AESTHETIC CONCEPTS → wonderful and sublime
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Quoique les formes diminuent de grandeur, & que les couleurs perdent de leur force depuis le premier plan du Tableau jusqu’aux lointains les plus éloignés, & que cette insensible diminution se voye toujours dans la Nature, & se pratique d’ordinaire, elle n’exclue pas pourtant l’usage des accidens dont nous avons parlé ; & ces accidens peuvent beaucoup contribuer au merveilleux d’un Païsage, quand le Peintre a l’occasion de s’en servir bien à propos, & qu’il a une idée juste du bon effet qu’il en attend dans son ouvrage.
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Men placht oock in voorleden eeuwen de Schilderyen te ghebruycken, om andere de noot die een pranghde te kennen te geven. Soo dede die gene die Schipbreucke gheleden hadden, dragende de selve seer ellendichlijck afgebeelt de Steden door, daer mede den aenschouweren het noot-lot van haer mistuyrich ongeval te kennen gevende, overmits sy ondervonden hadden, dat soodanighe natuerlijcke af-konterfeytinge de welsprekentheyt verre te boven gingh, om der lieden gemoeden tot medoghentheyt te verwecken
Des siècles durant, les anciens ont utilisé la peinture pour prévenir autrui des misères accablantes. En témoigne le cas des victimes de naufrage, qui en transportaient de villes en villes une bien misérable représentation, dévoilant ainsi aux spectateurs le destin de leur malheureuse fortune, car ils avaient découvert qu’une pourtrait au vif naturel dépassait largement l’éloquence pour ce qui était de susciter la compassion dans le cœur des hommes.
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Men placht oock in voorleden eeuwen de Schilderyen te ghebruycken, om andere de noot die een pranghde te kennen te geven. Soo dede die gene die Schipbreucke gheleden hadden, dragende de selve seer ellendichlijck afgebeelt de Steden door, daer mede den aenschouweren het noot-lot van haer mistuyrich ongeval te kennen gevende, overmits sy ondervonden hadden, dat soodanighe natuerlijcke af-konterfeytinge de welsprekentheyt verre te boven gingh, om der lieden gemoeden tot medoghentheyt te verwecken
[proposition de traduction, Léonard Pouy:] Des siècles durant, les anciens ont utilisé la peinture pour prévenir autrui de misères accablantes. En témoigne le cas des victimes de naufrage, qui en transportaient de villes en villes une bien misérable représentation, dévoilant ainsi aux spectateurs le destin de leur malheureuse fortune, car ils avaient découvert qu’une pourtrait au vif, naturel, dépassait largement l’éloquence pour ce qui était de susciter la compassion dans le cœur des hommes.
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Entre les moiens dont nous avons parlé, qui contribuent au Sublime, il faut aussi donner rang à ce qu’ils appellent Amplification […]. En effet l’Amplification se peut diviser en un nombre infini d’Espèces ; mais l’Orateur doit sçavoir que pas une de ses Espèces n’est parfaite de soi, s’il n’y a du Grand & du Sublime […] si vous ostez l’Amplification ce qu’elle a de Grand, vous lui arrachez, pour ainsi dire, l’ame du corps.
Le terme Amplification est l'expression de la notion de copia.
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Je ne sçaurois approuver la definition que les donnent les Maistres de l’art. L’Amplification, disent-ils, est un Discours qui augment & agrandit les choses. Car cette definition peut convenir tout de mesme au Sublime, au Pathetique & aux Figures : puis qu’elles donnent toutes au Discours je ne sçay quel caractere de grandeur. Il y a pourtant bien de la difference […] le Sublime consiste dans la hauteur et l’eslevation : au lieu que l’Amplification consiste aussi dans la multitude des paroles ; c’est pourquoi le Sublime se trouve quelquefois dans une simple pensée : mais l’Amplication ne subsiste que dans la pompe & l’abondance.
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And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
Quotation
Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
Quotation
Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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[...] mon Maistre me fist remarquer bien d’autres beautés que celles que les Cabalistes admirent dans les ouvrages de leurs Chefs : Car outre qu’il n’y manquoit rien de celles-là qui ne regardent que la pratique de l’Art, il m’y fist découvrir tant de science & d’étude, qu’il est presque aussi difficile de les exprimer, que de les imiter, à moins que d’avoir les mêmes connoissances desquelles ces rares Esprits se servoient, pour faire de si excellens Ouvrages.
Il ne me parla point de la Vaguesse du Coloris, de la Morbidesse des Carnations, de la Franchise du Pinceau, ny des autres termes extravagans à la mode de nos Cabalistes ; mais bien de la beauté, diversité, netteté & sublimité des pensées, de cette manière noble & majestueuse de traiter un sujet, de la discretion à le remplir dignement & convenablement à la verité de l’Histoire qu’il represente, & au Mode dans lequel il se rencontre ; de l’exacte & sçavante observation du Costume, dans laquelle ces anciens Maistres faisoient consister tout ce que la Peinture a d’ingenieux & de sublime ; de cette pointe d’esprit & de cet excellent genie, qu’ils faisoient paroistre dans leurs Ouvrages, dont les Ecrivains les ont loüés si hautement : De là suivoit la judicieuse & convenable disposition des lieux & des figures, la force & la diversité des expressions, l’élégance & le beau choix des attitudes, la diligence & l’exactitudes dans le dessein, la beauté & la variété des proportions, la position aisée & naturelle des figures sur leur centre de gravité ou équilibre, & conformément aux regles de la Perspective des Plans, qui est le lien & le soûtien de toutes les beautés de la Peinture, & sans laquelle elle n’est qu’une pure barboüillerie de Couleurs ; mais sur tout, cet agrément & cette grace admirable dans les mouvemens, qui est un talent autant rare qu’il est precieux.
On pouvoit encore admirer la lumiere bien choisie, & répanduë avec discretion sur les objets, selon leur proximité ou éloignement de l’œil, & les accidens du lumineux, du Diaphane & du corps éclairé ; les differens effets des lumieres primitives & derivatives, l’amitié & la charmante harmonie (pour ainsi dire) des Couleurs, par leur degrés proportionnés de force ou d’afoiblissement, suivant les regles de la Perspective aërienne, ou par leur sympatie naturelle : Enfin, cette Eurithmie dans toutes les parties de l’Ouvrage, auquel elle donne son prix & sa valeur.
Voilà une partie des veritables & solides beautés, que mon Maistre me fist observer dans les admirables Ouvrages de ces grands Hommes, qui ont charmé toute l’Antiquité, & dont le seul recit charme encor tous ceux qui l’entendent.
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And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
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He that would rise to the Sublime must form an Idea of Something beyond all we have yet seen ; or which Art, or Nature has yet produc’d ; Painting, Such as when all the Excellencies of the several Masters are United, and their several Defects avoided.
The greatest Designers among the Moderns want much of that exquisite Beauty, in all the Several Characters, that is to be seen in the Antique ; the Airs of the Heads, even of Rafaëlle himself, are Inferiour to what the Ancients have done ; and for Grace to some of Guido : the Colouring of Rubens and Van Dyck falls short of That of Titian, and Coreggio ; and the best Masters have Rarely Thought like Rafaëlle, or Compos’d like Rembrandt. Let us then imagine a Picture Design’d as the Laocoon, the Hercules, the Apollo, the Venus, or any of these Miraculous remains of Antiquity : The Airs of Heads like what is to be found in the Statues, Busts, Bas-releifs, or Medals, or like some of those of Guido ; and Colour’d like the most Celebrated Colourists ; with the Lightest Pencil, and the most Proper to the Subject ; and all this Suitably Invented, and Compos’d ; Here would be a Picture ! Such a one a Painter should Imagine, and So set before him for Imitation.
Nor must he stop Here, but Create an Original Idea of Perfection. The Utmost that the Best Masters have done, is not to be suppos’d the Utmost ‘tis possible for Humane Nature to arrive at ;
Dans cet extrait, Richardson mentionne plusieurs œuvres antiques. Outre le Laocoon, il évoque un Hercule, un Apollon et une Vénus. Néanmoins, il ne donne pas assez d'indication pour les identifier précisément.
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Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her.
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Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
Quotation
Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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He that would rise to the Sublime must form an Idea of Something beyond all we have yet seen ; or which Art, or Nature has yet produc’d ; Painting, Such as when all the Excellencies of the several Masters are United, and their several Defects avoided.
The greatest Designers among the Moderns want much of that exquisite Beauty, in all the Several Characters, that is to be seen in the Antique ; the Airs of the Heads, even of Rafaëlle himself, are Inferiour to what the Ancients have done ; and for Grace to some of Guido : the Colouring of Rubens and Van Dyck falls short of That of Titian, and Coreggio ; and the best Masters have Rarely Thought like Rafaëlle, or Compos’d like Rembrandt. Let us then imagine a Picture Design’d as the Laocoon, the Hercules, the Apollo, the Venus, or any of these Miraculous remains of Antiquity : The Airs of Heads like what is to be found in the Statues, Busts, Bas-releifs, or Medals, or like some of those of Guido ; and Colour’d like the most Celebrated Colourists ; with the Lightest Pencil, and the most Proper to the Subject ; and all this Suitably Invented, and Compos’d ; Here would be a Picture ! Such a one a Painter should Imagine, and So set before him for Imitation.
Nor must he stop Here, but Create an Original Idea of Perfection. The Utmost that the Best Masters have done, is not to be suppos’d the Utmost ‘tis possible for Humane Nature to arrive at ;
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{Penseelen.} De Penseelen worden bequamelijk, gelijk als by vele in gebruik is, tot vier soorten of trappen gebragt; […]
{En haare verscheydentheid.} De grootste soorten gebruiktmen; om logten en gronden aanteleggen, en de tweede soorte is dienstig om aanteleggen boomen en aardgronden; de derde kan verstrekken; om de zelve en nog wat fijndere voorwerpen op te maken, en de laatste werd gebezigt om alle netheid en kurieusheid uit te drukken die noodig is, om de kragt van ’t leven, in edeler dingen en van na by gezien, of van verre gants fijn zig vertoonende te schilderen.
’t Zijn de beste Penseelen, die kort van hair en puntig zijn, en daaren boven wel gesloten, en die niet en kleven in ’t schilderen: maar staat aantemerken, dat de landschapschilderen tot de boomen zig best van de gekloofde dienen konnen.
[translation: BEURS, en préparation, transl. Myra Scholz:] {Soft hair brushes} Soft hair brushes are commonly divided into four types or grades;[…] {And their differences}The largest types are used for applying sky and grounds, and the second for laying in trees and earth grounds; the third can serve for filling these in and for somewhat finer objects, and the last is used to render all the precise and particular detail necessary for painting life in all its intensity, in precious things seen up close or things that appear in very delicate form in the distance.The best soft brushes are those that have short hair and are pointed; they are also compact and the hairs do not split apart during painting. But it should be noted that landscape painters can very well use split brushes for trees.
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Het welschicken van dagen en schaduwen by een, is een van de principaelste hooft-banden daer een goet Schilder mede verciert dient te zijn, om de wel-standigheyt die de selve onse Konst aen brenght: want de schaduwe by een ghevoeght zijnde op haer behoorlijcke plaets, gheven sulcken tooverachtighe kracht, en wonderbaerlijcke welstandt; dat veel dinghen, die nauwelijcx door gheen Penceelen met verwen zijn na te bootsen, seer eyghentlijck doen schijnen.
[proposition de traduction, Léonard Pouy:] Le bon arrangement des jours et des ombres est l’une des principales couronnes dont doit se parer un bon peintre, car il apporte à notre art sa bienséance. Car lorsque les ombres sont arrangées à leurs propres places les unes à côté des autres, elles possèdent un pouvoir tellement enchanteur et une convenance si merveilleuse, qu’elles font apparaître comme tout à fait vraies certaines choses qu’il est difficile d’imiter avec un pinceau et des couleurs.
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[...] mon Maistre me fist remarquer bien d’autres beautés que celles que les Cabalistes admirent dans les ouvrages de leurs Chefs : Car outre qu’il n’y manquoit rien de celles-là qui ne regardent que la pratique de l’Art, il m’y fist découvrir tant de science & d’étude, qu’il est presque aussi difficile de les exprimer, que de les imiter, à moins que d’avoir les mêmes connoissances desquelles ces rares Esprits se servoient, pour faire de si excellens Ouvrages.
Il ne me parla point de la Vaguesse du Coloris, de la Morbidesse des Carnations, de la Franchise du Pinceau, ny des autres termes extravagans à la mode de nos Cabalistes ; mais bien de la beauté, diversité, netteté & sublimité des pensées, de cette manière noble & majestueuse de traiter un sujet, de la discretion à le remplir dignement & convenablement à la verité de l’Histoire qu’il represente, & au Mode dans lequel il se rencontre ; de l’exacte & sçavante observation du Costume, dans laquelle ces anciens Maistres faisoient consister tout ce que la Peinture a d’ingenieux & de sublime ; de cette pointe d’esprit & de cet excellent genie, qu’ils faisoient paroistre dans leurs Ouvrages, dont les Ecrivains les ont loüés si hautement : De là suivoit la judicieuse & convenable disposition des lieux & des figures, la force & la diversité des expressions, l’élégance & le beau choix des attitudes, la diligence & l’exactitudes dans le dessein, la beauté & la variété des proportions, la position aisée & naturelle des figures sur leur centre de gravité ou équilibre, & conformément aux regles de la Perspective des Plans, qui est le lien & le soûtien de toutes les beautés de la Peinture, & sans laquelle elle n’est qu’une pure barboüillerie de Couleurs ; mais sur tout, cet agrément & cette grace admirable dans les mouvemens, qui est un talent autant rare qu’il est precieux.
On pouvoit encore admirer la lumiere bien choisie, & répanduë avec discretion sur les objets, selon leur proximité ou éloignement de l’œil, & les accidens du lumineux, du Diaphane & du corps éclairé ; les differens effets des lumieres primitives & derivatives, l’amitié & la charmante harmonie (pour ainsi dire) des Couleurs, par leur degrés proportionnés de force ou d’afoiblissement, suivant les regles de la Perspective aërienne, ou par leur sympatie naturelle : Enfin, cette Eurithmie dans toutes les parties de l’Ouvrage, auquel elle donne son prix & sa valeur.
Voilà une partie des veritables & solides beautés, que mon Maistre me fist observer dans les admirables Ouvrages de ces grands Hommes, qui ont charmé toute l’Antiquité, & dont le seul recit charme encor tous ceux qui l’entendent.
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[…] si les Figures naturellement soûtiennnent le Sublime, le Sublime de son costé soûtient merveilleusement les Figures. […] il n’y a point de Figure plus excellente que celle qui est tout-à-fait cachée, & lorsqu’on ne reconnoist point que c’est une Figure. Or il n’y a point de secours ni de remede plus merveilleux pour l’empescher de paroître, que le Sublime & le Pathetique, par ce que l’Art ainsi renfermé au milieu de quelque chose de Grand & d’éclatant, a tout ce qui lui manquoit, & n’est plus suspect d’aucune tromperie. [….] Comment est-ce que l’Orateur a caché la figure dont il se sert ? N’est-il pas aisé de reconnoistre que c’est par l’éclat mesme de sa pensée ? Car comme les moindres lumieres s’évanoüissent, quand le Soleil vient à les éclairer ; de mesme, toutes ces subtilitez de Rhetorique disparoissent à la veüe de cette grandeur qui les environne de tous costés. La mesme chose à peu prés arrive dans la peinture. En effet qu’on tire plusieurs lignes paralleles sur un mesme plan, avec les jours & les ombres : il est certain que ce qui se presentera d’abord à la veuë, ce sera le lumineux, à cause de son grand éclat qui fait qu’il semble sortir hors du tableau, & s’approcher en quelque façon de nous. Ainsi le Sublime & le Pathetique, soit par une affinité naturelle qu’ils ont avec les mouvemens de nostre ame, soit à cause de leur brillant, paroissent davantage, & semblent toucher de plus prés notre esprit que les Figures, dont ils cachent l’art, & qu’ils mettent comme à couvert.
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[…] si les Figures naturellement soûtiennnent le Sublime, le Sublime de son costé soûtient merveilleusement les Figures. […] il n’y a point de Figure plus excellente que celle qui est tout-à-fait cachée, & lorsqu’on ne reconnoist point que c’est une Figure. Or il n’y a point de secours ni de remede plus merveilleux pour l’empescher de paroître, que le Sublime & le Pathetique, par ce que l’Art ainsi renfermé au milieu de quelque chose de Grand & d’éclatant, a tout ce qui lui manquoit, & n’est plus suspect d’aucune tromperie. [….] Comment est-ce que l’Orateur a caché la figure dont il se sert ? N’est-il pas aisé de reconnoistre que c’est par l’éclat mesme de sa pensée ? Car comme les moindres lumieres s’évanoüissent, quand le Soleil vient à les éclairer ; de mesme, toutes ces subtilitez de Rhetorique disparoissent à la veüe de cette grandeur qui les environne de tous costés. La mesme chose à peu prés arrive dans la peinture. En effet qu’on tire plusieurs lignes paralleles sur un mesme plan, avec les jours & les ombres : il est certain que ce qui se presentera d’abord à la veuë, ce sera le lumineux, à cause de son grand éclat qui fait qu’il semble sortir hors du tableau, & s’approcher en quelque façon de nous. Ainsi le Sublime & le Pathetique, soit par une affinité naturelle qu’ils ont avec les mouvemens de nostre ame, soit à cause de leur brillant, paroissent davantage, & semblent toucher de plus prés notre esprit que les Figures, dont ils cachent l’art, & qu’ils mettent comme à couvert.
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So in Painting the Sublimity of the Thought, or Expression may be consistent with bad Colouring, or Drawing, and these may help to produce that fine effect ; If they do not, That will make Them Overlook’d, or even Prejudice us in their favour ; However ‘tis not those Defects, but what is Excellent that is Sublime.
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Car tout ce qui est veritablement Sublime, a cela de propre, quand on l’écoute, qu’il esleve l’ame, & lui fait concevoir une plus haute opinion d’elle mesme, la remplissant de joie & de je ne sçais quel noble orgueil, comme si c’estoit elle qui eust produit les choses qu’elle vient simplement d’entendre.
[…]. La marque infaillible du Sublime, c’est quand nous sentons qu’un Discours nous laisse beaucoup à penser, fait d’abord un effet sur nous auquel il est bien difficile, pour ne pas dire impossible, de resister, et qu’ensuite le souvenir nous en dure, & ne s’efface qu’avec peine. En un mot, figurez-vous qu’une chose est veritablement Sublime, quand vous voiez qu’elle plaist universellement & dans toutes ses parties. Car lors qu’en un grand nombre de personnes differentes de profession, & d’âge, & qui n’ont aucun rapport ni d’humeurs ni d’inclinations, tout le monde vient à estre frappé également de quelque endroit d’un discours ; ce jugement & cette approbation uniforme de tant d’esprits, si discordans d’ailleurs, est une preuve certaine & indubitable, qu’il y a là du Merveilleux & du Grand.
Quotation
Le sublime de la Poësie & de la Peinture est de toucher & de plaire, comme celui de l'Eloquence est de persuader. […] Un poème ainsi qu'un tableau, ne sçaurait produire cet effet, s'il n'a pas d'autre mérite que la régularité & l'élégance de l'exécution. Le tableau le mieux peint, comme le poëme le mieux distribué & le plus exactement écrit, peuvent être des ouvrages froids & ennuïeux. Afin qu'un ouvrage nous touche, il faut que l'élégance du dessein & la verité du coloris, si c'est un tableau […] y servent à donner l'être à des objets capables par eux-mêmes de nous émouvoir & de nous plaire.
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En effet, il n’y a peut-estre rien d’où les Orateurs et tous les Escrivains en general qui s’estudient au Sublime, tirent plus de grandeur, d’élegance, de netteté, de poids, de force, & de vigueur pour leurs Ouvrages, que du choix des paroles. C’est par elles que toutes ces beautez éclatent dans le discours, comme dans un riche tableau, & elles donnent aux choses une espece d’ame & de vie.
Quotation
Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
Quotation
Au reste vous devez sçavoir que les Images dans la Rhetorique, ont tout un autre usage que parmi les Poëtes. En effet le but qu’on s’y propose dans la Poësie, c’est l’estonnement & la surprise : au lieu que dans la prose c’est de bien peindre les choses, & de les faire voir clairement. Il y a pourtant cela de commun, qu’on tend à emouvoir en l’une & en l’autre rencontre. [...] Et veritablement je ne sçaurois pas bien dire si Euripide est aussi heureux à exprimer les autres passions ; mais pour ce qui regarde l’amour & la fureur, c’est à quoi il s’est estudié particulierement, & il y a fort bien reussi. Et mesme en d’autres rencontres il ne manque pas quelque-fois de hardiesse à peindre les choses. Car bien que son esprit de lui-mesme ne soit pas porté au Grand, il corrige son naturel, & le force d’estre tragique & relevé, principalement dans les grands Sujets.
Quotation
Le sublime de la Poësie & de la Peinture est de toucher & de plaire, comme celui de l'Eloquence est de persuader. […] Un poème ainsi qu'un tableau, ne sçaurait produire cet effet, s'il n'a pas d'autre mérite que la régularité & l'élégance de l'exécution. Le tableau le mieux peint, comme le poëme le mieux distribué & le plus exactement écrit, peuvent être des ouvrages froids & ennuïeux. Afin qu'un ouvrage nous touche, il faut que l'élégance du dessein & la verité du coloris, si c'est un tableau […] y servent à donner l'être à des objets capables par eux-mêmes de nous émouvoir & de nous plaire.
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Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
Quotation
Ces Images, que d’autres appellent Peintures, ou Fictions, sont aussi d’un grand artifice pour donner du poids, de la magnificence, & de la force au discours. Ce mot d’Image se prend en général pour toute Pensée propre à produire une expression, & qui fait une peinture à l’esprit de quelque maniere que ce soit. Mais il se prend encore dans un sens plus particulier & plus resserré ; pour ces discours que l’on fait, lorsque par un enthousiasme & un mouvement extraordinaire de l’ame, il semble que nous voions les choses dont nous parlons, & que nous le mettons devant les yeux de ceux qui écoutent.
Quotation
Or comme celui qui considere un Ouvrage suit le degré d'élévation qu'il y trouve, le transport d'esprit qui est dans l'Enthousiasme est commun au Peintre & au Spectateur ; avec cette difference neanmoins, que bien que le Peintre ait travaillé à plusieurs reprises pour échauffer son imagination, & pour monter son Ouvrage au degré que demande l'Enthousiasme, le Spectateur au contraire sans entrer dans aucun détail se laisse enlever tout à coup, & comme malgré lui, au degré d'Enthousiasme où le Peintre l'a attiré.
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Quotation
L'Enthousiasme est un transport de l'esprit qui fait penser les choses d'une maniere sublime, surprenante, & vraisemblable. […]
[...] Quoique le Vrai plaise toujours, parce qu'il est la base & le fondement de toutes les perfections, il ne laisse pas d'être souvent insipide quand il est tout seul ; mais quand il est joint à l’Enthousiasme, il transporte l'esprit dans une admiration mêlée d'étonnement ; il le ravit avec violence sans lui donner le tems de retourner sur lui-même.
J'ai fait entrer le Sublime dans la définition de l'Enthousiasme, parce que le Sublime est un effet & une production de l'Enthousiasme. […] Mais comme l'Enthousiasme & le Sublime tendent tous deux à élever notre esprit, on peut dire qu'ils sont d'une même nature. La difference neanmoins qui me paroît entre l'un & l'autre, c'est que l'Enthousiasme est une fureur de veine qui porte notre ame encore plus haut que le Sublime, dont il est la source, & qui a son principal effet dans la pensée & dans le Tout ensemble de l'ouvrage ; aulieu que le Sublime se fait sentir également dans le général, & dans le détail de toutes les parties. L'Enthousiasme a encore cela que l'effet en est plus prompt, & que celui du Sublime demande au moins quelques momens de réfléxion pour être vû dans toute sa force.
[…] Il me paroît, en un mot, que l'Enthousiasme nous saisit, & que nous saisissons le Sublime.
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Quotation
Au reste vous devez sçavoir que les Images dans la Rhetorique, ont tout un autre usage que parmi les Poëtes. En effet le but qu’on s’y propose dans la Poësie, c’est l’estonnement & la surprise : au lieu que dans la prose c’est de bien peindre les choses, & de les faire voir clairement. Il y a pourtant cela de commun, qu’on tend à emouvoir en l’une & en l’autre rencontre. [...] Et veritablement je ne sçaurois pas bien dire si Euripide est aussi heureux à exprimer les autres passions ; mais pour ce qui regarde l’amour & la fureur, c’est à quoi il s’est estudié particulierement, & il y a fort bien reussi. Et mesme en d’autres rencontres il ne manque pas quelque-fois de hardiesse à peindre les choses. Car bien que son esprit de lui-mesme ne soit pas porté au Grand, il corrige son naturel, & le force d’estre tragique & relevé, principalement dans les grands Sujets.
Quotation
L'Enthousiasme est un transport de l'esprit qui fait penser les choses d'une maniere sublime, surprenante, & vraisemblable. […]
[...] Quoique le Vrai plaise toujours, parce qu'il est la base & le fondement de toutes les perfections, il ne laisse pas d'être souvent insipide quand il est tout seul ; mais quand il est joint à l’Enthousiasme, il transporte l'esprit dans une admiration mêlée d'étonnement ; il le ravit avec violence sans lui donner le tems de retourner sur lui-même.
J'ai fait entrer le Sublime dans la définition de l'Enthousiasme, parce que le Sublime est un effet & une production de l'Enthousiasme. […] Mais comme l'Enthousiasme & le Sublime tendent tous deux à élever notre esprit, on peut dire qu'ils sont d'une même nature. La difference neanmoins qui me paroît entre l'un & l'autre, c'est que l'Enthousiasme est une fureur de veine qui porte notre ame encore plus haut que le Sublime, dont il est la source, & qui a son principal effet dans la pensée & dans le Tout ensemble de l'ouvrage ; aulieu que le Sublime se fait sentir également dans le général, & dans le détail de toutes les parties. L'Enthousiasme a encore cela que l'effet en est plus prompt, & que celui du Sublime demande au moins quelques momens de réfléxion pour être vû dans toute sa force.
[…] Il me paroît, en un mot, que l'Enthousiasme nous saisit, & que nous saisissons le Sublime.
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Quotation
Cet artifice paroîtra toujours merveilleux dans les grands ouvrages ; car c’est lui qui dans les distances proportionnées à la grandeur des Tableaux, soûtient le caractere des objets particuliers & du Tout-ensemble ; & sans lui, en s’éloignant de l’ouvrage, l’ouvrage s’éloigne du vrai, & tombe dans l’insipidité de la Peinture ordinaire. C’est dans ces grands ouvrages, où l’on voit que Rubens a rendu cette savante exageration plus heureuse & plus sensible ; mais principalement à ceux qui sont capables d’y faire attention, & de l’examiner : car aux personnes qui ne s’y connoissent que peu, rien n’est plus caché que cet artifice.
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Quotation
All the different Degrees of Goodness in Painting may be reduc’d to these three General Classes. The Mediocre, or Indifferently Good, the Excellent, and the Sublime. The first is of a large Extent ; the second much Narrower ; and the Last still more so. I believe most people have a pretty Clear, and Just Idea of the two former ; the other is not so well understood ; which therefore I will define according to the Sense I have of it ;
Quotation
Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
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I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ; and that for Reasons which will be seen anon. Michael Angelo’s Great Style intitles Him to the Sublime, not his Drawing ; ‘tis that Greatness, and a competent degree of Grace, and not his Colouring that makes Titian capable of it : As Correggio’s Grace, with a sufficient mixture of Greatness gives this Noble Quality to His Works. Van Dyck’s Colouring, nor Pencil tho’ perfectly fine would never introduce him to the Sublime ; ‘tis his Expression, and that Grace, and Greatness he possess’d, (the Utmost that Portrait-Painting is Justly capable of) that sets some of his Works in that Exalted Class ;
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I should […] have been sparing of Examples, if I had not already given many for other Purposes, but which are also Instances of the Sublime in Painting, and which are scatter’d up and down throughout all I have Written on this Amiable Subject : But One or Two I will add in This Place. The First shall be from Rembrandt ; and surely he has given Us such an Idea of a Death-Bed in one Quarter of a Sheet of Paper in two Figures with few Accompagnements, and in Clair Obscure only, that the most Eloquent Preacher cannot paint it so strongly by the most Elaborate Discourses ; […]. An Old Man is lying on his Bed, just ready to Expire ; this Bed has a plain Curtain, and a Lamp hanging over it, for ‘tis in a Little sort of an Alcove, Dark Otherwise, though ‘tis Bright Day in the next Room, and which is nearest the Eye, There the Son of this Dying Old Man is at Prayers. […]. All is over with this Man, and there is such an Expression in this Dull Lamp-Light at Noon-Day, such a Touching Solemnity, and Repose that these Equal any thing in the Airs, and Attitudes of the Figures, which have the Utmost Excellency that I think I ever saw, or can conceive is possible to be Imagined.
‘Tis a Drawing, I have it. And here is an Instance of an Important Subject, Impress’d upon our Minds by such Expedients, and Incidents as display an Elevation of Thought, and fine Invention ; and all this with the Utmost Art, and with the greatest Simplicity ; That being more Apt, at least in this Case, than any Embellishment whatsoever.
D'après C. Gibson-Wood, le dessin évoqué par Richardson ne représente pas un homme sur son lit de mort, mais la prière de saint Pierre avant la résurrection de Tabitha (C. Gibson-Wood, 2003, reproduction p. 168).
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Quotation
Il ne reste plus pour finir cette Préface, que de dire ce que Longin entend par Sublime. Car comme il escrit de cette matiere aprés Cecilius qui avoit presque emploié tout son Livre à montrer ce que c’est que Sublime, il n’a pas crû devoir rebatre une chose qui n’avoit esté dêja que trop discutée par un autre. Il faut donc sçavoir que par Sublime, Longin n’entend pas ce que les Orateurs appellent le Stile Sublime : mais cet extraordinaire & ce merveilleux qui frappe dans le Discours, & qui fait qu’un Ouvrage enleve, ravit, transporte. Le Stile Sublime veut toûjours de grands mots : mais le Sublime se peut trouver dans une seule pensée, dans une seule figure, dans un seul tour de paroles. Une chose peut estre dans le Stile Sublime, et n’estre pourtant pas Sublime ; c’est à dire n’avoir rien d’extraordinaire ni de surprenant. Par exemple, Le souverain Arbitre de la Nature d’une seule parole forma la lumiere. Voilà qui est dans le Stile Sublime : cela n’est pas neanmoins Sublime : parce qu’il n’y a rien là de fort merveilleux, & qu’un autre ne pust aisément trouver. Mais. Dieu dit : Que la lumière se fasse, et la lumière se fit. Ce tour extraordinaire d’expression qui marque si bien l’obéïssance de la Creature aux ordres de Createur est veritablement sublime, & a quelque chose de divin. Il faut donc entendre par Sublime dans Longin, l’Extraordinaire, le Surprenant & comme je l’ay traduit, le Merveilleux dans le discours.
Boileau est l'auteur de cette préface.
Quotation
Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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Quotation
Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
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[…] si les Figures naturellement soûtiennnent le Sublime, le Sublime de son costé soûtient merveilleusement les Figures. […] il n’y a point de Figure plus excellente que celle qui est tout-à-fait cachée, & lorsqu’on ne reconnoist point que c’est une Figure. Or il n’y a point de secours ni de remede plus merveilleux pour l’empescher de paroître, que le Sublime & le Pathetique, par ce que l’Art ainsi renfermé au milieu de quelque chose de Grand & d’éclatant, a tout ce qui lui manquoit, & n’est plus suspect d’aucune tromperie. [….] Comment est-ce que l’Orateur a caché la figure dont il se sert ? N’est-il pas aisé de reconnoistre que c’est par l’éclat mesme de sa pensée ? Car comme les moindres lumieres s’évanoüissent, quand le Soleil vient à les éclairer ; de mesme, toutes ces subtilitez de Rhetorique disparoissent à la veüe de cette grandeur qui les environne de tous costés. La mesme chose à peu prés arrive dans la peinture. En effet qu’on tire plusieurs lignes paralleles sur un mesme plan, avec les jours & les ombres : il est certain que ce qui se presentera d’abord à la veuë, ce sera le lumineux, à cause de son grand éclat qui fait qu’il semble sortir hors du tableau, & s’approcher en quelque façon de nous. Ainsi le Sublime & le Pathetique, soit par une affinité naturelle qu’ils ont avec les mouvemens de nostre ame, soit à cause de leur brillant, paroissent davantage, & semblent toucher de plus prés notre esprit que les Figures, dont ils cachent l’art, & qu’ils mettent comme à couvert.
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Quotation
En effet, il n’y a peut-estre rien d’où les Orateurs et tous les Escrivains en general qui s’estudient au Sublime, tirent plus de grandeur, d’élegance, de netteté, de poids, de force, & de vigueur pour leurs Ouvrages, que du choix des paroles. C’est par elles que toutes ces beautez éclatent dans le discours, comme dans un riche tableau, & elles donnent aux choses une espece d’ame & de vie.
Quotation
And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
Quotation
All the different Degrees of Goodness in Painting may be reduc’d to these three General Classes. The Mediocre, or Indifferently Good, the Excellent, and the Sublime. The first is of a large Extent ; the second much Narrower ; and the Last still more so. I believe most people have a pretty Clear, and Just Idea of the two former ; the other is not so well understood ; which therefore I will define according to the Sense I have of it ;
Quotation
Pour aprendre à bien manier la plume, rien n'est meilleur que de copier des Estampes des Caraches, & de faire avec la plume les contours & les hachures que le burin à tracez: car pour leurs desseins à la plume il faut estre déja fort avancé pour en profiter, ils sont touchez avec esprit et d’un goust merveilleux.
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Quotation
GOUST, terme qui se prend en différentes acceptions. On dit, un ouvrage de bon goût, de mauvais goût, d’un goût trivial, de grand goût.
On entend par grand goût, quelque chose de grand, de piquant, d’extraordinaire, de sublime même, & de merveilleux. Bon goût, dit quelque chose de moins que grand goût. Un tableau peut être de bon goût, sans être de grand goût. Le goût trivial s’oppose au grand goût, & le mauvais goût au bon goût. Un ouvrage peut être de mauvais goût, & avoir cependant quelque chose de sublime & de merveilleux : tels sont les ouvrages de plusieurs Peintres Flamands.
Goût naturel, c’est celui qui se forme dans l’esprit à la vûe de la simple nature.
Goût artificiel, c’est celui qui s’acquiert par la vûe des ouvrages d’autrui, par la réflexion, par l’étude.
Goût de Nation, c’est celui qui domine chez chaque peuple.
Les différents goûts de Nation peuvent se réduire à cinq.
Le goût Romain, le goût Vénitien, le goût Lombard, le goût Flamand, & le goût François, c’est-à-dire, qu’il y a autant de goûts que d’écoles.
Le goût Romain est plus grand, plus sçavant ; le goût Vénitien plus naturel ; le goût Lombard plus moëleux & plus coulant : le goût Flamand plus simple, & souvent trop simple.
Le goût François tient beaucoup du goût Romain. Voyez ECOLE.
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Quotation
GOUST, terme qui se prend en différentes acceptions. On dit, un ouvrage de bon goût, de mauvais goût, d’un goût trivial, de grand goût.
On entend par grand goût, quelque chose de grand, de piquant, d’extraordinaire, de sublime même, & de merveilleux. Bon goût, dit quelque chose de moins que grand goût. Un tableau peut être de bon goût, sans être de grand goût. Le goût trivial s’oppose au grand goût, & le mauvais goût au bon goût. Un ouvrage peut être de mauvais goût, & avoir cependant quelque chose de sublime & de merveilleux : tels sont les ouvrages de plusieurs Peintres Flamands.
Goût naturel, c’est celui qui se forme dans l’esprit à la vûe de la simple nature.
Goût artificiel, c’est celui qui s’acquiert par la vûe des ouvrages d’autrui, par la réflexion, par l’étude.
Goût de Nation, c’est celui qui domine chez chaque peuple.
Les différents goûts de Nation peuvent se réduire à cinq.
Le goût Romain, le goût Vénitien, le goût Lombard, le goût Flamand, & le goût François, c’est-à-dire, qu’il y a autant de goûts que d’écoles.
Le goût Romain est plus grand, plus sçavant ; le goût Vénitien plus naturel ; le goût Lombard plus moëleux & plus coulant : le goût Flamand plus simple, & souvent trop simple.
Le goût François tient beaucoup du goût Romain. Voyez ECOLE.
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I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ; and that for Reasons which will be seen anon. Michael Angelo’s Great Style intitles Him to the Sublime, not his Drawing ; ‘tis that Greatness, and a competent degree of Grace, and not his Colouring that makes Titian capable of it : As Correggio’s Grace, with a sufficient mixture of Greatness gives this Noble Quality to His Works. Van Dyck’s Colouring, nor Pencil tho’ perfectly fine would never introduce him to the Sublime ; ‘tis his Expression, and that Grace, and Greatness he possess’d, (the Utmost that Portrait-Painting is Justly capable of) that sets some of his Works in that Exalted Class ;
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Quotation
And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
Quotation
Car tout ce qui est veritablement Sublime, a cela de propre, quand on l’écoute, qu’il esleve l’ame, & lui fait concevoir une plus haute opinion d’elle mesme, la remplissant de joie & de je ne sçais quel noble orgueil, comme si c’estoit elle qui eust produit les choses qu’elle vient simplement d’entendre.
[…]. La marque infaillible du Sublime, c’est quand nous sentons qu’un Discours nous laisse beaucoup à penser, fait d’abord un effet sur nous auquel il est bien difficile, pour ne pas dire impossible, de resister, et qu’ensuite le souvenir nous en dure, & ne s’efface qu’avec peine. En un mot, figurez-vous qu’une chose est veritablement Sublime, quand vous voiez qu’elle plaist universellement & dans toutes ses parties. Car lors qu’en un grand nombre de personnes differentes de profession, & d’âge, & qui n’ont aucun rapport ni d’humeurs ni d’inclinations, tout le monde vient à estre frappé également de quelque endroit d’un discours ; ce jugement & cette approbation uniforme de tant d’esprits, si discordans d’ailleurs, est une preuve certaine & indubitable, qu’il y a là du Merveilleux & du Grand.
Quotation
Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
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Quotation
Au reste vous devez sçavoir que les Images dans la Rhetorique, ont tout un autre usage que parmi les Poëtes. En effet le but qu’on s’y propose dans la Poësie, c’est l’estonnement & la surprise : au lieu que dans la prose c’est de bien peindre les choses, & de les faire voir clairement. Il y a pourtant cela de commun, qu’on tend à emouvoir en l’une & en l’autre rencontre. [...] Et veritablement je ne sçaurois pas bien dire si Euripide est aussi heureux à exprimer les autres passions ; mais pour ce qui regarde l’amour & la fureur, c’est à quoi il s’est estudié particulierement, & il y a fort bien reussi. Et mesme en d’autres rencontres il ne manque pas quelque-fois de hardiesse à peindre les choses. Car bien que son esprit de lui-mesme ne soit pas porté au Grand, il corrige son naturel, & le force d’estre tragique & relevé, principalement dans les grands Sujets.
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Que ne dirons-nous donc point de la Composition, qui est en effet comme l’harmonie du discours dont l’usage est naturel à l’homme, qui ne frappe pas simplement l’oreille mais l’esprit : qui remuë tout à la fois tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de beautés, & d’elegances avec lesquelles notre ame a comme une espece de liaison & d’affinité : qui par le meslange & la diversité des sons insinuë dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mesmes de l’Orateur, & qui bastit sur ce sublime amas de paroles, ce Grand & ce Merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu’elle ne contribuë beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du discours, & à toutes ces autres beautés qu’elle renferme en soi, & qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps les ravir & les enlever ? Il y auroit de la folie à douter d’une verité si universellement reconnuë, & l’experience en fait foi.
Au reste il en est de mesme des Discours que des corps, qui doivent ordinairement leur principale excellence à l’assemblage, & à la juste proportion de leurs membres : De sorte mesme qu’encore qu’un membre separé de l’autre n’ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas de faire un corps parfait. Ainsi les parties du Sublime estant divisées, le Sublime se dissipe entierement : au lieu que venant à ne former qu’un corps par l’assemblage qu’on en fait, & par cette liaison harmonieuse qui les joint, le seul tour de la Periode leur donne du son & de l’emphase. C’est pourquoi l’on peut comparer le Sublime dans les Periodes à un festin par escot auquel plusieurs ont contribué.
Quotation
Le style Heroïque est une composition d’objets qui dans leur genre tirent de l’Art & de la Nature tout ce que l’un & l'autre peuvent produire de grand & d’extraordinaire. Les sites en sont tout agreables & tout surprenans : les fabriques n’y sont que temples, que pyramides, que sepultures antiques, qu’autels consacrés aux divinités, que maisons de plaisance d’une reguliere architecture ; & si la Nature n’y est pas exprimée comme le hazard nous la fait voir tous les jours, elle y est du moins representée comme on s’imagine qu’elle devroit être. Ce style est une agreable illusion, & une espece d’enchantement quand il part d’un beau genie & d’un bon esprit, comme étoit celui du Poussin : lui qui s’y est si bien exprimé. Mais ceux qui voudront suivre ce genre de Peinture, & qui n’auront pas le talent de soûtenir le sublime qu’il demande, courent souvent le risque de tomber dans le puerile.
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En effet, il n’y a peut-estre rien d’où les Orateurs et tous les Escrivains en general qui s’estudient au Sublime, tirent plus de grandeur, d’élegance, de netteté, de poids, de force, & de vigueur pour leurs Ouvrages, que du choix des paroles. C’est par elles que toutes ces beautez éclatent dans le discours, comme dans un riche tableau, & elles donnent aux choses une espece d’ame & de vie.
Quotation
Que ne dirons-nous donc point de la Composition, qui est en effet comme l’harmonie du discours dont l’usage est naturel à l’homme, qui ne frappe pas simplement l’oreille mais l’esprit : qui remuë tout à la fois tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de beautés, & d’elegances avec lesquelles notre ame a comme une espece de liaison & d’affinité : qui par le meslange & la diversité des sons insinuë dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mesmes de l’Orateur, & qui bastit sur ce sublime amas de paroles, ce Grand & ce Merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu’elle ne contribuë beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du discours, & à toutes ces autres beautés qu’elle renferme en soi, & qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps les ravir & les enlever ? Il y auroit de la folie à douter d’une verité si universellement reconnuë, & l’experience en fait foi.
Au reste il en est de mesme des Discours que des corps, qui doivent ordinairement leur principale excellence à l’assemblage, & à la juste proportion de leurs membres : De sorte mesme qu’encore qu’un membre separé de l’autre n’ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas de faire un corps parfait. Ainsi les parties du Sublime estant divisées, le Sublime se dissipe entierement : au lieu que venant à ne former qu’un corps par l’assemblage qu’on en fait, & par cette liaison harmonieuse qui les joint, le seul tour de la Periode leur donne du son & de l’emphase. C’est pourquoi l’on peut comparer le Sublime dans les Periodes à un festin par escot auquel plusieurs ont contribué.
Quotation
Il faut donc dans la Peinture quelque chose de grand, de piquant, d’extraordinaire, capable de surprendre, de plaire, d’instruire, & c’est ce qu’on appelle le grand Goût : c’est par lui que les choses communes deviennent belles, & que les belles deviennent sublimes & merveilleuses ; car en Peinture le Grand Goût, le Sublime & le Merveilleux ne sont que la même chose.
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Quotation
I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ; and that for Reasons which will be seen anon. Michael Angelo’s Great Style intitles Him to the Sublime, not his Drawing ; ‘tis that Greatness, and a competent degree of Grace, and not his Colouring that makes Titian capable of it : As Correggio’s Grace, with a sufficient mixture of Greatness gives this Noble Quality to His Works. Van Dyck’s Colouring, nor Pencil tho’ perfectly fine would never introduce him to the Sublime ; ‘tis his Expression, and that Grace, and Greatness he possess’d, (the Utmost that Portrait-Painting is Justly capable of) that sets some of his Works in that Exalted Class ;
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Quotation
And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
Quotation
Au reste vous devez sçavoir que les Images dans la Rhetorique, ont tout un autre usage que parmi les Poëtes. En effet le but qu’on s’y propose dans la Poësie, c’est l’estonnement & la surprise : au lieu que dans la prose c’est de bien peindre les choses, & de les faire voir clairement. Il y a pourtant cela de commun, qu’on tend à emouvoir en l’une & en l’autre rencontre. [...] Et veritablement je ne sçaurois pas bien dire si Euripide est aussi heureux à exprimer les autres passions ; mais pour ce qui regarde l’amour & la fureur, c’est à quoi il s’est estudié particulierement, & il y a fort bien reussi. Et mesme en d’autres rencontres il ne manque pas quelque-fois de hardiesse à peindre les choses. Car bien que son esprit de lui-mesme ne soit pas porté au Grand, il corrige son naturel, & le force d’estre tragique & relevé, principalement dans les grands Sujets.
Quotation
Que ne dirons-nous donc point de la Composition, qui est en effet comme l’harmonie du discours dont l’usage est naturel à l’homme, qui ne frappe pas simplement l’oreille mais l’esprit : qui remuë tout à la fois tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de beautés, & d’elegances avec lesquelles notre ame a comme une espece de liaison & d’affinité : qui par le meslange & la diversité des sons insinuë dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mesmes de l’Orateur, & qui bastit sur ce sublime amas de paroles, ce Grand & ce Merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu’elle ne contribuë beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du discours, & à toutes ces autres beautés qu’elle renferme en soi, & qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps les ravir & les enlever ? Il y auroit de la folie à douter d’une verité si universellement reconnuë, & l’experience en fait foi.
Au reste il en est de mesme des Discours que des corps, qui doivent ordinairement leur principale excellence à l’assemblage, & à la juste proportion de leurs membres : De sorte mesme qu’encore qu’un membre separé de l’autre n’ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas de faire un corps parfait. Ainsi les parties du Sublime estant divisées, le Sublime se dissipe entierement : au lieu que venant à ne former qu’un corps par l’assemblage qu’on en fait, & par cette liaison harmonieuse qui les joint, le seul tour de la Periode leur donne du son & de l’emphase. C’est pourquoi l’on peut comparer le Sublime dans les Periodes à un festin par escot auquel plusieurs ont contribué.
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I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ; and that for Reasons which will be seen anon. Michael Angelo’s Great Style intitles Him to the Sublime, not his Drawing ; ‘tis that Greatness, and a competent degree of Grace, and not his Colouring that makes Titian capable of it : As Correggio’s Grace, with a sufficient mixture of Greatness gives this Noble Quality to His Works. Van Dyck’s Colouring, nor Pencil tho’ perfectly fine would never introduce him to the Sublime ; ‘tis his Expression, and that Grace, and Greatness he possess’d, (the Utmost that Portrait-Painting is Justly capable of) that sets some of his Works in that Exalted Class ; in which on That account he may perhaps take place of Rafaelle himself in That Kind of Painting, if that Great Man’s Fine, and Noble Idea’s carried him asmuch above Nature Then, as they did in History, where the utmost that can be done is commendable ; a due Subordination of Characters being preserved ; And thus (by the way) V. Dyck’s Colouring, and Pencil may be judg’d Equal to that of Corregio, or any other Master.
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He that would rise to the Sublime must form an Idea of Something beyond all we have yet seen ; or which Art, or Nature has yet produc’d ; Painting, Such as when all the Excellencies of the several Masters are United, and their several Defects avoided.
The greatest Designers among the Moderns want much of that exquisite Beauty, in all the Several Characters, that is to be seen in the Antique ; the Airs of the Heads, even of Rafaëlle himself, are Inferiour to what the Ancients have done ; and for Grace to some of Guido : the Colouring of Rubens and Van Dyck falls short of That of Titian, and Coreggio ; and the best Masters have Rarely Thought like Rafaëlle, or Compos’d like Rembrandt. Let us then imagine a Picture Design’d as the Laocoon, the Hercules, the Apollo, the Venus, or any of these Miraculous remains of Antiquity : The Airs of Heads like what is to be found in the Statues, Busts, Bas-releifs, or Medals, or like some of those of Guido ; and Colour’d like the most Celebrated Colourists ; with the Lightest Pencil, and the most Proper to the Subject ; and all this Suitably Invented, and Compos’d ; Here would be a Picture ! Such a one a Painter should Imagine, and So set before him for Imitation.
Nor must he stop Here, but Create an Original Idea of Perfection. The Utmost that the Best Masters have done, is not to be suppos’d the Utmost ‘tis possible for Humane Nature to arrive at ;
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Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ;
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Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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Que ne dirons-nous donc point de la Composition, qui est en effet comme l’harmonie du discours dont l’usage est naturel à l’homme, qui ne frappe pas simplement l’oreille mais l’esprit : qui remuë tout à la fois tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de beautés, & d’elegances avec lesquelles notre ame a comme une espece de liaison & d’affinité : qui par le meslange & la diversité des sons insinuë dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mesmes de l’Orateur, & qui bastit sur ce sublime amas de paroles, ce Grand & ce Merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu’elle ne contribuë beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du discours, & à toutes ces autres beautés qu’elle renferme en soi, & qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps les ravir & les enlever ? Il y auroit de la folie à douter d’une verité si universellement reconnuë, & l’experience en fait foi.
Au reste il en est de mesme des Discours que des corps, qui doivent ordinairement leur principale excellence à l’assemblage, & à la juste proportion de leurs membres : De sorte mesme qu’encore qu’un membre separé de l’autre n’ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas de faire un corps parfait. Ainsi les parties du Sublime estant divisées, le Sublime se dissipe entierement : au lieu que venant à ne former qu’un corps par l’assemblage qu’on en fait, & par cette liaison harmonieuse qui les joint, le seul tour de la Periode leur donne du son & de l’emphase. C’est pourquoi l’on peut comparer le Sublime dans les Periodes à un festin par escot auquel plusieurs ont contribué.
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Que ne dirons-nous donc point de la Composition, qui est en effet comme l’harmonie du discours dont l’usage est naturel à l’homme, qui ne frappe pas simplement l’oreille mais l’esprit : qui remuë tout à la fois tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de beautés, & d’elegances avec lesquelles notre ame a comme une espece de liaison & d’affinité : qui par le meslange & la diversité des sons insinuë dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mesmes de l’Orateur, & qui bastit sur ce sublime amas de paroles, ce Grand & ce Merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu’elle ne contribuë beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du discours, & à toutes ces autres beautés qu’elle renferme en soi, & qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps les ravir & les enlever ? Il y auroit de la folie à douter d’une verité si universellement reconnuë, & l’experience en fait foi.
Au reste il en est de mesme des Discours que des corps, qui doivent ordinairement leur principale excellence à l’assemblage, & à la juste proportion de leurs membres : De sorte mesme qu’encore qu’un membre separé de l’autre n’ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas de faire un corps parfait. Ainsi les parties du Sublime estant divisées, le Sublime se dissipe entierement : au lieu que venant à ne former qu’un corps par l’assemblage qu’on en fait, & par cette liaison harmonieuse qui les joint, le seul tour de la Periode leur donne du son & de l’emphase. C’est pourquoi l’on peut comparer le Sublime dans les Periodes à un festin par escot auquel plusieurs ont contribué.
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All the different Degrees of Goodness in Painting may be reduc’d to these three General Classes. The Mediocre, or Indifferently Good, the Excellent, and the Sublime. The first is of a large Extent ; the second much Narrower ; and the Last still more so. I believe most people have a pretty Clear, and Just Idea of the two former ; the other is not so well understood ; which therefore I will define according to the Sense I have of it ;
Quotation
Il ne reste plus pour finir cette Préface, que de dire ce que Longin entend par Sublime. Car comme il escrit de cette matiere aprés Cecilius qui avoit presque emploié tout son Livre à montrer ce que c’est que Sublime, il n’a pas crû devoir rebatre une chose qui n’avoit esté dêja que trop discutée par un autre. Il faut donc sçavoir que par Sublime, Longin n’entend pas ce que les Orateurs appellent le Stile Sublime : mais cet extraordinaire & ce merveilleux qui frappe dans le Discours, & qui fait qu’un Ouvrage enleve, ravit, transporte. Le Stile Sublime veut toûjours de grands mots : mais le Sublime se peut trouver dans une seule pensée, dans une seule figure, dans un seul tour de paroles. Une chose peut estre dans le Stile Sublime, et n’estre pourtant pas Sublime ; c’est à dire n’avoir rien d’extraordinaire ni de surprenant. Par exemple, Le souverain Arbitre de la Nature d’une seule parole forma la lumiere. Voilà qui est dans le Stile Sublime : cela n’est pas neanmoins Sublime : parce qu’il n’y a rien là de fort merveilleux, & qu’un autre ne pust aisément trouver. Mais. Dieu dit : Que la lumière se fasse, et la lumière se fit. Ce tour extraordinaire d’expression qui marque si bien l’obéïssance de la Creature aux ordres de Createur est veritablement sublime, & a quelque chose de divin. Il faut donc entendre par Sublime dans Longin, l’Extraordinaire, le Surprenant & comme je l’ay traduit, le Merveilleux dans le discours.
Boileau est l'auteur de cette préface.
Quotation
Car tout ce qui est veritablement Sublime, a cela de propre, quand on l’écoute, qu’il esleve l’ame, & lui fait concevoir une plus haute opinion d’elle mesme, la remplissant de joie & de je ne sçais quel noble orgueil, comme si c’estoit elle qui eust produit les choses qu’elle vient simplement d’entendre.
[…]. La marque infaillible du Sublime, c’est quand nous sentons qu’un Discours nous laisse beaucoup à penser, fait d’abord un effet sur nous auquel il est bien difficile, pour ne pas dire impossible, de resister, et qu’ensuite le souvenir nous en dure, & ne s’efface qu’avec peine. En un mot, figurez-vous qu’une chose est veritablement Sublime, quand vous voiez qu’elle plaist universellement & dans toutes ses parties. Car lors qu’en un grand nombre de personnes differentes de profession, & d’âge, & qui n’ont aucun rapport ni d’humeurs ni d’inclinations, tout le monde vient à estre frappé également de quelque endroit d’un discours ; ce jugement & cette approbation uniforme de tant d’esprits, si discordans d’ailleurs, est une preuve certaine & indubitable, qu’il y a là du Merveilleux & du Grand.
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Que ne dirons-nous donc point de la Composition, qui est en effet comme l’harmonie du discours dont l’usage est naturel à l’homme, qui ne frappe pas simplement l’oreille mais l’esprit : qui remuë tout à la fois tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de beautés, & d’elegances avec lesquelles notre ame a comme une espece de liaison & d’affinité : qui par le meslange & la diversité des sons insinuë dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mesmes de l’Orateur, & qui bastit sur ce sublime amas de paroles, ce Grand & ce Merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu’elle ne contribuë beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du discours, & à toutes ces autres beautés qu’elle renferme en soi, & qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps les ravir & les enlever ? Il y auroit de la folie à douter d’une verité si universellement reconnuë, & l’experience en fait foi.
Au reste il en est de mesme des Discours que des corps, qui doivent ordinairement leur principale excellence à l’assemblage, & à la juste proportion de leurs membres : De sorte mesme qu’encore qu’un membre separé de l’autre n’ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas de faire un corps parfait. Ainsi les parties du Sublime estant divisées, le Sublime se dissipe entierement : au lieu que venant à ne former qu’un corps par l’assemblage qu’on en fait, & par cette liaison harmonieuse qui les joint, le seul tour de la Periode leur donne du son & de l’emphase. C’est pourquoi l’on peut comparer le Sublime dans les Periodes à un festin par escot auquel plusieurs ont contribué.
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Ainsi dans un Ouvrage de Peinture ce n'est point assez qu'il y ait du feu & de l'imagination, ny que la justesse du dessin s'y rencontre, il y faut encore beaucoup de conduite au choix des objets, des couleurs & des lumières, si vous desirez qu'on trouve dans les Tableaux comme dans les Poëmes l'imitation de la Nature accompagnée de quelque chose de surprenant & d'extraordinaire; ou plustost ce merveilleux & ce vraysemblable, qui fait toute la beauté de la Peinture & de la Poesie.
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Ce fut dans la mesme année 1647 qu’il [ndr : Poussin] acheva encore le Sacrement de Penitence, celuy de l’Ordre, & celuy de l’Eucharistie, qui est la Cene ; & que le sieur Pointel receût icy ce beau Tableau de Moïse sauvé des eaux, qui est presentement dans le Cabinet du Roy. Ce fut au sujet de ce Tableau qu’il écrivit une grande lettre à M. de Chantelou, par laquelle il luy mande. Que si ce dernier ouvrage luy a donné tant d’amour lors qu’il l’a veû, ce n’est pas qu’il ait esté fait avec plus de soin que celuy qu’il avoit receû de luy auparavent, mais qu’il doit considerer que c’est la qualité du sujet, & la disposition dans laquelle il se trouve luy-mesme, en le voyant, qui cause un tel effet. Que les sujets des Tableaux qu’il fait pour luy, doivent estre representez d’une autre maniere ; & que c’est en cela que consiste l’artifice de la Peinture. Que c’est juger avec trop de précipitation de ses ouvrages ; qu’estant difficile de donner son jugement si l’on n’a une grande pratique & la theorie jointes ensemble, les sens seuls ne doivent pas le faire, mais y appeler la raison. Que pour cela il veut bien l’avertir d’une chose importante qui luy fera connoistre ce qu’un Peintre doit observer dans la representation des choses qu’il traite. C’est que les anciens Grecs inventeurs des beaux Arts, trouverent plusieurs modes par le moyen desquels ils produisirent les effets merveilleux qu’on a remarquez dans leurs ouvrages. Qu’il entend par le mot de mode la raison, la mesure, ou la forme dont il se sert dans tout ce qu’il fait, & par laquelle il se sent obligé à demeurer dans de justes bornes, & à travailler avec une certaine médiocrité, moderation, & ordre déterminé qui établissent l’ouvrage que l’on fait dans son estre veritable.
Quotation
Il [ndr : Poussin] sçavoit bien que le merveilleux n’est pas moins propre à la peinture qu’à la poësie : mais il n’ignoroit pas aussi qu’il faut que la vrayssemblance paroisse en toutes choses, comme je vous ay dit qu’il l’écrivit luy-mesme au sieur Stella, en répondant à ceux qui avoient trouvé à redire à son Tableau du frapement du rocher, & qui n’approuvoient pas qu’il y eust marqué une profondeur pour l’écoulement des eaux.
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Il faut donc dans la Peinture quelque chose de grand, de piquant, d’extraordinaire, capable de surprendre, de plaire, d’instruire, & c’est ce qu’on appelle le grand Goût : c’est par lui que les choses communes deviennent belles, & que les belles deviennent sublimes & merveilleuses ; car en Peinture le Grand Goût, le Sublime & le Merveilleux ne sont que la même chose.
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And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
Quotation
Au reste vous devez sçavoir que les Images dans la Rhetorique, ont tout un autre usage que parmi les Poëtes. En effet le but qu’on s’y propose dans la Poësie, c’est l’estonnement & la surprise : au lieu que dans la prose c’est de bien peindre les choses, & de les faire voir clairement. Il y a pourtant cela de commun, qu’on tend à emouvoir en l’une & en l’autre rencontre. [...] Et veritablement je ne sçaurois pas bien dire si Euripide est aussi heureux à exprimer les autres passions ; mais pour ce qui regarde l’amour & la fureur, c’est à quoi il s’est estudié particulierement, & il y a fort bien reussi. Et mesme en d’autres rencontres il ne manque pas quelque-fois de hardiesse à peindre les choses. Car bien que son esprit de lui-mesme ne soit pas porté au Grand, il corrige son naturel, & le force d’estre tragique & relevé, principalement dans les grands Sujets.
Quotation
En effet, il n’y a peut-estre rien d’où les Orateurs et tous les Escrivains en general qui s’estudient au Sublime, tirent plus de grandeur, d’élegance, de netteté, de poids, de force, & de vigueur pour leurs Ouvrages, que du choix des paroles. C’est par elles que toutes ces beautez éclatent dans le discours, comme dans un riche tableau, & elles donnent aux choses une espece d’ame & de vie.
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[...] mon Maistre me fist remarquer bien d’autres beautés que celles que les Cabalistes admirent dans les ouvrages de leurs Chefs : Car outre qu’il n’y manquoit rien de celles-là qui ne regardent que la pratique de l’Art, il m’y fist découvrir tant de science & d’étude, qu’il est presque aussi difficile de les exprimer, que de les imiter, à moins que d’avoir les mêmes connoissances desquelles ces rares Esprits se servoient, pour faire de si excellens Ouvrages.
Il ne me parla point de la Vaguesse du Coloris, de la Morbidesse des Carnations, de la Franchise du Pinceau, ny des autres termes extravagans à la mode de nos Cabalistes ; mais bien de la beauté, diversité, netteté & sublimité des pensées, de cette manière noble & majestueuse de traiter un sujet, de la discretion à le remplir dignement & convenablement à la verité de l’Histoire qu’il represente, & au Mode dans lequel il se rencontre ; de l’exacte & sçavante observation du Costume, dans laquelle ces anciens Maistres faisoient consister tout ce que la Peinture a d’ingenieux & de sublime ; de cette pointe d’esprit & de cet excellent genie, qu’ils faisoient paroistre dans leurs Ouvrages, dont les Ecrivains les ont loüés si hautement : De là suivoit la judicieuse & convenable disposition des lieux & des figures, la force & la diversité des expressions, l’élégance & le beau choix des attitudes, la diligence & l’exactitudes dans le dessein, la beauté & la variété des proportions, la position aisée & naturelle des figures sur leur centre de gravité ou équilibre, & conformément aux regles de la Perspective des Plans, qui est le lien & le soûtien de toutes les beautés de la Peinture, & sans laquelle elle n’est qu’une pure barboüillerie de Couleurs ; mais sur tout, cet agrément & cette grace admirable dans les mouvemens, qui est un talent autant rare qu’il est precieux.
On pouvoit encore admirer la lumiere bien choisie, & répanduë avec discretion sur les objets, selon leur proximité ou éloignement de l’œil, & les accidens du lumineux, du Diaphane & du corps éclairé ; les differens effets des lumieres primitives & derivatives, l’amitié & la charmante harmonie (pour ainsi dire) des Couleurs, par leur degrés proportionnés de force ou d’afoiblissement, suivant les regles de la Perspective aërienne, ou par leur sympatie naturelle : Enfin, cette Eurithmie dans toutes les parties de l’Ouvrage, auquel elle donne son prix & sa valeur.
Voilà une partie des veritables & solides beautés, que mon Maistre me fist observer dans les admirables Ouvrages de ces grands Hommes, qui ont charmé toute l’Antiquité, & dont le seul recit charme encor tous ceux qui l’entendent.
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Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
Quotation
Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
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Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
Quotation
[…] si les Figures naturellement soûtiennnent le Sublime, le Sublime de son costé soûtient merveilleusement les Figures. […] il n’y a point de Figure plus excellente que celle qui est tout-à-fait cachée, & lorsqu’on ne reconnoist point que c’est une Figure. Or il n’y a point de secours ni de remede plus merveilleux pour l’empescher de paroître, que le Sublime & le Pathetique, par ce que l’Art ainsi renfermé au milieu de quelque chose de Grand & d’éclatant, a tout ce qui lui manquoit, & n’est plus suspect d’aucune tromperie. [….] Comment est-ce que l’Orateur a caché la figure dont il se sert ? N’est-il pas aisé de reconnoistre que c’est par l’éclat mesme de sa pensée ? Car comme les moindres lumieres s’évanoüissent, quand le Soleil vient à les éclairer ; de mesme, toutes ces subtilitez de Rhetorique disparoissent à la veüe de cette grandeur qui les environne de tous costés. La mesme chose à peu prés arrive dans la peinture. En effet qu’on tire plusieurs lignes paralleles sur un mesme plan, avec les jours & les ombres : il est certain que ce qui se presentera d’abord à la veuë, ce sera le lumineux, à cause de son grand éclat qui fait qu’il semble sortir hors du tableau, & s’approcher en quelque façon de nous. Ainsi le Sublime & le Pathetique, soit par une affinité naturelle qu’ils ont avec les mouvemens de nostre ame, soit à cause de leur brillant, paroissent davantage, & semblent toucher de plus prés notre esprit que les Figures, dont ils cachent l’art, & qu’ils mettent comme à couvert.
Quotation
Or comme celui qui considere un Ouvrage suit le degré d'élévation qu'il y trouve, le transport d'esprit qui est dans l'Enthousiasme est commun au Peintre & au Spectateur ; avec cette difference neanmoins, que bien que le Peintre ait travaillé à plusieurs reprises pour échauffer son imagination, & pour monter son Ouvrage au degré que demande l'Enthousiasme, le Spectateur au contraire sans entrer dans aucun détail se laisse enlever tout à coup, & comme malgré lui, au degré d'Enthousiasme où le Peintre l'a attiré.
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[…] si les Figures naturellement soûtiennnent le Sublime, le Sublime de son costé soûtient merveilleusement les Figures. […] il n’y a point de Figure plus excellente que celle qui est tout-à-fait cachée, & lorsqu’on ne reconnoist point que c’est une Figure. Or il n’y a point de secours ni de remede plus merveilleux pour l’empescher de paroître, que le Sublime & le Pathetique, par ce que l’Art ainsi renfermé au milieu de quelque chose de Grand & d’éclatant, a tout ce qui lui manquoit, & n’est plus suspect d’aucune tromperie. [….] Comment est-ce que l’Orateur a caché la figure dont il se sert ? N’est-il pas aisé de reconnoistre que c’est par l’éclat mesme de sa pensée ? Car comme les moindres lumieres s’évanoüissent, quand le Soleil vient à les éclairer ; de mesme, toutes ces subtilitez de Rhetorique disparoissent à la veüe de cette grandeur qui les environne de tous costés. La mesme chose à peu prés arrive dans la peinture. En effet qu’on tire plusieurs lignes paralleles sur un mesme plan, avec les jours & les ombres : il est certain que ce qui se presentera d’abord à la veuë, ce sera le lumineux, à cause de son grand éclat qui fait qu’il semble sortir hors du tableau, & s’approcher en quelque façon de nous. Ainsi le Sublime & le Pathetique, soit par une affinité naturelle qu’ils ont avec les mouvemens de nostre ame, soit à cause de leur brillant, paroissent davantage, & semblent toucher de plus prés notre esprit que les Figures, dont ils cachent l’art, & qu’ils mettent comme à couvert.
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I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ; and that for Reasons which will be seen anon. Michael Angelo’s Great Style intitles Him to the Sublime, not his Drawing ; ‘tis that Greatness, and a competent degree of Grace, and not his Colouring that makes Titian capable of it : As Correggio’s Grace, with a sufficient mixture of Greatness gives this Noble Quality to His Works. Van Dyck’s Colouring, nor Pencil tho’ perfectly fine would never introduce him to the Sublime ; ‘tis his Expression, and that Grace, and Greatness he possess’d, (the Utmost that Portrait-Painting is Justly capable of) that sets some of his Works in that Exalted Class ;
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Le sublime de la Poësie & de la Peinture est de toucher & de plaire, comme celui de l'Eloquence est de persuader. […] Un poème ainsi qu'un tableau, ne sçaurait produire cet effet, s'il n'a pas d'autre mérite que la régularité & l'élégance de l'exécution. Le tableau le mieux peint, comme le poëme le mieux distribué & le plus exactement écrit, peuvent être des ouvrages froids & ennuïeux. Afin qu'un ouvrage nous touche, il faut que l'élégance du dessein & la verité du coloris, si c'est un tableau […] y servent à donner l'être à des objets capables par eux-mêmes de nous émouvoir & de nous plaire.
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I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ; and that for Reasons which will be seen anon. Michael Angelo’s Great Style intitles Him to the Sublime, not his Drawing ; ‘tis that Greatness, and a competent degree of Grace, and not his Colouring that makes Titian capable of it : As Correggio’s Grace, with a sufficient mixture of Greatness gives this Noble Quality to His Works. Van Dyck’s Colouring, nor Pencil tho’ perfectly fine would never introduce him to the Sublime ; ‘tis his Expression, and that Grace, and Greatness he possess’d, (the Utmost that Portrait-Painting is Justly capable of) that sets some of his Works in that Exalted Class ; in which on That account he may perhaps take place of Rafaelle himself in That Kind of Painting, if that Great Man’s Fine, and Noble Idea’s carried him asmuch above Nature Then, as they did in History, where the utmost that can be done is commendable ; a due Subordination of Characters being preserved ; And thus (by the way) V. Dyck’s Colouring, and Pencil may be judg’d Equal to that of Corregio, or any other Master.
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Quoique les formes diminuent de grandeur, & que les couleurs perdent de leur force depuis le premier plan du Tableau jusqu’aux lointains les plus éloignés, & que cette insensible diminution se voye toujours dans la Nature, & se pratique d’ordinaire, elle n’exclue pas pourtant l’usage des accidens dont nous avons parlé ; & ces accidens peuvent beaucoup contribuer au merveilleux d’un Païsage, quand le Peintre a l’occasion de s’en servir bien à propos, & qu’il a une idée juste du bon effet qu’il en attend dans son ouvrage.
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Mais la raison ne se trouve pas seulement dans les Ouvrages de Peinture, elle s’y fait voir ornée d’une élégance & d’un tour agréable ; & le sublime s’y découvre aussi sensiblement que dans la Poësie. L’harmonie même qui les introduit toutes deux, & qui leur procure un accueil favorable s’y rencontre indispensablement. Car on tire des couleurs une harmonie pour les yeux, comme on tire des sons pour les oreilles.
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Le peintre en effet est l’homme de tous les talens, c’est un poëte, un historien, un fidèle imitateur, ou plutôt un rival de la nature ; ne sçait-on pas que c’est elle seule qui forme les peintres ainsi que les poëtes ? Ils montent, si l’on en croit un (a) moderne, également sur le Parnasse ; leurs arts dépendent du génie, ils ont pour objet commun d’émouvoir les passions & de plaire. Tous deux sont dans l’obligation de représenter des images plus riches, plus riantes, plus belles que celles que l’on voit ordinairement, c’est par ce moyen que l’on irrite plus vivement les passions, & que par le plaisir qu’elles procurent, le spectateur participe de l’enthousiasme qui les a fait naître.
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Or je n’appelle estudié que ce qui concerne les opérations d’esprit, et les judicieuses Observations sur la Partie du Costume, lequel est comme un lien ou comme un Composé de l’Invention et de l’Expression, les deux plus nobles de nos cinq parties, où consiste tout ce qu’il y a d’ingénieux et de sublime dans la Peinture ; les trois autres, c’est-à-dire, la Proportion, le Coloris, et la Delineation perspective, regardant plustost le mechanique de l’Art, que le Spirituel, et n’estant, par manière de dire que les Instruments de la Science de la Peinture : si bien que ceux qui appliquent tout leur esprit à ces Parties-là, travaillent plustost en gens de mestier, qu’ils n’estudient ; Aussi ne sont-ils nommez par les Sçavants, que des Desseignateurs praticiens, et n’auroient jamais esté considérables parmi les Peintres anciens.
Quotation
Il ne reste plus pour finir cette Préface, que de dire ce que Longin entend par Sublime. Car comme il escrit de cette matiere aprés Cecilius qui avoit presque emploié tout son Livre à montrer ce que c’est que Sublime, il n’a pas crû devoir rebatre une chose qui n’avoit esté dêja que trop discutée par un autre. Il faut donc sçavoir que par Sublime, Longin n’entend pas ce que les Orateurs appellent le Stile Sublime : mais cet extraordinaire & ce merveilleux qui frappe dans le Discours, & qui fait qu’un Ouvrage enleve, ravit, transporte. Le Stile Sublime veut toûjours de grands mots : mais le Sublime se peut trouver dans une seule pensée, dans une seule figure, dans un seul tour de paroles. Une chose peut estre dans le Stile Sublime, et n’estre pourtant pas Sublime ; c’est à dire n’avoir rien d’extraordinaire ni de surprenant. Par exemple, Le souverain Arbitre de la Nature d’une seule parole forma la lumiere. Voilà qui est dans le Stile Sublime : cela n’est pas neanmoins Sublime : parce qu’il n’y a rien là de fort merveilleux, & qu’un autre ne pust aisément trouver. Mais. Dieu dit : Que la lumière se fasse, et la lumière se fit. Ce tour extraordinaire d’expression qui marque si bien l’obéïssance de la Creature aux ordres de Createur est veritablement sublime, & a quelque chose de divin. Il faut donc entendre par Sublime dans Longin, l’Extraordinaire, le Surprenant & comme je l’ay traduit, le Merveilleux dans le discours.
Boileau est l'auteur de cette préface.
Quotation
Car tout ce qui est veritablement Sublime, a cela de propre, quand on l’écoute, qu’il esleve l’ame, & lui fait concevoir une plus haute opinion d’elle mesme, la remplissant de joie & de je ne sçais quel noble orgueil, comme si c’estoit elle qui eust produit les choses qu’elle vient simplement d’entendre.
[…]. La marque infaillible du Sublime, c’est quand nous sentons qu’un Discours nous laisse beaucoup à penser, fait d’abord un effet sur nous auquel il est bien difficile, pour ne pas dire impossible, de resister, et qu’ensuite le souvenir nous en dure, & ne s’efface qu’avec peine. En un mot, figurez-vous qu’une chose est veritablement Sublime, quand vous voiez qu’elle plaist universellement & dans toutes ses parties. Car lors qu’en un grand nombre de personnes differentes de profession, & d’âge, & qui n’ont aucun rapport ni d’humeurs ni d’inclinations, tout le monde vient à estre frappé également de quelque endroit d’un discours ; ce jugement & cette approbation uniforme de tant d’esprits, si discordans d’ailleurs, est une preuve certaine & indubitable, qu’il y a là du Merveilleux & du Grand.
Quotation
Chap. VI, Des cinq Sources du Grand.
Il y a, pour ainsi dire, cinq Sources principales du Sublime : mais ces cinq Sources présupposent, comme pour fondement commun, une Faculté de bien parler ; sans quoi tout le reste n’est rien.
Cela posé, la premiere & la plus considerable est une certaine Elevation d’esprit qui nous fait penser heureusement les choses […].
La seconde consiste dans le Pathetique : j’entens par Pathetique, cet Enthousiasme, & cette vehemence naturelle qui touche & qui émeut. Au reste à l’égard de ces deux premieres, elles doivent presque tout à la Nature, & il faut qu’elles naissent en nous : au lieu que les autres dépendent de l’Art en partie.
La troisiéme n’est autre chose que les Figures tournées d’une certaine maniere. Or les Fgures sont de deux sortes les Figures de Pensée, & les Figures de Diction.
Nous mettons pour la quatriesme, la Noblesse de l’expression, qui a deux parties, le choix des mots, & la diction elegante & figurée.
Pour la cinquiéme qui est celle, à proprement parler, qui produit le Grand & qui renferme en soi toutes les autres, c’est la Composition & l’arrangement des paroles dans toute leur magnificence & leur dignité.
[…]. Et certainement […] pour avoir creu que le Sublime & le Pathetique naturellement n’alloient jamais l’un sans l’autre, & ne faisoient qu’un, il [ndr : Cecilius] se trompe : puis qu’il y a des Passions qui n’ont rien de Grand ; & et qui ont mesme quelque chose de bas comme l’Affliction, la Peur, la Tristesse : & qu’au contraire il se rencontre quantité de choses grandes & sublimes, où il n’entre point de passion.
Quotation
Je ne sçaurois approuver la definition que les donnent les Maistres de l’art. L’Amplification, disent-ils, est un Discours qui augment & agrandit les choses. Car cette definition peut convenir tout de mesme au Sublime, au Pathetique & aux Figures : puis qu’elles donnent toutes au Discours je ne sçay quel caractere de grandeur. Il y a pourtant bien de la difference […] le Sublime consiste dans la hauteur et l’eslevation : au lieu que l’Amplification consiste aussi dans la multitude des paroles ; c’est pourquoi le Sublime se trouve quelquefois dans une simple pensée : mais l’Amplication ne subsiste que dans la pompe & l’abondance.
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[…] si les Figures naturellement soûtiennnent le Sublime, le Sublime de son costé soûtient merveilleusement les Figures. […] il n’y a point de Figure plus excellente que celle qui est tout-à-fait cachée, & lorsqu’on ne reconnoist point que c’est une Figure. Or il n’y a point de secours ni de remede plus merveilleux pour l’empescher de paroître, que le Sublime & le Pathetique, par ce que l’Art ainsi renfermé au milieu de quelque chose de Grand & d’éclatant, a tout ce qui lui manquoit, & n’est plus suspect d’aucune tromperie. [….] Comment est-ce que l’Orateur a caché la figure dont il se sert ? N’est-il pas aisé de reconnoistre que c’est par l’éclat mesme de sa pensée ? Car comme les moindres lumieres s’évanoüissent, quand le Soleil vient à les éclairer ; de mesme, toutes ces subtilitez de Rhetorique disparoissent à la veüe de cette grandeur qui les environne de tous costés. La mesme chose à peu prés arrive dans la peinture. En effet qu’on tire plusieurs lignes paralleles sur un mesme plan, avec les jours & les ombres : il est certain que ce qui se presentera d’abord à la veuë, ce sera le lumineux, à cause de son grand éclat qui fait qu’il semble sortir hors du tableau, & s’approcher en quelque façon de nous. Ainsi le Sublime & le Pathetique, soit par une affinité naturelle qu’ils ont avec les mouvemens de nostre ame, soit à cause de leur brillant, paroissent davantage, & semblent toucher de plus prés notre esprit que les Figures, dont ils cachent l’art, & qu’ils mettent comme à couvert.
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Quotation
En effet, il n’y a peut-estre rien d’où les Orateurs et tous les Escrivains en general qui s’estudient au Sublime, tirent plus de grandeur, d’élegance, de netteté, de poids, de force, & de vigueur pour leurs Ouvrages, que du choix des paroles. C’est par elles que toutes ces beautez éclatent dans le discours, comme dans un riche tableau, & elles donnent aux choses une espece d’ame & de vie.
Quotation
Que ne dirons-nous donc point de la Composition, qui est en effet comme l’harmonie du discours dont l’usage est naturel à l’homme, qui ne frappe pas simplement l’oreille mais l’esprit : qui remuë tout à la fois tant de différentes sortes de noms, de pensées, de choses, tant de beautés, & d’elegances avec lesquelles notre ame a comme une espece de liaison & d’affinité : qui par le meslange & la diversité des sons insinuë dans les esprits, inspire à ceux qui écoutent les passions mesmes de l’Orateur, & qui bastit sur ce sublime amas de paroles, ce Grand & ce Merveilleux que nous cherchons ? Pouvons-nous, dis-je, nier qu’elle ne contribuë beaucoup à la grandeur, à la majesté, à la magnificence du discours, & à toutes ces autres beautés qu’elle renferme en soi, & qu’ayant un empire absolu sur les esprits, elle ne puisse en tout temps les ravir & les enlever ? Il y auroit de la folie à douter d’une verité si universellement reconnuë, & l’experience en fait foi.
Au reste il en est de mesme des Discours que des corps, qui doivent ordinairement leur principale excellence à l’assemblage, & à la juste proportion de leurs membres : De sorte mesme qu’encore qu’un membre separé de l’autre n’ait rien en soi de remarquable, tous ensemble ne laissent pas de faire un corps parfait. Ainsi les parties du Sublime estant divisées, le Sublime se dissipe entierement : au lieu que venant à ne former qu’un corps par l’assemblage qu’on en fait, & par cette liaison harmonieuse qui les joint, le seul tour de la Periode leur donne du son & de l’emphase. C’est pourquoi l’on peut comparer le Sublime dans les Periodes à un festin par escot auquel plusieurs ont contribué.
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Le Peintre qui a du genie trouve dans toutes les parties de son Art une ample matiere de le faire paroître : mais celle qui lui fournit plus d'occasions de faire voir ce qu'il a d'esprit, d'imagination, & de prudence est sans doute l'Invention. C'est par elle que la Peinture marche de pas égal avec la Poësie, & c'est elle principalement qui attire l'estime des personnes les plus estimables, je veux dire des gens d'esprit, qui non contens de la seule imitation des objets, veulent que le choix en soit juste pour l'expression du sujet.
Mais ce même genie veut être cultivé par les connoissances qui ont relation à la Peinture ; parce que quelque brillante que soit notre imagination, elle ne peut produire que les choses dont notre esprit s'est rempli, & notre mémoire ne nous rapporte que les idées de ce que nous savons, & de ce que nous avons vû. C'est selon cette mesure que les talens des particuliers demeurent dans la bassesse des objets communs, ou s'élevent au sublime, par la recherche de ceux qui sont extraordinaires. C'est par-là que certains Peintres qui, ont cultivé leur esprit ont heureusement suppléé au genie qui leur manquoit d'ailleurs, & que s'élevant avec leur sujet, leur sujet s'éléve & s'agrandit avec eux. Sans les connoissances nécessaires, on fait beaucoup de fautes ; avec elles, tout se presente & se range en son ordre insensiblement.
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L'Enthousiasme est un transport de l'esprit qui fait penser les choses d'une maniere sublime, surprenante, & vraisemblable. […]
[...] Quoique le Vrai plaise toujours, parce qu'il est la base & le fondement de toutes les perfections, il ne laisse pas d'être souvent insipide quand il est tout seul ; mais quand il est joint à l’Enthousiasme, il transporte l'esprit dans une admiration mêlée d'étonnement ; il le ravit avec violence sans lui donner le tems de retourner sur lui-même.
J'ai fait entrer le Sublime dans la définition de l'Enthousiasme, parce que le Sublime est un effet & une production de l'Enthousiasme. […] Mais comme l'Enthousiasme & le Sublime tendent tous deux à élever notre esprit, on peut dire qu'ils sont d'une même nature. La difference neanmoins qui me paroît entre l'un & l'autre, c'est que l'Enthousiasme est une fureur de veine qui porte notre ame encore plus haut que le Sublime, dont il est la source, & qui a son principal effet dans la pensée & dans le Tout ensemble de l'ouvrage ; aulieu que le Sublime se fait sentir également dans le général, & dans le détail de toutes les parties. L'Enthousiasme a encore cela que l'effet en est plus prompt, & que celui du Sublime demande au moins quelques momens de réfléxion pour être vû dans toute sa force.
[…] Il me paroît, en un mot, que l'Enthousiasme nous saisit, & que nous saisissons le Sublime.
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Mais la raison ne se trouve pas seulement dans les Ouvrages de Peinture, elle s’y fait voir ornée d’une élégance & d’un tour agréable ; & le sublime s’y découvre aussi sensiblement que dans la Poësie. L’harmonie même qui les introduit toutes deux, & qui leur procure un accueil favorable s’y rencontre indispensablement. Car on tire des couleurs une harmonie pour les yeux, comme on tire des sons pour les oreilles.
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Quotation
Il faut donc dans la Peinture quelque chose de grand, de piquant, d’extraordinaire, capable de surprendre, de plaire, d’instruire, & c’est ce qu’on appelle le grand Goût : c’est par lui que les choses communes deviennent belles, & que les belles deviennent sublimes & merveilleuses ; car en Peinture le Grand Goût, le Sublime & le Merveilleux ne sont que la même chose.
Quotation
Fab. C’est avec justice qu’on a toujours estimé les peintres, parce qu’ils semblent surpasser en esprit, & en courage les autres hommes ; puisqu’ils osent par leur art imiter ce que Dieu a fait, & le representer de maniere qu’il semble vrai : c’est ce qui fait que je ne m’etonne pas que les Grecs, qui connoissoient le sublime de la peinture, deffendissent aux esclaves de la professer. Aussi Aristote se garde bien de confondre cet art parmi les mecaniques, disant qu’on devroit etablir des ecoles publiques dans les villes, ou les enfants allassent apprendre.
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Le sublime de la Poësie & de la Peinture est de toucher & de plaire, comme celui de l'Eloquence est de persuader. […] Un poème ainsi qu'un tableau, ne sçaurait produire cet effet, s'il n'a pas d'autre mérite que la régularité & l'élégance de l'exécution. Le tableau le mieux peint, comme le poëme le mieux distribué & le plus exactement écrit, peuvent être des ouvrages froids & ennuïeux. Afin qu'un ouvrage nous touche, il faut que l'élégance du dessein & la verité du coloris, si c'est un tableau […] y servent à donner l'être à des objets capables par eux-mêmes de nous émouvoir & de nous plaire.
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Depuis Rubens jusqu'à Coypel, le sujet du crucifiment a été traité plusieurs fois. Cependant ce dernier Peintre a rendu sa composition nouvelle. Son tableau représente le moment où la nature s'émut d'horreur à la mort de J. C. le moment où le Soleil s'éclipsa sans l'interposition de la lune, & où les morts sortirent de leurs sépulcres. Dans l'un des côtez du tableau l'on voit des hommes saisis d'une peur mêlée d'étonnement à l'aspect du désordre nouveau, où paroît le Ciel, sur lequel leurs regards sont attachez. Leur épouvante fait un contraste avec une crainte mêlée d'horreur, dont sont frappez d'autres spectateurs, au milieu desquels un mort sort tout-à-coup de son tombeau. Cette pensée très-convenable à la situation des personnages, et qui montre des accidens differens de la même passion, va jusques au sublime ; mais elle paroît si naturelle en même-tems, que chacun s'imagine qu'il l'auroit trouvée, s'il eût traité le même sujet. La Bible qui est celui de tous les livres qu'on lit le plus, ne nous apprend-elle pas que la nature s'émût d'horreur à la mort de Jesus-Christ, & que les morts sortirent de leurs tombeaux ? Comment, dirions-nous, a-t-on pû faire un seul tableau du crucifiment, sans y emploïer ces accidens terribles, & capables de produire un si grand effet ? Cependant le Poussin introduit dans son tableau du crucifiment un mort sortant du sepulchre, sans tirer de l'apparition de ce mort le trait de poësie, que Monsieur Coypel en a tiré. Mais c'est le caractere propre de ces inventions sublimes que le génie seul fait trouver, que de paroître tellement liées avec le sujet, qu'il semble qu'elles aïent dû être les premieres idées qui se soient présentées aux Artisans, qui ont traité ce sujet. On suë vainement, dit Horace, quand on veut trouver des inventions du même genre sans avoir un génie pareil à celui du Poëte, dont on veut imiter le naturel et la simplicité.
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Par un charme secret que nous sentons mieux que nous ne pouvons le définir, la peinture s’empare de nos sens ; elle fait passer pour vrai ce qui est faux, pour vivant ce qui est mort, é nous ne sortons de cette illusion que pour admirer l’art qui la cause. Cet art demande conséquemment un génie fécond & élevé, une imagination vive & brillante, de l’enthousiasme, du sublime, un jugement exquis, un esprit capable de prendre toutes sortes de formes & de les exprimer. Pour s’élever à ce sublime, il ne suffit pas à un peintre de plaire, il faut qu’il surprenne : il doit faire encore plus, se former une idée supérieure à tout ce que la nature & l’art ont pû produire jusqu’à présent de plus beau, suivre cette idée jusqu’à embellir même la nature & la perfectionner.
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Ces caractères du style d’un peintre, ces marques de son écriture veulent encore être accompagnés de sa manière de penser, & d’une certaine touche spirituelle qui le caractérise. Le sublime d’un dessein est ce sel qui est la propre pensée du peintre, laquelle remue notre imagination, & nous représente son véritable caractère ; alors on pourra être sûr de l’école d’un peintre & de son nom.
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All the different Degrees of Goodness in Painting may be reduc’d to these three General Classes. The Mediocre, or Indifferently Good, the Excellent, and the Sublime. The first is of a large Extent ; the second much Narrower ; and the Last still more so. I believe most people have a pretty Clear, and Just Idea of the two former ; the other is not so well understood ; which therefore I will define according to the Sense I have of it ; And I take it consist of some few of the Highest Degrees of Excellence in those Kinds, and Parts of Painting which are Excellent ; The Sublime therefore must be Marvellous, and Surprizing, It must strike vehemently upon the Mind, and Fill, and Captivate it Irresistably.
[…].
I confine the Sublime to History, and Portrait-Painting ; And These must excell in Grace, and Greatness, Invention, or Expression ; and that for Reasons which will be seen anon. Michael Angelo’s Great Style intitles Him to the Sublime, not his Drawing ; ‘tis that Greatness, and a competent degree of Grace, and not his Colouring that makes Titian capable of it : As Correggio’s Grace, with a sufficient mixture of Greatness gives this Noble Quality to His Works. Van Dyck’s Colouring, nor Pencil tho’ perfectly fine would never introduce him to the Sublime ; ‘tis his Expression, and that Grace, and Greatness he possess’d, (the Utmost that Portrait-Painting is Justly capable of) that sets some of his Works in that Exalted Class ; in which on That account he may perhaps take place of Rafaelle himself in That Kind of Painting, if that Great Man’s Fine, and Noble Idea’s carried him asmuch above Nature Then, as they did in History, where the utmost that can be done is commendable ; a due Subordination of Characters being preserved ; And thus (by the way) V. Dyck’s Colouring, and Pencil may be judg’d Equal to that of Corregio, or any other Master.
Quotation
So in Painting the Sublimity of the Thought, or Expression may be consistent with bad Colouring, or Drawing, and these may help to produce that fine effect ; If they do not, That will make Them Overlook’d, or even Prejudice us in their favour ; However ‘tis not those Defects, but what is Excellent that is Sublime.
Quotation
what I chiefly intented, which was to speak of the Sublime in Painting. The Term indeed is not so Generally apply’d to That Art, but would have been had it been so Generally Understood, and so much treated on as Writing : For certainly the Supream Excellence in Painting is As worthy of that Distinction ; and More so, as employing More of the Faculties pecular to the Noblest Creature we are acquainted with.
And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
‘Tis to these Properties therefore as also to the Invention, Expression and Composition, that I confine the Sublime in Painting, and that as they are found in Histories and Portraits.
If the Story, Sublime in it Self, loses nothing of its own Dignity under the Painter’s Hand ; Or if ‘tis Rais’d, and Improv’d, which it cannot be if the Airs of the Heads, and Attitudes of the Figures are not conformable to the Greatness of the Subject : If Expedients, and Incidents are flung in, that discover an Elevation of Thought in the Master, And all is Artfully convey’d to us, whetherin a Sketch, or Drawing, or in a Finish’d Picture. This I esteem Sublimity in Painting. Nor less so, if a Noble Character is Given, or Improv’d ; a Character of Wisdom, Goodness, Magnanimity, or whatever Other Vertues, or Excellencies ; and that together with a Just and Proper Resemblance. But a Low Subject, and a Mean Character are Incapable of Sublimity : As the Best Composition when employ’d on Such.
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I should […] have been sparing of Examples, if I had not already given many for other Purposes, but which are also Instances of the Sublime in Painting, and which are scatter’d up and down throughout all I have Written on this Amiable Subject : But One or Two I will add in This Place. The First shall be from Rembrandt ; and surely he has given Us such an Idea of a Death-Bed in one Quarter of a Sheet of Paper in two Figures with few Accompagnements, and in Clair Obscure only, that the most Eloquent Preacher cannot paint it so strongly by the most Elaborate Discourses ; […]. An Old Man is lying on his Bed, just ready to Expire ; this Bed has a plain Curtain, and a Lamp hanging over it, for ‘tis in a Little sort of an Alcove, Dark Otherwise, though ‘tis Bright Day in the next Room, and which is nearest the Eye, There the Son of this Dying Old Man is at Prayers. […]. All is over with this Man, and there is such an Expression in this Dull Lamp-Light at Noon-Day, such a Touching Solemnity, and Repose that these Equal any thing in the Airs, and Attitudes of the Figures, which have the Utmost Excellency that I think I ever saw, or can conceive is possible to be Imagined.
‘Tis a Drawing, I have it. And here is an Instance of an Important Subject, Impress’d upon our Minds by such Expedients, and Incidents as display an Elevation of Thought, and fine Invention ; and all this with the Utmost Art, and with the greatest Simplicity ; That being more Apt, at least in this Case, than any Embellishment whatsoever.
D'après C. Gibson-Wood, le dessin évoqué par Richardson ne représente pas un homme sur son lit de mort, mais la prière de saint Pierre avant la résurrection de Tabitha (C. Gibson-Wood, 2003, reproduction p. 168).
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I am perhaps too much Prejudiced in favour of Painting, but however not so much but that I am ready to acknowledge that we have Few Instances, if Any of the Perfect Sublime, that is, where the Thought is so, and the manner of Conveyance Equal to it ; some Defects will always be found in the best Pictures, whereas there are Sublime Passages in Writers where the Words are not only the most Apt, and proper, but the most Beautiful : This nevertheless is to the honour of Our Art. No Man yet has arriv’d to Excellency in All Parts of it : That is the Task of an Angel, or some Angelick Man, such as has not yet appear’d. Rafaëlle, and Others have reach’d the Sublime, and rose as high as Homer, or Demosthenes ; but you can never see, I say not an Intire Picture, or Figure, but even a Single Head without at the same time seeing Something amiss : Whereas in Writers you often have their Beautiful Parts Detach’d, and Perfect.
But the Sublime, as the Crown in the State hides all Defects ; it fills and satisfies the Mind, nothing appears to be wanting ; nothing to be amiss, or if it does ‘tis easily forgiven. All Faults die, and vanish in the presence of the Sublime,
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He that would rise to the Sublime must form an Idea of Something beyond all we have yet seen ; or which Art, or Nature has yet produc’d ; Painting, Such as when all the Excellencies of the several Masters are United, and their several Defects avoided.
The greatest Designers among the Moderns want much of that exquisite Beauty, in all the Several Characters, that is to be seen in the Antique ; the Airs of the Heads, even of Rafaëlle himself, are Inferiour to what the Ancients have done ; and for Grace to some of Guido : the Colouring of Rubens and Van Dyck falls short of That of Titian, and Coreggio ; and the best Masters have Rarely Thought like Rafaëlle, or Compos’d like Rembrandt. Let us then imagine a Picture Design’d as the Laocoon, the Hercules, the Apollo, the Venus, or any of these Miraculous remains of Antiquity : The Airs of Heads like what is to be found in the Statues, Busts, Bas-releifs, or Medals, or like some of those of Guido ; and Colour’d like the most Celebrated Colourists ; with the Lightest Pencil, and the most Proper to the Subject ; and all this Suitably Invented, and Compos’d ; Here would be a Picture ! Such a one a Painter should Imagine, and So set before him for Imitation.
Nor must he stop Here, but Create an Original Idea of Perfection. The Utmost that the Best Masters have done, is not to be suppos’d the Utmost ‘tis possible for Humane Nature to arrive at ;
Dans cet extrait, Richardson mentionne plusieurs œuvres antiques. Outre le Laocoon, il évoque un Hercule, un Apollon et une Vénus. Néanmoins, il ne donne pas assez d'indication pour les identifier précisément.
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[...] mon Maistre me fist remarquer bien d’autres beautés que celles que les Cabalistes admirent dans les ouvrages de leurs Chefs : Car outre qu’il n’y manquoit rien de celles-là qui ne regardent que la pratique de l’Art, il m’y fist découvrir tant de science & d’étude, qu’il est presque aussi difficile de les exprimer, que de les imiter, à moins que d’avoir les mêmes connoissances desquelles ces rares Esprits se servoient, pour faire de si excellens Ouvrages.
Il ne me parla point de la Vaguesse du Coloris, de la Morbidesse des Carnations, de la Franchise du Pinceau, ny des autres termes extravagans à la mode de nos Cabalistes ; mais bien de la beauté, diversité, netteté & sublimité des pensées, de cette manière noble & majestueuse de traiter un sujet, de la discretion à le remplir dignement & convenablement à la verité de l’Histoire qu’il represente, & au Mode dans lequel il se rencontre ; de l’exacte & sçavante observation du Costume, dans laquelle ces anciens Maistres faisoient consister tout ce que la Peinture a d’ingenieux & de sublime ; de cette pointe d’esprit & de cet excellent genie, qu’ils faisoient paroistre dans leurs Ouvrages, dont les Ecrivains les ont loüés si hautement : De là suivoit la judicieuse & convenable disposition des lieux & des figures, la force & la diversité des expressions, l’élégance & le beau choix des attitudes, la diligence & l’exactitudes dans le dessein, la beauté & la variété des proportions, la position aisée & naturelle des figures sur leur centre de gravité ou équilibre, & conformément aux regles de la Perspective des Plans, qui est le lien & le soûtien de toutes les beautés de la Peinture, & sans laquelle elle n’est qu’une pure barboüillerie de Couleurs ; mais sur tout, cet agrément & cette grace admirable dans les mouvemens, qui est un talent autant rare qu’il est precieux.
On pouvoit encore admirer la lumiere bien choisie, & répanduë avec discretion sur les objets, selon leur proximité ou éloignement de l’œil, & les accidens du lumineux, du Diaphane & du corps éclairé ; les differens effets des lumieres primitives & derivatives, l’amitié & la charmante harmonie (pour ainsi dire) des Couleurs, par leur degrés proportionnés de force ou d’afoiblissement, suivant les regles de la Perspective aërienne, ou par leur sympatie naturelle : Enfin, cette Eurithmie dans toutes les parties de l’Ouvrage, auquel elle donne son prix & sa valeur.
Voilà une partie des veritables & solides beautés, que mon Maistre me fist observer dans les admirables Ouvrages de ces grands Hommes, qui ont charmé toute l’Antiquité, & dont le seul recit charme encor tous ceux qui l’entendent.
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So in Painting the Sublimity of the Thought, or Expression may be consistent with bad Colouring, or Drawing, and these may help to produce that fine effect ; If they do not, That will make Them Overlook’d, or even Prejudice us in their favour ; However ‘tis not those Defects, but what is Excellent that is Sublime.
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what I chiefly intented, which was to speak of the Sublime in Painting. The Term indeed is not so Generally apply’d to That Art, but would have been had it been so Generally Understood, and so much treated on as Writing : For certainly the Supream Excellence in Painting is As worthy of that Distinction ; and More so, as employing More of the Faculties pecular to the Noblest Creature we are acquainted with.
And here I take the Sublime to be the Greatest, and most Beautiful Ideas, whether Corporeal, or not, convey’d to us the most Advantageously.
By Beauty I do not mean that of Form, or Colour, Copy’d from what the Painter sees ; These being never so well Imitated, I take not to be Sublime, because These require little more than an Eye, and Hand, and Practice. An Exalted Idea of Colour in a Humane Face, or Figure might be judg’d to be Sublime, could That be had, and convey’d to Us, as I think it cannot, since even Nature has not yet been Equall’d by the best Colourists ; Here she keeps Art at a Distance whetever Courtship it has made to her. In Forms ‘tis Otherwise as we find in the Antique Statues, which therefore I allow to have a Sublimity in them : And should do the same in regard to the same Kind, and Degree of Beauty if it were to be found in any Picture, as I believe it is not. Tho’ in Pictures is seen a Grace, and Greatness, whether from the Attitude, or Air of the Whole, or the Head only, that may justly be Esteem’d Sublime.
‘Tis to these Properties therefore as also to the Invention, Expression and Composition, that I confine the Sublime in Painting, and that as they are found in Histories and Portraits.
If the Story, Sublime in it Self, loses nothing of its own Dignity under the Painter’s Hand ; Or if ‘tis Rais’d, and Improv’d, which it cannot be if the Airs of the Heads, and Attitudes of the Figures are not conformable to the Greatness of the Subject : If Expedients, and Incidents are flung in, that discover an Elevation of Thought in the Master, And all is Artfully convey’d to us, whetherin a Sketch, or Drawing, or in a Finish’d Picture. This I esteem Sublimity in Painting. Nor less so, if a Noble Character is Given, or Improv’d ; a Character of Wisdom, Goodness, Magnanimity, or whatever Other Vertues, or Excellencies ; and that together with a Just and Proper Resemblance. But a Low Subject, and a Mean Character are Incapable of Sublimity : As the Best Composition when employ’d on Such.
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Depuis Rubens jusqu'à Coypel, le sujet du crucifiment a été traité plusieurs fois. Cependant ce dernier Peintre a rendu sa composition nouvelle. Son tableau représente le moment où la nature s'émut d'horreur à la mort de J. C. le moment où le Soleil s'éclipsa sans l'interposition de la lune, & où les morts sortirent de leurs sépulcres. Dans l'un des côtez du tableau l'on voit des hommes saisis d'une peur mêlée d'étonnement à l'aspect du désordre nouveau, où paroît le Ciel, sur lequel leurs regards sont attachez. Leur épouvante fait un contraste avec une crainte mêlée d'horreur, dont sont frappez d'autres spectateurs, au milieu desquels un mort sort tout-à-coup de son tombeau. Cette pensée très-convenable à la situation des personnages, et qui montre des accidens differens de la même passion, va jusques au sublime ; mais elle paroît si naturelle en même-tems, que chacun s'imagine qu'il l'auroit trouvée, s'il eût traité le même sujet. La Bible qui est celui de tous les livres qu'on lit le plus, ne nous apprend-elle pas que la nature s'émût d'horreur à la mort de Jesus-Christ, & que les morts sortirent de leurs tombeaux ? Comment, dirions-nous, a-t-on pû faire un seul tableau du crucifiment, sans y emploïer ces accidens terribles, & capables de produire un si grand effet ? Cependant le Poussin introduit dans son tableau du crucifiment un mort sortant du sepulchre, sans tirer de l'apparition de ce mort le trait de poësie, que Monsieur Coypel en a tiré. Mais c'est le caractere propre de ces inventions sublimes que le génie seul fait trouver, que de paroître tellement liées avec le sujet, qu'il semble qu'elles aïent dû être les premieres idées qui se soient présentées aux Artisans, qui ont traité ce sujet. On suë vainement, dit Horace, quand on veut trouver des inventions du même genre sans avoir un génie pareil à celui du Poëte, dont on veut imiter le naturel et la simplicité.
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Il ne reste plus pour finir cette Préface, que de dire ce que Longin entend par Sublime. Car comme il escrit de cette matiere aprés Cecilius qui avoit presque emploié tout son Livre à montrer ce que c’est que Sublime, il n’a pas crû devoir rebatre une chose qui n’avoit esté dêja que trop discutée par un autre. Il faut donc sçavoir que par Sublime, Longin n’entend pas ce que les Orateurs appellent le Stile Sublime : mais cet extraordinaire & ce merveilleux qui frappe dans le Discours, & qui fait qu’un Ouvrage enleve, ravit, transporte. Le Stile Sublime veut toûjours de grands mots : mais le Sublime se peut trouver dans une seule pensée, dans une seule figure, dans un seul tour de paroles. Une chose peut estre dans le Stile Sublime, et n’estre pourtant pas Sublime ; c’est à dire n’avoir rien d’extraordinaire ni de surprenant. Par exemple, Le souverain Arbitre de la Nature d’une seule parole forma la lumiere. Voilà qui est dans le Stile Sublime : cela n’est pas neanmoins Sublime : parce qu’il n’y a rien là de fort merveilleux, & qu’un autre ne pust aisément trouver. Mais. Dieu dit : Que la lumière se fasse, et la lumière se fit. Ce tour extraordinaire d’expression qui marque si bien l’obéïssance de la Creature aux ordres de Createur est veritablement sublime, & a quelque chose de divin. Il faut donc entendre par Sublime dans Longin, l’Extraordinaire, le Surprenant & comme je l’ay traduit, le Merveilleux dans le discours.
Boileau est l'auteur de cette préface.
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Au reste vous devez sçavoir que les Images dans la Rhetorique, ont tout un autre usage que parmi les Poëtes. En effet le but qu’on s’y propose dans la Poësie, c’est l’estonnement & la surprise : au lieu que dans la prose c’est de bien peindre les choses, & de les faire voir clairement. Il y a pourtant cela de commun, qu’on tend à emouvoir en l’une & en l’autre rencontre. [...] Et veritablement je ne sçaurois pas bien dire si Euripide est aussi heureux à exprimer les autres passions ; mais pour ce qui regarde l’amour & la fureur, c’est à quoi il s’est estudié particulierement, & il y a fort bien reussi. Et mesme en d’autres rencontres il ne manque pas quelque-fois de hardiesse à peindre les choses. Car bien que son esprit de lui-mesme ne soit pas porté au Grand, il corrige son naturel, & le force d’estre tragique & relevé, principalement dans les grands Sujets.
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En effet, il n’y a peut-estre rien d’où les Orateurs et tous les Escrivains en general qui s’estudient au Sublime, tirent plus de grandeur, d’élegance, de netteté, de poids, de force, & de vigueur pour leurs Ouvrages, que du choix des paroles. C’est par elles que toutes ces beautez éclatent dans le discours, comme dans un riche tableau, & elles donnent aux choses une espece d’ame & de vie.
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Het welschicken van dagen en schaduwen by een, is een van de principaelste hooft-banden daer een goet Schilder mede verciert dient te zijn, om de wel-standigheyt die de selve onse Konst aen brenght: want de schaduwe by een ghevoeght zijnde op haer behoorlijcke plaets, gheven sulcken tooverachtighe kracht, en wonderbaerlijcke welstandt; dat veel dinghen, die nauwelijcx door gheen Penceelen met verwen zijn na te bootsen, seer eyghentlijck doen schijnen.
[proposition de traduction, Léonard Pouy:] Le bon arrangement des jours et des ombres est l’une des principales couronnes dont doit se parer un bon peintre, car il apporte à notre art sa bienséance. Car lorsque les ombres sont arrangées à leurs propres places les unes à côté des autres, elles possèdent un pouvoir tellement enchanteur et une convenance si merveilleuse, qu’elles font apparaître comme tout à fait vraies certaines choses qu’il est difficile d’imiter avec un pinceau et des couleurs.
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L'Enthousiasme est un transport de l'esprit qui fait penser les choses d'une maniere sublime, surprenante, & vraisemblable. […]
[...] Quoique le Vrai plaise toujours, parce qu'il est la base & le fondement de toutes les perfections, il ne laisse pas d'être souvent insipide quand il est tout seul ; mais quand il est joint à l’Enthousiasme, il transporte l'esprit dans une admiration mêlée d'étonnement ; il le ravit avec violence sans lui donner le tems de retourner sur lui-même.
J'ai fait entrer le Sublime dans la définition de l'Enthousiasme, parce que le Sublime est un effet & une production de l'Enthousiasme. […] Mais comme l'Enthousiasme & le Sublime tendent tous deux à élever notre esprit, on peut dire qu'ils sont d'une même nature. La difference neanmoins qui me paroît entre l'un & l'autre, c'est que l'Enthousiasme est une fureur de veine qui porte notre ame encore plus haut que le Sublime, dont il est la source, & qui a son principal effet dans la pensée & dans le Tout ensemble de l'ouvrage ; aulieu que le Sublime se fait sentir également dans le général, & dans le détail de toutes les parties. L'Enthousiasme a encore cela que l'effet en est plus prompt, & que celui du Sublime demande au moins quelques momens de réfléxion pour être vû dans toute sa force.
[…] Il me paroît, en un mot, que l'Enthousiasme nous saisit, & que nous saisissons le Sublime.