ONDERWERP (n. n.)
TERM USED AS TRANSLATIONS IN QUOTATION
PRATIQUE (fra.)PRATIQUE
DU FRESNOY, Charles-Alphonse et DE PILES, Roger, De Schilderkonst eerst in Latynze Vaerzen Beschreven door C.A. Dufresnoy in't Frans gebragt en met Aantekekeningen verrykt Door den Heer De Piles Nevens een Zaammeuspraak over het koloriet, trad. par VERHOEK, Joannes, Amsterdam, Balthazar Lakeman, 1722.
177. [Ne soyez pas si fort attaché à la Nature, &c.] Ce Precepte est contre deux sortes de Peintres. Premierement contre ceux qui sont tellement attachez à la Nature, qu’ils ne peuvent rien sans elle, qui la copient comme ils la croyent voir, sans y rien adjoûter ny en retrancher la moindre chose, soit pour le Nud, ou pour les Draperies ; Et secondement il est contre ceux qui peignent toutes choses de Pratique, sans pouvoir s’assujettir à rien retoucher ny examiner sur le Naturel. Ces derniers sont proprement des Libertins de Peinture, comme il y en a de Religion, lesquels n’ont pas d’autre Loy que l’impetuosité de leurs inclinations, qu’ils ne veulent pas vaincre, de mesme que les Libertins de Peinture n’ont point d’autre Modele, que la boutade d’un Genie mal reglé, qui les emporte. Quoy que ces deux sortes de Peintres soient & l’un & l’autre dans des extremitez vitieuses, toutefois les premiers me semblent moins insupportables ; parce que s’ils n’imitent pas la Nature accompagnée de toutes ses beautez & de toutes ses graces, au moins imitent-ils une Nature qui nous est connuë, & que nous voyons tous les jours : au lieu que les autres nous en font voir une toute sauvage, que nous ne connoissons point, & qui semble estre d’une creation toute nouvelle.
SUJET
DU FRESNOY, Charles-Alphonse et DE PILES, Roger, De Schilderkonst eerst in Latynze Vaerzen Beschreven door C.A. Dufresnoy in't Frans gebragt en met Aantekekeningen verrykt Door den Heer De Piles Nevens een Zaammeuspraak over het koloriet, trad. par VERHOEK, Joannes, Amsterdam, Balthazar Lakeman, 1722.
{III. Precepte. Du Sujet.}
Cela posé, il faudra choisir *un Sujet beau, & noble, qui estant de soy-mesme capable de toutes les graces & de tous les charmes que peuvent recevoir les Couleurs & l’élégance du Dessein, donne ensuite à l’Art parfait & consommé un beau champ & une matiere ample de montrer tout ce qu’il peut, & de faire voir quelque chose de fin & de judicieux, *qui soit plein de sel, & qui soit propre à instruire & à éclairer les esprits.
68. [Un sujet beau & noble, qui estant de soy-mesme capable &c.] La Peinture est non seulement divertissante & agreable, mais elle est encore comme un Memorial de tout ce qui s’est passé de plus beau dans l’Antiquité, nous remettant l’Histoire devant les yeux, comme si elle se passoit effectivement ; jusques-là mesme, qu’à la veuë des Tableaux où les belles actions sont representées, nous nous sentons piquez d’honneur de nous rendre capables de quelque chose de semblable, de mesme que si nous avions leu quelque belle Histoire. La beauté du Sujet donne de l’amour & de l’admiration pour le Tableau, comme le beau Tableau fait entrer dans le Sujet qu’il represente, & l’imprime plus avant dans l’esprit & dans la memoire. Ce sont deux chaînons engagez l’un dans l’autre, qui contiennent & sont contenus, & dont la matiere doit estre également precieuse
{V. Fidélité du sujet}
*Que vos compositions soient conformes au texte des anciens Autheurs, aux coûtumes & aux temps.
…] Il y a une chose de tres-grande consequence à observer dans l’Œconomie de tout l'Ouvrage, c'est que d'abord l'on reconnoisse la qualité du Sujet, & que le Tableau du premier coup d'œil en inspire la Passion principale : par exemple, si le Sujet que vous avez entrepris de traitter, est de joye, il faut que tout ce qui entrera dans votre Tableau contribuë à cette Passion, en sorte que ceux qui le verront en soient aussi-tost touchez. Si c’est un Sujet lugubre, tout y ressentira la tristesse, & ainsi des autres Passions & qualitez des Sujets.
81. [Que vos Compositions soient conformes au, &c.] Il faut prendre garde que les licences des Peintres soient plûtost pour orner l’Histoire que pour la corrompre. Et si Horace permet aux Peintres & aux Poëtes de tout oser, ce n’est pas pour faire des choses hors de la vraye-semblance […] Traitez donc les Sujets de vos Tableaux avec toute la fidélité possible ; & vous servez hardiment de vos licences, pourveu qu'elles soient ingenieuses, & non pas immoderées & extravagantes.
83. [Donnez vous de garde que ce qui ne fait rien au Sujet, &c.] Rien n’affadit tant la composition d’un Tableau que les Figures qui ne font rien au Sujet : on les peut appeler fort plaisamment les Figures à loüer.
129. [Que la principale Figure du Sujet, &c.] L’un des plus grands vices que puisse avoir un Tableau, c’est de ne pas donner à connoistre de prime-abord le Sujet qu’il represente : & dans la verité rien n’embroüille davantage, que d’en éteindre la Figure principale, par l’opposition de quelques autres, qui se presentent d’abord à la veuë, & qui brillent beaucoup plus. […] Un Peintre est comme un Orateur, il faut qu’il dispose les choses en sorte que tout cede à son principal Sujet : & si les autres Figures qui ne font que l’accompagner & qui n’y sont qu’accessoires, occupent la principale place, & qu’elles se fassent remarquer, ou par la beauté de leurs Couleurs, ou par l’éclat de la Lumière dont elles sont frappées, elles arresteront tout court la veuë, & ne luy permettront pas d’aller plus loin, qu’apres beaucoup de temps, pour chercher enfin ce qu’elle n’a pas trouvé d’abord. La Figure Principale dans un Tableau, est comme un Roy parmy ses Courtisans, que l’on doit reconnoistre au premier coup d’œil, & qui doit ternir l’éclat de tous ceux qui l’accompagnent. Les Peintres qui en usent autrement, qui la mettent dans l’ombre, ou qui l’enfoncent trop avant dans le Tableau, font justement comme ceux qui en racontant une Histoire, s’engagent imprudemment dans une digression si longue, qu’ils sont contraints de finir par là, & de conclure par toute autre chose que par leur Sujet.
Les Expressions sont la pierre de touche de l’esprit du Peintre. Il montre par la justesse dont il les distribue, sa pénétration & son discernement : mais il faut le même esprit dans le Spectateur pour les bien apercevoir, que dans le Peintre pour les bien executer. On doit considérer un Tableau comme une Scene, où chaque Figure joue son rôle. Les Figures bien dessinées & bien coloriées sont admirables à la vérité, mais la plûpart des gens d’esprit, qui n’ont pas encore une Idée bien juste de la Peinture, ne sont sensibles à ces parties, qu’autant qu’elles sont accompagnées de la vivacité, de la justesse & de la délicatesse des Expressions. Elles sont un des plus rare talens de la Peinture, & celui qui est assez heureux pour les bien traiter, y intéresse non-seulement les Parties du visage, mais encore toutes celles du corps, & fait concourir à l’Expression générale du sujet, les objets même les plus inanimés, par la manière dont il les expose.
chapitre XV, p.43-44
Soit que vous vouliez peindre, soit que vous vouliez composer des vers, aïez autant d'attention à choisir un sujet qui convienne au pinceau, si vous voulez faire un tableau, & qui convienne, pour ainsi dire, à la plume si vous êtes Poëte, qu'à le choisir convenable aux forces de votre genie particulier & proportionné avec vos talens personnels. Nous traiterons plus au long de ce dernier choix dans la suite. Revenons aux sujets specialement propres pour être traitez ou en vers ou dans un tableau. Le Poëte qui traite un sujet inconnu, generalement parlant, peut faire facilement connoître ses personnages dès le premier acte : il peut même, comme nous avons déja dit, les rendre interessans. Au contraire le Peintre à qui ces moïens manquent, ne doit jamais entreprendre de traiter un sujet tiré de quelque ouvrage peu connu ; il ne doit introduire sur sa toile que des personnages dont tout le monde, du moins le monde devant lequel il doit produire son tableau, ait entendu parler. Il faut que ce monde les connoisse déja, car le Peintre ne peut faire autre chose que de les lui faire reconnoître. Nous avons parlé de l'indifference des spectateurs pour le tableau dont ils ne connoissoient pas le sujet.
Le Peintre doit avoir cette attention sans cesse ; mais elle lui est encore plus necessaire quand il fait des tableaux de chevalet destinez à changer souvent de place comme de maître. Le sujet des fresques peintes sur les murailles, & celui de ces grands tableaux qui demeurent toujours dans la même place, s'il n'est pas bien connu, peut le devenir. On devine même que le tableau d'autel d'une Chapelle répresente quelque évenement de la vie du Saint sous le nom duquel elle est dédiée. Enfin la renommée qui instruit le monde du mérite de ces ouvrages, lui apprend en même-tems l'histoire que le Peintre y peut avoir traitée.
[…] les tableaux ne doivent pas être des énigmes, & le but de la Peinture n'est pas d'exercer notre imagination, en lui donnant des sujets embrouïlles à deviner. Son but est de nous emouvoir & par consequent les sujets de ses ouvrages ne sçauroient être trop faciles à entendre. […] Tel est le pouvoir de la vérité, que les imitations & les fictions ne reussissent jamais mieux, que lorsqu'elles l'[ndr. : le sujet] altèrent le moins.
Or comme nous le dit Vitruve en termes très-senses, il ne suffit pas que nos yeux trouvent leur compte dans un tableau bien peint & bien dessiné : l'esprit doit aussi trouver le sien. Il faut donc que l'Artisan du tableau ait choisi un sujet, que ce sujet se comprenne distinctement, & qu'il soit traité de maniere qu'il nous interesse. Je n'estime gueres, ajoute-t-il, les tableaux dont les sujets n'imitent pas quelque vérité. […] Ils peuvent tout au plus introduire dans leur action qui doit toujours imiter la verité historique, quelques figures allégoriques de celles qui sont convenables au sujet, comme seroit, par exemple, la Foi représentée à côté d'un Saint qui feroit un miracle. […] Des verites auxquelles nous ne sçaurions penser sans terreur & sans humiliation, ne doivent pas être peintes avec tant d'esprit, ni représentées sous l'emblême d'une allégorie ingénieuse inventée à plaisir. Il est encore moins permis d'emprunter les personnages & les fictions de la Fable pour peindre ces verites.
Depuis Rubens jusqu'à Coypel, le sujet du crucifiment a été traité plusieurs fois. Cependant ce dernier Peintre a rendu sa composition nouvelle. Son tableau représente le moment où la nature s'émut d'horreur à la mort de J. C. le moment où le Soleil s'éclipsa sans l'interposition de la lune, & où les morts sortirent de leurs sépulcres. Dans l'un des côtez du tableau l'on voit des hommes saisis d'une peur mêlée d'étonnement à l'aspect du désordre nouveau, où paroît le Ciel, sur lequel leurs regards sont attachez. Leur épouvante fait un contraste avec une crainte mêlée d'horreur, dont sont frappez d'autres spectateurs, au milieu desquels un mort sort tout-à-coup de son tombeau. Cette pensée très-convenable à la situation des personnages, et qui montre des accidens differens de la même passion, va jusques au sublime ; mais elle paroît si naturelle en même-tems, que chacun s'imagine qu'il l'auroit trouvée, s'il eût traité le même sujet. La Bible qui est celui de tous les livres qu'on lit le plus, ne nous apprend-elle pas que la nature s'émût d'horreur à la mort de Jesus-Christ, & que les morts sortirent de leurs tombeaux ? Comment, dirions-nous, a-t-on pû faire un seul tableau du crucifiment, sans y emploïer ces accidens terribles, & capables de produire un si grand effet ? Cependant le Poussin introduit dans son tableau du crucifiment un mort sortant du sepulchre, sans tirer de l'apparition de ce mort le trait de poësie, que Monsieur Coypel en a tiré. Mais c'est le caractere propre de ces inventions sublimes que le génie seul fait trouver, que de paroître tellement liées avec le sujet, qu'il semble qu'elles aïent dû être les premieres idées qui se soient présentées aux Artisans, qui ont traité ce sujet. On suë vainement, dit Horace, quand on veut trouver des inventions du même genre sans avoir un génie pareil à celui du Poëte, dont on veut imiter le naturel et la simplicité.
Section 26. Que les sujets ne sont pas épuisez pour les Peintres. Exemples tirez des Tableaux du Crucifiment. p. 220-221-222