme ceux d'une Sphere ; autrement on auroit trop de peine pour luy faire faire son effet de rondeur, & pour vous témoigner, Monsieur, comme lors que vous regardez cette Boule y jettant le rayon de vostre œil dessus, elle vous semble estre un peu de forme Ovale ou Eliptique, faite en sorte de regarder fixement en cét endroit qui est son veritable point de veuë, & vous verrez qu’elle vous fera l’effet que vous doit faire une Boule naturelle ou de relief veuë de cét endroit.
pour vous témoigner, Monsieur, comme lors que vous regardez cette Boule y jettant le rayon de vostre œil dessus, elle vous semble estre un peu de forme Ovale ou Eliptique, faite en sorte de regarder fixement en cét endroit qui est son veritable point de veuë, & vous verrez qu’elle vous fera l’effet que vous doit faire une Boule naturelle ou de relief veuë de cét endroit.
Bosse évoque la question de la place du "regardant" que le peintre doit se poser notamment pour représenter des objets en relief et en perspective
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[ndr : LE DISCIPLE]
Qu’ayant conçeu un objet de relief ou plusieurs ensemble, scituez fixement chacun en sa place, & mesme éclairez du Soleil ou autre Luminaire, de quel costé & à telle élevation qu’il vous plaira, & aussi que vous soyez placé en un endroit convenable pour les voir, qui est adire d’un éloignement ou distance raisonnable & en telle élevation d’œil que vous puissiez voir facilement ces objets d’une seule œillade, sans este obligé de varier la Teste d’un ou d’autre costé ; qu’il faut ensuitte supposer intervenir une Glace ou Verre, ou bien une Toile, entre vostre œil & ces objets, & ce en tel endroit qu’il vous plaira, puis imaginez-vous aprés, qu’il parte des rayons de chaque parties de ces objets, lesquels aillent chacun en ligne droite tendre au point de vostre œil, & percer ce Verre ou Toile.
Lors ces points ou endroits supposez percez par ces rayonnemens, seront les contours ou lineamens Perspectifs de ces objets naturels, lesquels sont tels, que la Regle de Perspective enseigne à les trouver sur les Papier, fonds, Toilles & Murs, plats ou non, que Monsieur Bosse nomme Tableaux, soit que l’on en aye les mesures Geometrales par Dessein ou par Devis.
[ndr : LE DISCIPLE]
[...] regardez nombre de pourtraits historiez, comme ceux où est representé toute une famille, & vous y trouverez autant de points de veuës que de pourtraits, & de plus, s’il y a de l’Architecture & du Païsage, châque morceau aura encore son point de veuë à part, & ainsi aprés cela, ceux qui auront commis ces fautes diront encore assez naïvement, qu’elles ne les choquent point ; ce qui est tres-facile de leur accorder, car comment les choqueroient-ils, puisque c’est eux qui les ont commises, & qui se sont accoûtumez à regarder ainsi leurs objets chacun à part.
Mais il n’en est pas ainsi de ceux qui entendent les Regles pour mieux faire, car elles leurs blessent les yeux aussi-tost qu’ils les ont envisagez.
Bosse évoque ici la question de l'unicité du point de vue dans un tableau dont le peintre doit tenir compte
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[...] feu Monsieur Desargues, que j’ay oüy estimer un tres-grand Geometre, & entendu en l’Art de bien bastir & de plus tres-universel aux Theories & Regles de pratiques des beaux Arts.
[...] feu Monsieur Desargues, que j’ay oüy estimer un tres-grand Geometre, & entendu en l’Art de bien bastir & de plus tres-universel aux Theories & Regles de pratiques des beaux Arts.
Et à vous dire le vray, je trouve merveilleux, qu’un homme comme luy, qui à peine sçavoit dessiner autre chose qu’un Plan & quelques Elevations de Bastimens, eust trouvé des pratiques si universelles, & si bien réglées & établies, que par elles on en voye les méprises & erreurs, que tant de grands Artistes ont commises & commettent encore tous les jours en leurs ouvrages.
LE PEINTRE.
C’est une espece de Bitume que l’on nomme Spalt ou Spaltum, duquel plusieurs qui travaillent de Graveure à l’Eau forte se servent pour la composition de leur Vernis mol ; mais il y a maniere de l’aprester pour peindre, laquelle je vous diray, c’est à mon gré une merveilleuse couleur, & qui sert en plusieurs endroits.
[ndr : ARISTE]
Mais dittes-moy, je vous prie, Monsieur Bosse de quoy vous sert en vostre Cabinet d’y avoir tous ces petits modelles ou objets de Bois & de Carton, puis cette Glace dans sa bordure, & mesme cette petite machine.
BOSSE.
C’est pour plus promptement & facilement faire concevoir à ces esprits que l’on veust éclairer de ces veritez Geometrales & Perspectives, le moyen de prendre les mesures de ces solides & modelles, puis leur position à l’égard de l’œil, & de la Section ou Tableau, qui est cette Glace, lors qu’elle intervient entre ces solides & l’œil qui les considere d’un seul endroit.
LE PEINTRE.
Cela est tres-judicieusement inventé & facile à concevoir.
BOSSE.
Vous le verrez bien mieux, quand sur cette Table divisée par des quarrez en forme d’Echiquier, j’auray mis dessus à discretion ou de sujettion ces modelles ou objets, & en suitte entre l’œil de celuy qui les regarde & eux, mis aussi cette Glace avec son quadre sur laquelle on peut une fois supposer qu’ils soient peints dessus, ou bien que de ces solides ou modelles, il en part des rayons qui allant chacun en ligne droite rencontrer l’œil du regardant, en passant dans cette Glace sans perdre leur ligne droite & forme piramidale ; ils y traceront dessus la representation perspective de leurs traits ou contours, & la place de leurs jours, ombres & ombrages, car vous jugez bien, Monsieur, qu’en ce qui concerne la force & foiblesse de leurs couleurs, pour l’expression du relief, que si celle de ces solides couloit aussi du long de ces rayons, & qu’elle s’arrestast sur cette Glace, qu’elle n’y feroit point à l’œil l’effet de relief, puis qu’elle seroit de la force & couleur que la naturelle ; c’est pourquoy, Messieurs, il faut entendre que l’espesseur de l’air qui est plus ou moins grande de l’objet à l’œil, fait que la sensation de la couleur luy apparoist plus ou moins forte ou foible, en ce qui pourtant ne se doit encore regler par la vision qu’en reçoit l’œil, mais sur ce que les couleurs sont plus ou moins éloignées de la Baze du Tableau ou Glace, ayant conçeu le tout reglé par des coupes paralelles au plan ou supperficie du Tableau.
Car de dire qu’il faut que la couleur des objets soit representée plus foible au Tableau selon qu’ils sont plus éloignez de l’œil, cela n’est pas bien parler, à moins d’estre de sentiment à approuver la rêverie du F.D.B.I. [ndr : Jean Dubreuil] étallée en sa perspective pratique, où il enseigne que l’on doit diminuer en perspective les objets à mesure qu’ils sont plus ou moins élevez du plan d’assiette qui est cette Table, quoy que supposez estre en un mesme plan ou du long d’une mesme ligne à plomb sur ledit plan & parallele aux costez du Tableau ; de sorte qu’une Muraille veuë ou ligne du plan de l’œil fust placée en leur milieu, que ladite Tour seroit beaucoup plus étroite par le bas & par le haut qu’à l’endroit de cette ligne, & aussi la Muraille diminuée par ces deux bouts & plus foible en couleur ; ce qui feroit à l’œil une ridicule perspective pratique ; car en la regardant de sa distance déterminée, il s’y feroit encore une double diminution [...].
[ndr : ARISTE]
Mais dittes-moy, je vous prie, Monsieur Bosse de quoy vous sert en vostre Cabinet d’y avoir tous ces petits modelles ou objets de Bois & de Carton, puis cette Glace dans sa bordure, & mesme cette petite machine.
BOSSE.
C’est pour plus promptement & facilement faire concevoir à ces esprits que l’on veust éclairer de ces veritez Geometrales & Perspectives, le moyen de prendre les mesures de ces solides & modelles, puis leur position à l’égard de l’œil, & de la Section ou Tableau, qui est cette Glace, lors qu’elle intervient entre ces solides & l’œil qui les considere d’un seul endroit.
LE PEINTRE.
Cela est tres-judicieusement inventé & facile à concevoir.
BOSSE.
Vous le verrez bien mieux, quand sur cette Table divisée par des quarrez en forme d’Echiquier, j’auray mis dessus à discretion ou de sujettion ces modelles ou objets, & en suitte entre l’œil de celuy qui les regarde & eux, mis aussi cette Glace avec son quadre sur laquelle on peut une fois supposer qu’ils soient peints dessus, ou bien que de ces solides ou modelles, il en part des rayons qui allant chacun en ligne droite rencontrer l’œil du regardant, en passant dans cette Glace sans perdre leur ligne droite & forme piramidale ; ils y traceront dessus la representation perspective de leurs traits ou contours, & la place de leurs jours, ombres & ombrages, car vous jugez bien, Monsieur, qu’en ce qui concerne la force & foiblesse de leurs couleurs, pour l’expression du relief, que si celle de ces solides couloit aussi du long de ces rayons, & qu’elle s’arrestast sur cette Glace, qu’elle n’y feroit point à l’œil l’effet de relief, puis qu’elle seroit de la force & couleur que la naturelle
BOSSE.
Vous le verrez bien mieux, quand sur cette Table divisée par des quarrez en forme d’Echiquier, j’auray mis dessus à discretion ou de sujettion ces modelles ou objets, & en suitte entre l’œil de celuy qui les regarde & eux, mis aussi cette Glace avec son quadre sur laquelle on peut une fois supposer qu’ils soient peints dessus, ou bien que de ces solides ou modelles, il en part des rayons qui allant chacun en ligne droite rencontrer l’œil du regardant, en passant dans cette Glace sans perdre leur ligne droite & forme piramidale ; ils y traceront dessus la representation perspective de leurs traits ou contours, & la place de leurs jours, ombres & ombrages, car vous jugez bien, Monsieur, qu’en ce qui concerne la force & foiblesse de leurs couleurs, pour l’expression du relief, que si celle de ces solides couloit aussi du long de ces rayons, & qu’elle s’arrestast sur cette Glace, qu’elle n’y feroit point à l’œil l’effet de relief, puis qu’elle seroit de la force & couleur que la naturelle ; c’est pourquoy, Messieurs, il faut entendre que l’espesseur de l’air qui est plus ou moins grande de l’objet à l’œil, fait que la sensation de la couleur luy apparoist plus ou moins forte ou foible, en ce qui pourtant ne se doit encore regler par la vision qu’en reçoit l’œil, mais sur ce que les couleurs sont plus ou moins éloignées de la Baze du Tableau ou Glace, ayant conçeu le tout reglé par des coupes paralelles au plan ou supperficie du Tableau.
Car de dire qu’il faut que la couleur des objets soit representée plus foible au Tableau selon qu’ils sont plus éloignez de l’œil
Le terme "couleur" est lié à la représentation du relief et de l'éloigenement de l'oeil de objets.
Conceptual field(s)
BOSSE.
Vous le verrez bien mieux, quand sur cette Table divisée par des quarrez en forme d’Echiquier, j’auray mis dessus à discretion ou de sujettion ces modelles ou objets, & en suitte entre l’œil de celuy qui les regarde & eux, mis aussi cette Glace avec son quadre sur laquelle on peut une fois supposer qu’ils soient peints dessus, ou bien que de ces solides ou modelles, il en part des rayons qui allant chacun en ligne droite rencontrer l’œil du regardant, en passant dans cette Glace sans perdre leur ligne droite & forme piramidale ; ils y traceront dessus la representation perspective de leurs traits ou contours, & la place de leurs jours, ombres & ombrages
BOSSE.
Vous le verrez bien mieux, quand sur cette Table divisée par des quarrez en forme d’Echiquier, j’auray mis dessus à discretion ou de sujettion ces modelles ou objets, & en suitte entre l’œil de celuy qui les regarde & eux, mis aussi cette Glace avec son quadre sur laquelle on peut une fois supposer qu’ils soient peints dessus, ou bien que de ces solides ou modelles, il en part des rayons qui allant chacun en ligne droite rencontrer l’œil du regardant, en passant dans cette Glace sans perdre leur ligne droite & forme piramidale ; ils y traceront dessus la representation perspective de leurs traits ou contours, & la place de leurs jours, ombres & ombrages, car vous jugez bien, Monsieur, qu’en ce qui concerne la force & foiblesse de leurs couleurs, pour l’expression du relief, que si celle de ces solides couloit aussi du long de ces rayons, & qu’elle s’arrestast sur cette Glace, qu’elle n’y feroit point à l’œil l’effet de relief, puis qu’elle seroit de la force & couleur que la naturelle
BOSSE.
Vous le verrez bien mieux, quand sur cette Table divisée par des quarrez en forme d’Echiquier, j’auray mis dessus à discretion ou de sujettion ces modelles ou objets, & en suitte entre l’œil de celuy qui les regarde & eux, mis aussi cette Glace avec son quadre sur laquelle on peut une fois supposer qu’ils soient peints dessus, ou bien que de ces solides ou modelles, il en part des rayons qui allant chacun en ligne droite rencontrer l’œil du regardant, en passant dans cette Glace sans perdre leur ligne droite & forme piramidale ; ils y traceront dessus la representation perspective de leurs traits ou contours, & la place de leurs jours, ombres & ombrages, car vous jugez bien, Monsieur, qu’en ce qui concerne la force & foiblesse de leurs couleurs, pour l’expression du relief, que si celle de ces solides couloit aussi du long de ces rayons, & qu’elle s’arrestast sur cette Glace, qu’elle n’y feroit point à l’œil l’effet de relief, puis qu’elle seroit de la force & couleur que la naturelle
BOSSE.
Vous le verrez bien mieux, quand sur cette Table divisée par des quarrez en forme d’Echiquier, j’auray mis dessus à discretion ou de sujettion ces modelles ou objets, & en suitte entre l’œil de celuy qui les regarde & eux, mis aussi cette Glace avec son quadre sur laquelle on peut une fois supposer qu’ils soient peints dessus, ou bien que de ces solides ou modelles, il en part des rayons qui allant chacun en ligne droite rencontrer l’œil du regardant, en passant dans cette Glace sans perdre leur ligne droite & forme piramidale ; ils y traceront dessus la representation perspective de leurs traits ou contours, & la place de leurs jours, ombres & ombrages, car vous jugez bien, Monsieur, qu’en ce qui concerne la force & foiblesse de leurs couleurs, pour l’expression du relief, que si celle de ces solides couloit aussi du long de ces rayons, & qu’elle s’arrestast sur cette Glace, qu’elle n’y feroit point à l’œil l’effet de relief, puis qu’elle seroit de la force & couleur que la naturelle ; c’est pourquoy, Messieurs, il faut entendre que l’espesseur de l’air qui est plus ou moins grande de l’objet à l’œil, fait que la sensation de la couleur luy apparoist plus ou moins forte ou foible, en ce qui pourtant ne se doit encore regler par la vision qu’en reçoit l’œil, mais sur ce que les couleurs sont plus ou moins éloignées de la Baze du Tableau ou Glace, ayant conçeu le tout reglé par des coupes paralelles au plan ou supperficie du Tableau.
"Regardant" est associé à "lœil" pour signifier le point de vue du spectateur
Conceptual field(s)
c’est pourquoy, Messieurs, il faut entendre que l’espesseur de l’air qui est plus ou moins grande de l’objet à l’œil, fait que la sensation de la couleur luy apparoist plus ou moins forte ou foible, en ce qui pourtant ne se doit encore regler par la vision qu’en reçoit l’œil,
Messieurs, il faut entendre que l’espesseur de l’air qui est plus ou moins grande de l’objet à l’œil, fait que la sensation de la couleur luy apparoist plus ou moins forte ou foible, en ce qui pourtant ne se doit encore regler par la vision qu’en reçoit l’œil, mais sur ce que les couleurs sont plus ou moins éloignées de la Baze du Tableau ou Glace, ayant conçeu le tout reglé par des coupes paralelles au plan ou supperficie du Tableau.
Le terme "air" se rapporte ici au terme "figure", en association avec les termes "action" et "passion"
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c’est pourquoy, Messieurs, il faut entendre que l’espesseur de l’air qui est plus ou moins grande de l’objet à l’œil, fait que la sensation de la couleur luy apparoist plus ou moins forte ou foible, en ce qui pourtant ne se doit encore regler par la vision qu’en reçoit l’œil, mais sur ce que les couleurs sont plus ou moins éloignées de la Baze du Tableau ou Glace, ayant conçeu le tout reglé par des coupes paralelles au plan ou supperficie du Tableau.
[ndr : BOSSE]
[...] & de plus, en ce qu’elle [ndr : cf. passage qui précède : la demande faite à Bosse de communiquer les règles de la perspective] m’a souvent esté faite par de grands Peintres, lesquels n’ayant jamais eu connoissance du moyen de mesurer ces objets, & qui bien loin de sçavoir les mesures des figures humaines, ne sçavoient pas seulement celle des ordres de Colonnes en l’Architecture, car mesme à present la pluspart ne s’en servent qu’en les voyant dans les Livres pour les dessiner d’aprés à veuë d’œil, & le mesme de tous les meubles & autres objets de services, suivant les divers Pays & modes, ce qui fait qu’alors qu’on leur parle de mesure cela les étonne.
Mais afin de les faire toujours approcher au plus prés du vray, je ne parle point de mesurer ces objets, mais bien de sçavoir seulement faire les Echelles de front Geometrales & Perspectives fuyantes, suivant une distance & élevation d’œil déterminée ; car par ce moyen, on sçaura toujours où est la ligne horizontale pour y placer où l’on voudra le point de veuë, en suite celle de tracer sur le plan d’assiette un tel nombre de quarrez Perspectifs que l’on desirera, afin qu’avec cela ayant seulement un peu égard à dessiner & placer convenablement ces objets sur ces quarrez, on ne fera pas si grossieres fautes que si on n’avoit fait aucune préparation, & mesme touchant la raison du fort & foible toucher, ces Echelles l’enseigneront à la veuë, en les comparant chacune à la force ou foiblesse de couleur que l’on aura déterminée sur celle de la Baze du Tableau.
[...] car à vray dire il ne se faut pas imaginer qu’il faille toûjours avoir le Compas et la Regle à la main pour representer toutes sortes d’objets ; puis qu’en ayant nombre de fois representée plusieurs sur le papier par le moyen des regles, lors que l’œil aura remarqué par eux les divers contours qu’ils forment, on les peut mettre aprés bien approchant du precis à veuë d’œil ; ne faisant point de distinction d’avoir le Compas & la Regle dans l’imagination ou dans l’esprit, ou de les avoir à la main.
[...] car à vray dire il ne se faut pas imaginer qu’il faille toûjours avoir le Compas et la Regle à la main pour representer toutes sortes d’objets ; puis qu’en ayant nombre de fois representée plusieurs sur le papier par le moyen des regles, lors que l’œil aura remarqué par eux les divers contours qu’ils forment, on les peut mettre aprés bien approchant du precis à veuë d’œil ; ne faisant point de distinction d’avoir le Compas & la Regle dans l’imagination ou dans l’esprit, ou de les avoir à la main.