SPECTATEUR (n. m.)

AANSCHOUWER (nld.) · ANSCHAUER (deu.) · BEHOLDER (eng.) · BESCHAUER (deu.) · BESCHOUWER (nld.) · SPECTATOR (eng.) · SPEKTATOR (deu.)
TERM USED IN EARLY TRANSLATIONS
AANSCHOUWER (nld.) · BESCHOUWER (nld.) · SPECTATOR (eng.)
FERRAN, Florence, « Les décisions de l'ignorant en débat dans la critique d'art au XVIIIe siècle », dans MICHEL, Christian et MAGNUSSON, Carl (éd.), Penser l’art dans la seconde moitié du XVIIIe siècle : théorie, critique, philosophie, histoire, Actes du colloque de Lausanne, Paris et Rome, Paris, Somogy, 2013, p. 129-143.
FRIED, Michael, La place du spectateur, Paris, Gallimard, 1990.
GRIENER, Pascal, La République de l'œil. L'Expérience de l'art au siècle des Lumières, Paris, Odile Jacob, 2010.
GUICHARD, Charlotte, Les amateurs d'art à Paris au XVIIIe siècle, Seyssel, Champ Vallon, 2008.
HAKIM, Zeina, « De la sensibilité : Diderot et l'ordre du descriptif », dans MICHEL, Christian et MAGNUSSON, Carl (éd.), Penser l’art dans la seconde moitié du XVIIIe siècle : théorie, critique, philosophie, histoire, Actes du colloque de Lausanne, Paris et Rome, Paris, Somogy, 2013, p. 237-246.
HECK, Michèle-Caroline, « SPECTATEUR / PUBLIC », dans HECK, Michèle-Caroline (éd.), LexArt. Les mots de la peinture (France, Allemagne, Angleterre, Pays-Bas, 1600-1750) [édition anglaise, 2018], Montpellier, Presses Universitaires de la Méditerranée, 2018, p. 431-436.
HENRY, Christophe et RABREAU, Daniel (éd.), Le public et la politique des Arts au Siècle des Lumières, Bordeaux, William Blake & Co., 2011.
KEMP, Wolfgang, Der Betrachter ist im Bild: Kunstwissenschaft und Rezeptionsästhetik, Köln, Du Mont, 1985.
LICHTENSTEIN, Jacqueline, « L’argument de l’ignorant : de la théorie de l’art à l’esthétique », dans MICHEL, Christian et MAGNUSSON, Carl (éd.), Penser l’art dans la seconde moitié du XVIIIe siècle : théorie, critique, philosophie, histoire, Actes du colloque de Lausanne, Paris, Somogy, 2013, p. 81-90.
MICHEL, Christian et MAGNUSSON, Carl (éd.), Penser l’art dans la seconde moitié du XVIIIe siècle : théorie, critique, philosophie, histoire, Actes du colloque de Lausanne, Paris et Rome, Paris, Somogy, 2013.
MÉROT, Alain, « L'idée du public parfait selon Antoine Coypel », dans BONFAIT, Olivier, SÉNÉCHAL, Philippe et GERARD-POWELL, Véronique (éd.), Curiosité. Etudes d'histoire de l'art en l'honneur d'Antoine Schnapper, Paris, Flammarion, 1998, p. 115-124.
« Rome 1630 : entrée en scène du spectateur », dans BONFAIT, Olivier (éd.), Roma 1630. Il trionfo del pennello, cat. exp., Roma, Villa Médicis, 1994-1995, Roma, Electa, 1994, p. 53-82.

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5 sources
10 quotations

Quotation

IL est vray, répliqua Pamphile, qu'il y a eu des Peintres qui n'ont estime que le Dessein sans se mettre en peine de tout le reste, Il y en a mesme encore beaucoup, qui ne jugent de la Peinture que par là ; & la pluspart des gens sont si accoustumez à n'entendre loüer les Tableaux que par cette partie, qu'ils ne s'attachent eux mesmes qu'à cela pour juger des Ouvrages. […] & sans chercher ces rafinemens où ils n'entendent rien (car la correction du Dessein n'est connue que des plus habiles Peintres), ils estimeroient les Tableaux qui représentent naïvement les beautez qu’ils ont accoustumé de voir dans la Nature, & mepriseroient au contraire d'autant plus les autres qu’ils s'estoigneroient de cette belle naïveté. Le Spectateur n'est point obligé de sçavoir ce que sçait un Peintre, il n'a qu'à s'abandonner à son sens commun pour juger de ce qu'il voit.

Conceptual field(s)

SPECTATEUR → connaissance
SPECTATEUR → jugement
SPECTATEUR → perception et regard

Quotation

la veritable Peinture doit appeller son Spectateur par la force & par la grande verité de son imitation ; & que le Spectateur surpris doit aller à elle, comme pour entrer en conversation avec les figures qu’elle represente. En effet quand elle porte le caractere du Vrai, elle semble ne nous avoir attirez que pour nous divertir, & nous instruire.

Conceptual field(s)

PEINTURE, TABLEAU, IMAGE → définition de la peinture
CONCEPTS ESTHETIQUES → nature, imitation et vrai
SPECTATEUR → perception et regard

Quotation

Le Spectateur n’est pas obligé d’aller chercher du Vrai dans un ouvrage de Peinture : mais le Vrai dans la Peinture doit par son effet appeller les Spectateurs.

Conceptual field(s)

CONCEPTS ESTHETIQUES → nature, imitation et vrai
SPECTATEUR → perception et regard

Quotation

La seconde est la Netteté, en sorte que le Spectateur suffisamment instruit dans l'Histoire, dévelope facilement celle que le Peintre aura voulu répresenter. D'où il s'ensuit qu'il faut ôter l'équivoque par quelque marque qui soit propre au sujet, & qui détermine l'esprit en sa faveur. Je parle des sujets qui ne sont pas fort ordinaires ; car pour ceux qui sont connus du Public, & qui ont été plusieurs fois repétés, ils n'ont pas besoin de cette précaution.
Que si le sujet n'est point assez connu, ou qu'on ne puisse raisonnablement y introduire quelque objet qui le déclare, le Peintre ne doit point hésiter d'y mettre une inscription. Entre plusieurs exemples que les Anciens & les Modernes nous en fournissent, j'en choisirai seulement deux qui sont très connus, l'un est de Raphaël, & l'autre d'Annibal Carache. Celui-ci ayant peint dans la Gallerie Farnese le moment où Anchise cherche à donner des marques de son amour à la Déesse Venus, & voulant empêcher qu'on ne prît Anchise pour Adonis, s'est ingenieusement servi du mot de Virgile, *
Genus unde Latinum, qu'il a écrit au dessous du lit dans l'épaisseur de l'estrade. Et Raphaël dans son Parnasse où il a placé Sapho parmi les Poëtes, a écrit le nom de cette savante fille, de peur qu'on ne la confondît avec les Muses.
*Ce mot veut dire :
C’est d’où vient l’origine des Latins.

public

Conceptual field(s)

L’HISTOIRE ET LA FIGURE → sujet et choix
SPECTATEUR → perception et regard

Quotation

Or comme celui qui considere un Ouvrage suit le degré d'élévation qu'il y trouve, le transport d'esprit qui est dans l'Enthousiasme est commun au Peintre & au Spectateur ; avec cette difference neanmoins, que bien que le Peintre ait travaillé à plusieurs reprises pour échauffer son imagination, & pour monter son Ouvrage au degré que demande l'Enthousiasme, le Spectateur au contraire sans entrer dans aucun détail se laisse enlever tout à coup, & comme malgré lui, au degré d'Enthousiasme où le Peintre l'a attiré.

Conceptual field(s)

L’ARTISTE → qualités
SPECTATEUR → perception et regard

Quotation

Il est à remarquer que les Arts n’étant que des imitations, le Raisonnement qui est dans un Ouvrage ne se passe que dans l’esprit de celui qui en juge. Il est donc question de faire voir que le Spectateur trouve du Raisonnement dans la Peinture, comme l’Auditeur dans la Poësie.

Conceptual field(s)

PEINTURE, TABLEAU, IMAGE → comparaison entre les arts
SPECTATEUR → jugement

Quotation

Le public ne se connoît pas en peinture à Paris autant qu'à Rome. Les François en géneral n'ont pas le sentiment intérieur aussi vif que les Italiens. La difference qui est entr'eux est déja sensible dans les peuples qui habitent aux pieds des Alpes du côté des Gaules & du côté de l'Italie ; mais elle est encore bien plus grande entre les naturels de Paris & les naturels de Rome. Il s'en faut encore beaucoup que nous ne cultivions autant qu'eux la sensibilité pour la peinture, commune à tous les hommes. Géneralement parlant, on n'acquiert pas ici aussi-bien qu'à Rome le goût de comparaison. Ce goût se forme en nous-mêmes & sans que nous y pensions. A force de voir des tableaux durant la jeunesse, l'idée, l'image d'une douzaine d'excellens tableaux se grave & s'imprime profondément dans notre cerveau encore tendre. Or, ces tableaux qui nous sont toujours présens, et dont le rang est certain, dont le mérite est décidé, servent, s'il est permis de parler ainsi, de pieces de comparaison, qui donnent le moïen de juger sainement à quel point l'ouvrage nouveau qu'on expose sous nos yeux approche de la perfection où les autres peintres ont atteint, & dans quelle classe il est digne d'être placé. L'idée de ces douze tableaux qui nous est présente, produit une partie de l'effet que les tableaux mêmes produiroient, s'ils étoient à côté de celui dont nous voulons discerner le mérite & connoître le rang. La difference qui peut se trouver entre le mérite de deux tableaux exposez à côté l'un de l'autre, frappe tous ceux qui ne sont pas stupides.
Mais pour acquerir ce goût de comparaison qui fait juger du tableau présent par le tableau absent, il faut avoir été nourris dans le sein de la Peinture. Il faut, principalement durant la jeunesse, avoir eu des occasions fréquentes de voir dans une assiete d'esprit tranquille des tableaux. La liberté d'esprit n'est guéres moins necessaire pour sentir toute la beauté d'un ouvrage que pour le composer. Pour être bon spectateur il faut avoir cette tranquillité d'ame qui ne naît pas de l'épuisement, mais bien de la sérenité de l'imagination.

 

Conceptual field(s)

SPECTATEUR → jugement
SPECTATEUR → perception et regard

Quotation

Pour nous refermer dans les limites de la Peinture, j'ose avancer que rien n'a plus souvent écarté les bons Peintres du véritable but de leur art & ne leur a fait faire plus de choses hors de propos, que le désir de se faire applaudir sur la subtilité de leur imagination, c'est-à-dire sur leur esprit. Au lieu de s'attacher à l'imitation des passions, ils se sont plûs à donner l'effort à une imagination capricieuse, & à forger des chimeres dont l'allégorie mystérieuse est une énigme […] Au lieu de nous parler la langue des passions qui est commune à tous les hommes, ils ont parlé un langage qu'ils avaient inventé eux-mêmes, & dont les expressions proportionnées à la vivacité de leur imagination, ne sont point à la portée du reste des hommes. Ainsi tous les personnages d'un tableau allégorique sont souvent muets pour les spectateurs dont l'imagination n'est point du même étage que celle du Peintre. […] 

Conceptual field(s)

SPECTATEUR → perception et regard

Quotation

Il ne serait pas moins téméraire de décider la question sur ce que nos tableaux ne sont point ces effets prodigieux que les tableaux des anciens peintres ont fait quelquefois ; suivant les apparences, les récits des Ecrivains qui nous racontent ces effets sont exagérez, & nous ne savons pas même ce qu'il en faudrait rabattre pour les réduire à l'exacte vérité. Nous ignorons quelle part de la nouveauté de l'art de la Peinture peut avoir euë dans l'impression qu'on veut que certains tableaux aïent fait sur les Spectateurs. Les premiers tableaux, quoique grossiers, ont dû paroître des ouvrages divins. L'admiration pour un art naissant, fait tomber aisément dans l'exagération ceux qui parlent de ses productions ; & et la tradition en recueillant ces récits outrez, aime encore les rendre plus merveilleux qu'elle ne les a reçus. On trouve même dans les Ecrivains anciens des choses impossibles données pour vraies, & des choses ordinaires traitées de prodiges. […]
Enfin on ne sçaurait donner une idée un peu précise des tableaux à ceux qui ne les ont pas vus absolument, & qui ne connaissent pas la manière du Peintre qui les a faits, que par voies de comparaison. […]
Les Ecrivains modernes qui ont traité de la peinture antique, nous rendent plus sçavans, sans nous rendre plus capables de juger la question de la supériorité des Peintres de l'antiquité sur les Peintres modernes. Ces Ecrivains se sont contentez de ramasser les passages des Auteurs anciens qui parlent de la peinture & de les commenter en Philologues, sans les expliquer par l'examen de ce que nos Peintres font de nos jours, & même sans appliquer ces passages aux morceaux de la peinture antique qui subsistent encore. Je pense donc que pour se former une idée aussi distincte de la peinture antique qu'il soit possible de l'avoir, il faut considérer séparément ce que nous pouvons sçavoir de certain sur la composition, sur l'expression & sur le coloris des Peintres de l'antiquité.     
[…] Quant à la composition Pittoresque, il faut avoüer que dans les monumens qui nous restent, les Peintres anciens ne paroissent pas superieurs, ni même égaux à Raphaël, à Rubens, à Paul Véronèse, ni à M. Le Brun. […]
Quant à la composition Poëtique, les anciens se piquoient beaucoup d'exceller dans ses inventions, & comme ils étoient grands dessinateurs, ils avoient toutes sortes de facilité pour y réussir. Pour donner une idée du progrès  que les anciens avoient faits dans cette partie de la peinture qui comprend le grand art des expressions, nous rapporterons ce qu'en disent les Ecrivains de l'antiquité. De toute les parties de la peinture, la composition Poëtique est celle dont il est le plus facile de donner une idée avec des paroles. C'est celle qui se décrit le mieux.
[…]
Comme le temps a éteint les couleurs, & confondu les nuances dans les fragmens qui nous restent de la peinture antique faite au pinceau, nous ne sçaurions juger à quel point les Peintres de l'antiquité ont excellé dans le coloris, ni s'ils ont égalé ou surpassé les grands Maîtres de l'Ecole Lombarde dans cette aimable partie de la peinture.[…] On ne sçaurait décider notre question sur des récits. Il faut pour la juger, avoir des pièces de comparaison. Elles nous manquent. 
On ne sçauroit former un préjugé contre le coloris des anciens, de ce qu'ils ignoroient l'invention de détremper les couleurs avec de l'huile […]
Quant au clair-obscur & à la distribution enchanteresse des lumières & des ombres, ce que Pline &  les autres Ecrivains de l'antiquité en disent, est si positif, leurs récits sont si bien circonstanciez & si vrai-semblables, qu'on ne sçauroit disconvenir que les anciens n'égalassent du moins dans cette partie de l'Art, les plus grands peintres modernes. Les passages de ces Auteurs que nous ne comprenions pas bien, quand les Peintres modernes ignoroient encore quel prestige on peut faire avec le secours de cette magie, ne sont plus si embroüillez & si difficiles, depuis que Rubens, ses Eleves, Polidore de Caravage, & d'autres Peintres les ont expliquez bien mieux, les pinceaux à la main, que les commentateurs les plus érudits ne le pouvoient faire dans des livres. 
[…] je dis, que les Peintres qui ont travaillé depuis la renaissance des Arts, que Raphaël & ses contemporains n'ont point eu aucun avantage sur nos Artisans. Ces derniers sçavent toutes les couleurs dont les premiers se sont servis. 

Conceptual field(s)

SPECTATEUR → perception et regard
SPECTATEUR → jugement
SPECTATEUR → connaissance

Quotation

Le peintre en effet est l’homme de tous les talens, c’est un poëte, un historien, un fidèle imitateur, ou plutôt un rival de la nature ; ne sçait-on pas que c’est elle seule qui forme les peintres ainsi que les poëtes ? Ils montent, si l’on en croit un (a) moderne, également sur le Parnasse ; leurs arts dépendent du génie, ils ont pour objet commun d’émouvoir les passions & de plaire. Tous deux sont dans l’obligation de représenter des images plus riches, plus riantes, plus belles que celles que l’on voit ordinairement, c’est par ce moyen que l’on irrite plus vivement les passions, & que par le plaisir qu’elles procurent, le spectateur participe de l’enthousiasme qui les a fait naître.

Conceptual field(s)

SPECTATEUR → perception et regard
CONCEPTS ESTHETIQUES → merveilleux et sublime