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Quotation
Comme il faut representer une personne parlant à plusieurs
Avant que de faire une figure qui ait à parler à plusieurs personnes, il faudra considerer la matiere dont elle doit les entretenir, pour luy donner une action conforme au sujet ; […]
Comme il faut representer une personne en colere
[…]
Comment on dépeint un desesperé
[…]
Du rire & du pleurer, & leur difference
[…]
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Quotation
L’Invention, ou le Genïe d’historier et de concevoir une belle Idée sur le Sujet qu’on veut peindre est un Talent naturel qui ne s’acquièrt ny par l’estude, ny par le travail : c’est proprement le Feu de l’esprit, lequel excite l’Imagination et la fait agir. Or comme cette partie de l’Invention tient naturellement le premier lieu dans l’ordre des choses […] aussi montre-t-elle plus qu’aucune autre la qualité de l’esprit ; s’il est Fecond, Judicieux, & Relevé : ou au contraire, s’il est sterile, confus, et bas.
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Quotation
Et comme ce mot n’est pas un Terme particulierement affecté à la Peinture, mais qu’il est aussi commun aux Poëtes et aux Historiens, qui disent les mesmes choses que les Peintres ont accoustumé de representer ; je ne dois pas imputer seulement aux Peintres de nostre Nation, tout le reproche de n‘avoir pas encore donné de nom à cette excellente Partie de l’Art ; d’où il semble qu’on peut inférer qu’elle n’est donc pas conneüe ny pratiquée par eux. Il sera toûjours plus apropos et plus utile d’en expliquer le mystère, et de faire concevoir la force et la vraye intelligence de ce Costûme, qui est proprement à dire un Stile sçavant, une expression judicieuse, une Convenance particulière et spécifique à chaque figure du Sujet qu’on traitte : de sorte que ce mot bien entendu comprend, et veut dire tant de choses essentielles à nostre propos qu’il ne peut estre trop examiné ny trop expliqué.
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Quotation
Il faut donc qu’un Peintre qui aspire à quelque degré de gloire en sa Profession, soit fort exact à ce qui regarde le Costûme, et qu’il en fasse pour ainsi dire son capital, parce qu’il est généralement commun à nos cinq principes fondamentaux, et qu’il en compose l’Eurythmie de telle sorte, qu’on doit le considérer comme le Tout de ces cinq parties. Mais il se faut bien garder de croire que pour satisfaire à l’Intention du Costûme, ce soit assez d’eviter ces inepties, et ces lourdes fautes […] si outre cela on ne paroist ingénieux et sçavant dans l’Expression du Sujet qu’on traitte.
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Quotation
Pour cet effet, il introduisit un gentil parergue dans son Sujet qui estoit de soy trop simple, n’ayant à représenter qu’une figure endormie et une figure hideuse. Or cet accompagnement parergique estoit une trouppe de Satyres qu’il mit à l’entour de son Cyclope dormant […] Et cette pensée du Peintre fut trouvée si ingénieuse et si nouvelle, qu’elle donna une grande reputation à son Tableau, qui neanmoins estoit de luy mesme fort petit, et d’un sujet assez peu considerable.
TIMANTHE, le grand cyclope
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Quotation
Comme un Tableau est l'Image d'une Action particuliere, le Peintre doit ordonner son Sujet & distribuer ses Figures selon la nature de l'Action qu'il entreprend de representer. Et parce que ce Tableau est, ou une Invention nouvelle du Peintre, ou une Histoire, ou une Fable déja décrite par les Historiens ou par les Poëtes ; il faudroit faire voir de quelle sorte il doit traiter tous ces differens Sujets ; & comme il y doit exprimer les mouvemens du corps & de l'esprit.
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Quotation
Dans un autre Tableau il [ndr : Gentile Bellini] peignit le Doge couvert de ses armes, qui accompagné de plusieurs Soldats, va recevoir la benediction du Pape. Ce Tableau fut estimé un des plus excellens que Gentil eust fait, tant pour l’expression du sujet, que pour la disposition des figures.
Le cycle de tableaux auquel fait ici référence Félibien était destiné à décorer la salle du Grand Conseil du Palais des Doges et dédiés à l’histoire de Venise, plus précisément au Traité de Venise qui mit fin, en 1177 à la lutte opposant l’empereur Frédéric Barberousse et le pape Alexandre III. Les descriptions livrées par Félibien dans ce passage s’inspirent de celles de Vasari.
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Quotation
[ndr : LE DISCIPLE]
[…] Pour la première [ndr : la première manière, cf. passage qui précède], voicy comme je m’y prends ; je commence d’abord ayant déterminé l’histoire ou sujet que j’ay composée dans mon imagination, supposant avoir l’intelligence de la belle proportion des objets.
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Quotation
[ndr : LE PEINTRE]
[...] outre ces beaux & divers airs & proportions de ces figures & Bas-reliefs antiques, qu’il faut bien sinculquer dans l’imagination ou dans l’esprit, qu’il y a encore celles de l’agencement de leurs Drapperies ou vestemens, & autre choses d’usage.
Mais sur cela, il y a à mon avis plusieurs particularitez à décider, afin que le Peintre soit pleinement assuré de ce qu’il doit faire, depuis le commencement jusques à la fin : Premierement de considerer ou sçavoir, que tout ce que l’on fait du Travail de Peinture & tel autre, est de sujettion ou de volonté, de sorte que si on prescrit à un Dessinateur & à un Peintre, le sujet où [ndr : sic] l’histoire qu’il doit faire, & toutes les dépendances d’icelle, jusques aux vestemens ou drapperies des figures, forme de Bastimens, Païsages, Animaux, &c. il est obligé de suivre cette prescription : Si il a aussi à faire un autre sujet, & qu’on luy en laisse la pleine liberté sans aucune contrainte, il en peut user comme il luy plaira ; toutefois si c’est une Histoire Romaine ou Grecque ou d’autre nation, il me semble que ce que luy doit estre en quelque sorte une sujettion, puisque sans contredit il doit rechercher de donner à ces figures l’air de la Nation, leurs formes de vestemens & autres choses de leur mode ou usage, & mesme de leurs Bastimens & Païsages, en cas que l’action se soit passée en leur mesme pays.
Car si ce sont des actions, des Faits, ou des Exploits de Conquerans, ce sera un mélange de plusieurs figures & vestemens, mais non de Païsage & Bastimens ; & comme souvent il arrive, que les Peintres prenent des sujets si anciens ou éloignez de nous, qu’ils ne peuvent avoir aucuns memoires ny vestiges des airs de Testes, Figures, Coloris, Vestemens, & choses d’usages, & de sorte qu’ils tombent dans les fautes de ceux dont nous avons parlé, qui donnent des airs à leurs figures de Venitiens & Venitiennes, ou de Flamans & Flamandes, &c. à des histoires anciennes, saintes, profanes, & autres.
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DE PILES, Roger, De l'art de peinture de Charles Alphonse Dufresnoy, Paris, Nicolas Langlois, 1668.
3 quotationsQuotation
{III. Precepte. Du Sujet.}
Cela posé, il faudra choisir *un Sujet beau, & noble, qui estant de soy-mesme capable de toutes les graces & de tous les charmes que peuvent recevoir les Couleurs & l’élégance du Dessein, donne ensuite à l’Art parfait & consommé un beau champ & une matiere ample de montrer tout ce qu’il peut, & de faire voir quelque chose de fin & de judicieux, *qui soit plein de sel, & qui soit propre à instruire & à éclairer les esprits.
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Quotation
{V. Fidélité du sujet}
*Que vos compositions soient conformes au texte des anciens Autheurs, aux coûtumes & aux temps.
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Quotation
{VI. Qu’il faut rejetter ce qui affadit le Sujet.}
*Donnez-vous de garde que ce qui ne fait rien au Sujet & qui n'y est que peu convenable, entre dans vostre Tableau, & en occupe la principale place : Mais imitez en cecy la Tragedie, Sœur de la Peinture, qui déploye toutes les forces de son Art où le fort de l’action se passe.
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Quotation
68. [Un sujet beau & noble, qui estant de soy-mesme capable &c.] La Peinture est non seulement divertissante & agreable, mais elle est encore comme un Memorial de tout ce qui s’est passé de plus beau dans l’Antiquité, nous remettant l’Histoire devant les yeux, comme si elle se passoit effectivement ; jusques-là mesme, qu’à la veuë des Tableaux où les belles actions sont representées, nous nous sentons piquez d’honneur de nous rendre capables de quelque chose de semblable, de mesme que si nous avions leu quelque belle Histoire. La beauté du Sujet donne de l’amour & de l’admiration pour le Tableau, comme le beau Tableau fait entrer dans le Sujet qu’il represente, & l’imprime plus avant dans l’esprit & dans la memoire. Ce sont deux chaînons engagez l’un dans l’autre, qui contiennent & sont contenus, & dont la matiere doit estre également precieuse
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Quotation
…] Il y a une chose de tres-grande consequence à observer dans l’Œconomie de tout l'Ouvrage, c'est que d'abord l'on reconnoisse la qualité du Sujet, & que le Tableau du premier coup d'œil en inspire la Passion principale : par exemple, si le Sujet que vous avez entrepris de traitter, est de joye, il faut que tout ce qui entrera dans votre Tableau contribuë à cette Passion, en sorte que ceux qui le verront en soient aussi-tost touchez. Si c’est un Sujet lugubre, tout y ressentira la tristesse, & ainsi des autres Passions & qualitez des Sujets.
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Quotation
81. [Que vos Compositions soient conformes au, &c.] Il faut prendre garde que les licences des Peintres soient plûtost pour orner l’Histoire que pour la corrompre. Et si Horace permet aux Peintres & aux Poëtes de tout oser, ce n’est pas pour faire des choses hors de la vraye-semblance […] Traitez donc les Sujets de vos Tableaux avec toute la fidélité possible ; & vous servez hardiment de vos licences, pourveu qu'elles soient ingenieuses, & non pas immoderées & extravagantes.
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Quotation
83. [Donnez vous de garde que ce qui ne fait rien au Sujet, &c.] Rien n’affadit tant la composition d’un Tableau que les Figures qui ne font rien au Sujet : on les peut appeler fort plaisamment les Figures à loüer.
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129. [Que la principale Figure du Sujet, &c.] L’un des plus grands vices que puisse avoir un Tableau, c’est de ne pas donner à connoistre de prime-abord le Sujet qu’il represente : & dans la verité rien n’embroüille davantage, que d’en éteindre la Figure principale, par l’opposition de quelques autres, qui se presentent d’abord à la veuë, & qui brillent beaucoup plus. […] Un Peintre est comme un Orateur, il faut qu’il dispose les choses en sorte que tout cede à son principal Sujet : & si les autres Figures qui ne font que l’accompagner & qui n’y sont qu’accessoires, occupent la principale place, & qu’elles se fassent remarquer, ou par la beauté de leurs Couleurs, ou par l’éclat de la Lumière dont elles sont frappées, elles arresteront tout court la veuë, & ne luy permettront pas d’aller plus loin, qu’apres beaucoup de temps, pour chercher enfin ce qu’elle n’a pas trouvé d’abord. La Figure Principale dans un Tableau, est comme un Roy parmy ses Courtisans, que l’on doit reconnoistre au premier coup d’œil, & qui doit ternir l’éclat de tous ceux qui l’accompagnent. Les Peintres qui en usent autrement, qui la mettent dans l’ombre, ou qui l’enfoncent trop avant dans le Tableau, font justement comme ceux qui en racontant une Histoire, s’engagent imprudemment dans une digression si longue, qu’ils sont contraints de finir par là, & de conclure par toute autre chose que par leur Sujet.
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Quotation
Au reste vous devez sçavoir que les Images dans la Rhetorique, ont tout un autre usage que parmi les Poëtes. En effet le but qu’on s’y propose dans la Poësie, c’est l’estonnement & la surprise : au lieu que dans la prose c’est de bien peindre les choses, & de les faire voir clairement. Il y a pourtant cela de commun, qu’on tend à emouvoir en l’une & en l’autre rencontre. [...] Et veritablement je ne sçaurois pas bien dire si Euripide est aussi heureux à exprimer les autres passions ; mais pour ce qui regarde l’amour & la fureur, c’est à quoi il s’est estudié particulierement, & il y a fort bien reussi. Et mesme en d’autres rencontres il ne manque pas quelque-fois de hardiesse à peindre les choses. Car bien que son esprit de lui-mesme ne soit pas porté au Grand, il corrige son naturel, & le force d’estre tragique & relevé, principalement dans les grands Sujets.
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Quotation
Je vous prie donc de me dire, quel effet vous croyez que doit faire un Tableau dans le premier moment qu'on le regarde. II me semble, répondit Damon, que le premier effet doit estre de développer nettement son sujet & d'en inspirer la principale passion
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Quotation
Si vous voulez, dit Pymandre, que les Peintres imitent les Poëtes, il faut pourtant, selon le sentiment des doctes qu’il y ait dans leurs tableaux quelque chose d’agreable & de touchant aussi bien que de grand & de fort.
Il est vray, répondis-je, mais cet agreable doit naistre toujours du sujet que l’on traitte, non pas des choses étrangeres : Car l’on ne pretend pas retrancher les choses belles, quand elles sont propres aux lieux où on les met, mais l’on condamne ceux qui gastent un sujet qui de soy est noble et grand, parce qu’ils s’arrestent trop à la recherche des ornemens de certaines parties inutiles.
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Quotation
[...] mon Maistre me fist remarquer bien d’autres beautés que celles que les Cabalistes admirent dans les ouvrages de leurs Chefs : Car outre qu’il n’y manquoit rien de celles-là qui ne regardent que la pratique de l’Art, il m’y fist découvrir tant de science & d’étude, qu’il est presque aussi difficile de les exprimer, que de les imiter, à moins que d’avoir les mêmes connoissances desquelles ces rares Esprits se servoient, pour faire de si excellens Ouvrages.
Il ne me parla point de la Vaguesse du Coloris, de la Morbidesse des Carnations, de la Franchise du Pinceau, ny des autres termes extravagans à la mode de nos Cabalistes ; mais bien de la beauté, diversité, netteté & sublimité des pensées, de cette manière noble & majestueuse de traiter un sujet, de la discretion à le remplir dignement & convenablement à la verité de l’Histoire qu’il represente, & au Mode dans lequel il se rencontre ; de l’exacte & sçavante observation du Costume, dans laquelle ces anciens Maistres faisoient consister tout ce que la Peinture a d’ingenieux & de sublime ; de cette pointe d’esprit & de cet excellent genie, qu’ils faisoient paroistre dans leurs Ouvrages, dont les Ecrivains les ont loüés si hautement : De là suivoit la judicieuse & convenable disposition des lieux & des figures, la force & la diversité des expressions, l’élégance & le beau choix des attitudes, la diligence & l’exactitudes dans le dessein, la beauté & la variété des proportions, la position aisée & naturelle des figures sur leur centre de gravité ou équilibre, & conformément aux regles de la Perspective des Plans, qui est le lien & le soûtien de toutes les beautés de la Peinture, & sans laquelle elle n’est qu’une pure barboüillerie de Couleurs ; mais sur tout, cet agrément & cette grace admirable dans les mouvemens, qui est un talent autant rare qu’il est precieux.
On pouvoit encore admirer la lumiere bien choisie, & répanduë avec discretion sur les objets, selon leur proximité ou éloignement de l’œil, & les accidens du lumineux, du Diaphane & du corps éclairé ; les differens effets des lumieres primitives & derivatives, l’amitié & la charmante harmonie (pour ainsi dire) des Couleurs, par leur degrés proportionnés de force ou d’afoiblissement, suivant les regles de la Perspective aërienne, ou par leur sympatie naturelle : Enfin, cette Eurithmie dans toutes les parties de l’Ouvrage, auquel elle donne son prix & sa valeur.
Voilà une partie des veritables & solides beautés, que mon Maistre me fist observer dans les admirables Ouvrages de ces grands Hommes, qui ont charmé toute l’Antiquité, & dont le seul recit charme encor tous ceux qui l’entendent.
Anciens (les)
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Quotation
Entre les Tableaux qu’il [ndr : Poussin] avoit déjà envoyé à Paris, il y avoit quatre Baccanales pour le Cardinal de Richelieu, un Triomphe de Neptune qui paroist dans son char tiré par quatre chevaux marins, & accompagné d’une fuite de Tritons & de Néréides. Ces sujets travaillez poëtiquement avec ce beau feu & cet art admirable qu’on peut dire si conforme à l’esprit des Poëtes, des Peintres, & des Sculpteurs anciens, & tant d’autres ouvrages de luy répandus quasi par toute l’Europe, rendoient célèbre de nom du Poussin.
POUSSIN, Nicolas, Le Triomphe de Bacchus (Bacchanales Richelieu), 1635 - 1636, huile sur toile, 127,9 x 151,8, Kansas City, Nelson-Atkins Museum of Art, 31-94.
POUSSIN, Nicolas, Le Triomphe de Neptune ou La Naissance de Vénus (Bacchanales Richelieu), 1635 - 1636, huile sur toile, 97,2 x 108, Philadelphia, Philadelphia Museum of Art, E1932-1-1.
POUSSIN, Nicolas, Le Triomphe de Pan (Bacchanales Richelieu), 1636, huile sur toile, 135,9 x 146, London, National Gallery, NG6477.
POUSSIN, Nicolas, Le Triomphe de Silène (Bacchanales Richelieu), 1637, huile sur toile, 142,9 x 120,5, London, National Gallery, NG42.
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Quotation
Commençons, si vous voulez, par ce qu’il [ndr : Poussin] dit, Que la matiere doit estre prise noble ; qu’elle n’ait receü aucune qualité de l’ouvrier ; & que pour donner lieu au Peintre de montrer son esprit & son industrie, il faut la prendre capable de recevoir la plus excellente forme.
Il n’est pas necessaire de vous marquer qu’il parle d’abord du choix des sujets. Il [ndr : Poussin] veut qu’ils soient nobles, c’est à dire, qu’ils ne traittent que de choses grandes, & non pas de simples representations de personnes, ou d’actions ordinaires & basses. Car bien que l’art de peindre s’étende à imiter tout ce qui est visible, comme il le dit luy-mesme ; il fait néanmoins consister l’excellence de cét art, & le grand sçavoir d’un Peintre dans le beau choix des actions héroïques & extraordinaires. Il veut que lors qu’il vient à mettre la main à l’œuvre, il le fasse d’une maniere qui n’ait point encore esté exécutée par un autre, afin que son ouvrage paroisse comme une chose unique & nouvelle, & que si l’on connoist la grandeur de ses idées, & la beauté de son genie dans la forme extraordinaire qu’il luy donnera, on remarque aussi la netteté & la force de son jugement dans le sujet qu’il aura choisi. C’est par cette haute idée que le Poussin avoit des choses grandes & relevées, qu’il ne pouvoit souffrir les sujets bas, & les peintures qui ne representent que des actions communes ; & qu’il avoit mesme du mépris pour ceux qui ne sçavent que copier simplement la nature telle qu’ils la voyent.
Félibien commente les propos de Poussin à Fréart de Chambray contenus dans une lettre de 7 mars 1665.
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Quotation
[…] & après avoir reconnu combien il estoit judicieux dans le choix de sa matiere, & habile à en bien relever le prix, voyons comment il a disposé ses sujets, puis que selon ses propres maximes, c’est par où le Peintre doit commencer son travail.
Je ne feindray point de vous dire ce que je pense sur cela du Poussin. Je croy qu’il n’y a jamais eû de Peintre [ndr : Poussin] qui ait eû plus de lumieres naturelles, & qui ait plus travaillé que luy pour aquerir toutes les belles connoissances qui peuvent servir à perfectionner un Peintre. Aussi sçavoit-il toutes les parties qui doivent entrer necessairement dans la composition & dans l’ordonnance d’un Tableau ; celles qui sont inutiles, & qui peuvent causer de la confusion : de quelle sorte il faut faire paroistre avantageusement les principales figures ; ne rien donner aux autres qui les rendent trop considerables, soit par la majesté ou par la noblesse des actions, soit par la richesse des habits & des accomodemens, & faire en sorte que dans la representation d’une histoire, il n’y ait ni trop peu de figures ; qu’elles soient agreablement placées, sans que les unes nuisent aux autres, & que toutes expriment parfaitement l’action qu’elles doivent faire. C’est ce que l’on voit dans ces beaux Tableaux du frapement de roche, & dans les sept Sacremens, où toutes les parties concourent à la perfection de l’ordonnance & à la belle disposition des figures, comme les membres bien proportionnez servent à rendre un corps parfaitement beau.
POUSSIN, Nicolas, Les Sept Sacrements I , 1636 - 1642, huile sur toile, Cambridge, Fitzwilliam Museum.
POUSSIN, Nicolas, Les Sept Sacrements II, 1644 - 1648, huile sur toile, Edinburgh, National Gallery of Scotland.
POUSSIN, Nicolas, Moïse faisant jaillir l'eau du rocher , 1649, huile sur toile, 122,5 x 191, Saint-Pétersbourg, Musée de l'Hermitage , ГЭ-1177.
POUSSIN, Nicolas, Moïse faisant jaillir l'eau du rocher ou Le Frappement du rocher, 1633 - 1635, huile sur toile, 97 x 133, Edinburgh, National Gallery of Scotland.
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Quotation
Le sujet doit être visible, & autant que l’on peut unique comme dans les pieces Epiques & Dramatiques. Les exemples instruisant plus que les préceptes, la pratique vaut mieux que la théorie, l’œil sert plus que l’oreille. On ne doit faire plus de trois groupes dans un tableau. Annibal Carache regulierement, ny passoit point douze figures. Il évitoit le fatras, le galimathias, la confusion.
Les testes & les postures doivent estre toutes différentes, les pieds ne doivent jamais estre cachez dans les tableaux. Les choses pouront estre diversifiées, pour plaire d’avantage.
L’on ne doit faire que ce qui est possible, dans l’ordre de la nature, si le sujet est chimerique & phantastique. On doit si bien unir les jours & les ombres, que l’on ne sçache le lieu, ny des uns ny des autres. Il faut copier un matin, ou un soir plutost qu’un midy.
Les figures sur le bord du tableau, doivent estre plus fortes en coloris, & plus élevées de taille. Elles doivent petiller & saillir. Les figures entières sont devant, les demy figures sont derrière.
Tout presque doit estre rond, & presque rien ne doit estre plat. On peut estudier les figures, mais on ne peut point les forcer. Les testes, les yeux, les oreilles, les mains & les pieds doivent estre les parties les plus finies, comme aussi les cheveux, & les barbes.
Comme on ne doit travailler qu’après la belle nature, aussi doit-on cacher tout ce qui est honteux. Le tableau peut avoir des digressions, & ses hors d’œuvres, mais modérement, avec variété & sans confusion.
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Quotation
L'on representa que toutes les differences remarquées dans les proportions ce doivent aussi observer à l'égard des contours, puisque c'est par leur moyen que l'on peut former leur diversité. Ce qui fit considérer de quatre sortes de sujets qui forment autant de difference de proportions & de contours, que l'on nomma vulgaires, Pastoralles & Champestres, dont on dit que les contours doivent être grossiers, ondoyants & incertains, appellant ondoyants la maniere de dessigner, où l'on ne voit aucuns muscles, qui commande à lautre, mais qui s'entresuivent également, que les grossiers & incertains sont tels, que les muscles paroissent confondus avec les tendons & les artères, & où rien n'est articulé, ce qui est pour des sujets simples & des gens grossiers.
En des sujets serieux, où la nature doit être representée belle & agreable, les contours doivent être nobles & certains, passant doucement de l'un à l'autre, en formant les parties grandes & precises, comme il paroît aux figures des jeunes hommes & des filles, où l'on ne voit rien d'aigu, mais au contraire les contours bien coulants.
La troisiéme sorte de contours que l'on a nommé grands, forts, resolus & arrêtés sont ceux auxquels ne se trouvent rien de douteux, [...] où il n'y a rien de choisi & de bien ordonné, ce qui est propre à representer des Heros qui ne doivent avoir rien que de parfait, car comme les Poëtes leur ont attribué, des vertus surnaturelles, les Peintres & Sculpteurs de l'Antiquité en avoient fait de même, choisissant en plusieurs corps, ce qu'il y avoit de plus beau pour en composer un, qui fût propre à de telles expressions & capable d'entrer en des sujets heroïques & extraordinaires.
En quatriéme lieu, l'on considera une maniere de contours artistes excedants le naturel, que l'on nomma puissans, austeres & terribles, puissans pour ce qu'ils font paroître les figures grandes & majestueuses, & qu'ils forment de grandes parties ; austeres parce qu'ils n'ont rien que de solide & de necessaire & qu'ils ne soustrent point de choses inutiles, [...], cette manière n'étant propre qu'à representer des divinités, que c'étoit ce que les anciens avoient soigneusement pratiqué [...].
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio) , Saint Michel terrassant le démon dit le Grand Saint Michel, v. 1518, huile sur bois, 268 x 160, Paris, Musée du Louvre, Inv. 610.
TESTELIN, Henry, [Le Grand Saint Michel d'après Raphaël], estampe, dans TESTELIN, Henry, Sentimens des plus habiles peintres du tems, sur la pratique de la peinture et sculpture, Recueillis & mis en Tables de Preceptes. Avec six discours academiques, Extraits des Conferences tenuës en l’Académie Royale desdits Arts & prononcés en presence de deffunt Monsieur Colbert, Conseiller du Roi en tous ses Conseils, Controleur General des Finances, Surintendant & Ordonnateur des Bâtiments du Roi, Jardins, Arts & Manufactures de France, protecteur de ladite Academie, assemblée generalement en des jours solemnels pour la delivrance du Prix Royal, par Henry Testelin, Peintre du Roi, Professeur & Secretaire en ladite Academie, La Haye, Matthieu Rogguet, s.d. [1693 ou 1694], n.p. [après p. 29].
TESTELIN, Henry, Table première des préceptes de la peinture sur le traict, estampe, dans TESTELIN, Henry, Sentimens des plus habiles peintres du tems, sur la pratique de la peinture et sculpture, Recueillis & mis en Tables de Preceptes. Avec six discours academiques, Extraits des Conferences tenuës en l’Académie Royale desdits Arts & prononcés en presence de deffunt Monsieur Colbert, Conseiller du Roi en tous ses Conseils, Controleur General des Finances, Surintendant & Ordonnateur des Bâtiments du Roi, Jardins, Arts & Manufactures de France, protecteur de ladite Academie, assemblée generalement en des jours solemnels pour la delivrance du Prix Royal, par Henry Testelin, Peintre du Roi, Professeur & Secretaire en ladite Academie, La Haye, Matthieu Rogguet, s.d. [1693 ou 1694], n.p. [après la dédicace à Le Brun].
TESTELIN, Henry, Table seconde des préceptes de la peinture sur les proportions, estampe, dans TESTELIN, Henry, Sentimens des plus habiles peintres du tems, sur la pratique de la peinture et sculpture, Recueillis & mis en Tables de Preceptes. Avec six discours academiques, Extraits des Conferences tenuës en l’Académie Royale desdits Arts & prononcés en presence de deffunt Monsieur Colbert, Conseiller du Roi en tous ses Conseils, Controleur General des Finances, Surintendant & Ordonnateur des Bâtiments du Roi, Jardins, Arts & Manufactures de France, protecteur de ladite Academie, assemblée generalement en des jours solemnels pour la delivrance du Prix Royal, par Henry Testelin, Peintre du Roi, Professeur & Secretaire en ladite Academie, La Haye, Matthieu Rogguet, s.d. [1693 ou 1694], n.p. [après p. 12].
Comme de nombreuses autres parties de texte, ce passage de Testelin est repris par Florent Le Comte dans son Cabinet des singularitez (...), plus précisément aux pages 38-41 de son édition de 1699-1700 (Paris, Etienne Picart & Nicolas Le Clerc, tome I, vol. I).
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Quotation
[...] le Peintre devoit tellement assujettir toutes les parties qui entrent en la composition de son Tableau, qu'elles concourrent ensemble à former une juste idée du sujet, en sorte qu'elles puissent inspirer dans l'esprit des regardans des émotions convenables à cette idée, & que si il se rencontroit dans la narration de l'Histoire même, quelque circonstance qui y fut contraire, on la devoit supprimer ou si fort negliger quelle n'y pût faire aucune interruption, qu'on peut neanmoins prendre une discrette liberté de choisir des incidens favorables, ou quelque allegorie qui convienne au sujet pour la varieté du Contraste, mais que l'on doit éviter de faire paroître ensemble des choses incompatibles ; par exemple la verité des choses Saintes avec les Prophanes, ou paroître ensemble des personnes qui n'ont été qu'en des tems fort éloignés l'un de l'autre.
BASSANO, Jacopo, Le Retour de l'enfant Prodigue, s.d., huile sur toile, 100 x 122,6, Gironde, Libourne, Inv. D.2004.1.65.
POUSSIN, Nicolas, Eliezer et Rebecca, 1648 , huile sur toile, 118 x 199, Paris, Musée du Louvre, Inv. 7270
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TESTELIN, Henry, Troisième table des préceptes de la peinture sur l'expression, estampe, dans TESTELIN, Henry, Sentimens des plus habiles peintres du tems, sur la pratique de la peinture et sculpture, Recueillis & mis en Tables de Preceptes. Avec six discours academiques, Extraits des Conferences tenuës en l’Académie Royale desdits Arts & prononcés en presence de deffunt Monsieur Colbert, Conseiller du Roi en tous ses Conseils, Controleur General des Finances, Surintendant & Ordonnateur des Bâtiments du Roi, Jardins, Arts & Manufactures de France, protecteur de ladite Academie, assemblée generalement en des jours solemnels pour la delivrance du Prix Royal, par Henry Testelin, Peintre du Roi, Professeur & Secretaire en ladite Academie, La Haye, Matthieu Rogguet, s.d. [1693 ou 1694], n.p. [après p. 18].
Comme de nombreuses autres parties de texte, ce passage de Testelin est repris par Florent Le Comte dans son Cabinet des singularitez (...), plus précisément aux pages 41-42 de son édition de 1699-1700 (Paris, Etienne Picart & Nicolas Le Clerc, tome I, vol. I). Par ailleurs, plusieurs autres œuvres picturales sont citées par Testelin dans ce passage, sans qu’il en précise les auteurs. Nous renvoyons donc directement au texte et à l’édition du texte par Christian Michel et Jacqueline Lichtenstein dans les Conférences de l'Académie royale de Peinture et de Sculpture. Tome 1, Les Conférences au temps d'Henry Testelin 1648-1681, vol. 2.
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Quotation
[...] en la Peinture l'on doit comprendre tout d'un coup l'idée du sujet, qu'ainsi un Peintre se doit restreindre à ces trois unités, à sçavoir ce qui arrive en un seul tems ; ce que la vüë peut découvrir d'une seule oeillade ; & ce qui se peut representer dans l'espace d'un Tableau, où l'idée de l'expression se doit rassembler à l'endroit du Heros du sujet comme la Perspective assujettit tout à un seul point ; que le devoir du Peintre est de s'étudier soigneusement à rechercher tout ce qui est essentiel au sujet, & bien examiner ce que les bons Autheurs en ont écrit, & ce qui peu mieux faire paroître le Heros, afin d'en bien exprimer l'image & l'idée, & par ce moyen éviter le défaut que l'on voyoit en beaucoup de Tableaux, méprisés à cet égard, quoi que d'ailleurs très-beaux, comme par exemple en un Tableau du Bassant, où est representé le retour de l'Enfant prodigue en la maison de son Pere, dont les figures principales du sujet sont fort petites, éloignées dans le derriere du Tableau, [...]. En un autre du Breugle en la representation de l'une des plus importantes actions de la Magdeleine, où sont reculées dans le lointain les figures principales pour faire paroître sur le devant du Tableau diverses personnes indifferentes au sujet, [...] Que l'on void même en des representations de la Nativité de Nôtre Sauveur, où l'on met en des places les plus apparentes, un Boeuf & un Ane, qui sont des choses indecentes & profanes, [...] qu'ainsi la representation de ces animaux n'étoit nullement de l'essence du sujet & qu'ils ne conviennent point à l'idée que cette histoire doit inspirer dans l'esprit de ceux qui la contemplent.
BASSANO, Jacopo, Le Retour de l'enfant Prodigue, s.d., huile sur toile, 100 x 122,6, Gironde, Libourne, Inv. D.2004.1.65.
POUSSIN, Nicolas, Eliezer et Rebecca, 1648 , huile sur toile, 118 x 199, Paris, Musée du Louvre, Inv. 7270
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TESTELIN, Henry, Troisième table des préceptes de la peinture sur l'expression, estampe, dans TESTELIN, Henry, Sentimens des plus habiles peintres du tems, sur la pratique de la peinture et sculpture, Recueillis & mis en Tables de Preceptes. Avec six discours academiques, Extraits des Conferences tenuës en l’Académie Royale desdits Arts & prononcés en presence de deffunt Monsieur Colbert, Conseiller du Roi en tous ses Conseils, Controleur General des Finances, Surintendant & Ordonnateur des Bâtiments du Roi, Jardins, Arts & Manufactures de France, protecteur de ladite Academie, assemblée generalement en des jours solemnels pour la delivrance du Prix Royal, par Henry Testelin, Peintre du Roi, Professeur & Secretaire en ladite Academie, La Haye, Matthieu Rogguet, s.d. [1693 ou 1694], n.p. [après p. 18].
De nombreuses autres œuvres picturales sont citées par Testelin dans ce passage, sans qu’il en précise les auteurs. Nous renvoyons donc directement au texte et à l’édition du texte par Christian Michel et Jacqueline Lichtenstein dans les Conférences de l'Académie royale de Peinture et de Sculpture. Tome 1, Les Conférences au temps d'Henry Testelin 1648-1681, vol. 2.
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C'est pourquoi Mr. le Poussain qui sçavoit bien choisir les circonstances, & les approprier aux sujets qu'il traitoit, s'en faisoit une regle, disant ordinairement qu'il donnoit à ses Tableaux un mode Frigien ; pour dire qu'il suivoit la seule idée du sujet principal, c'est ce qui se remarque aussi en tous ses Ouvrages, notamment en celui dont on venoit de parler [ndr : Eliézer et Rebecca] [...] ; voilà l'idée du sujet qu'il s'est proposé en cette action, à quoi il a tellement assujetti toutes les parties qui entrent en la composition de cet excellent Ouvrage [...] On peut encore remarquer l'observation de cette maxime de Mr. le Poussain dans un Tableau du Miracle de Nôtre-Seigneur, en guerissant deux aveugles [ndr : Les Aveugles de Jéricho ou Le Christ guérissant les aveugles], où tout ce qui accompagne cette expression est grand, majestueux, & serieux, tant dans les actions que dans les habillemens des figures, les couleurs & la disposition du Paysage ; [...] mais pour ne rien obmettre de ce qui étoit essentiel au sujet, il avoit exprimé dans le petit nombre de figures qui accompagnent Nôtre-Seigneur tous les mouvemens & les passions qui pouvoient convenir en cette rencontre, l'incredulité & l'indifference des Juifs, la curiosité, la derision, & la mocquerie des Pharisiens, la foi, l'admiration & le zele des Disciples, le respect, la devotion & le grand desir des affligés. [...] d'où l'on conclut qu'un Peintre peut bien accompagner l'expression de son sujet de quelques figures allegoriques pour marquer & citer le lieu, où il se rencontre, mais comme par des statuës qui n'ont nulle part aux mouvements des figures qui expriment le sujet, que n'ayant que cette sorte de langage pour exprimer ses belles conceptions, il ne seroit pas juste de lui en ôter la liberté, c'est ce qui a fait dire que la Peinture est une Poesie muette, & la Rhetorique des Peintres.
POUSSIN, Nicolas, Eliezer et Rebecca, 1648 , huile sur toile, 118 x 199, Paris, Musée du Louvre, Inv. 7270
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POUSSIN, Nicolas, Les Aveugles de Jéricho, 1650, huile sur toile, 119 x 176, Paris, Musée du Louvre, Inv. 7281
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TESTELIN, Henry, Troisième table des préceptes de la peinture sur l'expression, estampe, dans TESTELIN, Henry, Sentimens des plus habiles peintres du tems, sur la pratique de la peinture et sculpture, Recueillis & mis en Tables de Preceptes. Avec six discours academiques, Extraits des Conferences tenuës en l’Académie Royale desdits Arts & prononcés en presence de deffunt Monsieur Colbert, Conseiller du Roi en tous ses Conseils, Controleur General des Finances, Surintendant & Ordonnateur des Bâtiments du Roi, Jardins, Arts & Manufactures de France, protecteur de ladite Academie, assemblée generalement en des jours solemnels pour la delivrance du Prix Royal, par Henry Testelin, Peintre du Roi, Professeur & Secretaire en ladite Academie, La Haye, Matthieu Rogguet, s.d. [1693 ou 1694], n.p. [après p. 18].
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Il nous reste à parler de la convenance, qui est cette partie de la Composition, qui comprend le choix, la vrai-semblance, l’usage, le Decore & l’Ornement. […]
[…] Le choix regarde la matiere ou le sujet de l’ouvrage, comme dans la Poësie, la matiere se prend pour le sujet qu’on traite, qu’on apelle aussi l’argument. Il doit être convenable au lieu, au tems & aux personnes qui le demandent : Il le faut choisir aussi noble qu’on peut quand on est libre, & ensuite le traiter avec des idées qui repondent à sa dignité, & dans les circonstances qui peuvent facilement faire comprendre ce que le Peintre veut representer.
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Les sujets vulgaires, Pastorales, & Champêtres doivent avoir leurs contours GROSSIERS, ONDOYANS, & INCERTAINS ; j’apelle ondoyans, la manière de dessiner où l’on ne voit aucun muscle qui commande à l’autre, mais qu’ils s’entresuivent également : Que les grossiers & incertains, sont tels que les muscles paroissent confondus avec les tendons & les arteres, & où rien n’est articulé ; ce qui sera à des sujets simples, & à des gens grossiers.
En des sujets serieux, où la nature doit être representée belle & agreable, les contours doivent être NOBLES & CERTAINS, passant doucement de l’un à l’autre, en formant les parties grandes & précises, comme il paroît aux figures des jeunes hommes & des filles, où l’on ne voit rien d’aigu, mais au contraire, les contours bien coulans.
Comme de nombreuses autres parties de texte, ce passage de Florent Le Comte est tiré de l'ouvrage "Les Sentimens (...)" de Testelin, plus précisément aux pages 16-17 de l'édition de La Haye (Matthieu Rogguet, vers 1693-1694). Il s'agit ici d'un des seuls extraits où Testelin est cité explicitement.
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Après tout cela, vous devez vous imaginer qu’il est marqué que L’ORDONNANCE étant comme l’assemblage & la disposition de toutes les parties de la Peinture, sa composition dépend entierement de la qualité & de la liberté des genies qui conduisent à leur fin les sujets par des moyens faciles, que les lumieres de l’esprit leur font découvrir, & qui rejettant tout ce qui peut partir d’un genie froid, ne sont paroître dans ce qu’ils inventent, que du bon goût dans l’élection des sujets extraordinairement vraysemblable dans leur gravité. C’est pour quoi l’on ne peut rien prescrire de plus à propos, que d’en donner quelqu’idée par des exemples, & sur les excellens Tableaux du Cabinet du Roy sur lesquels on peut remarquer en general, que dans les divers sujets qu’un Peintre peut avoir à traitter, il doit.
Déterminer la situation du lieu, & à l’égard des actions des figures, se proposer la diversité des mouvemens qui peuvent convenir à son sujet, leur ponderation ou soutien en équilibre, leur position sur un plan perspectif, le contraste, les jours & les ombres ; & enfin les couleurs, puisqu’on doit avoir égard également à toutes ces choses dans le projet qu’on fait de l’ordonnance pour le disposer, de sorte que toutes concourent ensemble à l’expression de la principale idée du sujet.
Comme de nombreuses autres parties de texte, ce passage de Florent Le Comte est tiré de l'ouvrage "Les Sentimens (...)" de Testelin, plus précisément à la page 27 de l'édition de La Haye (Matthieu Rogguet, vers 1693-1694).
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Comme le Peintre ne peut représenter dans un même Tableau que ce qui se voit d'un coup d'œil dans la Nature, il ne peut par consequent nous y exposer ce qui s'est passé dans des tems differens : Et si quelques Peintres ont pris la liberté de faire le contraire, ils en sont inexcusables, à moins qu'ils n'y ayent été contraints par ceux qui les ont employés ou qu'ils n'ayent eu dans la pensée de composer un sujet Mysterieux ou Allégorique comme est le Tableau de l'Ecole d'Athenes.
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Mais quand le Peintre a une fois bien choisi son sujet, il est très à propos qu'il y fasse entrer les circonstances qui peuvent servir à fortifier le caractere de ce même sujet, & à le faire connoître : pourvû qu'elles n'y soyent pas en assez grand nombre pour lasser notre attention : mais plûtôt que le choix en soit assez judicieux pour exercer agréablement nôtre esprit : Et ces circonstances regardent, le lieu, le tems, & les personnes.
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J'ai observé ailleurs que la fidelité de l'Histoire n'étoit pas de l'essence de la Peinture ; mais une convenance indispensable à cet Art. Et quoique le Peintre ne soit Historien que par accident, c'est toujours une grande faute que de sortir mal de ce que l'on entreprend. J'entens par la fidelité de l'Histoire, l'étroite imitation des choses vraies ou fabuleuses telles qu'elles nous sont connues par les Auteurs, ou par la Tradition. Il est sans doute que cette Imitation donne d'autant plus de force à l'Invention, & releve d'autant plus le prix du Tableau, qu'elle conserve de fidelité.
Mais si le Peintre a l'industrie de mêler dans son sujet quelque marque d'érudition qui réveille l'attention du Spectateur sans détruire la vérité de l'Histoire, s'il peut introduire quelque trait de Poësie dans les faits Historiques qui pourront le souffrir; en un mot, s'il traite ses sujets selon la licence moderée qui est permise aux Peintres & aux Poëtes, il rendra ses Inventions élevées, & s'attirera une grande distinction. La Fidélité est donc la premiere qualité de l'Histoire
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La seconde est la Netteté, en sorte que le Spectateur suffisamment instruit dans l'Histoire, dévelope facilement celle que le Peintre aura voulu répresenter. D'où il s'ensuit qu'il faut ôter l'équivoque par quelque marque qui soit propre au sujet, & qui détermine l'esprit en sa faveur. Je parle des sujets qui ne sont pas fort ordinaires ; car pour ceux qui sont connus du Public, & qui ont été plusieurs fois repétés, ils n'ont pas besoin de cette précaution.
Que si le sujet n'est point assez connu, ou qu'on ne puisse raisonnablement y introduire quelque objet qui le déclare, le Peintre ne doit point hésiter d'y mettre une inscription. Entre plusieurs exemples que les Anciens & les Modernes nous en fournissent, j'en choisirai seulement deux qui sont très connus, l'un est de Raphaël, & l'autre d'Annibal Carache. Celui-ci ayant peint dans la Gallerie Farnese le moment où Anchise cherche à donner des marques de son amour à la Déesse Venus, & voulant empêcher qu'on ne prît Anchise pour Adonis, s'est ingenieusement servi du mot de Virgile, *Genus unde Latinum, qu'il a écrit au dessous du lit dans l'épaisseur de l'estrade. Et Raphaël dans son Parnasse où il a placé Sapho parmi les Poëtes, a écrit le nom de cette savante fille, de peur qu'on ne la confondît avec les Muses.
*Ce mot veut dire : C’est d’où vient l’origine des Latins.
CARRACCI, Annibale et CARRACCI, les, Vénus et Anchise, 1597 - 1607, fresque, Pas d'informations, Roma, Palazzo Farnese.
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio) , Le Parnasse, 1509 - 1511, fresque, Vatican, Musei Vaticani.
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La troisiéme qualité de l'Histoire consiste dans le choix du Sujet, supposé que le Peintre en soit le maître : parce qu'un sujet remarquable fournit plus d'occasions d'enrichir la scene & d'attirer l'attention. Mais si le Peintre se trouve engagé dans un petit sujet, il faut qu'il tâche de le rendre grand par la maniere extraordinaire dont il le traitera.
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Ce n'est point une simple Histoire que le Peintre a voulu représenter, c'est une allegorie où la diversité des tems & des païs n'empêche point l'unité du sujet.
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio) , Dispute du Très Saint-Sacrement, 1509 - 1510, fresque, 500 × 770, Vatican, Musei Vaticani.
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio) , L'École d'Athènes, 1509 - 1510, fresque, 440 x 770, Vatican, Musei Vaticani.
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio) , Le Parnasse, 1509 - 1511, fresque, Vatican, Musei Vaticani.
RAFFAELLO (Raffaello Sanzio) , Les Vertus cardinales et Théologales et la Loi, 1508 - 1511, fresque, Vatican, Musei Vaticani.
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[…] le bon sens, & la qualité de la matiere doivent déterminer le Peintre à donner aux objets qu'il aura choisis les places qui leur conviennent pour remplir les devoirs d'une bonne composition.
[…] Car l'œconomie dépend de la qualité du sujet, qui est tantôt patetique & tantôt enjoué, tantôt heroïque & tantôt populaire, tantôt tendre & tantôt terrible, & enfin qui demande plus ou moins de mouvement, selon qu'il est plus ou moins vif ou tranquille. Mais si le sujet inspire au Peintre une bonne œconomie dans la distribution des objets, la bonne distribution de son côté sert merveilleusement à exprimer le sujet. Elle donne de la force & de la grace aux choses qui sont inventées ; elle tire les figures de la confusion, & fait que ce que l'on represente est plus net, plus sensible & plus capable d'appeller, & d'arrêter son Spectateur.
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Les Expressions sont la pierre de touche de l’esprit du Peintre. Il montre par la justesse dont il les distribue, sa pénétration & son discernement : mais il faut le même esprit dans le Spectateur pour les bien apercevoir, que dans le Peintre pour les bien executer. On doit considérer un Tableau comme une Scene, où chaque Figure joue son rôle. Les Figures bien dessinées & bien coloriées sont admirables à la vérité, mais la plûpart des gens d’esprit, qui n’ont pas encore une Idée bien juste de la Peinture, ne sont sensibles à ces parties, qu’autant qu’elles sont accompagnées de la vivacité, de la justesse & de la délicatesse des Expressions. Elles sont un des plus rare talens de la Peinture, & celui qui est assez heureux pour les bien traiter, y intéresse non-seulement les Parties du visage, mais encore toutes celles du corps, & fait concourir à l’Expression générale du sujet, les objets même les plus inanimés, par la manière dont il les expose.
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ALCIPE. […] Quelle est à votre avis la premiere partie de la composition ? N’est-ce pas de vous rendre avec vérité, le sujet que l’on vous annonce ? Si l’on veut vous representer, par exemple, la mort de Jules Cesar, n’étes-vous pas à la portée de juger, si le Peintre a rendu l’image de cette scene ? n’en jugeriez-vous pas au théâtre ? ne verriez-vous pas bien si Cesar & Brutus sont les principaux objets qui frappent votre vûë ? si les autres personnages sont dans l’action, dans laquelle ils doivent être ? enfin si le mouvement de cette scene vous inspire la terreur qui doit vous inspirer ? Si ces principales parties ne s’y trouvent point, dites en sûreté que la composition de ce tableau ne vous plaît pas ; & vous aurez raison : mais ne vous pressez pas de dire que ce tableau ne vaut rien ; car il pourroit se trouver d’excellentes choses dans le détail.
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En effet lorsqu’il s’agira de representer douze personnes frappées du même évenement tout homme bien rempli de son sujet n’a pas besoin d’avoir recours aux regles du contraste, pour éviter de leur donner les mêmes gestes : s’il pense vivement, croyez vous qu’il puisse placer ses figures sur la même ligne, à distance égales ? & si le bon sens le conduit, portera-t-il la masse de ses ombres sur les principaux objets de son tableau ?
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Dès que l'attrait principal de la Poësie & de la Peinture, dès que le pouvoir qu'elles ont pour nous émouvoir & pour nous plaire vient des imitations qu'elles sçavent faire des objets capables de nous interresser : la plus grande imprudence que le Peintre ou le Poëte puissent faire, c'est de prendre pour l'objet principal de leur imitation des choses que nous regarderions avec indifference dans la nature : c'est d'emploïer leur Art à nous représenter des actions qui ne s'attireroient qu'une attention médiocre si nous les voïions veritablement. Comment serons-nous touchez par la copie d'un original incapable de nous affecter ? Comment serons-nous attachez par un tableau qui représente un villageois passant son chemin en conduisant deux bêtes de somme, si l'action que ce tableau imite ne peut pas nous attacher ? [...] L'imitation ne sçauroit donc nous émouvoir quand la chose imitée n'est point capable de le faire. Les sujets que Teniers, Wowermans & les autres Peintres de ce genre ont représentez, n'auroient obtenu de nous qu'une attention très-legere. Il n'est rien dans l'action d'une fête de village ou dans les divertissemens ordinaires d'un corps de garde qui puisse nous émouvoir. Il s'ensuit donc que l'imitation de ces objets peut bien nous amuser durant quelques momens, qu'elle peut bien nous faire applaudir aux talens que l'ouvrier avoit pour l'imitation, mais elle ne sçauroit nous toucher.
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Quotation
Les Peintres intelligens ont si bien connu, ils ont si bien senti cette verité, que rarement ils ont fait des païsages deserts & sans figures. Ils les ont peuplez, ils ont introduit dans ces tableaux un sujet composé de plusieurs personnages dont l'action fût capable de nous émouvoir & par conséquent de nous attacher. C'est ainsi qu'en ont usé le Poussin, Rubens et d'autres grands Maîtres qui ne se sont pas contentez de mettre dans leurs païsages un homme qui passe son chemin, ou bien une femme qui porte des fruits au marché. Ils y placent ordinairement des figures qui pensent, afin de nous donner lieu de penser ; ils y mettent des hommes agitez de passions, afin de réveiller les nôtres & de nous attacher par cette agitation. En effet on parle plus souvent des figures de ces tableaux que de leurs terrasses et de leurs arbres. Le païsage que le Poussin a peint plusieurs fois, & qui s'appelle communément l'Arcadie, ne seroit pas si vanté s'il étoit sans figures.
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Il est facile de conclure après ce que je viens d'exposer, que la Peinture se plaît à traiter des sujets où elle puisse introduire un grand nombre de personnages interessez à l'action. Tels sont les sujets dont nous avons parlé, & tels sont encore le meurtre de Cesar, le sacrifice d'Iphigenie, & plusieurs autres qu'il seroit superflu d'indiquer.
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Soit que vous vouliez peindre, soit que vous vouliez composer des vers, aïez autant d'attention à choisir un sujet qui convienne au pinceau, si vous voulez faire un tableau, & qui convienne, pour ainsi dire, à la plume si vous êtes Poëte, qu'à le choisir convenable aux forces de votre genie particulier & proportionné avec vos talens personnels. Nous traiterons plus au long de ce dernier choix dans la suite. Revenons aux sujets specialement propres pour être traitez ou en vers ou dans un tableau. Le Poëte qui traite un sujet inconnu, generalement parlant, peut faire facilement connoître ses personnages dès le premier acte : il peut même, comme nous avons déja dit, les rendre interessans. Au contraire le Peintre à qui ces moïens manquent, ne doit jamais entreprendre de traiter un sujet tiré de quelque ouvrage peu connu ; il ne doit introduire sur sa toile que des personnages dont tout le monde, du moins le monde devant lequel il doit produire son tableau, ait entendu parler. Il faut que ce monde les connoisse déja, car le Peintre ne peut faire autre chose que de les lui faire reconnoître. Nous avons parlé de l'indifference des spectateurs pour le tableau dont ils ne connoissoient pas le sujet.
Le Peintre doit avoir cette attention sans cesse ; mais elle lui est encore plus necessaire quand il fait des tableaux de chevalet destinez à changer souvent de place comme de maître. Le sujet des fresques peintes sur les murailles, & celui de ces grands tableaux qui demeurent toujours dans la même place, s'il n'est pas bien connu, peut le devenir. On devine même que le tableau d'autel d'une Chapelle répresente quelque évenement de la vie du Saint sous le nom duquel elle est dédiée. Enfin la renommée qui instruit le monde du mérite de ces ouvrages, lui apprend en même-tems l'histoire que le Peintre y peut avoir traitée.
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Depuis Rubens jusqu'à Coypel, le sujet du crucifiment a été traité plusieurs fois. Cependant ce dernier Peintre a rendu sa composition nouvelle. Son tableau représente le moment où la nature s'émut d'horreur à la mort de J. C. le moment où le Soleil s'éclipsa sans l'interposition de la lune, & où les morts sortirent de leurs sépulcres. Dans l'un des côtez du tableau l'on voit des hommes saisis d'une peur mêlée d'étonnement à l'aspect du désordre nouveau, où paroît le Ciel, sur lequel leurs regards sont attachez. Leur épouvante fait un contraste avec une crainte mêlée d'horreur, dont sont frappez d'autres spectateurs, au milieu desquels un mort sort tout-à-coup de son tombeau. Cette pensée très-convenable à la situation des personnages, et qui montre des accidens differens de la même passion, va jusques au sublime ; mais elle paroît si naturelle en même-tems, que chacun s'imagine qu'il l'auroit trouvée, s'il eût traité le même sujet. La Bible qui est celui de tous les livres qu'on lit le plus, ne nous apprend-elle pas que la nature s'émût d'horreur à la mort de Jesus-Christ, & que les morts sortirent de leurs tombeaux ? Comment, dirions-nous, a-t-on pû faire un seul tableau du crucifiment, sans y emploïer ces accidens terribles, & capables de produire un si grand effet ? Cependant le Poussin introduit dans son tableau du crucifiment un mort sortant du sepulchre, sans tirer de l'apparition de ce mort le trait de poësie, que Monsieur Coypel en a tiré. Mais c'est le caractere propre de ces inventions sublimes que le génie seul fait trouver, que de paroître tellement liées avec le sujet, qu'il semble qu'elles aïent dû être les premieres idées qui se soient présentées aux Artisans, qui ont traité ce sujet. On suë vainement, dit Horace, quand on veut trouver des inventions du même genre sans avoir un génie pareil à celui du Poëte, dont on veut imiter le naturel et la simplicité.
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Quotation
Leurs Ouvrages [ndr : Raphaël, Poussin, Rubens, Le Brun, Le Sueur] sont des livres ouverts à toutes les Nations, où tout instruit ; nulle circonstance nécessaire au sujet n'y est omise, & leur parole qui se fait entendre aux regards, souvent pénétre l'ame plus profondément que les plus éloquens écrits.
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Quotation
Un Peintre doit beaucoup examiner le rolle qui convient à chaque Acteur dans son sujet, afin de n'en faire jouër aucun qui soit déplacé ou inutile.
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BAILLET DE SAINT-JULIEN, Louis-Guillaume, Lettres sur la peinture à un amateur, Genève, s.n., 1750.
5 quotationsQuotation
M. Boucher s’est distingué cette année, à son ordinaire, dans plusieurs genres. On voit de lui un Tableau de Dévotion, quatre Sujets galands ; & deux Paysages.
BOUCHER, François
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Sa Venus au bain [ndr : de Vanlo] est tout à fait intéressante ; de même que la Vestale ; quoique ce dernier tableau soit un peu sec. On sent bien que M. Vanlo a voulu y fatiguer ses chairs le moins qu’il lui étoit possible, pour mieux exprimer le caractere de virginité qui étoit de son sujet ; mais on s’apperçoit en même-tems que la nature ne lui a pu servir en cette occasion ; & qu’il n’a pu peindre cet objet que d’idée, & comme un beau fantôme, que lui retraçoit son imagination. La question étoit de chercher un beau modele de Vierge, quelque part ; mais en bonne vérité où le trouver !
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Celui qui représente la continence de Scipion semble un peu mieux colorié ; mais pour le coup, M. Restout me permettra de lui dire que ce sujet ne lui convenait en rien. Il s’agissoit d’y caractériser dans tout son éclat, une personne célebre par la beauté dont les charmes étoient si forts & si puissans qu’il étoit comme impossible d’y résister : On relevoit parlà adroitement, le mérite de Scipion qui eut le courage prodigieux d’en triompher ? Point du tout ; on se contente de nous croquer ici séchement une matrone de la plus mauvaise grâce du monde ; & qui n’est remarquable uniquement que par sa laideur. Ce n’est point là ce qu’il falloit encore une fois, mais M. Restout ne pouvoit pas mieux faire dans ce genre. Cet Auteur devroit bien s’étudier à mieux connoitre ce qui lui est propre. Comment pouvoit-il nous donner quelque idée de la beauté, lui qui n’a pu, encore atteindre à nous représenter des caracteres simples & ordinaires ? Je n’en veux pour exemple que ses Tableaux de Dévotion, qui sont comme on sait le fort de cet Auteur. Cependant quelles attitudes dures & forcées n’y voit-on pas ? Quelles grimaces pour des expressions ? Quels airs de tête effrayans & bizarres !
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Ce n’est pas, néanmoins, que cet Auteur [ndr : Pierre] n’ait son agrément, mais qui est bien supérieur à ce qu’on appelle purement de ce nom. Sa Psyché est tout ce qu’on peut voir de plus aimable : toutes les figures qui entrent dans ce Tableau y ont une noblesse & une élégance singulieres. On ne sauroit trop admirer l’effort que le Peintre a du faire pour nous représenter Psyché avec tant de graces, après celle que son pinceau avoit si libéralement prodiguées à toutes les figures qui composent ce Tableau. C’est surtout avec la derniere volupté que l’œil contemple la fraîcheur & le beau moëlleux des chairs qu’a peintes ici M. Pierres, qui rendent par leur fraïcheur & leur élasticité tout le charme du nud féminin.
[...] La Présentation au Temple, qui est le dernier Tableau de M. Pierres, est peinte avec toute la sagesse & la noble pauvreté qui conviennent à ce sujet.
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[...] Je ne vous ai point encore parlé de M. Vernet, qui est un de ceux dont j’ai le plus de choses à vous dire. Les Marines sont le principal genre auquel semble s’appliquer cet Auteur, si l’on peut fixer le genre d’un homme qui a autant de talent & de génie. Outre la fraîcheur, la vérité avec laquelle elles sont peintes, il sait encore les animer de figures extrêmement intéressantes & dessinées avec tout le feu & toutes l’expression possible. Les Acteurs qu’il introduit dans ses sujets n’y sont jamais muets ni inutiles. A juger de M. Vernet par cette partie, prise séparément, il peut passer pour un Peintre d’Histoire ; je dis plus, pour très-bon Poëte, tant il excelle à rendre les caracteres, le sentiment & les passions dans toute leur vérité.