ZEUXIS ( v. 464 av. J.-C.-v. 398 av. J.-C. )

ISNI:0000000440388249 Getty:500021844
Peintre de l'Antiquité grecque

Quotation

38 Ons maeghden en Vrouwen met zedich wesen {Vrouwen standen en actien soet en zedich.}
Laet dan vercieren, om welstandts verstercken,
Al heeft Zeuxis Homerum (soo wy lesen)
Elders al te vele ghelooft in desen,
Dat hy in Wijfs beelden heeft laten mercken
Oock ernstighe, herde, en grove wercken,
Al welcke dinghen sullen den volwassen
Ionghelinghen, oft Amasones passen.

 
39 Sonderlinghe stercke ghestelde Mannen
Sullen doen gheweldigh’ acten en standen {Standen en actien nae de macht der Beelden.}:
maer Ionckheyt, die swaermoedicheyt wil bannen,
Moet wesen wacker met leden ontspannen,
Gants vry en los, nu de stellinghe van den
Oude Mannen, die sullen metten handen
Yet vattend’ hun swacke lijf onderhouden,
Met vermoeyde beenen gheneyght om vouden.

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LE PRESIDENT. Si la Sculpture moderne l’emporte si fort sur la Sculpture antique par cet endroit que vous marquez [ndr : un bas-relief de François Anguier], il faut que la Peinture d’aujourd’huy soit bien superieure à celle des Anciens, puisqu’enfin c’est d’elle que la Sculpture a appris tous ces secrets de degradation & de perspective.
L’ABBE. J’en demeure d’accord, & la consequence en est tres juste ; mais puisqu’il s’agit presentement de la Peinture, il faut commencer par la distinguer suivant les divers temps où elle a fleuri, & en faire trois classes : Celle du temps d’Appelle, de Zeuxis, de Timante, & de tous ces grands Peintres dont les Livres rapportent tant des merveilles ; Celle du temps de Raphael, du Titien, de Paul Veronese, & de plusieurs autres excellens Maistres d’Italie, & Celle du siecle où nous vivons.
Si nous voulons suivre l’opinion commune qui regle presque toûjours le merite selon l'ancienneté, nous mettrons le siecle d'Apelle beaucoup au dessus de celuy de Raphael, & celuy de Raphael beaucoup au dessus du nostre ; mais je ne suis nullement d’accord de cet arrangement, particulierement à l'égard de la preference qu’on donne au siecle d’Apelle sur celuy de Raphael.
LE PRESIDENT. Comment pouvez-vous ne pas convenir d'un jugement si universel & si raisonnable, sur tout après estre demeuré d'accord de l'excellence de la sculpture de Phidias & de Praxitele ; car si la sculpture de ces temps-là l'emporte sur celle de tous les siecles qui ont suivi, à plus forte raison la Peinture, si nous considerons qu'elle est susceptible de mille beautez & de mille agrémens dont la Sculpture n’est point capable.
L'ABBE. C’est par cette raison là mesme que la consequence que vous tirez n’est pas recevable.
Si la Peinture estoit un Art aussi simple & aussi borné que l’est la Sculpture en fait d'ouvrages de ronde bosse, car c'est en cela seul qu'elle a excellé parmi les Anciens, je me rendrois à vostre advis, mais la Peinture est un Art si vaste de d'une si grande étenduë, qu'il n'a pas moins fallu que la durée de tous les siecles pour en découvrir tous les secrets & tous les mysteres. Pour vous convaincre du peu de beauté des peintures antiques, & de combien elles doivent estre mises au dessous de celles de Raphael, du Titien & de Paul Veronese, & de celles qui se font aujourd’hui, je ne veux me servir que des loüanges mesmes qu'on leur a données.

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Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent. Ainsi la grande difficulté n'est pas de prouver qu'on l'emporte aujourd'huy sur Zeuxis, sur les Timantes & sur les Appelles, mais de faire voir qu’on a encore quelque avantage sur les Raphaels, sur les Titiens, sur les Pauls Veroneses, & sur les autres grands Peintres du dernier siecle. Cependant j'ose avancer qu'à regarder l'Art en luy-mesme, entant qu’il est un amas & une collection de preceptes, on trouvera qu'il est plus accompli & plus parfait presentement qu'il ne l'estoit du temps de ces grands Maistres.

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Traveller,
            I grant you, Inclination goes a great way in disposing the Hand, but a strong Imagination only, will not carry a Painter through ; For when he compares his Work to
Nature, he will soon find, that great Judgment is requisite, as well as a Lively Fancy ; and particularly when he comes to place many Objects together in one Piece or Story, which are all to have a just relation to one another. There he will find that not only the habit of the Hand but the strength of the Mind is requisite ; therefore all the Eminent Painters that ever were, spent more time in Designing after the Life, and after the Statues of the Antients, then ever did in learning how to colour their Works ; that so they might be Masters of Design, and be able to place readily every Object in its true situation.
                        Friend,
            Now you talk of Nature and Statues, I have heard Painters blam’d for working after both.
                        Traveller,
            It is very true, and justly ; but less for working after Nature than otherwise. Caravaggio a famous Painter is blam’d for having meerly imitated Nature as he found her, without any correction of Forms. And Perugin, another Painter is blam’d for having wrought so much after Statues, that his Works never had that lively easiness which accompanies Nature ; and of this fault Raphael his Scholar was a long time guilty, till he Reform’d it by imitating Nature.

                        Friend,
            How is it possible to erre in imitating Nature ?
                        Traveller,
           
Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

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Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind.

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[…] L'ABBE. Tous ces effets merveilleux de la peinture antique, n’empeschent pas que je ne persiste dans ma proposition ; car ce n'est point la belle ordonnance d'un tableau, la juste dispensation des lumières, la judicieuse degradation des objets, ny tout ce qui compose cette troisiéme partie de la peinture dont j'ay parlé, qui touche, qui charme & qui enleve. Ce n'est que la juste delineation des objets revétus de leurs vrayes couleurs, & sur tout l'expression vive & naturelle des mouvemens de l'ame, qui font de fortes impressions sur ceux qui les regardent. Car il faut remarquer que comme la peinture a trois parties qui la composent, il y a aussi trois parties dans l'homme par où il en est touché, les sens, le cœur & la raison. La juste delineation des objets, accompagnée de leur couleur, frappe agreablement les yeux ; la naïve expression des mouvemens de l’ame va droit au cœur, & imprimant sur luy les mesmes passions qu'il voit representées, luy donne un plaisir tres sensible. Et enfin l'entente qui paroist dans la juste distribution des ombres & des lumieres dans la degradation des figures selon leur plan & dans le bel ordre d'une composition judicieusement ordonnée, plaist à la raison, & luy fait ressentir une joye moins vive à la verité, mais plus spirituelle & plus digne d'un homme. Il en est de mesme des Ouvrages de tous les autres Arts […]. 
Je dis donc qu'il a suffi aux Appelles & aux Zeuxis pour se faire admirer de toute la Terre d'avoir charmé les yeux & touché le cœur, sans qu'il leur ait esté necessaire de posseder cette troisiéme partie de la peinture [ndr : la composition], qui ne va qu’à satisfaire la raison ; car bien loin que cette partie serve à charmer le commun du monde, elle y nuit fort souvent, & n'aboutit qu'à luy déplaire.
En effet, combien y a-il de personnes qui voudroient qu'on fist les personnages éloignez aussi forts & aussi marquez que ceux qui sont proches ; afin de les mieux voir, qui de bon cœur quitteroient le Peintre de toute la peine qu'il se donne à composer son tableau & à dégrader les figures sélon leur plan ; mais sur tout qui seroient bien aises qu'on ne fist point d'ombres dans les visages & particulièrement dans les portraits des personnes qu'ils aiment.

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Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent. Ainsi la grande difficulté n'est pas de prouver qu'on l'emporte aujourd'huy sur Zeuxis, sur les Timantes & sur les Appelles, mais de faire voir qu’on a encore quelque avantage sur les Raphaels, sur les Titiens, sur les Pauls Veroneses, & sur les autres grands Peintres du dernier siecle. Cependant j'ose avancer qu'à regarder l'Art en luy-mesme, entant qu’il est un amas & une collection de preceptes, on trouvera qu'il est plus accompli & plus parfait presentement qu'il ne l'estoit du temps de ces grands Maistres.

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[…] si les Arts sont imitateurs de la Nature ; ce doit être une imitation sage & éclairée, qui ne la copie pas servilement ; mais qui choisissant les objets & les traits, les présente avec toute la perfection dont ils sont susceptibles. En un mot, une imitation, où on voye la Nature, non telle qu’elle est en elle-même, mais telle qu’elle peut être, & qu’on peut la concevoir par l’esprit.
Que fit Zeuxis quand il voulut peindre une beauté parfaite ? Fit-il le portrait de quelque beauté particulière, dont sa peinture fût l’histoire ? Non, il rassembla les traits séparés de plusieurs beautés existantes. Il se forma dans l’esprit une idée factice qui résulta de tous ces traits réunis : & cette idée fut le prototype, ou le modèle de son tableau, qui fut vraisemblablement & poëtique dans sa totalité, & ne fut vrai & historique que dans ses parties prises séparément. Voilà l’exemple donné à tous les Artistes : voilà la route qu’ils doivent suivre, & c’est la pratique de tous les grands Maîtres sans exception.

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Ainsi la grande difficulté n'est pas de prouver qu'on l'emporte aujourd'huy sur Zeuxis, sur les Timantes & sur les Appelles, mais de faire voir qu’on a encore quelque avantage sur les Raphaels, sur les Titiens, sur les Pauls Veroneses, & sur les autres grands Peintres du dernier siecle. Cependant j'ose avancer qu'à regarder l'Art en luy-mesme, entant qu’il est un amas & une collection de preceptes, on trouvera qu'il est plus accompli & plus parfait presentement qu'il ne l'estoit du temps de ces grands Maistres.

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De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.


[…] Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir exécuté ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles se voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

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Zeuxis hat der Helenä Bildnis mit so überholder Schönheit gemahlet / daß die lebendige Helena / von der verstorbnen und gemahlten gleichsam überwunden worden; also / daß fast gantz Griechenland zugeloffen / daß Kunststück mit Verwunderung anzusehen /und unter andernauch Nicostratus / welcher der Zeit nicht für dengeringsten Meister dieser Kunst gehalten wurde: dieser erstaunte ob dem ersten Anblick solches Bildes / daß er gleich einem Stein ohne Bewegnis darbey stehend verblieben / und von der Betrachtung solches Gemählsenzucket / von einemandern unbedachtsamen Gesellen geschüttelt und gleichsam von dem Schlafe erwecket werden wolte / mit befragen: was er an dem Gemähl so groß verwunderte? darauf Nicostratus geantwortet: Dieses ist kein Bild für die Nachteulen / und wann da deine ungeschickte Augen / mit den meinigen vertauschen köntest / so würdest du diese Frage eines Blinden / an mich nicht gelangen lassen. Also wäre zu wünschen / daß die Künstler allein von der Künste und nicht di Unverständigen wie die Blinden von der Farbe redeten.

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Are. [...] Le peintre doit donc s’appliquer non seulement à imiter, mais aussi à surpasser la nature ; je dis surpasser en partie ; car au reste ce seroit un prodige, non pas s’il arrivoit à l’imiter, mais meme s’il en approchoit : ce qui consiste à faire paroitre par le moien de l’art dans un seul corps toutes les perfections de la beauté, qu’a peine la nature a coutume de faire voir en mille. Parcequ’il ne se trouve point de corps humain de si parfaite beauté, qu’il ne lui en manque quelque partie. Aussi avons nous l’exemple de Zeuxis, qui aiant à peindre Helene dans le temple des Crotoniates, choisit cinq jeunes filles qu’il vit toutes nûes, & prenant les belles parties de l’une, qui manquoient à l’autre, reduisit son Helene au point de perfection que la renomée en subsiste encore aujourdhui. Ce qui peut aussi servir d’avis pour ceux qui ont la temerité de faire tous leurs ouvrages de pratique. Mais si les peintres veulent trouver sans peine le parfait modelle d’une belle femme, ils n’ont qu’a lire les stances dans les quelles l’Arioste decrit admirablement les beautés de la Fée Alcine. Il [sic] verront en même tems, combien les bons poetes sont aussi bons peintres. [...]
Elle etoit aussi bien faite que les plus industrieux peintres eussent sû la representer.
Voila pour la proportion que l’ingenieux Arioste etablit 1, la plus exacte que les plus excellents peintres puissent former : il se sert de l’epithete industrieux, pour marquer le soin, qui convient un excellent ouvrier.
[...]
Avec une blonde chevelure longue & nouée :
Il n’y a point d’or qui eclatte & brille davantage.
De la meme façon que l’Arioste a dit tresse blonde, il pouvoit dire tresse d’or : mais peut etre crut-il, que l’expression auroit trop senti son poete : d’ou on peut conclure que le peintre doit imiter l’or, & non pas l’emploier dans sa peinture comme font ceux qui peignent en mignature, ensorte qu’on puisse dire ces cheveux ne sont pas d’or, & cependant ils semblent briller comme l’or. Je suis bien aise d’avoir touché ce point, quand meme la chose ne meriteroit pas qu’on y fit reflexion. […] On doit conclure de là, que le peintre est obligé d’imiter les proprietés de chaque chose avec les distinctions qui leur conviennent.

 
1 On a encore ici prophetisé, plus pour ce tems ici, que pour aucun autre qui ce soit passè.

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Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

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Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.

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Korts naer desen geestighe Apollodorus, is die uytmuntende Zeuxus ten voorschijn ghekomen, die onse Konst een grooten luyster heeft weten te geven, soo dat hy de Vogelen door sijn geschildert fruyt heeft weten uyt de lucht te lock, en door sijn natuerelijck nabootsen in de selve een begeerte verwect om te prouven, en daer toe vliegende sijnse bedrogen gheweest.

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[...] oversulcx, als desen grooten Meester [Zeuxis] voor-genomen hadde den inwoonderen van Crotona een uytnemende schoon vrouwelick Beeldt nae te laeten, soo en vond hy het niet gheraedtsaem de gheheele volmaecktheydt van d'aller bevallighste schoonigheydt in een lichaem te soecken, maer hy heeft vijf van d'aller schoonste Maeghden uytghepickt, ten eynde dat hy uyt d'ernstighe opmerckinghe der selvigher de rechte schoonheydt, die nae 't segghen van Lucianus {In Hermetino} noodtsaeckelijck maer een wesen kan, moght ghevinden

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Ghelijck dan de oude Konstenaers een seer treffelicke maniere van wercken ghehadt hebben, soo hadden sy mede een sonderlinghe gaeve om sich de waere verbeeldinghe van allerley beweghinghen onses ghemoeds op ’t aller levendighste voor te stellen; ja wy moghen ’t oock vrijelick daer voor houden, dat sy haere wercken nimmermeer met sulcke bequaeme uytdruckinghen van de verscheydene herts-tochten souden vervult hebben, ’t en waer saecke dat sy met pijne waerd gheacht hadden alle die naturelicke beroerten wijslick nae te speuren door de welcke ons ghemoed verruckt ende den gewoonlicken schijn onses wesens verscheydenlick verandert wordt. Zeuxis heeft de schilderije van Penelope gemaeckt, so dat hy de sedigheyd haeres eerbaeren wesens daer in konstighlick schijnt uytghedruckt te hebben. Plin. XXXV.9. Timomachus heeft den raesenden Aiax afghemaelt, en hoe hy sich in dese uytsinnighe dolligheyd al aenstelde Philostr. Lib. II. de vita Apollonii. Cap. 10. Silanion heeft den wrevelmoedighen Konstenaer Apollodorus ghemaeckt; ende overmids desen Apollodorus eenen rechten korselkop was, soo ist dat Silanion niet alleen den Konstenaer selver, maer sijn koppighe krijghelheydt met eenen oock in ’t koper heeft ghegoten Plin. XXXIV.8. Protogenes heeft Philiscus geschildert, als wesende met eenighe diepe bedenckinghen opghenomen Plin. XXXV.10. Praxiteles heeft Phryne ghemackt, als of men haer weelderigh herte in een volle Zee van vreughd en wellust sach swemmen, Plin. XXXIV.8. Parrhasius maeckten eenen jonghelingh die in sijne wapenrustinge om strijd loopt, Plin. XXXV.10. Den Anapanomenos van Aristides sterft uyt liefde van sijnen broeder, Plin. ibidem. Philostratus {Iconoum Lib. I. in Ariadne} beschrijft ons de schilderije van eenen Bacchus die maer alleen bekent wordt by de minne-stuypen die hem quellen. Dese exempelen gheven ons ghenoegh te verstaen, hoe grooten ervaerenheyd d’oude Meesters in’t uytdrucken van allerley beroerten ende beweghinghen ghehad hebben;

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Zeuxis, Polygnotas, ende Euphranor hebben met eenen sonderlingen arbeyd ghesocht haere stucken behoorlicker wijse te beschaduwen ende met eenen levendighen gheest in te aessemen; soo plaghten sy mede daer nae te staen datse in haere verdiepsels ende verhooghsels den oppersten lof boven d’andere Meesters moghten verwerven. Philostr. Lib. II. Cap. 9. De vita Apollonij.

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II. Was das Gemähl seye, p. 128
Wegen der sichtbarlichen Abbildungen wird das Gemähl ein lieblicher Betrug der Augen genennet/ und ist der beste Mahler der beste und redlichste Betrüger besagten// fürnemsten Sinnes/ deß Gesichts. Sie ist ein zuläßiger und löblicher Betrug/ abgesehen von der Gleichheit der Natur; massen alle Künste ihre Herzwurzel gleichsam in deren natürlichen Wesen habe[n]/ von welchen sie herstammen/ und nachgehends/ als abgesonderte Zweige verpflanzet und neuen Safft und Kräfften erlanget haben.
Also hat Zeuxis die Vögel betrogen/ in dem er Weintrauben mit so natürlichen Farben gemahlt/ daß sie selbe herzugelocket/darvon zu picken/wie der Poet sagt : […

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[...] soo en kan 't niet schaeden dat men tot de bevalligheydt van Apelles toe voeght de gheluckighe stoudt-moedigheydt van Zeuxis, d'onvermoeyde naersticheydt van Protogenes, de kloecke diepsinnigheydt van Timanthes, als oock de hooghstaetelicke grootsheydt van Nicophanes.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Ghelijck dan de oude Konstenaers een seer treffelicke maniere van wercken ghehadt hebben, soo hadden sy mede een sonderlinghe gaeve om sich de waere verbeeldinghe van allerley beweghinghen onses ghemoeds op ’t aller levendighste voor te stellen; ja wy moghen ’t oock vrijelick daer voor houden, dat sy haere wercken nimmermeer met sulcke bequaeme uytdruckinghen van de verscheydene herts-tochten souden vervult hebben, ’t en waer saecke dat sy met pijne waerd gheacht hadden alle die naturelicke beroerten wijslick nae te speuren door de welcke ons ghemoed verruckt ende den gewoonlicken schijn onses wesens verscheydenlick verandert wordt. Zeuxis heeft de schilderije van Penelope gemaeckt, so dat hy de sedigheyd haeres eerbaeren wesens daer in konstighlick schijnt uytghedruckt te hebben. Plin. XXXV.9. Timomachus heeft den raesenden Aiax afghemaelt, en hoe hy sich in dese uytsinnighe dolligheyd al aenstelde Philostr. Lib. II. de vita Apollonii. Cap. 10. Silanion heeft den wrevelmoedighen Konstenaer Apollodorus ghemaeckt; ende overmids desen Apollodorus eenen rechten korselkop was, soo ist dat Silanion niet alleen den Konstenaer selver, maer sijn koppighe krijghelheydt met eenen oock in ’t koper heeft ghegoten Plin. XXXIV.8. Protogenes heeft Philiscus geschildert, als wesende met eenighe diepe bedenckinghen opghenomen Plin. XXXV.10. Praxiteles heeft Phryne ghemackt, als of men haer weelderigh herte in een volle Zee van vreughd en wellust sach swemmen, Plin. XXXIV.8. Parrhasius maeckten eenen jonghelingh die in sijne wapenrustinge om strijd loopt, Plin. XXXV.10. Den Anapanomenos van Aristides sterft uyt liefde van sijnen broeder, Plin. ibidem. Philostratus {Iconoum Lib. I. in Ariadne} beschrijft ons de schilderije van eenen Bacchus die maer alleen bekent wordt by de minne-stuypen die hem quellen. Dese exempelen gheven ons ghenoegh te verstaen, hoe grooten ervaerenheyd d’oude Meesters in’t uytdrucken van allerley beroerten ende beweghinghen ghehad hebben;

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Zeuxis hat der Helenä Bildnis mit so überholder Schönheit gemahlet / daß die lebendige Helena / von der verstorbnen und gemahlten gleichsam überwunden worden; also / daß fast gantz Griechenland zugeloffen / daß Kunststück mit Verwunderung anzusehen /und unter andernauch Nicostratus / welcher der Zeit nicht für dengeringsten Meister dieser Kunst gehalten wurde: dieser erstaunte ob dem ersten Anblick solches Bildes / daß er gleich einem Stein ohne Bewegnis darbey stehend verblieben / und von der Betrachtung solches Gemählsenzucket / von einemandern unbedachtsamen Gesellen geschüttelt und gleichsam von dem Schlafe erwecket werden wolte / mit befragen: was er an dem Gemähl so groß verwunderte? darauf Nicostratus geantwortet: Dieses ist kein Bild für die Nachteulen / und wann da deine ungeschickte Augen / mit den meinigen vertauschen köntest / so würdest du diese Frage eines Blinden / an mich nicht gelangen lassen. Also wäre zu wünschen / daß die Künstler allein von der Künste und nicht di Unverständigen wie die Blinden von der Farbe redeten.

Quotation

La partie principale du coloris est le contraste que fait la lumiere avec l’ombre, au quel on trouve un milieu, qui unit un contraire à l’autre, & fait paroitre rondes les figures, & selon le besoin plus ou moins eloignées ; car le peintre doit prendre garde, en les plaçant, qu’elles ne fassent de la confusion. En quoi il est aussi tres necessaire d’avoir une grande connoissance de la perspective, pour la diminution des objets, qui s’eloignent, ou qu’on feint eloignées [sic] : mais il faut toujours avoir l’œil attentif sur tout au coloris, & au tendre des chairs, parceque plusieurs en font de maniere qu’elles paroissent de porfire, tant en couleur, qu’en dureté : & les ombres si rudes, que le plus souvent elles degenerent en pur noir : d’autres les font trop blanches, & les autres trop rouges. Pour moi je desirerois une couleur plûtot brune, qu’excessivement blanche ; & je bannirois de mes tableaux pour l’ordinaire, ces joües vermeilles, avec ces levres de coral, parceque de tels visages semblent des masques. Nous trouvons qu’Apelles emploioit frequemment le brun

Quotation

Are. je passe au coloris, nous pouvons juger combien il est important, par les exemples que nous en ont donné suffisament les peintres qui tromperent les oyseaux et les chevaux.
[…]
Are. Cela montre la grande attention qu’avoient les anciens à bien colorer, afinque leurs ouvrages imitassent le vrai. Il est certain que le coloris est de si grande importance, & a tant de force, que quand le peintre imite bien les teintes, le tendre des chairs, & la propriété de chaque chose, telle qu’elle soit, il fait paroitre ses peintures animeés, & telles qu’il ne leur manque autre que la respiration.
La partie principale du coloris est le contraste que fait la lumiere avec l’ombre, au quel on trouve un milieu, qui unit un contraire à l’autre, & fait paroitre rondes les figures, & selon le besoin plus ou moins eloignées ; car le peintre doit prendre garde, en les plaçant, qu’elles ne fassent de la confusion. En quoi il est aussi tres necessaire d’avoir une grande connoissance de la perspective, pour la diminution des objets, qui s’eloignent, ou qu’on feint eloignées [sic] : mais il faut toujours avoir l’œil attentif sur tout au coloris, & au tendre des chairs, parceque plusieurs en font de maniere qu’elles paroissent de porfire, tant en couleur, qu’en dureté : & les ombres si rudes, que le plus souvent elles degenerent en pur noir : d’autres les font trop blanches, & les autres trop rouges. Pour moi je desirerois une couleur plûtot brune, qu’excessivement blanche ; & je bannirois de mes tableaux pour l’ordinaire, ces joües vermeilles, avec ces levres de coral, parceque de tels visages semblent des masques. Nous trouvons qu’Apelles emploioit frequemment le brun  ; d’ou Properce pour corriger sa maitresse Cinthie, qui se fardoit, dit qu’il souhaitoit qu’elle montrat une simplicité, & pureté de couleur telle qu’on en voit dans les tableaux d’Apelles. Il est vrai qu’on doit varier ces teintes, & avoir aussi egard aux sexes, aux ages, & aux conditions. […]
Or il faut que le melange des couleurs soit temperé, & melangé de maniere, qu’il represente le naturel, & qu’il ne reste rien qui blesse la vûe, telles que sont les lignes des contours qu’on doit eviter, parceque la nature ne les marque point, non plus que le noir dans les ombres dont je viens de parler. Ces lumieres, & ces ombres placées avec jugement, & avec art arrondissent les figures, & leur donnent le relief qu’on recherche ; car sans ce relief, les figures, comme vous avez fort bien dit, paroissent peintes, parcequ’elles ont la superficie platte. Celui qui a donc cette qualité, en possede une des plus importantes. [...]

Quotation

Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

Quotation

Are. je passe au coloris, nous pouvons juger combien il est important, par les exemples que nous en ont donné suffisament les peintres qui tromperent les oyseaux et les chevaux.
[…]
Are. Cela montre la grande attention qu’avoient les anciens à bien colorer, afinque leurs ouvrages imitassent le vrai. Il est certain que le coloris est de si grande importance, & a tant de force, que quand le peintre imite bien les teintes, le tendre des chairs, & la propriété de chaque chose, telle qu’elle soit, il fait paroitre ses peintures animeés, & telles qu’il ne leur manque autre que la respiration.
La partie principale du coloris est le contraste que fait la lumiere avec l’ombre, au quel on trouve un milieu, qui unit un contraire à l’autre, & fait paroitre rondes les figures, & selon le besoin plus ou moins eloignées ; car le peintre doit prendre garde, en les plaçant, qu’elles ne fassent de la confusion. En quoi il est aussi tres necessaire d’avoir une grande connoissance de la perspective, pour la diminution des objets, qui s’eloignent, ou qu’on feint eloignées [sic] : mais il faut toujours avoir l’œil attentif sur tout au coloris, & au tendre des chairs, parceque plusieurs en font de maniere qu’elles paroissent de porfire, tant en couleur, qu’en dureté : & les ombres si rudes, que le plus souvent elles degenerent en pur noir : d’autres les font trop blanches, & les autres trop rouges. Pour moi je desirerois une couleur plûtot brune, qu’excessivement blanche ; & je bannirois de mes tableaux pour l’ordinaire, ces joües vermeilles, avec ces levres de coral, parceque de tels visages semblent des masques. Nous trouvons qu’Apelles emploioit frequemment le brun  ; d’ou Properce pour corriger sa maitresse Cinthie, qui se fardoit, dit qu’il souhaitoit qu’elle montrat une simplicité, & pureté de couleur telle qu’on en voit dans les tableaux d’Apelles. Il est vrai qu’on doit varier ces teintes, & avoir aussi egard aux sexes, aux ages, & aux conditions. […]
Or il faut que le melange des couleurs soit temperé, & melangé de maniere, qu’il represente le naturel, & qu’il ne reste rien qui blesse la vûe, telles que sont les lignes des contours qu’on doit eviter, parceque la nature ne les marque point, non plus que le noir dans les ombres dont je viens de parler. Ces lumieres, & ces ombres placées avec jugement, & avec art arrondissent les figures, & leur donnent le relief qu’on recherche ; car sans ce relief, les figures, comme vous avez fort bien dit, paroissent peintes, parcequ’elles ont la superficie platte. Celui qui a donc cette qualité, en possede une des plus importantes. [...]

Quotation

[…] L'ABBE. Tous ces effets merveilleux de la peinture antique, n’empeschent pas que je ne persiste dans ma proposition ; car ce n'est point la belle ordonnance d'un tableau, la juste dispensation des lumières, la judicieuse degradation des objets, ny tout ce qui compose cette troisiéme partie de la peinture dont j'ay parlé, qui touche, qui charme & qui enleve. Ce n'est que la juste delineation des objets revétus de leurs vrayes couleurs, & sur tout l'expression vive & naturelle des mouvemens de l'ame, qui font de fortes impressions sur ceux qui les regardent. Car il faut remarquer que comme la peinture a trois parties qui la composent, il y a aussi trois parties dans l'homme par où il en est touché, les sens, le cœur & la raison. La juste delineation des objets, accompagnée de leur couleur, frappe agreablement les yeux ; la naïve expression des mouvemens de l’ame va droit au cœur, & imprimant sur luy les mesmes passions qu'il voit representées, luy donne un plaisir tres sensible. Et enfin l'entente qui paroist dans la juste distribution des ombres & des lumieres dans la degradation des figures selon leur plan & dans le bel ordre d'une composition judicieusement ordonnée, plaist à la raison, & luy fait ressentir une joye moins vive à la verité, mais plus spirituelle & plus digne d'un homme. Il en est de mesme des Ouvrages de tous les autres Arts […]. 
Je dis donc qu'il a suffi aux Appelles & aux Zeuxis pour se faire admirer de toute la Terre d'avoir charmé les yeux & touché le cœur, sans qu'il leur ait esté necessaire de posseder cette troisiéme partie de la peinture [ndr : la composition], qui ne va qu’à satisfaire la raison ; car bien loin que cette partie serve à charmer le commun du monde, elle y nuit fort souvent, & n'aboutit qu'à luy déplaire.

Quotation

{Couleur ou Cromatique. Troisième Partie de la Peinture.}
Aussi ne voit-on personne qui rétablisse *la † CROMATIQUE, & qui la remette en vigueur au point que la porta Zeuxis, lors que par cette Partie, qui est pleine de charmes & de magie, & qui sçait si admirablement tromper la veuë, il se rendit égal au fameux Apelle, le Prince des Peintres, & qu’il merita pour toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde. Et comme cette partie (que l’on peut dire l’ame & le dernier achevement de la Peinture) est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire *sa Sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard & cette tromperie l’ayent jamais deshonorée, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite : Il sera donc tres-avantageux de la connoistre.

Quotation

Aussi ne voit on personne qui rétablisse la beauté des couleurs, que les Romains nomment Cromatique, & qui la remettent en vigueur au point que l’a porta Zeuxis, lorsque par cette partie, qui est pleine de charmes & de magie & qui sçait si admirablement tromper la veuë qui se rendit égal au fameux Apelles, le Prince des Peintres, & qu’il merita toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde.
Et comme cette partie [ndr la chromatique], que l’on peut dire la fin & le dernier achevement de la Peinture, est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire sa sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard, & cette tromperie l’ayent jamais deshonoré, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite ; il sera donc tres avantageux de la connoistre.

Quotation

Are. je passe au coloris, nous pouvons juger combien il est important, par les exemples que nous en ont donné suffisament les peintres qui tromperent les oyseaux et les chevaux.
[…]
Are. Cela montre la grande attention qu’avoient les anciens à bien colorer, afinque leurs ouvrages imitassent le vrai. Il est certain que le coloris est de si grande importance, & a tant de force, que quand le peintre imite bien les teintes, le tendre des chairs, & la propriété de chaque chose, telle qu’elle soit, il fait paroitre ses peintures animeés, & telles qu’il ne leur manque autre que la respiration.
La partie principale du coloris est le contraste que fait la lumiere avec l’ombre, au quel on trouve un milieu, qui unit un contraire à l’autre, & fait paroitre rondes les figures, & selon le besoin plus ou moins eloignées ; car le peintre doit prendre garde, en les plaçant, qu’elles ne fassent de la confusion. En quoi il est aussi tres necessaire d’avoir une grande connoissance de la perspective, pour la diminution des objets, qui s’eloignent, ou qu’on feint eloignées [sic] : mais il faut toujours avoir l’œil attentif sur tout au coloris, & au tendre des chairs, parceque plusieurs en font de maniere qu’elles paroissent de porfire, tant en couleur, qu’en dureté : & les ombres si rudes, que le plus souvent elles degenerent en pur noir : d’autres les font trop blanches, & les autres trop rouges. Pour moi je desirerois une couleur plûtot brune, qu’excessivement blanche ; & je bannirois de mes tableaux pour l’ordinaire, ces joües vermeilles, avec ces levres de coral, parceque de tels visages semblent des masques. Nous trouvons qu’Apelles emploioit frequemment le brun  ; d’ou Properce pour corriger sa maitresse Cinthie, qui se fardoit, dit qu’il souhaitoit qu’elle montrat une simplicité, & pureté de couleur telle qu’on en voit dans les tableaux d’Apelles. Il est vrai qu’on doit varier ces teintes, & avoir aussi egard aux sexes, aux ages, & aux conditions. […]
Or il faut que le melange des couleurs soit temperé, & melangé de maniere, qu’il represente le naturel, & qu’il ne reste rien qui blesse la vûe, telles que sont les lignes des contours qu’on doit eviter, parceque la nature ne les marque point, non plus que le noir dans les ombres dont je viens de parler. Ces lumieres, & ces ombres placées avec jugement, & avec art arrondissent les figures, & leur donnent le relief qu’on recherche ; car sans ce relief, les figures, comme vous avez fort bien dit, paroissent peintes, parcequ’elles ont la superficie platte. Celui qui a donc cette qualité, en possede une des plus importantes. [...]

Quotation

Are. je passe au coloris, nous pouvons juger combien il est important, par les exemples que nous en ont donné suffisament les peintres qui tromperent les oyseaux et les chevaux.
[…]
Are. Cela montre la grande attention qu’avoient les anciens à bien colorer, afinque leurs ouvrages imitassent le vrai. Il est certain que le coloris est de si grande importance, & a tant de force, que quand le peintre imite bien les teintes, le tendre des chairs, & la propriété de chaque chose, telle qu’elle soit, il fait paroitre ses peintures animeés, & telles qu’il ne leur manque autre que la respiration.
La partie principale du coloris est le contraste que fait la lumiere avec l’ombre, au quel on trouve un milieu, qui unit un contraire à l’autre, & fait paroitre rondes les figures, & selon le besoin plus ou moins eloignées ; car le peintre doit prendre garde, en les plaçant, qu’elles ne fassent de la confusion. En quoi il est aussi tres necessaire d’avoir une grande connoissance de la perspective, pour la diminution des objets, qui s’eloignent, ou qu’on feint eloignées [sic] : mais il faut toujours avoir l’œil attentif sur tout au coloris, & au tendre des chairs, parceque plusieurs en font de maniere qu’elles paroissent de porfire, tant en couleur, qu’en dureté : & les ombres si rudes, que le plus souvent elles degenerent en pur noir : d’autres les font trop blanches, & les autres trop rouges. Pour moi je desirerois une couleur plûtot brune, qu’excessivement blanche ; & je bannirois de mes tableaux pour l’ordinaire, ces joües vermeilles, avec ces levres de coral, parceque de tels visages semblent des masques. Nous trouvons qu’Apelles emploioit frequemment le brun  ; d’ou Properce pour corriger sa maitresse Cinthie, qui se fardoit, dit qu’il souhaitoit qu’elle montrat une simplicité, & pureté de couleur telle qu’on en voit dans les tableaux d’Apelles. Il est vrai qu’on doit varier ces teintes, & avoir aussi egard aux sexes, aux ages, & aux conditions. […]
Or il faut que le melange des couleurs soit temperé, & melangé de maniere, qu’il represente le naturel, & qu’il ne reste rien qui blesse la vûe, telles que sont les lignes des contours qu’on doit eviter, parceque la nature ne les marque point, non plus que le noir dans les ombres dont je viens de parler. Ces lumieres, & ces ombres placées avec jugement, & avec art arrondissent les figures, & leur donnent le relief qu’on recherche ; car sans ce relief, les figures, comme vous avez fort bien dit, paroissent peintes, parcequ’elles ont la superficie platte. Celui qui a donc cette qualité, en possede une des plus importantes. [...]

Quotation

{Couleur ou Cromatique. Troisième Partie de la Peinture.}
Aussi ne voit-on personne qui rétablisse *la † CROMATIQUE, & qui la remette en vigueur au point que la porta Zeuxis, lors que par cette Partie, qui est pleine de charmes & de magie, & qui sçait si admirablement tromper la veuë, il se rendit égal au fameux Apelle, le Prince des Peintres, & qu’il merita pour toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde. Et comme cette partie (que l’on peut dire l’ame & le dernier achevement de la Peinture) est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire *sa Sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard & cette tromperie l’ayent jamais deshonorée, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite : Il sera donc tres-avantageux de la connoistre.

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Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.

Quotation

Aussi ne voit on personne qui rétablisse la beauté des couleurs, que les Romains nomment Cromatique, & qui la remettent en vigueur au point que l’a porta Zeuxis, lorsque par cette partie, qui est pleine de charmes & de magie & qui sçait si admirablement tromper la veuë qui se rendit égal au fameux Apelles, le Prince des Peintres, & qu’il merita toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde.
Et comme cette partie [ndr la chromatique], que l’on peut dire la fin & le dernier achevement de la Peinture, est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire sa sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard, & cette tromperie l’ayent jamais deshonoré, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite ; il sera donc tres avantageux de la connoistre.

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Pour bien me faire entendre, il faut que je distingue trois choses dans la peinture. La representation des figures, l'expression des passions, & la composition du tout ensemble. Dans la representation des figures je comprens non seulement la juste delineation de leurs contours, mais aussi l'application des vraies couleurs qui leur conviennent. Par l'expression des passions, j'entens les differens caracteres des visages & les diverses attitudes des figures qui marquent ce qu'elles veulent faire, ce qu'elles pensent, en un mot ce qui se passe dans le fond de leur ame. Par la composition du tout ensemble j'entens l'assemblage judicieux de toutes ces figures, placées avec entente, & dégradées de couleur selon l'endroit du plan où elles sont posées. 
Ce que je dis icy d'un tableau où il y a plusieurs figures, se doit entendre aussi d'un tableau où il n'y en a qu'une, parce que les différentes parties de cette figure sont entr'elles ce que plusieurs figures sont les unes à l'égard des autres. Comme ceux qui apprennent à peindre commencent par apprendre à designer le contour des figures, & à le remplir de leurs couleurs naturelles ; qu'ensuite ils s'étudient à donner de belles attitudes à leurs figures & à bien exprimer les passions dont ils veulent qu'elles, paroissent animées, mais que ce n'est qu'après un long-temps qu'ils sçavent ce qu'on doit observer pour bien disposer la composition d'un tableau, pour bien distribuer le clair obscur, & pour bien mettre toutes choses dans les regles de la perspective ; tant pour le trait que pour l’affoiblissement des ombres & des lumieres. 
De mesme ceux qui les premiers dans le monde ont commencé à peindre, ne se sont appliquez d'abord qu'à representer naïvement le trait & la couleur des objets, sans desirer autre chose, sinon que ceux qui verroient leurs Ouvrages peussent dire, voila un Homme , voila un Cheval, voila un Arbre, […]. Ensuite ils ont passé à donner de belles attitudes à leurs figures, & à les animer vivement de toutes les passions imaginables : Et voila les deux seules parties de la peinture, où nous sommes obligez de croire que soient parvenus les Appelles & les Zeuxis, si nous en jugeons par la vray-semblance du progrez que leur Art a pû faire, & parce que les Auteurs nous rapportent de leurs Ouvrages ; sans qu'ils ayent jamais connu, si ce n'est tres-imparfaitement, cette troisiéme partie de la peinture qui regarde la composition d'un tableau, suivant les regles & les égards que je viens d'expliquer.

Quotation

Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. [...] qu’ainsi il étoit d’une trés grande consequence de s’étudier à bien connoître la couleur, & de se rendre ses charmes familiers, afin de ne pas s’y laisser surprendre, & de pouvoir étudier le reste avec plus de liberté : qu’un tableau dessigné mediocrement, où les couleurs seroient en tout leur éclat, feroit plus d’agreables effets à la vuë, qu’un autre où le dessein seroit en sa plus parfaite justesse où la couleur seroit negligée, parce que la couleur en sa perfection representoit toûjours la verité & que le dessein ne pouvoit representer que la possibilité. L’on ajoûta que le dessein étoit commun avec les sculpteurs & Graveurs, mais que la couleur est le propre du Peintre, & que l’on ne pouvoit prendre cette qualité qu’à cause de l’emploi des couleurs, qui sont capables de tromper les yeux en imitant les choses naturelles ; qu’étant donc la chose qui le distingue d’avec les autres Artisans, elle devoit être considerée d’une façon singuliere, qu’aussi Zeuxis avoit obtenu autant de louanges par l’intelligence des couleurs, qu’Appellés pour la justesse du dessein : que si comparant l’état auquel se trouve maintenant l’une & l’autre, la couleur avoit cet avantage d’être moins d’écheue, mais plûtôt augmentée par l’usage de l’huile, elle devoit par consequent meriter d’autant plus de loüanges, & qu’étant une partie essentielle pour conduire le Peintre à la perfection de son Ouvrage ; elle devoit être considerée aussi necessaire que le dessein.

Quotation

Ce que je dis icy d'un tableau où il y a plusieurs figures, se doit entendre aussi d'un tableau où il n'y en a qu'une, parce que les différentes parties de cette figure sont entr'elles ce que plusieurs figures sont les unes à l'égard des autres. Comme ceux qui apprennent à peindre commencent par apprendre à designer le contour des figures, & à le remplir de leurs couleurs naturelles ; qu'ensuite ils s'étudient à donner de belles attitudes à leurs figures & à bien exprimer les passions dont ils veulent qu'elles, paroissent animées, mais que ce n'est qu'après un long-temps qu'ils sçavent ce qu'on doit observer pour bien disposer la composition d'un tableau, pour bien distribuer le clair obscur, & pour bien mettre toutes choses dans les regles de la perspective ; tant pour le trait que pour l’affoiblissement des ombres & des lumieres. 
De mesme ceux qui les premiers dans le monde ont commencé à peindre, ne se sont appliquez d'abord qu'à representer naïvement le trait & la couleur des objets, sans desirer autre chose, sinon que ceux qui verroient leurs Ouvrages peussent dire, voila un Homme , voila un Cheval, voila un Arbre, […]. Ensuite ils ont passé à donner de belles attitudes à leurs figures, & à les animer vivement de toutes les passions imaginables : Et voila les deux seules parties de la peinture, où nous sommes obligez de croire que soient parvenus les Appelles & les Zeuxis, si nous en jugeons par la vray-semblance du progrez que leur Art a pû faire, & parce que les Auteurs nous rapportent de leurs Ouvrages ; sans qu'ils ayent jamais connu, si ce n'est tres-imparfaitement, cette troisiéme partie de la peinture qui regarde la composition d'un tableau, suivant les regles & les égards que je viens d'expliquer.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

Quotation

Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind. And amongst the Modern Painters, Hannibal Carache, relates to himself, That going to see Bassano at Venice, he went to take a Book off a Shelf, and found it to be the Picture of one, so lively done, that he who was a Great Painter, was deceived by it. The Flesh of Raphael’s Pictures are so Natural, that this seems to be Alive. And so do Titians Pictures, who was the Greatest Master for Colouring that ever was, having attained to imitate Humane Bodies in all the softness of Flesh, and beauty of Skin and Complexion.

Quotation

Daerom segh ick zijnder nu bequaem, oft begrijplijcke jonghe gheesten oft vaten, tot onse Schilder-const leer-liefdigh oft lustigh wesende, […], die moghen desen mijnen willighen dienst dancklijck aennemen, en snel-geestigh opmercklijck achten op d’onderwijsighe deelen, die ick in desen mijnen Schilder-consten gront, oft gantschen Schilder-boeck, hen voor ooghen stelle oft voordraghe. […] hun vrymoedicheyt levende verweckt te wesen conden mercken : Soo bespreeck ick, datse onvertsaeghdlijck toetreden, en aengrijpen voor eerst het besonderste deel der Consten, te weten, een Menschlijck beeldt te leeren stellen, oock eyndlijck alle ander omstandighe deelen t’omhelsen, oft immers als Natuere en Geest anders niet willen toelaten, eenigh besonder deel, om daer in uytnemende te moghen worden: want het niet daeghlijcx gheschiet, dat een alleen alles vermagh, leeren, begrijpen, oft in alles uytnemende worden can. Sulcx bevintmen onder onse Const, van in den ouden oft Antijcken tijt te wesen toeghegaen, dat d’een in d’een, en d’ander in d’ander geschickter en beter Meester gheweest is, gelijck men in hun levens sal bevinden.

Quotation

Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. Puis qu’il n y a que cette seule difference qui rende la fin du Peintre particuliere & qui le distingue d’avec les autres arts : car de pretendre que la fin du Peintre soit de plaire & de tromper, en feignant du relief sur une superficie plate, à quoi le dessein juste, & correct, pourroit réussir simplement avec du crayon sans la couleur, s’étoit se tromper sois-même, puisque, si le but est de plaire, c’étoit à la couleur qu’appartient cet avantage ; que le dessein avec toute sa justesse n’étoit connu que de trés peu de personnes, au lieu que la couleur charme tout le monde : que c’étoit peu de chose de plaire aux ignorants, que c’étoit beaucoup de ne plaire qu’aux sçavants ; mais que c’étoit une perfection consommée de plaire à tous universellement ; qu’ainsi il étoit d’une trés grande consequence de s’étudier à bien connoître la couleur, & de se rendre ses charmes familiers, afin de ne pas s’y laisser surprendre, & de pouvoir étudier le reste avec plus de liberté : qu’un tableau dessigné mediocrement, où les couleurs seroient en tout leur éclat, feroit plus d’agreables effets à la vuë, qu’un autre où le dessein seroit en sa plus parfaite justesse où la couleur seroit negligée, parce que la couleur en sa perfection representoit toûjours la verité & que le dessein ne pouvoit representer que la possibilité. L’on ajoûta que le dessein étoit commun avec les sculpteurs & Graveurs, mais que la couleur est le propre du Peintre, & que l’on ne pouvoit prendre cette qualité qu’à cause de l’emploi des couleurs, qui sont capables de tromper les yeux en imitant les choses naturelles ; qu’étant donc la chose qui le distingue d’avec les autres Artisans, elle devoit être considerée d’une façon singuliere, qu’aussi Zeuxis avoit obtenu autant de louanges par l’intelligence des couleurs, qu’Appellés pour la justesse du dessein : que si comparant l’état auquel se trouve maintenant l’une & l’autre, la couleur avoit cet avantage d’être moins d’écheue, mais plûtôt augmentée par l’usage de l’huile, elle devoit par consequent meriter d’autant plus de loüanges, & qu’étant une partie essentielle pour conduire le Peintre à la perfection de son Ouvrage ; elle devoit être considerée aussi necessaire que le dessein.

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[...] soo en kan 't niet schaeden dat men tot de bevalligheydt van Apelles toe voeght de gheluckighe stoudt-moedigheydt van Zeuxis, d'onvermoeyde naersticheydt van Protogenes, de kloecke diepsinnigheydt van Timanthes, als oock de hooghstaetelicke grootsheydt van Nicophanes.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Cependant, interrompit Pymandre, si un grand ouvrage est traité avec le mesme art qu’un plus petit, le plus grand ne doit-il pas estre plus estimé ?
Il est vray, répondis-je ; mais c’est en quoy ils trouvoient de la difficulté, demeurant quasi tous d’accord qu’on ne peut faire paroistre tant de force dans une grande disposition d’ouvrage que dans un tableau qui est composé de peu de figures ; & la raison qu’ils en apportoient, est que la Peinture a ses bornes & ses limites […].
Cependant, dit Pymandre, il me semble qu’il faut bien plus de science pour traitter un grand ouvrage, pour le bien disposer, pour le remplir d’une infinité de differentes figures, d’habits, d’accomodemens, & pour y faire paroistre toutes ces parties dont vous m’avez parlé, que pour peindre seulement trois ou quatre figures ensemble.
Je vous avouë, repartis-je, que pour bien representer un grand sujet, il faut beaucoup plus de science, plus de travail, & que c’est-là qu’un Peintre a toute l’estendüe necessaire pour donner des marques de son sçavoir. Mais il y en a qui vous diront que ce n’est pas dans ces rencontres que l’art peut faire paroistre davantage sa puissance & la force de ses charmes.

 
[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.


[…] Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir exécuté ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles se voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

Pour moy, respondit Pymandre, je ne voudrois pas donner mon jugement là dessus ;
mais j'ay leu que Zeuxis ayant peint une Centaure, se fascha voyant que l’on en estimoit plustost la nouvelle invention, que l’art qu’il avoit employé à la bien representer, estimant davantage cette derniere partie que la premiere. Et j’ay encore remarqué que les Anciens ont fait beaucoup de cas de plusieurs tableaux qui n’estoient que de peu de figures.
C’est pourquoy, repris-je, ceux qui ont une inclination particuliere pour les Ouvrages du Titien, & des autres Peintres de Lombardie, disent que si les Anciens ont receu beaucoup de loüanges pour des sujets de peu de figures, l’on ne doit pas trouver à redire si le Titien pour les imiter a plustost tasché d’acquerir la partie de bien peindre, que celle qui regarde les grandes dispositions, & la connoissance particuliere de l’Histoire & des Coustumes.

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Daer plaght ghemeynlick op ’t gheniet van d’eere een vrymoedige stoutvaerdigheyd der Konste te volghen. ’t Is ongelooflick, seght Plinius {Lib. xxxiv. Cap.7}, hoe dapper de Konst, eerst door een gheluckighe uytkomste, en daer nae door een seeckere stoutmoedigheyd heeft toeghenomen. Alwaer wy door de gheluckighe uytkomste anders niet en moghen verstaen, dan d’aensienlicke eerbiedigheyd die dese Konsten hadden soo langhe als Koningen en Republijcken veele wercks van de selvighe maeckten. Daer nae, seght Plinius noch voorder wierd de Konst dapper ghevoordert door een seekere stoutmoedigheyd, ons met dese woorden te verstaen ghevende dat de voornoemde gheluckighe uytkomste de Konstenaers door ’t gevoelen van de soete eer-ketelingh soo verde braght dat sy sich niet en schroomden de hand aen eenighe nieuwe en onghehoorde wercken te slaen, de gheweldighe Colossen van d’oude Meesters gheven hier van ghetuyghenis; en Plinius, in de voorghemelde plaetse, naemt eenighe Colossisiche wercken der ouder Konstenaeren tot bewijs van haere voordvaerende stoutmoedigheyd. Zeuxis was meest van allen vermaerd over sijne stoutigheydt; hy is vaerdighlick door de deure die hem Apollodorus gheopent hadden inghestept, seght Plinius wederom in de selvighe plaetse, het penceel, ’t welck nu vry wat bestaen dorst, tot meerder eere ende aensienlickheyd brengende. Van de stoutigheyd deses uytnemenden Konstenaers siet Lucianus in sijn Boecksken ’t welck Zeuxis gheheeten wordt.

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Ghelijck dan de oude Konstenaers een seer treffelicke maniere van wercken ghehadt hebben, soo hadden sy mede een sonderlinghe gaeve om sich de waere verbeeldinghe van allerley beweghinghen onses ghemoeds op ’t aller levendighste voor te stellen; ja wy moghen ’t oock vrijelick daer voor houden, dat sy haere wercken nimmermeer met sulcke bequaeme uytdruckinghen van de verscheydene herts-tochten souden vervult hebben, ’t en waer saecke dat sy met pijne waerd gheacht hadden alle die naturelicke beroerten wijslick nae te speuren door de welcke ons ghemoed verruckt ende den gewoonlicken schijn onses wesens verscheydenlick verandert wordt. Zeuxis heeft de schilderije van Penelope gemaeckt, so dat hy de sedigheyd haeres eerbaeren wesens daer in konstighlick schijnt uytghedruckt te hebben. Plin. XXXV.9. Timomachus heeft den raesenden Aiax afghemaelt, en hoe hy sich in dese uytsinnighe dolligheyd al aenstelde Philostr. Lib. II. de vita Apollonii. Cap. 10. Silanion heeft den wrevelmoedighen Konstenaer Apollodorus ghemaeckt; ende overmids desen Apollodorus eenen rechten korselkop was, soo ist dat Silanion niet alleen den Konstenaer selver, maer sijn koppighe krijghelheydt met eenen oock in ’t koper heeft ghegoten Plin. XXXIV.8. Protogenes heeft Philiscus geschildert, als wesende met eenighe diepe bedenckinghen opghenomen Plin. XXXV.10. Praxiteles heeft Phryne ghemackt, als of men haer weelderigh herte in een volle Zee van vreughd en wellust sach swemmen, Plin. XXXIV.8. Parrhasius maeckten eenen jonghelingh die in sijne wapenrustinge om strijd loopt, Plin. XXXV.10. Den Anapanomenos van Aristides sterft uyt liefde van sijnen broeder, Plin. ibidem. Philostratus {Iconoum Lib. I. in Ariadne} beschrijft ons de schilderije van eenen Bacchus die maer alleen bekent wordt by de minne-stuypen die hem quellen. Dese exempelen gheven ons ghenoegh te verstaen, hoe grooten ervaerenheyd d’oude Meesters in’t uytdrucken van allerley beroerten ende beweghinghen ghehad hebben;

Quotation

[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.

Quotation

Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

Quotation

Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.

Quotation

Aristote {L. de Poet. c. 6} le [ndr : Zeuxis] reprent aussi de n’avoir pas exprimé comme Polygnotus les mœurs, ny fait comprendre les passions, quoy que Pline {L. 35. c. 9. & 10.} dise qu’elles étoient visibles dans sa Penelope qui fit un de ses chefs-d’œuvres […]. Le peintre Aristide est le premier de tous qui se servit de la Morale dans sa profession, & qui sçeut pendre l’Ame avecque ses pensées aussi bien que le corps, par l’expression visible de tous les mouvemens interieurs ; les couleurs dont il [ndr : Aristide] se servoit estoient neantmois trouvées un peu rudes de son tems.

Quotation

Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind. And amongst the Modern Painters, Hannibal Carache, relates to himself, That going to see Bassano at Venice, he went to take a Book off a Shelf, and found it to be the Picture of one, so lively done, that he who was a Great Painter, was deceived by it. The Flesh of Raphael’s Pictures are so Natural, that this seems to be Alive. And so do Titians Pictures, who was the Greatest Master for Colouring that ever was, having attained to imitate Humane Bodies in all the softness of Flesh, and beauty of Skin and Complexion.

Quotation

Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.

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Aussi ne voit on personne qui rétablisse la beauté des couleurs, que les Romains nomment Cromatique, & qui la remettent en vigueur au point que l’a porta Zeuxis, lorsque par cette partie, qui est pleine de charmes & de magie & qui sçait si admirablement tromper la veuë qui se rendit égal au fameux Apelles, le Prince des Peintres, & qu’il merita toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde.
Et comme cette partie [ndr la chromatique], que l’on peut dire la fin & le dernier achevement de la Peinture, est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire sa sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard, & cette tromperie l’ayent jamais deshonoré, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite ; il sera donc tres avantageux de la connoistre.

Quotation

[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.

Quotation

Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. Puis qu’il n y a que cette seule difference qui rende la fin du Peintre particuliere & qui le distingue d’avec les autres arts : car de pretendre que la fin du Peintre soit de plaire & de tromper, en feignant du relief sur une superficie plate, à quoi le dessein juste, & correct, pourroit réussir simplement avec du crayon sans la couleur, s’étoit se tromper sois-même, puisque, si le but est de plaire, c’étoit à la couleur qu’appartient cet avantage ; que le dessein avec toute sa justesse n’étoit connu que de trés peu de personnes, au lieu que la couleur charme tout le monde : que c’étoit peu de chose de plaire aux ignorants, que c’étoit beaucoup de ne plaire qu’aux sçavants ; mais que c’étoit une perfection consommée de plaire à tous universellement

Quotation

[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.


[…] Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir exécuté ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles se voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

Pour moy, respondit Pymandre, je ne voudrois pas donner mon jugement là dessus ;

Quotation

Ghelijck dan de oude Konstenaers een seer treffelicke maniere van wercken ghehadt hebben, soo hadden sy mede een sonderlinghe gaeve om sich de waere verbeeldinghe van allerley beweghinghen onses ghemoeds op ’t aller levendighste voor te stellen; ja wy moghen ’t oock vrijelick daer voor houden, dat sy haere wercken nimmermeer met sulcke bequaeme uytdruckinghen van de verscheydene herts-tochten souden vervult hebben, ’t en waer saecke dat sy met pijne waerd gheacht hadden alle die naturelicke beroerten wijslick nae te speuren door de welcke ons ghemoed verruckt ende den gewoonlicken schijn onses wesens verscheydenlick verandert wordt. Zeuxis heeft de schilderije van Penelope gemaeckt, so dat hy de sedigheyd haeres eerbaeren wesens daer in konstighlick schijnt uytghedruckt te hebben. Plin. XXXV.9. Timomachus heeft den raesenden Aiax afghemaelt, en hoe hy sich in dese uytsinnighe dolligheyd al aenstelde Philostr. Lib. II. de vita Apollonii. Cap. 10. Silanion heeft den wrevelmoedighen Konstenaer Apollodorus ghemaeckt; ende overmids desen Apollodorus eenen rechten korselkop was, soo ist dat Silanion niet alleen den Konstenaer selver, maer sijn koppighe krijghelheydt met eenen oock in ’t koper heeft ghegoten Plin. XXXIV.8. Protogenes heeft Philiscus geschildert, als wesende met eenighe diepe bedenckinghen opghenomen Plin. XXXV.10. Praxiteles heeft Phryne ghemackt, als of men haer weelderigh herte in een volle Zee van vreughd en wellust sach swemmen, Plin. XXXIV.8. Parrhasius maeckten eenen jonghelingh die in sijne wapenrustinge om strijd loopt, Plin. XXXV.10. Den Anapanomenos van Aristides sterft uyt liefde van sijnen broeder, Plin. ibidem. Philostratus {Iconoum Lib. I. in Ariadne} beschrijft ons de schilderije van eenen Bacchus die maer alleen bekent wordt by de minne-stuypen die hem quellen. Dese exempelen gheven ons ghenoegh te verstaen, hoe grooten ervaerenheyd d’oude Meesters in’t uytdrucken van allerley beroerten ende beweghinghen ghehad hebben;

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II. Was das Gemähl seye, p. 128
Wegen der sichtbarlichen Abbildungen wird das Gemähl ein lieblicher Betrug der Augen genennet/ und ist der beste Mahler der beste und redlichste Betrüger besagten// fürnemsten Sinnes/ deß Gesichts. Sie ist ein zuläßiger und löblicher Betrug/ abgesehen von der Gleichheit der Natur; massen alle Künste ihre Herzwurzel gleichsam in deren natürlichen Wesen habe[n]/ von welchen sie herstammen/ und nachgehends/ als abgesonderte Zweige verpflanzet und neuen Safft und Kräfften erlanget haben.
Also hat Zeuxis die Vögel betrogen/ in dem er Weintrauben mit so natürlichen Farben gemahlt/ daß sie selbe herzugelocket/darvon zu picken/wie der Poet sagt : […
]

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Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

Quotation

[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.

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On est fort éloigné du sentiment de quelques auteurs qui n’estimant que les peintres d’histoire, regardent comme fort inférieurs ceux qui peignent (a) le portrait, le païsage, les batailles, les marines, les animaux, les fruits, les fleurs, les noces de village, les tabagies & les cuisines : on prétend au contraire qu’un peintre qui a parfaitement imité la nature n’eüt-il peint qu’une vache, ou comme le peintre grec Zeuxis, qu’une grappe de raisin, est aussi parfait dans son genre que Raphaël l’est dans le sien. Chacun a taché d’exceller dans la partie vers laquelle le génie, une inspiration, une inclination naturelle l’a porté. L’Histoire, il est vrai, est le plus noble objet de la peinture, le plus instructif, & celui qui demande le plus de connoissances ; le païsage, les animaux, les fruits & les fleurs n’en sont que l’accessoire, ils ne servent le plus souvent qu’à orner les sujets d’histoire ; tout enfin consiste dans l’imitation de la belle nature, c’est l’unique point de vuë où l’on doive aspirer.
(a) On les appelle à l’Académie de peintre, des peintres de talens

Quotation

Pour ce qui concerne la Proportion, c’est-à-dire la Symmetrie ou correspondance du Tout avec ses parties, c’est une chose facile, et à la portée de tous les esprits : ce qui fait que l’ignorance est sans excuse, parce qu’on peut l’acquerir presque sans peine, et mesmes par une estude entierement mechanique : mais le seul moyen de parvenir à sa perfection, et d’en avoir une connoissance bien esclairée, c’est d’aller par le chemin de la Geométrie, qui est la source de tous les Arts. […]

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II. Was das Gemähl seye, p. 128
Wegen der sichtbarlichen Abbildungen wird das Gemähl ein lieblicher Betrug der Augen genennet/ und ist der beste Mahler der beste und redlichste Betrüger besagten// fürnemsten Sinnes/ deß Gesichts. Sie ist ein zuläßiger und löblicher Betrug/ abgesehen von der Gleichheit der Natur; massen alle Künste ihre Herzwurzel gleichsam in deren natürlichen Wesen habe[n]/ von welchen sie herstammen/ und nachgehends/ als abgesonderte Zweige verpflanzet und neuen Safft und Kräfften erlanget haben.
Also hat Zeuxis die Vögel betrogen/ in dem er Weintrauben mit so natürlichen Farben gemahlt/ daß sie selbe herzugelocket/darvon zu picken/wie der Poet sagt : […
]

Quotation

Aller menschen ghesicht en is niet begaeft met de selvighe oordeelenskracht; seght Plutarchus {apud Stobaeum ser de Venere & amore}, 't eene ghesicht is meer volmaeckt door de Nature en beter geoffenet door de konst als het ander om het gene schoon is te onderkennen. Hier uyt ontstaet het dat de Schilders met een vaerdighe gauwigheyd van de ghedaenten ende ghestaltenissen der dingen weten te oordeelen. Als een onwetend mensche, eenen rechten Idioot, volmondelick bekendt dat hy de Venus die Zeuxis gheschildert hadde niet schoon en vond; Neem mijne ogen seyde Nicomachus, en sy sall een Godinne schijnen te sijn.

Quotation

Daer plaght ghemeynlick op ’t gheniet van d’eere een vrymoedige stoutvaerdigheyd der Konste te volghen. ’t Is ongelooflick, seght Plinius {Lib. xxxiv. Cap.7}, hoe dapper de Konst, eerst door een gheluckighe uytkomste, en daer nae door een seeckere stoutmoedigheyd heeft toeghenomen. Alwaer wy door de gheluckighe uytkomste anders niet en moghen verstaen, dan d’aensienlicke eerbiedigheyd die dese Konsten hadden soo langhe als Koningen en Republijcken veele wercks van de selvighe maeckten. Daer nae, seght Plinius noch voorder wierd de Konst dapper ghevoordert door een seekere stoutmoedigheyd, ons met dese woorden te verstaen ghevende dat de voornoemde gheluckighe uytkomste de Konstenaers door ’t gevoelen van de soete eer-ketelingh soo verde braght dat sy sich niet en schroomden de hand aen eenighe nieuwe en onghehoorde wercken te slaen, de gheweldighe Colossen van d’oude Meesters gheven hier van ghetuyghenis; en Plinius, in de voorghemelde plaetse, naemt eenighe Colossisiche wercken der ouder Konstenaeren tot bewijs van haere voordvaerende stoutmoedigheyd. Zeuxis was meest van allen vermaerd over sijne stoutigheydt; hy is vaerdighlick door de deure die hem Apollodorus gheopent hadden inghestept, seght Plinius wederom in de selvighe plaetse, het penceel, ’t welck nu vry wat bestaen dorst, tot meerder eere ende aensienlickheyd brengende. Van de stoutigheyd deses uytnemenden Konstenaers siet Lucianus in sijn Boecksken ’t welck Zeuxis gheheeten wordt.

Quotation

II. Was das Gemähl seye, p. 128
Wegen der sichtbarlichen Abbildungen wird das Gemähl ein lieblicher Betrug der Augen genennet/ und ist der beste Mahler der beste und redlichste Betrüger besagten// fürnemsten Sinnes/ deß Gesichts. Sie ist ein zuläßiger und löblicher Betrug/ abgesehen von der Gleichheit der Natur; massen alle Künste ihre Herzwurzel gleichsam in deren natürlichen Wesen habe[n]/ von welchen sie herstammen/ und nachgehends/ als abgesonderte Zweige verpflanzet und neuen Safft und Kräfften erlanget haben.
Also hat Zeuxis die Vögel betrogen/ in dem er Weintrauben mit so natürlichen Farben gemahlt/ daß sie selbe herzugelocket/darvon zu picken/wie der Poet sagt : […
]

Quotation

Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

Quotation

Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind. And amongst the Modern Painters, Hannibal Carache, relates to himself, That going to see Bassano at Venice, he went to take a Book off a Shelf, and found it to be the Picture of one, so lively done, that he who was a Great Painter, was deceived by it. The Flesh of Raphael’s Pictures are so Natural, that this seems to be Alive. And so do Titians Pictures, who was the Greatest Master for Colouring that ever was, having attained to imitate Humane Bodies in all the softness of Flesh, and beauty of Skin and Complexion.

Quotation

[...] soo en kan 't niet schaeden dat men tot de bevalligheydt van Apelles toe voeght de gheluckighe stoudt-moedigheydt van Zeuxis, d'onvermoeyde naersticheydt van Protogenes, de kloecke diepsinnigheydt van Timanthes, als oock de hooghstaetelicke grootsheydt van Nicophanes.

Quotation

Daer is maer eene Konst ende maniere van Schilderen, in welcke Zeuxis, Aglaophon, Apelles een verscheyden handelinghe volghden; ende nochtans en was daer onder dese groote Meesters niet eenen dien yet tot de Konst scheene te ontbreken.

Quotation

Ghelijck dan de oude Konstenaers een seer treffelicke maniere van wercken ghehadt hebben, soo hadden sy mede een sonderlinghe gaeve om sich de waere verbeeldinghe van allerley beweghinghen onses ghemoeds op ’t aller levendighste voor te stellen; ja wy moghen ’t oock vrijelick daer voor houden, dat sy haere wercken nimmermeer met sulcke bequaeme uytdruckinghen van de verscheydene herts-tochten souden vervult hebben, ’t en waer saecke dat sy met pijne waerd gheacht hadden alle die naturelicke beroerten wijslick nae te speuren door de welcke ons ghemoed verruckt ende den gewoonlicken schijn onses wesens verscheydenlick verandert wordt. Zeuxis heeft de schilderije van Penelope gemaeckt, so dat hy de sedigheyd haeres eerbaeren wesens daer in konstighlick schijnt uytghedruckt te hebben. Plin. XXXV.9. Timomachus heeft den raesenden Aiax afghemaelt, en hoe hy sich in dese uytsinnighe dolligheyd al aenstelde Philostr. Lib. II. de vita Apollonii. Cap. 10. Silanion heeft den wrevelmoedighen Konstenaer Apollodorus ghemaeckt; ende overmids desen Apollodorus eenen rechten korselkop was, soo ist dat Silanion niet alleen den Konstenaer selver, maer sijn koppighe krijghelheydt met eenen oock in ’t koper heeft ghegoten Plin. XXXIV.8. Protogenes heeft Philiscus geschildert, als wesende met eenighe diepe bedenckinghen opghenomen Plin. XXXV.10. Praxiteles heeft Phryne ghemackt, als of men haer weelderigh herte in een volle Zee van vreughd en wellust sach swemmen, Plin. XXXIV.8. Parrhasius maeckten eenen jonghelingh die in sijne wapenrustinge om strijd loopt, Plin. XXXV.10. Den Anapanomenos van Aristides sterft uyt liefde van sijnen broeder, Plin. ibidem. Philostratus {Iconoum Lib. I. in Ariadne} beschrijft ons de schilderije van eenen Bacchus die maer alleen bekent wordt by de minne-stuypen die hem quellen. Dese exempelen gheven ons ghenoegh te verstaen, hoe grooten ervaerenheyd d’oude Meesters in’t uytdrucken van allerley beroerten ende beweghinghen ghehad hebben;

Quotation

[…] si les Arts sont imitateurs de la Nature ; ce doit être une imitation sage & éclairée, qui ne la copie pas servilement ; mais qui choisissant les objets & les traits, les présente avec toute la perfection dont ils sont susceptibles. En un mot, une imitation, où on voye la Nature, non telle qu’elle est en elle-même, mais telle qu’elle peut être, & qu’on peut la concevoir par l’esprit.
Que fit Zeuxis quand il voulut peindre une beauté parfaite ? Fit-il le portrait de quelque beauté particulière, dont sa peinture fût l’histoire ? Non, il rassembla les traits séparés de plusieurs beautés existantes. Il se forma dans l’esprit une idée factice qui résulta de tous ces traits réunis : & cette idée fut le prototype, ou le modèle de son tableau, qui fut vraisemblablement & poëtique dans sa totalité, & ne fut vrai & historique que dans ses parties prises séparément. Voilà l’exemple donné à tous les Artistes : voilà la route qu’ils doivent suivre, & c’est la pratique de tous les grands Maîtres sans exception.

Quotation

Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. [...] L’on ajoûta que le dessein étoit commun avec les sculpteurs & Graveurs, mais que la couleur est le propre du Peintre, & que l’on ne pouvoit prendre cette qualité qu’à cause de l’emploi des couleurs, qui sont capables de tromper les yeux en imitant les choses naturelles ; qu’étant donc la chose qui le distingue d’avec les autres Artisans, elle devoit être considerée d’une façon singuliere

Quotation

Whereas in every Work there is some one entire Figure, whereunto all the particulars of the whole History ought to be principally referred, the Painter ought not to imagine, […] that therefore he shall deserve commendation, but rather discredit, for it is most certain that Work will prove offensive, where some inferiour and by matter, is more curiously handled then the principal, and the rather, because the other Parts cannot chuse but loose their Grace. A thing which hath caused divers excellent Painters (as well new) as antient […] to leave their Works imperfect, which they could not remedy any other way, then by utterly defacing that which they had done, were it never so excellent.
A most pregnant example whereof we have in that antient
Painter Euphzanor ; who being to draw the Twelve gods in Athens, he began with the Picture of Neptune, which he wrought so exquisitely both for proportion, colour, and all other points ; that purposing afterwards to make Jupiter with far greater perfection, he had so spent his conceit in the First Figure that he was not able afterwards to express any of other gods, much less Jupiter) the like Disgrace happened to Zeuxes by the Naturalness of his Grapes, and the Imperfection of the Boy, not unlike unto which was that of Leon: Vincent of late Dayes, who being to Paint Christ at his last Supper in the middst of his Disciples in the Refectory of St. Maria de Gratia in Milane, and having finished all the other Apostles, he represented the tow James’s with such perfection of Grace and Majesty, that endeavouring afterwards to express Christ, he was not able to perfect and accomplish that sacred Countenance, […]. Whence my Council is ; that for the avoiding of the like Errors, we examine the original thereof, having an especial regard to our proportions ; as the cheif Cause of the grossness, slenderness, clownishness, and daintyness of Bodies : whence all the Beauty and Ill-favourdness of Pictures proceedeth ; wherefore let each Body have his true and particular proportion […].

Quotation

Are. [...] Le peintre doit donc s’appliquer non seulement à imiter, mais aussi à surpasser la nature ; je dis surpasser en partie ; car au reste ce seroit un prodige, non pas s’il arrivoit à l’imiter, mais meme s’il en approchoit : ce qui consiste à faire paroitre par le moien de l’art dans un seul corps toutes les perfections de la beauté, qu’a peine la nature a coutume de faire voir en mille. Parcequ’il ne se trouve point de corps humain de si parfaite beauté, qu’il ne lui en manque quelque partie. Aussi avons nous l’exemple de Zeuxis, qui aiant à peindre Helene dans le temple des Crotoniates, choisit cinq jeunes filles qu’il vit toutes nûes, & prenant les belles parties de l’une, qui manquoient à l’autre, reduisit son Helene au point de perfection que la renomée en subsiste encore aujourdhui. Ce qui peut aussi servir d’avis pour ceux qui ont la temerité de faire tous leurs ouvrages de pratique. Mais si les peintres veulent trouver sans peine le parfait modelle d’une belle femme, ils n’ont qu’a lire les stances dans les quelles l’Arioste decrit admirablement les beautés de la Fée Alcine. Il [sic] verront en même tems, combien les bons poetes sont aussi bons peintres. [...]
Elle etoit aussi bien faite que les plus industrieux peintres eussent sû la representer.
Voila pour la proportion que l’ingenieux Arioste etablit 1, la plus exacte que les plus excellents peintres puissent former : il se sert de l’epithete industrieux, pour marquer le soin, qui convient un excellent ouvrier.
[...]

Quotation

Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

Quotation

Si nous voulons suivre l’opinion commune qui regle presque toûjours le merite selon l'ancienneté, nous mettrons le siecle d'Apelle beaucoup au dessus de celuy de Raphael, & celuy de Raphael beaucoup au dessus du nostre ; mais je ne suis nullement d’accord de cet arrangement, particulierement à l'égard de la preference qu’on donne au siecle d’Apelle sur celuy de Raphael.
LE PRESIDENT. Comment pouvez-vous ne pas convenir d'un jugement si universel & si raisonnable, sur tout après estre demeuré d'accord de l'excellence de la sculpture de Phidias & de Praxitele ; car si la sculpture de ces temps-là l'emporte sur celle de tous les siecles qui ont suivi, à plus forte raison la Peinture, si nous considerons qu'elle est susceptible de mille beautez & de mille agrémens dont la Sculpture n’est point capable.
L'ABBE. C’est par cette raison là mesme que la consequence que vous tirez n’est pas recevable.
Si la Peinture estoit un Art aussi simple & aussi borné que l’est la Sculpture en fait d'ouvrages de ronde bosse, car c'est en cela seul qu'elle a excellé parmi les Anciens, je me rendrois à vostre advis, mais la Peinture est un Art si vaste de d'une si grande étenduë, qu'il n'a pas moins fallu que la durée de tous les siecles pour en découvrir tous les secrets & tous les mysteres. Pour vous convaincre du peu de beauté des peintures antiques, & de combien elles doivent estre mises au dessous de celles de Raphael, du Titien & de Paul Veronese, & de celles qui se font aujourd’hui, je ne veux me servir que des loüanges mesmes qu'on leur a données.

Quotation

Quoy qu’il en soit, cela vous peut faire souvenir du reproche qu’on fit à un ancien Orateur, d’avoir tres-improprement parlé d’un Promethée peint au Temple de Minerve par Parrhasius dans Athenes. Car luy estant venu dans l’esprit ce qu’on avoit escrit des raisins representez par Zeuxis, que de petits moineaux venoient bequeter ; il creut qu’il ne pouvoit mieus louër ce Promethée, que de dire qu’il estoit tel qu’on voyoit souvent les Vaultours se jetter dessus pour luy perçer le costé, & se repaistre de son foye. Cependant c’estoit tres-mal rencontré à luy, d’autant qu’il n’est pas imaginable que des Vaultours entrent dans un Temple frequenté comme celuy de Minerve Athenienne, encore que des moineaux se puissent hazarder d’aller donner du bec contre un tableau exposé au jour, selon que les Peintres ont accoustumé d’y mettre leurs ouvrages.
L’on ne sçauroit donc nier que la peinture ne soit fort spirituelle, & tres propre à exercer le jugement en beaucoup de façons.

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Quoy qu’il en soit, cela vous peut faire souvenir du reproche qu’on fit à un ancien Orateur, d’avoir tres-improprement parlé d’un Promethée peint au Temple de Minerve par Parrhasius dans Athenes. Car luy estant venu dans l’esprit ce qu’on avoit escrit des raisins representez par Zeuxis, que de petits moineaux venoient bequeter ; il creut qu’il ne pouvoit mieus louër ce Promethée, que de dire qu’il estoit tel qu’on voyoit souvent les Vaultours se jetter dessus pour luy perçer le costé, & se repaistre de son foye. Cependant c’estoit tres-mal rencontré à luy, d’autant qu’il n’est pas imaginable que des Vaultours entrent dans un Temple frequenté comme celuy de Minerve Athenienne, encore que des moineaux se puissent hazarder d’aller donner du bec contre un tableau exposé au jour, selon que les Peintres ont accoustumé d’y mettre leurs ouvrages.
L’on ne sçauroit donc nier que la peinture ne soit fort spirituelle, & tres propre à exercer le jugement en beaucoup de façons.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Daer is maer eene Konst ende maniere van Schilderen, in welcke Zeuxis, Aglaophon, Apelles een verscheyden handelinghe volghden; ende nochtans en was daer onder dese groote Meesters niet eenen dien yet tot de Konst scheene te ontbreken.

Quotation

Ghelijck dan de oude Konstenaers een seer treffelicke maniere van wercken ghehadt hebben, soo hadden sy mede een sonderlinghe gaeve om sich de waere verbeeldinghe van allerley beweghinghen onses ghemoeds op ’t aller levendighste voor te stellen; ja wy moghen ’t oock vrijelick daer voor houden, dat sy haere wercken nimmermeer met sulcke bequaeme uytdruckinghen van de verscheydene herts-tochten souden vervult hebben, ’t en waer saecke dat sy met pijne waerd gheacht hadden alle die naturelicke beroerten wijslick nae te speuren door de welcke ons ghemoed verruckt ende den gewoonlicken schijn onses wesens verscheydenlick verandert wordt. Zeuxis heeft de schilderije van Penelope gemaeckt, so dat hy de sedigheyd haeres eerbaeren wesens daer in konstighlick schijnt uytghedruckt te hebben. Plin. XXXV.9. Timomachus heeft den raesenden Aiax afghemaelt, en hoe hy sich in dese uytsinnighe dolligheyd al aenstelde Philostr. Lib. II. de vita Apollonii. Cap. 10. Silanion heeft den wrevelmoedighen Konstenaer Apollodorus ghemaeckt; ende overmids desen Apollodorus eenen rechten korselkop was, soo ist dat Silanion niet alleen den Konstenaer selver, maer sijn koppighe krijghelheydt met eenen oock in ’t koper heeft ghegoten Plin. XXXIV.8. Protogenes heeft Philiscus geschildert, als wesende met eenighe diepe bedenckinghen opghenomen Plin. XXXV.10. Praxiteles heeft Phryne ghemackt, als of men haer weelderigh herte in een volle Zee van vreughd en wellust sach swemmen, Plin. XXXIV.8. Parrhasius maeckten eenen jonghelingh die in sijne wapenrustinge om strijd loopt, Plin. XXXV.10. Den Anapanomenos van Aristides sterft uyt liefde van sijnen broeder, Plin. ibidem. Philostratus {Iconoum Lib. I. in Ariadne} beschrijft ons de schilderije van eenen Bacchus die maer alleen bekent wordt by de minne-stuypen die hem quellen. Dese exempelen gheven ons ghenoegh te verstaen, hoe grooten ervaerenheyd d’oude Meesters in’t uytdrucken van allerley beroerten ende beweghinghen ghehad hebben;

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Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind. And amongst the Modern Painters, Hannibal Carache, relates to himself, That going to see Bassano at Venice, he went to take a Book off a Shelf, and found it to be the Picture of one, so lively done, that he who was a Great Painter, was deceived by it. The Flesh of Raphael’s Pictures are so Natural, that this seems to be Alive. And so do Titians Pictures, who was the Greatest Master for Colouring that ever was, having attained to imitate Humane Bodies in all the softness of Flesh, and beauty of Skin and Complexion.

Quotation

{Likenesse, not to be compared} But the worke of Art, is not singly in the Similitude or likenesse to the Life, (as common judgement will have it) but in the Symmetry  ; which in truth, proceeds from someskill in the Artizan’s surpassing Art.
{To Symmetry} It was distinguished by that excellent
Painter. A Boy holding a cluster of Grapes so like, that deceived the Birds, and yet not deterred by the shape of the Lad ; which therefore being an exception to the excellencie of the Piece, the Painter put out the Grapes, (though most like,) but reserved the Boy (for his Symmetry,) as the better esteem of the Art ; not understood by ordinary capacities.
{And therefore Naked Bodies hard to Paint.} You shall hardly find an
Artist, very excellent in a naked body, where true Symmetry is expected ; and therefore the ancient skill of the Græcians, sildome apparelled any. A timorous Painter, excuses his weaknesse, by covering the body, with a muffled Mantle.
{Defining Lines, what ?} The
Artizans call this proportion, the designing lines, Scatches, the first draught, and so a second and third, before you Paint them ; {A Cut.} which stroaks, by those that have insight in Art, are esteemed of high value ; for by these first draughts, the true force and undisguised Lineaments of Nature, do ravish the contemplation ; wherein the thought of a studious Artificer is perfectly evidenced.
[…].

Quotation

{Likenesse, not to be compared} But the worke of Art, is not singly in the Similitude or likenesse to the Life, (as common judgement will have it) but in the Symmetry  ; which in truth, proceeds from someskill in the Artizan’s surpassing Art.
{To Symmetry} It was distinguished by that excellent
Painter. A Boy holding a cluster of Grapes so like, that deceived the Birds, and yet not deterred by the shape of the Lad ; which therefore being an exception to the excellencie of the Piece, the Painter put out the Grapes, (though most like,) but reserved the Boy (for his Symmetry,) as the better esteem of the Art ; not understood by ordinary capacities.
{And therefore Naked Bodies hard to Paint.} You shall hardly find an
Artist, very excellent in a naked body, where true Symmetry is expected ; and therefore the ancient skill of the Græcians, sildome apparelled any. A timorous Painter, excuses his weaknesse, by covering the body, with a muffled Mantle.
{Defining Lines, what ?} The
Artizans call this proportion, the designing lines, Scatches, the first draught, and so a second and third, before you Paint them ; {A Cut.} which stroaks, by those that have insight in Art, are esteemed of high value ; for by these first draughts, the true force and undisguised Lineaments of Nature, do ravish the contemplation ; wherein the thought of a studious Artificer is perfectly evidenced.
[…].

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{Couleur ou Cromatique. Troisième Partie de la Peinture.}
Aussi ne voit-on personne qui rétablisse *la † CROMATIQUE, & qui la remette en vigueur au point que la porta Zeuxis, lors que par cette Partie, qui est pleine de charmes & de magie, & qui sçait si admirablement tromper la veuë, il se rendit égal au fameux Apelle, le Prince des Peintres, & qu’il merita pour toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde. Et comme cette partie (que l’on peut dire l’ame & le dernier achevement de la Peinture) est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire *sa Sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard & cette tromperie l’ayent jamais deshonorée, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite : Il sera donc tres-avantageux de la connoistre.

Quotation

[...] want Zeuxis plaght de ghedeelten des lichaems wat meer toe te gheven, en de selvighe grooter te maecken; achtende dat de staetelickheyd ende Majesteyt sijner beelden door die middel vermeerdert wierd.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

Quotation

Daer is maer eene Konst ende maniere van Schilderen, in welcke Zeuxis, Aglaophon, Apelles een verscheyden handelinghe volghden; ende nochtans en was daer onder dese groote Meesters niet eenen dien yet tot de Konst scheene te ontbreken.

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Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent. Ainsi la grande difficulté n'est pas de prouver qu'on l'emporte aujourd'huy sur Zeuxis, sur les Timantes & sur les Appelles, mais de faire voir qu’on a encore quelque avantage sur les Raphaels, sur les Titiens, sur les Pauls Veroneses, & sur les autres grands Peintres du dernier siecle. Cependant j'ose avancer qu'à regarder l'Art en luy-mesme, entant qu’il est un amas & une collection de preceptes, on trouvera qu'il est plus accompli & plus parfait presentement qu'il ne l'estoit du temps de ces grands Maistres.

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{In welchen Studen jeder von den Alten oder antichen bäst qualificirt gewesen.} Es ist dieses bey unserer Kunst gewöhnlich/ auch so wol an den antichen/ als modernen/ zu ersehen/ daß der eine in einem/ der andere in etwas anders/ die wenigsten in allem/ excelliret und Meister gewesen. {Die Griechen.} Dann Apollodorus legte sonderlich der Schönheit zu. Zeuxis machte zu große Köpfe/ ware aber ein künstlicher Obst-Mahler. Eumarus gewöhnte sich/ alles nach dem Leben nachzubilden. Protogenes konte erstlich nur Schiffe mahlen. Apelles war in allem zierlich. Parrhasius ware gut in seinen Umrißen; Daemon, reich von invention; Timanthes verständig in allen seinen Werken/ auch immer verborgenen Sinns und Meinung; Pamphilus, gelehrt; Nicomachus, geschwind; Athenion, tieffsinnig; Nicophanes, sauber und nett; Amulius schön mit Farben; Pausias, munter in Bildung der Kinder und Blumen; Asclepidorius gut in dem messen und in den proportionen; Amphion, von Anordnung, Serapio, vernünftig in großen; Pireikus, in kleinen Sachen; Antiphilus in klein- und großen ; Dyonisius, konte nur Menschen mahlen; Euphranor, alles; Nicias, Thiere/ besonderlich Hunde. Nicophanes, konte wol nach-copiren/ und war in seinen Werken sauber; Mechophanes zu rauh in den Farben; Nealces, gut im ausbilden; Aristides, in affecte ; Clesides, nach dem Leben ; Ludius, in Landschaften.

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Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent.

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[…] si les Arts sont imitateurs de la Nature ; ce doit être une imitation sage & éclairée, qui ne la copie pas servilement ; mais qui choisissant les objets & les traits, les présente avec toute la perfection dont ils sont susceptibles. En un mot, une imitation, où on voye la Nature, non telle qu’elle est en elle-même, mais telle qu’elle peut être, & qu’on peut la concevoir par l’esprit.
Que fit Zeuxis quand il voulut peindre une beauté parfaite ? Fit-il le portrait de quelque beauté particulière, dont sa peinture fût l’histoire ? Non, il rassembla les traits séparés de plusieurs beautés existantes. Il se forma dans l’esprit une idée factice qui résulta de tous ces traits réunis : & cette idée fut le prototype, ou le modèle de son tableau, qui fut vraisemblablement & poëtique dans sa totalité, & ne fut vrai & historique que dans ses parties prises séparément. Voilà l’exemple donné à tous les Artistes : voilà la route qu’ils doivent suivre, & c’est la pratique de tous les grands Maîtres sans exception.

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Thus Aglaphontes us’d but one Colour, no more did Nitia the Athenian Painter ; and it was this Relievo also for which the famous Zeuxis became so renound’d : not to insist on Heredices the Corinthian, and Thelophanes the Sicyonian, who were both of them but Monochromists ; and, ‘till Cleophanes came amongst them, no dissemblers, as owning no other Colours but those eminent Contraries ; that is, the lights and the shades, in the true managing whereof, so many wonders are to be produc’d by this Art, and even a certain splendor, and beauty in the touches of the Burin, so as the very Union and colouring it self may be conceiv’d without any force upon the imagination, as we have before observed in these excellent Gravings of Natalis, Rouslet, and Poisly, after Bourdon ; and in what Greuter, Blomart, and some others have done after Monsieur Poussin, Guido Rhene, Cortoon, &c.

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[...] soo en kan 't niet schaeden dat men tot de bevalligheydt van Apelles toe voeght de gheluckighe stoudt-moedigheydt van Zeuxis, d'onvermoeyde naersticheydt van Protogenes, de kloecke diepsinnigheydt van Timanthes, als oock de hooghstaetelicke grootsheydt van Nicophanes.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Korts naer desen geestighe Apollodorus, is die uytmuntende Zeuxus ten voorschijn ghekomen, die onse Konst een grooten luyster heeft weten te geven, soo dat hy de Vogelen door sijn geschildert fruyt heeft weten uyt de lucht te lock, en door sijn natuerelijck nabootsen in de selve een begeerte verwect om te prouven, en daer toe vliegende sijnse bedrogen gheweest.

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II. Was das Gemähl seye, p. 128
Wegen der sichtbarlichen Abbildungen wird das Gemähl ein lieblicher Betrug der Augen genennet/ und ist der beste Mahler der beste und redlichste Betrüger besagten// fürnemsten Sinnes/ deß Gesichts. Sie ist ein zuläßiger und löblicher Betrug/ abgesehen von der Gleichheit der Natur; massen alle Künste ihre Herzwurzel gleichsam in deren natürlichen Wesen habe[n]/ von welchen sie herstammen/ und nachgehends/ als abgesonderte Zweige verpflanzet und neuen Safft und Kräfften erlanget haben.
Also hat Zeuxis die Vögel betrogen/ in dem er Weintrauben mit so natürlichen Farben gemahlt/ daß sie selbe herzugelocket/darvon zu picken/wie der Poet sagt : […
]

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Are. [...] Le peintre doit donc s’appliquer non seulement à imiter, mais aussi à surpasser la nature ; je dis surpasser en partie ; car au reste ce seroit un prodige, non pas s’il arrivoit à l’imiter, mais meme s’il en approchoit : ce qui consiste à faire paroitre par le moien de l’art dans un seul corps toutes les perfections de la beauté, qu’a peine la nature a coutume de faire voir en mille. Parcequ’il ne se trouve point de corps humain de si parfaite beauté, qu’il ne lui en manque quelque partie. Aussi avons nous l’exemple de Zeuxis, qui aiant à peindre Helene dans le temple des Crotoniates, choisit cinq jeunes filles qu’il vit toutes nûes, & prenant les belles parties de l’une, qui manquoient à l’autre, reduisit son Helene au point de perfection que la renomée en subsiste encore aujourdhui. Ce qui peut aussi servir d’avis pour ceux qui ont la temerité de faire tous leurs ouvrages de pratique. Mais si les peintres veulent trouver sans peine le parfait modelle d’une belle femme, ils n’ont qu’a lire les stances dans les quelles l’Arioste decrit admirablement les beautés de la Fée Alcine. Il [sic] verront en même tems, combien les bons poetes sont aussi bons peintres. [...]
Elle etoit aussi bien faite que les plus industrieux peintres eussent sû la representer.
Voila pour la proportion que l’ingenieux Arioste etablit 1, la plus exacte que les plus excellents peintres puissent former : il se sert de l’epithete industrieux, pour marquer le soin, qui convient un excellent ouvrier.
[...]
Avec une blonde chevelure longue & nouée :
Il n’y a point d’or qui eclatte & brille davantage.
De la meme façon que l’Arioste a dit tresse blonde, il pouvoit dire tresse d’or : mais peut etre crut-il, que l’expression auroit trop senti son poete : d’ou on peut conclure que le peintre doit imiter l’or, & non pas l’emploier dans sa peinture comme font ceux qui peignent en mignature, ensorte qu’on puisse dire ces cheveux ne sont pas d’or, & cependant ils semblent briller comme l’or. Je suis bien aise d’avoir touché ce point, quand meme la chose ne meriteroit pas qu’on y fit reflexion. […] On doit conclure de là, que le peintre est obligé d’imiter les proprietés de chaque chose avec les distinctions qui leur conviennent.

 
1 On a encore ici prophetisé, plus pour ce tems ici, que pour aucun autre qui ce soit passè.

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Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. [...] L’on ajoûta que le dessein étoit commun avec les sculpteurs & Graveurs, mais que la couleur est le propre du Peintre, & que l’on ne pouvoit prendre cette qualité qu’à cause de l’emploi des couleurs, qui sont capables de tromper les yeux en imitant les choses naturelles ; qu’étant donc la chose qui le distingue d’avec les autres Artisans, elle devoit être considerée d’une façon singuliere

Quotation

Traveller,
           
Design is the Expressing with a Pen, or Pencil, or other Instrument, the Likeness of any Object by its out Lines, or Contours ; and he that Understands and Mannages well these first Lines, working after Nature still, and using extream Diligence, and skill may with Practice and Judgment, arrive to an Excellency in the Art.
                        Friend,
            Me thinks that should be no difficult Matter, for we see many whose Inclination carys them to Draw any thing they see, and they perform it with ease.
                       
Traveller,
            I grant you, Inclination goes a great way in disposing the Hand, but a strong Imagination only, will not carry a Painter through ; For when he compares his Work to
Nature, he will soon find, that great Judgment is requisite, as well as a Lively Fancy ; and particularly when he comes to place many Objects together in one Piece or Story, which are all to have a just relation to one another. There he will find that not only the habit of the Hand but the strength of the Mind is requisite ; therefore all the Eminent Painters that ever were, spent more time in Designing after the Life, and after the Statues of the Antients, then ever did in learning how to colour their Works ; that so they might be Masters of Design, and be able to place readily every Object in its true situation.
                        Friend,
            Now you talk of Nature and Statues, I have heard Painters blam’d for working after both.
                        Traveller,
            It is very true, and justly ; but less for working after Nature than otherwise. Caravaggio a famous Painter is blam’d for having meerly imitated Nature as he found her, without any correction of Forms. And Perugin, another Painter is blam’d for having wrought so much after Statues, that his Works never had that lively easiness which accompanies Nature ; and of this fault Raphael his Scholar was a long time guilty, till he Reform’d it by imitating Nature.

                        Friend,
            How is it possible to erre in imitating Nature ?
                        Traveller,
           
Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

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Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

Quotation

Ce n'est que la juste delineation des objets revétus de leurs vrayes couleurs, & sur tout l'expression vive & naturelle des mouvemens de l'ame, qui font de fortes impressions sur ceux qui les regardent. Car il faut remarquer que comme la peinture a trois parties qui la composent, il y a aussi trois parties dans l'homme par où il en est touché, les sens, le cœur & la raison. La juste delineation des objets, accompagnée de leur couleur, frappe agreablement les yeux ; la naïve expression des mouvemens de l’ame va droit au cœur, & imprimant sur luy les mesmes passions qu'il voit representées, luy donne un plaisir tres sensible. Et enfin l'entente qui paroist dans la juste distribution des ombres & des lumieres dans la degradation des figures selon leur plan & dans le bel ordre d'une composition judicieusement ordonnée, plaist à la raison, & luy fait ressentir une joye moins vive à la verité, mais plus spirituelle & plus digne d'un homme. Il en est de mesme des Ouvrages de tous les autres Arts […]. 
Je dis donc qu'il a suffi aux Appelles & aux Zeuxis pour se faire admirer de toute la Terre d'avoir charmé les yeux & touché le cœur, sans qu'il leur ait esté necessaire de posseder cette troisiéme partie de la peinture [ndr : la composition], qui ne va qu’à satisfaire la raison ; car bien loin que cette partie serve à charmer le commun du monde, elle y nuit fort souvent, & n'aboutit qu'à luy déplaire.

Quotation

’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Aller menschen ghesicht en is niet begaeft met de selvighe oordeelenskracht; seght Plutarchus {apud Stobaeum ser de Venere & amore}, 't eene ghesicht is meer volmaeckt door de Nature en beter geoffenet door de konst als het ander om het gene schoon is te onderkennen. Hier uyt ontstaet het dat de Schilders met een vaerdighe gauwigheyd van de ghedaenten ende ghestaltenissen der dingen weten te oordeelen. Als een onwetend mensche, eenen rechten Idioot, volmondelick bekendt dat hy de Venus die Zeuxis gheschildert hadde niet schoon en vond; Neem mijne ogen seyde Nicomachus, en sy sall een Godinne schijnen te sijn.

Quotation

Si nous voulons suivre l’opinion commune qui regle presque toûjours le merite selon l'ancienneté, nous mettrons le siecle d'Apelle beaucoup au dessus de celuy de Raphael, & celuy de Raphael beaucoup au dessus du nostre ; mais je ne suis nullement d’accord de cet arrangement, particulierement à l'égard de la preference qu’on donne au siecle d’Apelle sur celuy de Raphael.
LE PRESIDENT. Comment pouvez-vous ne pas convenir d'un jugement si universel & si raisonnable, sur tout après estre demeuré d'accord de l'excellence de la sculpture de Phidias & de Praxitele ; car si la sculpture de ces temps-là l'emporte sur celle de tous les siecles qui ont suivi, à plus forte raison la Peinture, si nous considerons qu'elle est susceptible de mille beautez & de mille agrémens dont la Sculpture n’est point capable.
L'ABBE. C’est par cette raison là mesme que la consequence que vous tirez n’est pas recevable.
Si la Peinture estoit un Art aussi simple & aussi borné que l’est la Sculpture en fait d'ouvrages de ronde bosse, car c'est en cela seul qu'elle a excellé parmi les Anciens, je me rendrois à vostre advis, mais la Peinture est un Art si vaste de d'une si grande étenduë, qu'il n'a pas moins fallu que la durée de tous les siecles pour en découvrir tous les secrets & tous les mysteres. Pour vous convaincre du peu de beauté des peintures antiques, & de combien elles doivent estre mises au dessous de celles de Raphael, du Titien & de Paul Veronese, & de celles qui se font aujourd’hui, je ne veux me servir que des loüanges mesmes qu'on leur a données.

Quotation

[...] oversulcx, als desen grooten Meester [Zeuxis] voor-genomen hadde den inwoonderen van Crotona een uytnemende schoon vrouwelick Beeldt nae te laeten, soo en vond hy het niet gheraedtsaem de gheheele volmaecktheydt van d'aller bevallighste schoonigheydt in een lichaem te soecken, maer hy heeft vijf van d'aller schoonste Maeghden uytghepickt, ten eynde dat hy uyt d'ernstighe opmerckinghe der selvigher de rechte schoonheydt, die nae 't segghen van Lucianus {In Hermetino} noodtsaeckelijck maer een wesen kan, moght ghevinden

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Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent.

Quotation

’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Quoy-qu’un Peintre ne doive rien négliger, il doit toutefois prendre garde à ne pas tant travailler pour aquerir de l’estime par la beauté des ornemens que par l’excellence de son principal ouvrage. Et c’est de quoy Zeuxis se plaint dans Lucien, disant avec indignation que l’on loûë dans la Peinture ce qui n’est que de la fange. Apulée nomme aussi les ornemens les feuïlles de l’art, & de veritables amusemens. C’est pourquoy comme le Peintre n’en doit pas faire le capital de son travail, cela ne merite pas aussi qu’on s’attache trop à les considerer.

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I am sorry the Great, and Principal End of the Art has hitherto been so little Consider’d ; I don’t mean by Gentlemen only, or by Low, Pretended Connoisseurs, But by those who ought to have gone higher, and to have Taught Others to have Followed them. ‘tis no Wonder if many who are accustom’d to Think Superficially look on Pictures as they would on a Piece of Rich Hangings ; Or if such as These, (and some Painters among the rest) fix upon the Pencil, the Colouring, or perhaps the Drawing, and some little Circumstantial Parts in the Picture, or even the just Representation of common Nature, without penetrating into the Idea of the Painter, and the Beauties of the History, or Fable. I say ‘tis no wonder if this so frequently happens when those whether Ancients or Moderns, who have wrote of Painting, in describing the Works of Painters in their Lives, or on other occasions have very rarely done any more ; Or in order to give us a Great Idea of some of the Best Painters have told us such Silly Stories as that of the Curtain of Parrhasius which deceiv’d Zeuxis, of the small lines one upon the other in the Contention between Apelles and Protogenes, (as I remember, ‘tis no matter of whom the Story goes) of the Circle of Giotto, and such like ; Trifles, which if a Man were never so expert at without going many degrees higher he would not be worthy the name of a Painter, much less of being remembred by Posterity with Honour.
‘tis true there are some Kinds of Pictures which can do no more than Please, as ‘tis the Case of some Kinds of Writings ; but one may as well say a Library is only for Ornament, and Ostentation as a Collection of Pictures, or Drawings. If That is the Only End, I am sure ‘tis not from any Defect in the Nature of the Things themselves.
I repeat it again, and would inculcate it, Painting is a fine piece of Workmanship ; ‘tis a Beautiful Ornament, and as such gives us Pleasure ; But over and above this We PAINTERS are upon the Level with Writers, as being Poets, Historians, Philosophers and Divines, we Entertain, and Instruct equally with Them.
This is true and manifest beyond dispute whatever Mens Notions have been ;

To wake the Soul by tender Strokes of Art,
To raise the Genius, and to mend the Heart.

Mr. Pope.

is the business of Painting as well as of Tragedy.

Quotation

There hath been a continual Altercation between Painters and Carvers for Superiority in the Excellency of Art : but that Carvers may not pretend to excel Painters in the Essential part we will lay down how far they agree and then wherein the Carvers are Excel’d.
[...].
            And as there is no
Essential difference between two particular Men, both being Rational Creatures, so there is not between Painting and Carving, for both tend to the same End, by Representing Individual Substances ; and both must observe the same Geometrical Quantity in what they Represent.
            Suppose a
Painter and Carver were to Counterfeit the same Person, doubtless both would conceive the same Idea of him, proceeding in their Minds with the same discourse of Reason and Art, and (as before) observe the same Geometrical Quantity, endeavouring to make it as like the Person they Represent as they could : and so the Draught expressing the Idea’s of both the Workmen, would agree in expressing the true Resemblance, which is the Essence of this Art.
            ’Tis true one
Painteth and the other Carveth ; but this is a Material Difference only, which argues no Specifical Difference in Art or Science, and it is the Essential Difference alone that maketh a Distinction of Species and Diversity of Science.
If it be Objected that the
Carver maketh more of the Figure then the Painter, it is answer’d, more or less makes no Specifical or Proper Difference ; therefore it is the Defect of Matter, and not of Art, thus far the Arts are Analogical.
Now that this
Art far Excels Carving is easily Demonstrated, since on a Flat, it Represents Roundness and Thickness, exceeding therein the Power of Nature it self, expressing Life and Spirit far beyond Carving, as in these Instances.
Apelles Painted Alexander the Great so to the Life, that his Horse Bucephalus brought into the Room, immediately kneeld down supposing it his Master : His Horse he likewise Painted with such Spirit that other Horses began to Neigh, when they saw him.
Andreas Mantegna represented a Servant in Porta Vercellina, so Natural, that the Horses left not Kicking at it till there was no shape of a Man left.
[...].
            A
Venus cannot be made with that Allectation in Carving, since the Complection of the skin, with Colour of Eyes, Hair, &c. are requisite to the Perfection of a Beauty.
            Nor can
History be Carvd without great Defects, since all Distances require a Faintness of Colouring, as well as Diminution of Body : with many more Observations in Nature, onely Obvious to Colouring, of absolute Necessity for the Animating of Figures.

Quotation

Mais establissons auparavant nostre cinquiesme partie touchant la Collocation ou Position régulière des Figures dans le Tableau, puisqu’elle est la Base de tout l’Edifice de la Peinture, et pour ainsi dire le lien et l’assemblage des quatre premieres, qui, sans celle-cy, n’ont ny forme, ny subsistance : […]
[…] un Peintre auroit travaillé en vain, et perdu son temps, si après avoir satisfait aux quatre premières Parties, il demeuroit court en cette dernière, où consiste toute l’Eurithmie de l’Art et le Magistère de la Peinture : parce qu’il est inutile d’avoir inventé et composé un Sujet ; et de s’estre estudié à rechercher la beauté, et la juste proportion de chaque figure ; d’estre excellent coloriste ; de savoir donner les Ombres, et les Lumières à tous les corps, avec leurs teintes, et leurs couleurs naturelles ; et de posseder, encore avec cela, le divin Talent de l’Expression des Mouvemens de l’esprit, et des passions, (qui est comme l’Ame de la peinture), si, après toutes ces nobles Parties, on se trouve depourveu d’intelligence au fait de la position reguliere des Figures dans le Tableau.
Il faut donc conclure, que si les autres, ou toutes ensembles, ou prises chacune à part, sont utiles et avantageuses à un Peintre, celle-cy luy est absolument necessaire.

Car quoy qu’un Tableau n’ait pas entièrement satisfait à quelqu’une des quatre premières Parties, ou que mesmes il soit foible, et en quelque sorte deffectueux en toutes ensemble ; neanmoins si cette derniere, dont nous traitons, s’y trouve à sa perfection, l’ouvrage sera toûjours estimable et digne d’un Peintre : parce que l’Ordre est la source, et le vray principe des Sciences : Et pour le regard des Arts, il a cela de particulier, et de merveilleux, qu’il est le père de la Beauté, et qu’il donne mesme de la grace aux choses les plus mediocres, et les rend considerables.
Voyons en quoy consiste cette partie si importante, et par maniere de dire, si Totale, qui acheve non seulement de former un Peintre, mais qui comprend tout ce que la Peinture a de scientifique, et qui la tire d’entre les Arts mechaniques pour luy donner le reng parmi les Sciences.
Les Geometres, qui sont les vrais maistres de cette question, pour en exprimer l’Intelligence, se servent du nom d’Optique, voulant dire ce terme-là, que c’est l’Art de voir les choses par la raison, et avec les yeux de l’Entendement : car on seroit bien impertinent de s’imaginer que les yeux du corps fussent d’eux-mesmes capables d’une si sublime operation, que de pouvoir estre juges de la beauté et de l’excellence d’un tableau.
Et comme le Peintre fait profession d’imiter les choses selon qu’il les void, il est certain que s'il voit mal, il  les représentera conforme[s] à sa mauvaise imagination, et fera une mauvaise peinture ; si bien qu’avant que de prendre le crayon et les pinceaux, il faut qu’il ajuste son œil avec le raisonnement, par les principes qui enseignent à voir les choses, non seulement ainsi qu’elles sont en elles-mesmes, mais encore selon qu’elles doivent estre figurées. Car ce seroit bien souvent une lourde faute de les peindre precisément comme l’œil les void, quoique cela semble un paradoxe.
Or cet Art si necessaire, que les sçavans ont nommé l’Optique, et que les Peintres, et tous les Desseignateurs appellent communement la Perspective, donne des moyens infaillibles de representer precisément sur une surface (telle qu’est la toile d’un tableau, une parois, une feuille de papier, ou telle autre chose)
tout ce que l’œil void et peut comprendre d’une seule œillade, pendant qu’il demeure ferme en un mesme lieu. […] je monstreray icy par des exemples, et par l’examen critique de diverses Pieces qui se voyent en estampe aprés Raphael (le plus celebre des Peintres Modernes, et le plus exact en ses Ouvrages) de quelle importance est cette Perspective ou collocation reguliere des Figures dans un Tableau ; vû que c’est par elle qu’on decide precisément, et avec demonstration, ce qui est bien, et ce qui est mal.
[…]

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De mesme ceux qui les premiers dans le monde ont commencé à peindre, ne se sont appliquez d'abord qu'à representer naïvement le trait & la couleur des objets, sans desirer autre chose, sinon que ceux qui verroient leurs Ouvrages peussent dire, voila un Homme , voila un Cheval, voila un Arbre, […]. Ensuite ils ont passé à donner de belles attitudes à leurs figures, & à les animer vivement de toutes les passions imaginables : Et voila les deux seules parties de la peinture, où nous sommes obligez de croire que soient parvenus les Appelles & les Zeuxis, si nous en jugeons par la vray-semblance du progrez que leur Art a pû faire, & parce que les Auteurs nous rapportent de leurs Ouvrages ; sans qu'ils ayent jamais connu, si ce n'est tres-imparfaitement, cette troisiéme partie de la peinture qui regarde la composition d'un tableau, suivant les regles & les égards que je viens d'expliquer. [...] […] L'ABBE. Tous ces effets merveilleux de la peinture antique, n’empeschent pas que je ne persiste dans ma proposition ; car ce n'est point la belle ordonnance d'un tableau, la juste dispensation des lumières, la judicieuse degradation des objets, ny tout ce qui compose cette troisiéme partie de la peinture dont j'ay parlé, qui touche, qui charme & qui enleve. Ce n'est que la juste delineation des objets revétus de leurs vrayes couleurs, & sur tout l'expression vive & naturelle des mouvemens de l'ame, qui font de fortes impressions sur ceux qui les regardent. Car il faut remarquer que comme la peinture a trois parties qui la composent, il y a aussi trois parties dans l'homme par où il en est touché, les sens, le cœur & la raison. La juste delineation des objets, accompagnée de leur couleur, frappe agreablement les yeux ; la naïve expression des mouvemens de l’ame va droit au cœur, & imprimant sur luy les mesmes passions qu'il voit representées, luy donne un plaisir tres sensible. Et enfin l'entente qui paroist dans la juste distribution des ombres & des lumieres dans la degradation des figures selon leur plan & dans le bel ordre d'une composition judicieusement ordonnée, plaist à la raison, & luy fait ressentir une joye moins vive à la verité, mais plus spirituelle & plus digne d'un homme. Il en est de mesme des Ouvrages de tous les autres Arts […]. 
Je dis donc qu'il a suffi aux Appelles & aux Zeuxis pour se faire admirer de toute la Terre d'avoir charmé les yeux & touché le cœur, sans qu'il leur ait esté necessaire de posseder cette troisiéme partie de la peinture [ndr : la composition], qui ne va qu’à satisfaire la raison ; car bien loin que cette partie serve à charmer le commun du monde, elle y nuit fort souvent, & n'aboutit qu'à luy déplaire.

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Aristote {L. de Poet. c. 6} le [ndr : Zeuxis] reprent aussi de n’avoir pas exprimé comme Polygnotus les mœurs, ny fait comprendre les passions, quoy que Pline {L. 35. c. 9. & 10.} dise qu’elles étoient visibles dans sa Penelope qui fit un de ses chefs-d’œuvres […]. Le peintre Aristide est le premier de tous qui se servit de la Morale dans sa profession, & qui sçeut pendre l’Ame avecque ses pensées aussi bien que le corps, par l’expression visible de tous les mouvemens interieurs ; les couleurs dont il [ndr : Aristide] se servoit estoient neantmois trouvées un peu rudes de son tems.

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Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

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[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.


[…] Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir exécuté ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles se voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

Pour moy, respondit Pymandre, je ne voudrois pas donner mon jugement là dessus ;
mais j'ay leu que Zeuxis ayant peint une Centaure, se fascha voyant que l’on en estimoit plustost la nouvelle invention, que l’art qu’il avoit employé à la bien representer, estimant davantage cette derniere partie que la premiere. Et j’ay encore remarqué que les Anciens ont fait beaucoup de cas de plusieurs tableaux qui n’estoient que de peu de figures.
C’est pourquoy, repris-je, ceux qui ont une inclination particuliere pour les Ouvrages du Titien, & des autres Peintres de Lombardie, disent que si les Anciens ont receu beaucoup de loüanges pour des sujets de peu de figures, l’on ne doit pas trouver à redire si le Titien pour les imiter a plustost tasché d’acquerir la partie de bien peindre, que celle qui regarde les grandes dispositions, & la connoissance particuliere de l’Histoire & des Coustumes. Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir executé ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

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Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. Puis qu’il n y a que cette seule difference qui rende la fin du Peintre particuliere & qui le distingue d’avec les autres arts : car de pretendre que la fin du Peintre soit de plaire & de tromper, en feignant du relief sur une superficie plate, à quoi le dessein juste, & correct, pourroit réussir simplement avec du crayon sans la couleur, s’étoit se tromper sois-même, puisque, si le but est de plaire, c’étoit à la couleur qu’appartient cet avantage [...] L’on ajoûta que le dessein étoit commun avec les sculpteurs & Graveurs, mais que la couleur est le propre du Peintre, & que l’on ne pouvoit prendre cette qualité qu’à cause de l’emploi des couleurs, qui sont capables de tromper les yeux en imitant les choses naturelles ; qu’étant donc la chose qui le distingue d’avec les autres Artisans, elle devoit être considerée d’une façon singuliere, qu’aussi Zeuxis avoit obtenu autant de louanges par l’intelligence des couleurs, qu’Appellés pour la justesse du dessein : que si comparant l’état auquel se trouve maintenant l’une & l’autre, la couleur avoit cet avantage d’être moins d’écheue, mais plûtôt augmentée par l’usage de l’huile, elle devoit par consequent meriter d’autant plus de loüanges, & qu’étant une partie essentielle pour conduire le Peintre à la perfection de son Ouvrage ; elle devoit être considerée aussi necessaire que le dessein.

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LE PRESIDENT. Si la Sculpture moderne l’emporte si fort sur la Sculpture antique par cet endroit que vous marquez [ndr : un bas-relief de François Anguier], il faut que la Peinture d’aujourd’huy soit bien superieure à celle des Anciens, puisqu’enfin c’est d’elle que la Sculpture a appris tous ces secrets de degradation & de perspective.
L’ABBE. J’en demeure d’accord, & la consequence en est tres juste ; mais puisqu’il s’agit presentement de la Peinture, il faut commencer par la distinguer suivant les divers temps où elle a fleuri, & en faire trois classes : Celle du temps d’Appelle, de Zeuxis, de Timante, & de tous ces grands Peintres dont les Livres rapportent tant des merveilles ; Celle du temps de Raphael, du Titien, de Paul Veronese, & de plusieurs autres excellens Maistres d’Italie, & Celle du siecle où nous vivons.
Si nous voulons suivre l’opinion commune qui regle presque toûjours le merite selon l'ancienneté, nous mettrons le siecle d'Apelle beaucoup au dessus de celuy de Raphael, & celuy de Raphael beaucoup au dessus du nostre ; mais je ne suis nullement d’accord de cet arrangement, particulierement à l'égard de la preference qu’on donne au siecle d’Apelle sur celuy de Raphael.
LE PRESIDENT. Comment pouvez-vous ne pas convenir d'un jugement si universel & si raisonnable, sur tout après estre demeuré d'accord de l'excellence de la sculpture de Phidias & de Praxitele ; car si la sculpture de ces temps-là l'emporte sur celle de tous les siecles qui ont suivi, à plus forte raison la Peinture, si nous considerons qu'elle est susceptible de mille beautez & de mille agrémens dont la Sculpture n’est point capable.
L'ABBE. C’est par cette raison là mesme que la consequence que vous tirez n’est pas recevable.
Si la Peinture estoit un Art aussi simple & aussi borné que l’est la Sculpture en fait d'ouvrages de ronde bosse, car c'est en cela seul qu'elle a excellé parmi les Anciens, je me rendrois à vostre advis, mais la Peinture est un Art si vaste de d'une si grande étenduë, qu'il n'a pas moins fallu que la durée de tous les siecles pour en découvrir tous les secrets & tous les mysteres. Pour vous convaincre du peu de beauté des peintures antiques, & de combien elles doivent estre mises au dessous de celles de Raphael, du Titien & de Paul Veronese, & de celles qui se font aujourd’hui, je ne veux me servir que des loüanges mesmes qu'on leur a données.

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La fin de la Peinture, comme de la Poësie, est de surprendre de telle sorte que leurs imitations paroissent des vérités. Le Tableau de Zeuxis, où il avoit peint un Garçon (a) qui portoit des raisins, & qui ne fit point de peur aux oiseaux, puisqu’ils vinrent becqueter ces fruits, est une marque que la Peinture de ces tems-là avoit accoutumé de tromper les yeux en tous les objets qu’elle representoit.

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Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. Puis qu’il n y a que cette seule difference qui rende la fin du Peintre particuliere & qui le distingue d’avec les autres arts : car de pretendre que la fin du Peintre soit de plaire & de tromper, en feignant du relief sur une superficie plate, à quoi le dessein juste, & correct, pourroit réussir simplement avec du crayon sans la couleur, s’étoit se tromper sois-même, puisque, si le but est de plaire, c’étoit à la couleur qu’appartient cet avantage ; que le dessein avec toute sa justesse n’étoit connu que de trés peu de personnes, au lieu que la couleur charme tout le monde : que c’étoit peu de chose de plaire aux ignorants, que c’étoit beaucoup de ne plaire qu’aux sçavants ; mais que c’étoit une perfection consommée de plaire à tous universellement ; qu’ainsi il étoit d’une trés grande consequence de s’étudier à bien connoître la couleur, & de se rendre ses charmes familiers, afin de ne pas s’y laisser surprendre, & de pouvoir étudier le reste avec plus de liberté : qu’un tableau dessigné mediocrement, où les couleurs seroient en tout leur éclat, feroit plus d’agreables effets à la vuë, qu’un autre où le dessein seroit en sa plus parfaite justesse où la couleur seroit negligée, parce que la couleur en sa perfection representoit toûjours la verité & que le dessein ne pouvoit representer que la possibilité. L’on ajoûta que le dessein étoit commun avec les sculpteurs & Graveurs, mais que la couleur est le propre du Peintre, & que l’on ne pouvoit prendre cette qualité qu’à cause de l’emploi des couleurs, qui sont capables de tromper les yeux en imitant les choses naturelles ; qu’étant donc la chose qui le distingue d’avec les autres Artisans, elle devoit être considerée d’une façon singuliere

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Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

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Pour ce qui concerne la Proportion, c’est-à-dire la Symmetrie ou correspondance du Tout avec ses parties, c’est une chose facile, et à la portée de tous les esprits : ce qui fait que l’ignorance est sans excuse, parce qu’on peut l’acquerir presque sans peine, et mesmes par une estude entierement mechanique : mais le seul moyen de parvenir à sa perfection, et d’en avoir une connoissance bien esclairée, c’est d’aller par le chemin de la Geométrie, qui est la source de tous les Arts. […]

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Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind. And amongst the Modern Painters, Hannibal Carache, relates to himself, That going to see Bassano at Venice, he went to take a Book off a Shelf, and found it to be the Picture of one, so lively done, that he who was a Great Painter, was deceived by it. The Flesh of Raphael’s Pictures are so Natural, that this seems to be Alive. And so do Titians Pictures, who was the Greatest Master for Colouring that ever was, having attained to imitate Humane Bodies in all the softness of Flesh, and beauty of Skin and Complexion.

Quotation

La partie principale du coloris est le contraste que fait la lumiere avec l’ombre, au quel on trouve un milieu, qui unit un contraire à l’autre, & fait paroitre rondes les figures, & selon le besoin plus ou moins eloignées ; car le peintre doit prendre garde, en les plaçant, qu’elles ne fassent de la confusion. En quoi il est aussi tres necessaire d’avoir une grande connoissance de la perspective, pour la diminution des objets, qui s’eloignent, ou qu’on feint eloignées [sic] : mais il faut toujours avoir l’œil attentif sur tout au coloris, & au tendre des chairs, parceque plusieurs en font de maniere qu’elles paroissent de porfire, tant en couleur, qu’en dureté : & les ombres si rudes, que le plus souvent elles degenerent en pur noir : d’autres les font trop blanches, & les autres trop rouges. Pour moi je desirerois une couleur plûtot brune, qu’excessivement blanche ; & je bannirois de mes tableaux pour l’ordinaire, ces joües vermeilles, avec ces levres de coral, parceque de tels visages semblent des masques. Nous trouvons qu’Apelles emploioit frequemment le brun

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Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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La fin de la Peinture, comme de la Poësie, est de surprendre de telle sorte que leurs imitations paroissent des vérités. Le Tableau de Zeuxis, où il avoit peint un Garçon (a) qui portoit des raisins, & qui ne fit point de peur aux oiseaux, puisqu’ils vinrent becqueter ces fruits, est une marque que la Peinture de ces tems-là avoit accoutumé de tromper les yeux en tous les objets qu’elle representoit.

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Ainsi la grande difficulté n'est pas de prouver qu'on l'emporte aujourd'huy sur Zeuxis, sur les Timantes & sur les Appelles, mais de faire voir qu’on a encore quelque avantage sur les Raphaels, sur les Titiens, sur les Pauls Veroneses, & sur les autres grands Peintres du dernier siecle. Cependant j'ose avancer qu'à regarder l'Art en luy-mesme, entant qu’il est un amas & une collection de preceptes, on trouvera qu'il est plus accompli & plus parfait presentement qu'il ne l'estoit du temps de ces grands Maistres.

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Pour ce qui concerne la Proportion, c’est-à-dire la Symmetrie ou correspondance du Tout avec ses parties, c’est une chose facile, et à la portée de tous les esprits : ce qui fait que l’ignorance est sans excuse, parce qu’on peut l’acquerir presque sans peine, et mesmes par une estude entierement mechanique : mais le seul moyen de parvenir à sa perfection, et d’en avoir une connoissance bien esclairée, c’est d’aller par le chemin de la Geométrie, qui est la source de tous les Arts. […]

Quotation

La PROPORTION est une juste correspondance du tout avec ses parties ; la plûpart des hommes se peuvent rendre capables de cette connoissance, & la GEOMETRIE qui est la source ou comme la guide de tous les autres Arts, est en même tems le chemin le plus assuré pour y parvenir. Entre les Peintres & les Sculpteurs anciens qui ont excellé dans cette partie Quintilien & beaucoup d’autres ont singulièrement remarqué PARRHAZIUS, PRAXITELLE, ZEUXIS, LYSIPPE, POLICRETTE, EUPHRANOR, & le celebre ASCLEPIODORE, à qui l’excellent APELLE faisoit gloire de ceder dans la justesse des proportions.

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Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.
Neither yet is this Proportion proper unto painting alone, but extendeth it self even unto all other Arts […] ; because it was the first pattern of all Artificial things : So that there is no Art, but is someway beholding to Proportion : yet notwithstanding the Painter as (Loo Baptista Albertus affirmeth) insomuch as he considereth mans Body more especially, is justly preferred before all other Artizans, which imitate the same, because antiquity meaning to grace Painting above all the rest, Handicrafts men exempting onely Painters out of that number.

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Whereas in every Work there is some one entire Figure, whereunto all the particulars of the whole History ought to be principally referred, the Painter ought not to imagine, […] that therefore he shall deserve commendation, but rather discredit, for it is most certain that Work will prove offensive, where some inferiour and by matter, is more curiously handled then the principal, and the rather, because the other Parts cannot chuse but loose their Grace. A thing which hath caused divers excellent Painters (as well new) as antient […] to leave their Works imperfect, which they could not remedy any other way, then by utterly defacing that which they had done, were it never so excellent.
A most pregnant example whereof we have in that antient
Painter Euphzanor ; who being to draw the Twelve gods in Athens, he began with the Picture of Neptune, which he wrought so exquisitely both for proportion, colour, and all other points ; that purposing afterwards to make Jupiter with far greater perfection, he had so spent his conceit in the First Figure that he was not able afterwards to express any of other gods, much less Jupiter) the like Disgrace happened to Zeuxes by the Naturalness of his Grapes, and the Imperfection of the Boy, not unlike unto which was that of Leon: Vincent of late Dayes, who being to Paint Christ at his last Supper in the middst of his Disciples in the Refectory of St. Maria de Gratia in Milane, and having finished all the other Apostles, he represented the tow James’s with such perfection of Grace and Majesty, that endeavouring afterwards to express Christ, he was not able to perfect and accomplish that sacred Countenance, […]. Whence my Council is ; that for the avoiding of the like Errors, we examine the original thereof, having an especial regard to our proportions ; as the cheif Cause of the grossness, slenderness, clownishness, and daintyness of Bodies : whence all the Beauty and Ill-favourdness of Pictures proceedeth ; wherefore let each Body have his true and particular proportion […].

Quotation

[…] si les Arts sont imitateurs de la Nature ; ce doit être une imitation sage & éclairée, qui ne la copie pas servilement ; mais qui choisissant les objets & les traits, les présente avec toute la perfection dont ils sont susceptibles. En un mot, une imitation, où on voye la Nature, non telle qu’elle est en elle-même, mais telle qu’elle peut être, & qu’on peut la concevoir par l’esprit.
Que fit Zeuxis quand il voulut peindre une beauté parfaite ? Fit-il le portrait de quelque beauté particulière, dont sa peinture fût l’histoire ? Non, il rassembla les traits séparés de plusieurs beautés existantes. Il se forma dans l’esprit une idée factice qui résulta de tous ces traits réunis : & cette idée fut le prototype, ou le modèle de son tableau, qui fut vraisemblablement & poëtique dans sa totalité, & ne fut vrai & historique que dans ses parties prises séparément. Voilà l’exemple donné à tous les Artistes : voilà la route qu’ils doivent suivre, & c’est la pratique de tous les grands Maîtres sans exception.

Quotation

Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

Quotation

[...] oversulcx, als desen grooten Meester [Zeuxis] voor-genomen hadde den inwoonderen van Crotona een uytnemende schoon vrouwelick Beeldt nae te laeten, soo en vond hy het niet gheraedtsaem de gheheele volmaecktheydt van d'aller bevallighste schoonigheydt in een lichaem te soecken, maer hy heeft vijf van d'aller schoonste Maeghden uytghepickt, ten eynde dat hy uyt d'ernstighe opmerckinghe der selvigher de rechte schoonheydt, die nae 't segghen van Lucianus {In Hermetino} noodtsaeckelijck maer een wesen kan, moght ghevinden

Quotation

{Likenesse, not to be compared} But the worke of Art, is not singly in the Similitude or likenesse to the Life, (as common judgement will have it) but in the Symmetry  ; which in truth, proceeds from someskill in the Artizan’s surpassing Art.
{To Symmetry} It was distinguished by that excellent
Painter. A Boy holding a cluster of Grapes so like, that deceived the Birds, and yet not deterred by the shape of the Lad ; which therefore being an exception to the excellencie of the Piece, the Painter put out the Grapes, (though most like,) but reserved the Boy (for his Symmetry,) as the better esteem of the Art ; not understood by ordinary capacities.
{And therefore Naked Bodies hard to Paint.} You shall hardly find an
Artist, very excellent in a naked body, where true Symmetry is expected ; and therefore the ancient skill of the Græcians, sildome apparelled any. A timorous Painter, excuses his weaknesse, by covering the body, with a muffled Mantle.
{Defining Lines, what ?} The
Artizans call this proportion, the designing lines, Scatches, the first draught, and so a second and third, before you Paint them ; {A Cut.} which stroaks, by those that have insight in Art, are esteemed of high value ; for by these first draughts, the true force and undisguised Lineaments of Nature, do ravish the contemplation ; wherein the thought of a studious Artificer is perfectly evidenced.
[…].

Quotation

Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind. And amongst the Modern Painters, Hannibal Carache, relates to himself, That going to see Bassano at Venice, he went to take a Book off a Shelf, and found it to be the Picture of one, so lively done, that he who was a Great Painter, was deceived by it. The Flesh of Raphael’s Pictures are so Natural, that this seems to be Alive. And so do Titians Pictures, who was the Greatest Master for Colouring that ever was, having attained to imitate Humane Bodies in all the softness of Flesh, and beauty of Skin and Complexion.

Quotation

38 Ons maeghden en Vrouwen met zedich wesen {Vrouwen standen en actien soet en zedich.}
Laet dan vercieren, om welstandts verstercken,
Al heeft Zeuxis Homerum (soo wy lesen)
Elders al te vele ghelooft in desen,
Dat hy in Wijfs beelden heeft laten mercken
Oock ernstighe, herde, en grove wercken,
Al welcke dinghen sullen den volwassen
Ionghelinghen, oft Amasones passen.

 
39 Sonderlinghe stercke ghestelde Mannen
Sullen doen gheweldigh’ acten en standen {Standen en actien nae de macht der Beelden.}:
maer Ionckheyt, die swaermoedicheyt wil bannen,
Moet wesen wacker met leden ontspannen,
Gants vry en los, nu de stellinghe van den
Oude Mannen, die sullen metten handen
Yet vattend’ hun swacke lijf onderhouden,
Met vermoeyde beenen gheneyght om vouden.

Quotation

[...] want Zeuxis plaght de ghedeelten des lichaems wat meer toe te gheven, en de selvighe grooter te maecken; achtende dat de staetelickheyd ende Majesteyt sijner beelden door die middel vermeerdert wierd.

Quotation

’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

Quotation

[...] soo en kan 't niet schaeden dat men tot de bevalligheydt van Apelles toe voeght de gheluckighe stoudt-moedigheydt van Zeuxis, d'onvermoeyde naersticheydt van Protogenes, de kloecke diepsinnigheydt van Timanthes, als oock de hooghstaetelicke grootsheydt van Nicophanes.

Quotation

Daer plaght ghemeynlick op ’t gheniet van d’eere een vrymoedige stoutvaerdigheyd der Konste te volghen. ’t Is ongelooflick, seght Plinius {Lib. xxxiv. Cap.7}, hoe dapper de Konst, eerst door een gheluckighe uytkomste, en daer nae door een seeckere stoutmoedigheyd heeft toeghenomen. Alwaer wy door de gheluckighe uytkomste anders niet en moghen verstaen, dan d’aensienlicke eerbiedigheyd die dese Konsten hadden soo langhe als Koningen en Republijcken veele wercks van de selvighe maeckten. Daer nae, seght Plinius noch voorder wierd de Konst dapper ghevoordert door een seekere stoutmoedigheyd, ons met dese woorden te verstaen ghevende dat de voornoemde gheluckighe uytkomste de Konstenaers door ’t gevoelen van de soete eer-ketelingh soo verde braght dat sy sich niet en schroomden de hand aen eenighe nieuwe en onghehoorde wercken te slaen, de gheweldighe Colossen van d’oude Meesters gheven hier van ghetuyghenis; en Plinius, in de voorghemelde plaetse, naemt eenighe Colossisiche wercken der ouder Konstenaeren tot bewijs van haere voordvaerende stoutmoedigheyd. Zeuxis was meest van allen vermaerd over sijne stoutigheydt; hy is vaerdighlick door de deure die hem Apollodorus gheopent hadden inghestept, seght Plinius wederom in de selvighe plaetse, het penceel, ’t welck nu vry wat bestaen dorst, tot meerder eere ende aensienlickheyd brengende. Van de stoutigheyd deses uytnemenden Konstenaers siet Lucianus in sijn Boecksken ’t welck Zeuxis gheheeten wordt.

Quotation

La fin de la Peinture, comme de la Poësie, est de surprendre de telle sorte que leurs imitations paroissent des vérités. Le Tableau de Zeuxis, où il avoit peint un Garçon (a) qui portoit des raisins, & qui ne fit point de peur aux oiseaux, puisqu’ils vinrent becqueter ces fruits, est une marque que la Peinture de ces tems-là avoit accoutumé de tromper les yeux en tous les objets qu’elle representoit.

Quotation

Pour ce qui concerne la Proportion, c’est-à-dire la Symmetrie ou correspondance du Tout avec ses parties, c’est une chose facile, et à la portée de tous les esprits : ce qui fait que l’ignorance est sans excuse, parce qu’on peut l’acquerir presque sans peine, et mesmes par une estude entierement mechanique : mais le seul moyen de parvenir à sa perfection, et d’en avoir une connoissance bien esclairée, c’est d’aller par le chemin de la Geométrie, qui est la source de tous les Arts. […]

Quotation

{Likenesse, not to be compared} But the worke of Art, is not singly in the Similitude or likenesse to the Life, (as common judgement will have it) but in the Symmetry  ; which in truth, proceeds from someskill in the Artizan’s surpassing Art.
{To Symmetry} It was distinguished by that excellent
Painter. A Boy holding a cluster of Grapes so like, that deceived the Birds, and yet not deterred by the shape of the Lad ; which therefore being an exception to the excellencie of the Piece, the Painter put out the Grapes, (though most like,) but reserved the Boy (for his Symmetry,) as the better esteem of the Art ; not understood by ordinary capacities.
{And therefore Naked Bodies hard to Paint.} You shall hardly find an
Artist, very excellent in a naked body, where true Symmetry is expected ; and therefore the ancient skill of the Græcians, sildome apparelled any. A timorous Painter, excuses his weaknesse, by covering the body, with a muffled Mantle.
{Defining Lines, what ?} The
Artizans call this proportion, the designing lines, Scatches, the first draught, and so a second and third, before you Paint them ; {A Cut.} which stroaks, by those that have insight in Art, are esteemed of high value ; for by these first draughts, the true force and undisguised Lineaments of Nature, do ravish the contemplation ; wherein the thought of a studious Artificer is perfectly evidenced.
[…].

Quotation

Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent.

Quotation

Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

Quotation

Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent.

Quotation

’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

Quotation

Comme ceux qui apprennent à peindre commencent par apprendre à designer le contour des figures, & à le remplir de leurs couleurs naturelles ; qu'ensuite ils s'étudient à donner de belles attitudes à leurs figures & à bien exprimer les passions dont ils veulent qu'elles, paroissent animées, mais que ce n'est qu'après un long-temps qu'ils sçavent ce qu'on doit observer pour bien disposer la composition d'un tableau, pour bien distribuer le clair obscur, & pour bien mettre toutes choses dans les regles de la perspective ; tant pour le trait que pour l’affoiblissement des ombres & des lumieres. 
De mesme ceux qui les premiers dans le monde ont commencé à peindre, ne se sont appliquez d'abord qu'à representer naïvement le trait & la couleur des objets, sans desirer autre chose, sinon que ceux qui verroient leurs Ouvrages peussent dire, voila un Homme , voila un Cheval, voila un Arbre, […]. Ensuite ils ont passé à donner de belles attitudes à leurs figures, & à les animer vivement de toutes les passions imaginables : Et voila les deux seules parties de la peinture, où nous sommes obligez de croire que soient parvenus les Appelles & les Zeuxis, si nous en jugeons par la vray-semblance du progrez que leur Art a pû faire, & parce que les Auteurs nous rapportent de leurs Ouvrages ; sans qu'ils ayent jamais connu, si ce n'est tres-imparfaitement, cette troisiéme partie de la peinture qui regarde la composition d'un tableau, suivant les regles & les égards que je viens d'expliquer.

Quotation

La fin de la Peinture, comme de la Poësie, est de surprendre de telle sorte que leurs imitations paroissent des vérités. Le Tableau de Zeuxis, où il avoit peint un Garçon (a) qui portoit des raisins, & qui ne fit point de peur aux oiseaux, puisqu’ils vinrent becqueter ces fruits, est une marque que la Peinture de ces tems-là avoit accoutumé de tromper les yeux en tous les objets qu’elle representoit.

Quotation

Aussi ne voit on personne qui rétablisse la beauté des couleurs, que les Romains nomment Cromatique, & qui la remettent en vigueur au point que l’a porta Zeuxis, lorsque par cette partie, qui est pleine de charmes & de magie & qui sçait si admirablement tromper la veuë qui se rendit égal au fameux Apelles, le Prince des Peintres, & qu’il merita toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde.
Et comme cette partie [ndr la chromatique], que l’on peut dire la fin & le dernier achevement de la Peinture, est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire sa sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard, & cette tromperie l’ayent jamais deshonoré, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite ; il sera donc tres avantageux de la connoistre.

Quotation

Le mesme Pline raconte encore que Parrhasius avoit contrefait si naïvement un rideau, que Zeuxis mesme y fut trompé. De semblables tromperies se font tous les jours par des Ouvrages dont on ne fait aucune estime. […] Le meme Autheur [ndr : Pline] rapporte comme une merveille de ce qu'un Peintre de ces temps, là en peignant un pigeon, en avoit représenté l'ombre sur le bord de l'auge où il buvoit. Cela montre seulement qu'on n'avoit point encore representé l'ombre qu'un corps fait sur un autre quand il le cache à la lumiere.

Quotation

Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.

Quotation

Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent.

Quotation

Zeuxis, Polygnotas, ende Euphranor hebben met eenen sonderlingen arbeyd ghesocht haere stucken behoorlicker wijse te beschaduwen ende met eenen levendighen gheest in te aessemen; soo plaghten sy mede daer nae te staen datse in haere verdiepsels ende verhooghsels den oppersten lof boven d’andere Meesters moghten verwerven. Philostr. Lib. II. Cap. 9. De vita Apollonij.

Quotation

Zeuxis, Polygnotas, ende Euphranor hebben met eenen sonderlingen arbeyd ghesocht haere stucken behoorlicker wijse te beschaduwen ende met eenen levendighen gheest in te aessemen; soo plaghten sy mede daer nae te staen datse in haere verdiepsels ende verhooghsels den oppersten lof boven d’andere Meesters moghten verwerven. Philostr. Lib. II. Cap. 9. De vita Apollonij.

Quotation

38 Ons maeghden en Vrouwen met zedich wesen {Vrouwen standen en actien soet en zedich.}
Laet dan vercieren, om welstandts verstercken,
Al heeft Zeuxis Homerum (soo wy lesen)
Elders al te vele ghelooft in desen,
Dat hy in Wijfs beelden heeft laten mercken
Oock ernstighe, herde, en grove wercken,
Al welcke dinghen sullen den volwassen
Ionghelinghen, oft Amasones passen.

Quotation

[...] oversulcx, als desen grooten Meester [Zeuxis] voor-genomen hadde den inwoonderen van Crotona een uytnemende schoon vrouwelick Beeldt nae te laeten, soo en vond hy het niet gheraedtsaem de gheheele volmaecktheydt van d'aller bevallighste schoonigheydt in een lichaem te soecken, maer hy heeft vijf van d'aller schoonste Maeghden uytghepickt, ten eynde dat hy uyt d'ernstighe opmerckinghe der selvigher de rechte schoonheydt, die nae 't segghen van Lucianus {In Hermetino} noodtsaeckelijck maer een wesen kan, moght ghevinden

Quotation

38 Ons maeghden en Vrouwen met zedich wesen {Vrouwen standen en actien soet en zedich.}
Laet dan vercieren, om welstandts verstercken,
Al heeft Zeuxis Homerum (soo wy lesen)
Elders al te vele ghelooft in desen,
Dat hy in Wijfs beelden heeft laten mercken
Oock ernstighe, herde, en grove wercken,
Al welcke dinghen sullen den volwassen
Ionghelinghen, oft Amasones passen.

 
39 Sonderlinghe stercke ghestelde Mannen
Sullen doen gheweldigh’ acten en standen {Standen en actien nae de macht der Beelden.}:
maer Ionckheyt, die swaermoedicheyt wil bannen,
Moet wesen wacker met leden ontspannen,
Gants vry en los, nu de stellinghe van den
Oude Mannen, die sullen metten handen
Yet vattend’ hun swacke lijf onderhouden,
Met vermoeyde beenen gheneyght om vouden.

 
40 Summa, nae Persoons crachten en ghemoeden
Sullen dan alle bootsen zijn bevonden,
Oock nae hun doen, als wel is te bevroeden :
Want hem een vecht-boots al anders sal spoeden,
In stellingh en acty woester ontbonden,
Dan een Philosophe, die diepe gronden
Schijnt te bedisputeren aen zijn gesten,
Dit moetmen al onderscheyden ten besten. {Onderscheyt der actien, nae gemoeden oft staten der Menschen.}

Quotation

Zeuxis maeckte te groote hoofden : maer was goet Fruyt-schilder.

Quotation

38 Ons maeghden en Vrouwen met zedich wesen {Vrouwen standen en actien soet en zedich.}
Laet dan vercieren, om welstandts verstercken,
Al heeft Zeuxis Homerum (soo wy lesen)
Elders al te vele ghelooft in desen,
Dat hy in Wijfs beelden heeft laten mercken
Oock ernstighe, herde, en grove wercken,
Al welcke dinghen sullen den volwassen
Ionghelinghen, oft Amasones passen.

Quotation

38 Ons maeghden en Vrouwen met zedich wesen {Vrouwen standen en actien soet en zedich.}
Laet dan vercieren, om welstandts verstercken,
Al heeft Zeuxis Homerum (soo wy lesen)
Elders al te vele ghelooft in desen,
Dat hy in Wijfs beelden heeft laten mercken
Oock ernstighe, herde, en grove wercken,
Al welcke dinghen sullen den volwassen
Ionghelinghen, oft Amasones passen.

 
39 Sonderlinghe stercke ghestelde Mannen
Sullen doen gheweldigh’ acten en standen {Standen en actien nae de macht der Beelden.}:
maer Ionckheyt, die swaermoedicheyt wil bannen,
Moet wesen wacker met leden ontspannen,
Gants vry en los, nu de stellinghe van den
Oude Mannen, die sullen metten handen
Yet vattend’ hun swacke lijf onderhouden,
Met vermoeyde beenen gheneyght om vouden.

Quotation

38 Ons maeghden en Vrouwen met zedich wesen {Vrouwen standen en actien soet en zedich.}
Laet dan vercieren, om welstandts verstercken,
Al heeft Zeuxis Homerum (soo wy lesen)
Elders al te vele ghelooft in desen,
Dat hy in Wijfs beelden heeft laten mercken
Oock ernstighe, herde, en grove wercken,
Al welcke dinghen sullen den volwassen
Ionghelinghen, oft Amasones passen.

 
39 Sonderlinghe stercke ghestelde Mannen
Sullen doen gheweldigh’ acten en standen {Standen en actien nae de macht der Beelden.}:
maer Ionckheyt, die swaermoedicheyt wil bannen,
Moet wesen wacker met leden ontspannen,
Gants vry en los, nu de stellinghe van den
Oude Mannen, die sullen metten handen
Yet vattend’ hun swacke lijf onderhouden,
Met vermoeyde beenen gheneyght om vouden.

 
40 Summa, nae Persoons crachten en ghemoeden
Sullen dan alle bootsen zijn bevonden,
Oock nae hun doen, als wel is te bevroeden :
Want hem een vecht-boots al anders sal spoeden,
In stellingh en acty woester ontbonden,
Dan een Philosophe, die diepe gronden
Schijnt te bedisputeren aen zijn gesten,
Dit moetmen al onderscheyden ten besten. {Onderscheyt der actien, nae gemoeden oft staten der Menschen.}

Quotation

[...] oversulcx, als desen grooten Meester [Zeuxis] voor-genomen hadde den inwoonderen van Crotona een uytnemende schoon vrouwelick Beeldt nae te laeten, soo en vond hy het niet gheraedtsaem de gheheele volmaecktheydt van d'aller bevallighste schoonigheydt in een lichaem te soecken, maer hy heeft vijf van d'aller schoonste Maeghden uytghepickt, ten eynde dat hy uyt d'ernstighe opmerckinghe der selvigher de rechte schoonheydt, die nae 't segghen van Lucianus {In Hermetino} noodtsaeckelijck maer een wesen kan, moght ghevinden

Quotation

[...] soo en kan 't niet schaeden dat men tot de bevalligheydt van Apelles toe voeght de gheluckighe stoudt-moedigheydt van Zeuxis, d'onvermoeyde naersticheydt van Protogenes, de kloecke diepsinnigheydt van Timanthes, als oock de hooghstaetelicke grootsheydt van Nicophanes.

Quotation

Daer is maer eene Konst ende maniere van Schilderen, in welcke Zeuxis, Aglaophon, Apelles een verscheyden handelinghe volghden; ende nochtans en was daer onder dese groote Meesters niet eenen dien yet tot de Konst scheene te ontbreken.

Quotation

Aller menschen ghesicht en is niet begaeft met de selvighe oordeelenskracht; seght Plutarchus {apud Stobaeum ser de Venere & amore}, 't eene ghesicht is meer volmaeckt door de Nature en beter geoffenet door de konst als het ander om het gene schoon is te onderkennen. Hier uyt ontstaet het dat de Schilders met een vaerdighe gauwigheyd van de ghedaenten ende ghestaltenissen der dingen weten te oordeelen. Als een onwetend mensche, eenen rechten Idioot, volmondelick bekendt dat hy de Venus die Zeuxis gheschildert hadde niet schoon en vond; Neem mijne ogen seyde Nicomachus, en sy sall een Godinne schijnen te sijn.

Quotation

Daer plaght ghemeynlick op ’t gheniet van d’eere een vrymoedige stoutvaerdigheyd der Konste te volghen. ’t Is ongelooflick, seght Plinius {Lib. xxxiv. Cap.7}, hoe dapper de Konst, eerst door een gheluckighe uytkomste, en daer nae door een seeckere stoutmoedigheyd heeft toeghenomen. Alwaer wy door de gheluckighe uytkomste anders niet en moghen verstaen, dan d’aensienlicke eerbiedigheyd die dese Konsten hadden soo langhe als Koningen en Republijcken veele wercks van de selvighe maeckten. Daer nae, seght Plinius noch voorder wierd de Konst dapper ghevoordert door een seekere stoutmoedigheyd, ons met dese woorden te verstaen ghevende dat de voornoemde gheluckighe uytkomste de Konstenaers door ’t gevoelen van de soete eer-ketelingh soo verde braght dat sy sich niet en schroomden de hand aen eenighe nieuwe en onghehoorde wercken te slaen, de gheweldighe Colossen van d’oude Meesters gheven hier van ghetuyghenis; en Plinius, in de voorghemelde plaetse, naemt eenighe Colossisiche wercken der ouder Konstenaeren tot bewijs van haere voordvaerende stoutmoedigheyd. Zeuxis was meest van allen vermaerd over sijne stoutigheydt; hy is vaerdighlick door de deure die hem Apollodorus gheopent hadden inghestept, seght Plinius wederom in de selvighe plaetse, het penceel, ’t welck nu vry wat bestaen dorst, tot meerder eere ende aensienlickheyd brengende. Van de stoutigheyd deses uytnemenden Konstenaers siet Lucianus in sijn Boecksken ’t welck Zeuxis gheheeten wordt.

Quotation

Ghelijck dan de oude Konstenaers een seer treffelicke maniere van wercken ghehadt hebben, soo hadden sy mede een sonderlinghe gaeve om sich de waere verbeeldinghe van allerley beweghinghen onses ghemoeds op ’t aller levendighste voor te stellen; ja wy moghen ’t oock vrijelick daer voor houden, dat sy haere wercken nimmermeer met sulcke bequaeme uytdruckinghen van de verscheydene herts-tochten souden vervult hebben, ’t en waer saecke dat sy met pijne waerd gheacht hadden alle die naturelicke beroerten wijslick nae te speuren door de welcke ons ghemoed verruckt ende den gewoonlicken schijn onses wesens verscheydenlick verandert wordt. Zeuxis heeft de schilderije van Penelope gemaeckt, so dat hy de sedigheyd haeres eerbaeren wesens daer in konstighlick schijnt uytghedruckt te hebben. Plin. XXXV.9. Timomachus heeft den raesenden Aiax afghemaelt, en hoe hy sich in dese uytsinnighe dolligheyd al aenstelde Philostr. Lib. II. de vita Apollonii. Cap. 10. Silanion heeft den wrevelmoedighen Konstenaer Apollodorus ghemaeckt; ende overmids desen Apollodorus eenen rechten korselkop was, soo ist dat Silanion niet alleen den Konstenaer selver, maer sijn koppighe krijghelheydt met eenen oock in ’t koper heeft ghegoten Plin. XXXIV.8. Protogenes heeft Philiscus geschildert, als wesende met eenighe diepe bedenckinghen opghenomen Plin. XXXV.10. Praxiteles heeft Phryne ghemackt, als of men haer weelderigh herte in een volle Zee van vreughd en wellust sach swemmen, Plin. XXXIV.8. Parrhasius maeckten eenen jonghelingh die in sijne wapenrustinge om strijd loopt, Plin. XXXV.10. Den Anapanomenos van Aristides sterft uyt liefde van sijnen broeder, Plin. ibidem. Philostratus {Iconoum Lib. I. in Ariadne} beschrijft ons de schilderije van eenen Bacchus die maer alleen bekent wordt by de minne-stuypen die hem quellen. Dese exempelen gheven ons ghenoegh te verstaen, hoe grooten ervaerenheyd d’oude Meesters in’t uytdrucken van allerley beroerten ende beweghinghen ghehad hebben;

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[...] want Zeuxis plaght de ghedeelten des lichaems wat meer toe te gheven, en de selvighe grooter te maecken; achtende dat de staetelickheyd ende Majesteyt sijner beelden door die middel vermeerdert wierd.

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Zeuxis, Polygnotas, ende Euphranor hebben met eenen sonderlingen arbeyd ghesocht haere stucken behoorlicker wijse te beschaduwen ende met eenen levendighen gheest in te aessemen; soo plaghten sy mede daer nae te staen datse in haere verdiepsels ende verhooghsels den oppersten lof boven d’andere Meesters moghten verwerven. Philostr. Lib. II. Cap. 9. De vita Apollonij.

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Korts naer desen geestighe Apollodorus, is die uytmuntende Zeuxus ten voorschijn ghekomen, die onse Konst een grooten luyster heeft weten te geven, soo dat hy de Vogelen door sijn geschildert fruyt heeft weten uyt de lucht te lock, en door sijn natuerelijck nabootsen in de selve een begeerte verwect om te prouven, en daer toe vliegende sijnse bedrogen gheweest.

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Quoy qu’il en soit, cela vous peut faire souvenir du reproche qu’on fit à un ancien Orateur, d’avoir tres-improprement parlé d’un Promethée peint au Temple de Minerve par Parrhasius dans Athenes. Car luy estant venu dans l’esprit ce qu’on avoit escrit des raisins representez par Zeuxis, que de petits moineaux venoient bequeter ; il creut qu’il ne pouvoit mieus louër ce Promethée, que de dire qu’il estoit tel qu’on voyoit souvent les Vaultours se jetter dessus pour luy perçer le costé, & se repaistre de son foye. Cependant c’estoit tres-mal rencontré à luy, d’autant qu’il n’est pas imaginable que des Vaultours entrent dans un Temple frequenté comme celuy de Minerve Athenienne, encore que des moineaux se puissent hazarder d’aller donner du bec contre un tableau exposé au jour, selon que les Peintres ont accoustumé d’y mettre leurs ouvrages.
L’on ne sçauroit donc nier que la peinture ne soit fort spirituelle, & tres propre à exercer le jugement en beaucoup de façons.

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Aristote {L. de Poet. c. 6} le [ndr : Zeuxis] reprent aussi de n’avoir pas exprimé comme Polygnotus les mœurs, ny fait comprendre les passions, quoy que Pline {L. 35. c. 9. & 10.} dise qu’elles étoient visibles dans sa Penelope qui fit un de ses chefs-d’œuvres […]. Le peintre Aristide est le premier de tous qui se servit de la Morale dans sa profession, & qui sçeut pendre l’Ame avecque ses pensées aussi bien que le corps, par l’expression visible de tous les mouvemens interieurs ; les couleurs dont il [ndr : Aristide] se servoit estoient neantmois trouvées un peu rudes de son tems.

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II. Was das Gemähl seye, p. 128
Wegen der sichtbarlichen Abbildungen wird das Gemähl ein lieblicher Betrug der Augen genennet/ und ist der beste Mahler der beste und redlichste Betrüger besagten// fürnemsten Sinnes/ deß Gesichts. Sie ist ein zuläßiger und löblicher Betrug/ abgesehen von der Gleichheit der Natur; massen alle Künste ihre Herzwurzel gleichsam in deren natürlichen Wesen habe[n]/ von welchen sie herstammen/ und nachgehends/ als abgesonderte Zweige verpflanzet und neuen Safft und Kräfften erlanget haben.
Also hat Zeuxis die Vögel betrogen/ in dem er Weintrauben mit so natürlichen Farben gemahlt/ daß sie selbe herzugelocket/darvon zu picken/wie der Poet sagt : […
]

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Zeuxis hat der Helenä Bildnis mit so überholder Schönheit gemahlet / daß die lebendige Helena / von der verstorbnen und gemahlten gleichsam überwunden worden; also / daß fast gantz Griechenland zugeloffen / daß Kunststück mit Verwunderung anzusehen /und unter andernauch Nicostratus / welcher der Zeit nicht für dengeringsten Meister dieser Kunst gehalten wurde: dieser erstaunte ob dem ersten Anblick solches Bildes / daß er gleich einem Stein ohne Bewegnis darbey stehend verblieben / und von der Betrachtung solches Gemählsenzucket / von einemandern unbedachtsamen Gesellen geschüttelt und gleichsam von dem Schlafe erwecket werden wolte / mit befragen: was er an dem Gemähl so groß verwunderte? darauf Nicostratus geantwortet: Dieses ist kein Bild für die Nachteulen / und wann da deine ungeschickte Augen / mit den meinigen vertauschen köntest / so würdest du diese Frage eines Blinden / an mich nicht gelangen lassen. Also wäre zu wünschen / daß die Künstler allein von der Künste und nicht di Unverständigen wie die Blinden von der Farbe redeten.

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Thus Aglaphontes us’d but one Colour, no more did Nitia the Athenian Painter ; and it was this Relievo also for which the famous Zeuxis became so renound’d : not to insist on Heredices the Corinthian, and Thelophanes the Sicyonian, who were both of them but Monochromists ; and, ‘till Cleophanes came amongst them, no dissemblers, as owning no other Colours but those eminent Contraries ; that is, the lights and the shades, in the true managing whereof, so many wonders are to be produc’d by this Art, and even a certain splendor, and beauty in the touches of the Burin, so as the very Union and colouring it self may be conceiv’d without any force upon the imagination, as we have before observed in these excellent Gravings of Natalis, Rouslet, and Poisly, after Bourdon ; and in what Greuter, Blomart, and some others have done after Monsieur Poussin, Guido Rhene, Cortoon, &c.

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Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

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Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

Quotation

Or cela n’est pas fort difficile à résoudre, puisqu’avec le seul Traitté de Leonard de Vinci on peut monstrer assez vraisemblablement, qu’un Peintre, ayant esté bien instruit dés sa jeunesse en toutes les connaissances nécessaires à sa profession, par la methode qu’il prescrit au premier chapitre de son livre, il ne peut manquer d’estre habille-homme : mais après cela, si la nature le favorise du Genïe de l’Art, qui est la vivacité et le caprice de l’Invention, et du Talent de la Grace, (que l’estude ne sçauroit donner), il faut par necessité qu’il reussisse excellent et si ses Ouvrages sont précisément conformes à tout ce qui est enseigné dans la suite de cette Dissertation, on en pourra dire les mesmes choses que de ces Chef-d’œuvres d’Apelles, de Zeuxis, et de Parrhasius.

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{Couleur ou Cromatique. Troisième Partie de la Peinture.}
Aussi ne voit-on personne qui rétablisse *la † CROMATIQUE, & qui la remette en vigueur au point que la porta Zeuxis, lors que par cette Partie, qui est pleine de charmes & de magie, & qui sçait si admirablement tromper la veuë, il se rendit égal au fameux Apelle, le Prince des Peintres, & qu’il merita pour toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde. Et comme cette partie (que l’on peut dire l’ame & le dernier achevement de la Peinture) est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire *sa Sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard & cette tromperie l’ayent jamais deshonorée, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite : Il sera donc tres-avantageux de la connoistre.

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’T en is oock niet geraden, seght Franciscus Iunius, dat wy ons selven tot eenen Meester alleen overgeven, om die in alle dingen te volgen: Apelles was ongetwijffelt den aldervermaersten, nochtans hebben hem wel eenige in ’t een of ’t ander deel te boven gegaen: Hy wiert wel van d’Oude Meesters gepresen, maer niet dat hy alleen behoorde na-gevolght te worden. {Hoemen van verscheyde Meesters het beste moet kiesen ende t’samen voegen.} ’t Soude wel Goet zijn als Apelles te werden, maer wat kan ’t schaden datmen tot de bevalligheyt van Apelles toevoeght de Geluck-stoutigheyt van Zeuxis, d’onvermoeyde neerstigheydt van Protogenes, de kloecke diepzinnigheydt van Nicophanes; ende andere hare deughden meer aen te namen. Soo seggen wy nu oock, wat kan het hinderen soo wy Raphel Vrbijn als een lichtende Fackel in fraye ordineeringhe, zedige besigheyt der Beelden, ende grootse gedachten willen navolgen, dat wy daer by soecken te krijgen de wisse Teyckeningh en vaste omtrecken van Carats, Testa ende andere; de bevalligheydt, cierlijcke playsantie, ende rijcke Majesteyt van Pietro de Cortone, de verstandige waernemingh der vlacke schaduwen en dagen, Crokeringh ende natuerlijcke Coloreeringh van Poussijn, Barotius, Symon Vouet, ende watmen meer na sijn humeur en gave oordeelt, in andere Meesters, navolgenswaerdigh te zijn.

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Now the Effects proceeding from Proportion are unspeakable, the Principal whereof, is that Majestie and Beautie which is found in Bodies, called by Vitruvius, EURITHMIA. And hence it is, that when behold a well-proportioned thing, we call it Beautiful, as if we should say, Indued with that exact and comely Grace, whereby all the Perfection of sweet Delights belonging to the Sight, are communicated to the Eye, and so conveyed to the Understanding.
But if we shall enter into a farther Consideration of this
Beauty, it will appear most evidently in things appertaining to Civil Discipline ; for it is strange to consider what effects of Piety, Reverence and Religion, are stirred up in mens Minds, by means of this suitable comeliness of apt proportion. A pregnant example whereof we have in the Jupiter carved by Phidias at Elis, which wrought an extraordinary sense of Religion in the People, whereupon the antient and renowned Zeuxis well knowing the excellency and dignity thereof, perswaded Greece in her most flourishing Estate, that the Pictures wherein this Majesty appeared were dedicated to great Princes, and consecrated to the Temples of the Immortal gods, so that they held them in exceeding great estimation ; partly because they were the Works of those famous Masters, who were reputed as gods amongt men ; and partly because they not only represented the Works of God, but also supplyed the defects of Nature : ever making choice of the Flower and Quintessence of Eye-pleasing delights.

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Whereas in every Work there is some one entire Figure, whereunto all the particulars of the whole History ought to be principally referred, the Painter ought not to imagine, […] that therefore he shall deserve commendation, but rather discredit, for it is most certain that Work will prove offensive, where some inferiour and by matter, is more curiously handled then the principal, and the rather, because the other Parts cannot chuse but loose their Grace. A thing which hath caused divers excellent Painters (as well new) as antient […] to leave their Works imperfect, which they could not remedy any other way, then by utterly defacing that which they had done, were it never so excellent.
A most pregnant example whereof we have in that antient
Painter Euphzanor ; who being to draw the Twelve gods in Athens, he began with the Picture of Neptune, which he wrought so exquisitely both for proportion, colour, and all other points ; that purposing afterwards to make Jupiter with far greater perfection, he had so spent his conceit in the First Figure that he was not able afterwards to express any of other gods, much less Jupiter) the like Disgrace happened to Zeuxes by the Naturalness of his Grapes, and the Imperfection of the Boy, not unlike unto which was that of Leon: Vincent of late Dayes, who being to Paint Christ at his last Supper in the middst of his Disciples in the Refectory of St. Maria de Gratia in Milane, and having finished all the other Apostles, he represented the tow James’s with such perfection of Grace and Majesty, that endeavouring afterwards to express Christ, he was not able to perfect and accomplish that sacred Countenance, […]. Whence my Council is ; that for the avoiding of the like Errors, we examine the original thereof, having an especial regard to our proportions ; as the cheif Cause of the grossness, slenderness, clownishness, and daintyness of Bodies : whence all the Beauty and Ill-favourdness of Pictures proceedeth ; wherefore let each Body have his true and particular proportion […].

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{In welchen Studen jeder von den Alten oder antichen bäst qualificirt gewesen.} Es ist dieses bey unserer Kunst gewöhnlich/ auch so wol an den antichen/ als modernen/ zu ersehen/ daß der eine in einem/ der andere in etwas anders/ die wenigsten in allem/ excelliret und Meister gewesen. {Die Griechen.} Dann Apollodorus legte sonderlich der Schönheit zu. Zeuxis machte zu große Köpfe/ ware aber ein künstlicher Obst-Mahler. Eumarus gewöhnte sich/ alles nach dem Leben nachzubilden. Protogenes konte erstlich nur Schiffe mahlen. Apelles war in allem zierlich. Parrhasius ware gut in seinen Umrißen; Daemon, reich von invention; Timanthes verständig in allen seinen Werken/ auch immer verborgenen Sinns und Meinung; Pamphilus, gelehrt; Nicomachus, geschwind; Athenion, tieffsinnig; Nicophanes, sauber und nett; Amulius schön mit Farben; Pausias, munter in Bildung der Kinder und Blumen; Asclepidorius gut in dem messen und in den proportionen; Amphion, von Anordnung, Serapio, vernünftig in großen; Pireikus, in kleinen Sachen; Antiphilus in klein- und großen ; Dyonisius, konte nur Menschen mahlen; Euphranor, alles; Nicias, Thiere/ besonderlich Hunde. Nicophanes, konte wol nach-copiren/ und war in seinen Werken sauber; Mechophanes zu rauh in den Farben; Nealces, gut im ausbilden; Aristides, in affecte ; Clesides, nach dem Leben ; Ludius, in Landschaften.

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Aussi ne voit on personne qui rétablisse la beauté des couleurs, que les Romains nomment Cromatique, & qui la remettent en vigueur au point que l’a porta Zeuxis, lorsque par cette partie, qui est pleine de charmes & de magie & qui sçait si admirablement tromper la veuë qui se rendit égal au fameux Apelles, le Prince des Peintres, & qu’il merita toûjours la reputation qu’il s’est établie par tout le monde.
Et comme cette partie [ndr la chromatique], que l’on peut dire la fin & le dernier achevement de la Peinture, est une beauté trompeuse, mais flateuse & agreable, on l’accusoit de produire sa sœur, & de nous engager adroitement à l’aimer : Mais tant s’en faut que cette prostitution, ce fard, & cette tromperie l’ayent jamais deshonoré, qu’au contraire elles n’ont servy qu’à sa loüange, & à faire voir son merite ; il sera donc tres avantageux de la connoistre.

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Cependant, interrompit Pymandre, si un grand ouvrage est traité avec le mesme art qu’un plus petit, le plus grand ne doit-il pas estre plus estimé ?
Il est vray, répondis-je ; mais c’est en quoy ils trouvoient de la difficulté, demeurant quasi tous d’accord qu’on ne peut faire paroistre tant de force dans une grande disposition d’ouvrage que dans un tableau qui est composé de peu de figures ; & la raison qu’ils en apportoient, est que la Peinture a ses bornes & ses limites […].
Cependant, dit Pymandre, il me semble qu’il faut bien plus de science pour traitter un grand ouvrage, pour le bien disposer, pour le remplir d’une infinité de differentes figures, d’habits, d’accomodemens, & pour y faire paroistre toutes ces parties dont vous m’avez parlé, que pour peindre seulement trois ou quatre figures ensemble.
Je vous avouë, repartis-je, que pour bien representer un grand sujet, il faut beaucoup plus de science, plus de travail, & que c’est-là qu’un Peintre a toute l’estendüe necessaire pour donner des marques de son sçavoir. Mais il y en a qui vous diront que ce n’est pas dans ces rencontres que l’art peut faire paroistre davantage sa puissance & la force de ses charmes.

 
[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.


[…] Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir exécuté ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles se voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

Pour moy, respondit Pymandre, je ne voudrois pas donner mon jugement là dessus ;
mais j'ay leu que Zeuxis ayant peint une Centaure, se fascha voyant que l’on en estimoit plustost la nouvelle invention, que l’art qu’il avoit employé à la bien representer, estimant davantage cette derniere partie que la premiere. Et j’ay encore remarqué que les Anciens ont fait beaucoup de cas de plusieurs tableaux qui n’estoient que de peu de figures.
C’est pourquoy, repris-je, ceux qui ont une inclination particuliere pour les Ouvrages du Titien, & des autres Peintres de Lombardie, disent que si les Anciens ont receu beaucoup de loüanges pour des sujets de peu de figures, l’on ne doit pas trouver à redire si le Titien pour les imiter a plustost tasché d’acquerir la partie de bien peindre, que celle qui regarde les grandes dispositions, & la connoissance particuliere de l’Histoire & des Coustumes.

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[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.

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[...] De sorte, dist Pymandre, que je puis sur cela vous faire une question, & vous demander ce que l’on doit le plus estimer dans un tableau ou le genie du Peintre, ou la force de l’Art.
Comme l’esprit du Peintre paroist dans tout ce qu’il fait, repartis-je, vous pourriez plustost demander lequel est le plus digne d’estime, ou celuy qui sçait tromper par la force de son Art, ou celuy qui montre beaucoup d’invention & de feu dans de grands ouvrages, mais qui ne trompent point comme les autres.


[…] Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir exécuté ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles se voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

Pour moy, respondit Pymandre, je ne voudrois pas donner mon jugement là dessus ;
mais j'ay leu que Zeuxis ayant peint une Centaure, se fascha voyant que l’on en estimoit plustost la nouvelle invention, que l’art qu’il avoit employé à la bien representer, estimant davantage cette derniere partie que la premiere. Et j’ay encore remarqué que les Anciens ont fait beaucoup de cas de plusieurs tableaux qui n’estoient que de peu de figures.
C’est pourquoy, repris-je, ceux qui ont une inclination particuliere pour les Ouvrages du Titien, & des autres Peintres de Lombardie, disent que si les Anciens ont receu beaucoup de loüanges pour des sujets de peu de figures, l’on ne doit pas trouver à redire si le Titien pour les imiter a plustost tasché d’acquerir la partie de bien peindre, que celle qui regarde les grandes dispositions, & la connoissance particuliere de l’Histoire & des Coustumes. Car c’est ainsi qu’ils jugent en deux manieres de l’obligation du Peintre ; l’une qui est de sçavoir comment les choses doivent estre historiées ; & l’autre de les sçavoir bien peindre. Or comme la derniere est sans doute tres-difficile, puis qu’en cet art, comme dans plusieurs autres, l’execution est au dessus de la theorie, il est toujours plus avantageux de pouvoir faire que de sçavoir simplement ce qu’il faut faire, ils trouvent qu’il est plus glorieux au Titien d’avoir executé ses ouvrages dans la perfection des couleurs où elles voyent, que s’il n’eust sceu, comme quantité d’autres Peintres, qu’inventer de grands sujets qui n’eussent pas esté peints avec cette beauté que l’on admire dans ses ouvrages.

Quotation

Traveller,
           
Design is the Expressing with a Pen, or Pencil, or other Instrument, the Likeness of any Object by its out Lines, or Contours ; and he that Understands and Mannages well these first Lines, working after Nature still, and using extream Diligence, and skill may with Practice and Judgment, arrive to an Excellency in the Art.
                        Friend,
            Me thinks that should be no difficult Matter, for we see many whose Inclination carys them to Draw any thing they see, and they perform it with ease.
                       
Traveller,
            I grant you, Inclination goes a great way in disposing the Hand, but a strong Imagination only, will not carry a Painter through ; For when he compares his Work to
Nature, he will soon find, that great Judgment is requisite, as well as a Lively Fancy ; and particularly when he comes to place many Objects together in one Piece or Story, which are all to have a just relation to one another. There he will find that not only the habit of the Hand but the strength of the Mind is requisite ; therefore all the Eminent Painters that ever were, spent more time in Designing after the Life, and after the Statues of the Antients, then ever did in learning how to colour their Works ; that so they might be Masters of Design, and be able to place readily every Object in its true situation.
                        Friend,
            Now you talk of Nature and Statues, I have heard Painters blam’d for working after both.
                        Traveller,
            It is very true, and justly ; but less for working after Nature than otherwise. Caravaggio a famous Painter is blam’d for having meerly imitated Nature as he found her, without any correction of Forms. And Perugin, another Painter is blam’d for having wrought so much after Statues, that his Works never had that lively easiness which accompanies Nature ; and of this fault Raphael his Scholar was a long time guilty, till he Reform’d it by imitating Nature.

                        Friend,
            How is it possible to erre in imitating Nature ?
                        Traveller,
           
Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

Quotation

Traveller,
            I grant you, Inclination goes a great way in disposing the Hand, but a strong Imagination only, will not carry a Painter through ; For when he compares his Work to
Nature, he will soon find, that great Judgment is requisite, as well as a Lively Fancy ; and particularly when he comes to place many Objects together in one Piece or Story, which are all to have a just relation to one another. There he will find that not only the habit of the Hand but the strength of the Mind is requisite ; therefore all the Eminent Painters that ever were, spent more time in Designing after the Life, and after the Statues of the Antients, then ever did in learning how to colour their Works ; that so they might be Masters of Design, and be able to place readily every Object in its true situation.
                        Friend,
            Now you talk of Nature and Statues, I have heard Painters blam’d for working after both.
                        Traveller,
            It is very true, and justly ; but less for working after Nature than otherwise. Caravaggio a famous Painter is blam’d for having meerly imitated Nature as he found her, without any correction of Forms. And Perugin, another Painter is blam’d for having wrought so much after Statues, that his Works never had that lively easiness which accompanies Nature ; and of this fault Raphael his Scholar was a long time guilty, till he Reform’d it by imitating Nature.

                        Friend,
            How is it possible to erre in imitating Nature ?
                        Traveller,
           
Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

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Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

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Though Nature be the Rule, yet Art has the Priviledge of Perfecting it ; for you must know that there are few Objects made naturally so entirely Beautiful as they might be, no one Man or Woman possesses all the Advantages of Feature, Proportion and Colour due to each Sence. Therefore the Antients, when they had any Great Work to do, upon which they would Value themselves did use to take several of the Beautifullest Objects they designed to Paint, and out of each of them, Draw what was most Perfect to make up One exquisite Figure ; Thus Zeuxis being imployed by the Inhabitants of Crotona, a City of Calabria, to make for their Temple of Juno, a Female Figure, Naked ; He desired the Liberty of seeing their Hansomest Virgins, out of whom he chose Five, from whose several Excellencies he fram’d a most Perfect Figure, both in Features, Shape and Colouring, calling it Helena.

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Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind.

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Friend,
            When a Painter has acquired any Excellency in
Desinging, readily and strongly ; What has he to do next ?
                        Traveller,
            That is not half his Work, for then he must begin to mannage his
Colours, it being particularly by them, that he is to express the greatness of his Art. ’Tis they that give, as it were, Life and Soul to all that he does ; without them, his Lines will be but Lines that are flat, and without a Body, but the addition of Colours makes that appear round ; and as it were out of the Picture, which else would be plain and dull. ’Tis they that must deceive the Eye, to the degree, to make Flesh appear warm and soft, and to give an Air of Life, so as his Picture may seem almost to Breath and Move.
                        Friend,
            Did ever any Painter arrive to that Perfection you mention ?
                        Traveller,
            Yes, several, both of the
Antient and Modern Painters. Zeuxis Painted Grapes, so that the Birds flew at them to eat them. Apelles drew Horses to such a likeness, that upon setting them before live Horses, the Live ones Neighed, and began to kick at them, as being of their own kind. And amongst the Modern Painters, Hannibal Carache, relates to himself, That going to see Bassano at Venice, he went to take a Book off a Shelf, and found it to be the Picture of one, so lively done, that he who was a Great Painter, was deceived by it. The Flesh of Raphael’s Pictures are so Natural, that this seems to be Alive. And so do Titians Pictures, who was the Greatest Master for Colouring that ever was, having attained to imitate Humane Bodies in all the softness of Flesh, and beauty of Skin and Complexion.

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LE PRESIDENT. Si la Sculpture moderne l’emporte si fort sur la Sculpture antique par cet endroit que vous marquez [ndr : un bas-relief de François Anguier], il faut que la Peinture d’aujourd’huy soit bien superieure à celle des Anciens, puisqu’enfin c’est d’elle que la Sculpture a appris tous ces secrets de degradation & de perspective.
L’ABBE. J’en demeure d’accord, & la consequence en est tres juste ; mais puisqu’il s’agit presentement de la Peinture, il faut commencer par la distinguer suivant les divers temps où elle a fleuri, & en faire trois classes : Celle du temps d’Appelle, de Zeuxis, de Timante, & de tous ces grands Peintres dont les Livres rapportent tant des merveilles ; Celle du temps de Raphael, du Titien, de Paul Veronese, & de plusieurs autres excellens Maistres d’Italie, & Celle du siecle où nous vivons.
Si nous voulons suivre l’opinion commune qui regle presque toûjours le merite selon l'ancienneté, nous mettrons le siecle d'Apelle beaucoup au dessus de celuy de Raphael, & celuy de Raphael beaucoup au dessus du nostre ; mais je ne suis nullement d’accord de cet arrangement, particulierement à l'égard de la preference qu’on donne au siecle d’Apelle sur celuy de Raphael.
LE PRESIDENT. Comment pouvez-vous ne pas convenir d'un jugement si universel & si raisonnable, sur tout après estre demeuré d'accord de l'excellence de la sculpture de Phidias & de Praxitele ; car si la sculpture de ces temps-là l'emporte sur celle de tous les siecles qui ont suivi, à plus forte raison la Peinture, si nous considerons qu'elle est susceptible de mille beautez & de mille agrémens dont la Sculpture n’est point capable.
L'ABBE. C’est par cette raison là mesme que la consequence que vous tirez n’est pas recevable.
Si la Peinture estoit un Art aussi simple & aussi borné que l’est la Sculpture en fait d'ouvrages de ronde bosse, car c'est en cela seul qu'elle a excellé parmi les Anciens, je me rendrois à vostre advis, mais la Peinture est un Art si vaste de d'une si grande étenduë, qu'il n'a pas moins fallu que la durée de tous les siecles pour en découvrir tous les secrets & tous les mysteres. Pour vous convaincre du peu de beauté des peintures antiques, & de combien elles doivent estre mises au dessous de celles de Raphael, du Titien & de Paul Veronese, & de celles qui se font aujourd’hui, je ne veux me servir que des loüanges mesmes qu'on leur a données.

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Si nous voulons suivre l’opinion commune qui regle presque toûjours le merite selon l'ancienneté, nous mettrons le siecle d'Apelle beaucoup au dessus de celuy de Raphael, & celuy de Raphael beaucoup au dessus du nostre ; mais je ne suis nullement d’accord de cet arrangement, particulierement à l'égard de la preference qu’on donne au siecle d’Apelle sur celuy de Raphael.
LE PRESIDENT. Comment pouvez-vous ne pas convenir d'un jugement si universel & si raisonnable, sur tout après estre demeuré d'accord de l'excellence de la sculpture de Phidias & de Praxitele ; car si la sculpture de ces temps-là l'emporte sur celle de tous les siecles qui ont suivi, à plus forte raison la Peinture, si nous considerons qu'elle est susceptible de mille beautez & de mille agrémens dont la Sculpture n’est point capable.
L'ABBE. C’est par cette raison là mesme que la consequence que vous tirez n’est pas recevable.
Si la Peinture estoit un Art aussi simple & aussi borné que l’est la Sculpture en fait d'ouvrages de ronde bosse, car c'est en cela seul qu'elle a excellé parmi les Anciens, je me rendrois à vostre advis, mais la Peinture est un Art si vaste de d'une si grande étenduë, qu'il n'a pas moins fallu que la durée de tous les siecles pour en découvrir tous les secrets & tous les mysteres. Pour vous convaincre du peu de beauté des peintures antiques, & de combien elles doivent estre mises au dessous de celles de Raphael, du Titien & de Paul Veronese, & de celles qui se font aujourd’hui, je ne veux me servir que des loüanges mesmes qu'on leur a données.

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Le mesme Pline raconte encore que Parrhasius avoit contrefait si naïvement un rideau, que Zeuxis mesme y fut trompé. De semblables tromperies se font tous les jours par des Ouvrages dont on ne fait aucune estime. […] Le meme Autheur [ndr : Pline] rapporte comme une merveille de ce qu'un Peintre de ces temps, là en peignant un pigeon, en avoit représenté l'ombre sur le bord de l'auge où il buvoit. Cela montre seulement qu'on n'avoit point encore representé l'ombre qu'un corps fait sur un autre quand il le cache à la lumiere.

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Ce que je dis icy d'un tableau où il y a plusieurs figures, se doit entendre aussi d'un tableau où il n'y en a qu'une, parce que les différentes parties de cette figure sont entr'elles ce que plusieurs figures sont les unes à l'égard des autres. Comme ceux qui apprennent à peindre commencent par apprendre à designer le contour des figures, & à le remplir de leurs couleurs naturelles ; qu'ensuite ils s'étudient à donner de belles attitudes à leurs figures & à bien exprimer les passions dont ils veulent qu'elles, paroissent animées, mais que ce n'est qu'après un long-temps qu'ils sçavent ce qu'on doit observer pour bien disposer la composition d'un tableau, pour bien distribuer le clair obscur, & pour bien mettre toutes choses dans les regles de la perspective ; tant pour le trait que pour l’affoiblissement des ombres & des lumieres. 
De mesme ceux qui les premiers dans le monde ont commencé à peindre, ne se sont appliquez d'abord qu'à representer naïvement le trait & la couleur des objets, sans desirer autre chose, sinon que ceux qui verroient leurs Ouvrages peussent dire, voila un Homme , voila un Cheval, voila un Arbre, […]. Ensuite ils ont passé à donner de belles attitudes à leurs figures, & à les animer vivement de toutes les passions imaginables : Et voila les deux seules parties de la peinture, où nous sommes obligez de croire que soient parvenus les Appelles & les Zeuxis, si nous en jugeons par la vray-semblance du progrez que leur Art a pû faire, & parce que les Auteurs nous rapportent de leurs Ouvrages ; sans qu'ils ayent jamais connu, si ce n'est tres-imparfaitement, cette troisiéme partie de la peinture qui regarde la composition d'un tableau, suivant les regles & les égards que je viens d'expliquer.

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Comme ceux qui apprennent à peindre commencent par apprendre à designer le contour des figures, & à le remplir de leurs couleurs naturelles ; qu'ensuite ils s'étudient à donner de belles attitudes à leurs figures & à bien exprimer les passions dont ils veulent qu'elles, paroissent animées, mais que ce n'est qu'après un long-temps qu'ils sçavent ce qu'on doit observer pour bien disposer la composition d'un tableau, pour bien distribuer le clair obscur, & pour bien mettre toutes choses dans les regles de la perspective ; tant pour le trait que pour l’affoiblissement des ombres & des lumieres. 
De mesme ceux qui les premiers dans le monde ont commencé à peindre, ne se sont appliquez d'abord qu'à representer naïvement le trait & la couleur des objets, sans desirer autre chose, sinon que ceux qui verroient leurs Ouvrages peussent dire, voila un Homme , voila un Cheval, voila un Arbre, […]. Ensuite ils ont passé à donner de belles attitudes à leurs figures, & à les animer vivement de toutes les passions imaginables : Et voila les deux seules parties de la peinture, où nous sommes obligez de croire que soient parvenus les Appelles & les Zeuxis, si nous en jugeons par la vray-semblance du progrez que leur Art a pû faire, & parce que les Auteurs nous rapportent de leurs Ouvrages ; sans qu'ils ayent jamais connu, si ce n'est tres-imparfaitement, cette troisiéme partie de la peinture qui regarde la composition d'un tableau, suivant les regles & les égards que je viens d'expliquer.

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De mesme ceux qui les premiers dans le monde ont commencé à peindre, ne se sont appliquez d'abord qu'à representer naïvement le trait & la couleur des objets, sans desirer autre chose, sinon que ceux qui verroient leurs Ouvrages peussent dire, voila un Homme , voila un Cheval, voila un Arbre, […]. Ensuite ils ont passé à donner de belles attitudes à leurs figures, & à les animer vivement de toutes les passions imaginables : Et voila les deux seules parties de la peinture, où nous sommes obligez de croire que soient parvenus les Appelles & les Zeuxis, si nous en jugeons par la vray-semblance du progrez que leur Art a pû faire, & parce que les Auteurs nous rapportent de leurs Ouvrages ; sans qu'ils ayent jamais connu, si ce n'est tres-imparfaitement, cette troisiéme partie de la peinture qui regarde la composition d'un tableau, suivant les regles & les égards que je viens d'expliquer. [...] […] L'ABBE. Tous ces effets merveilleux de la peinture antique, n’empeschent pas que je ne persiste dans ma proposition ; car ce n'est point la belle ordonnance d'un tableau, la juste dispensation des lumières, la judicieuse degradation des objets, ny tout ce qui compose cette troisiéme partie de la peinture dont j'ay parlé, qui touche, qui charme & qui enleve. Ce n'est que la juste delineation des objets revétus de leurs vrayes couleurs, & sur tout l'expression vive & naturelle des mouvemens de l'ame, qui font de fortes impressions sur ceux qui les regardent. Car il faut remarquer que comme la peinture a trois parties qui la composent, il y a aussi trois parties dans l'homme par où il en est touché, les sens, le cœur & la raison. La juste delineation des objets, accompagnée de leur couleur, frappe agreablement les yeux ; la naïve expression des mouvemens de l’ame va droit au cœur, & imprimant sur luy les mesmes passions qu'il voit representées, luy donne un plaisir tres sensible. Et enfin l'entente qui paroist dans la juste distribution des ombres & des lumieres dans la degradation des figures selon leur plan & dans le bel ordre d'une composition judicieusement ordonnée, plaist à la raison, & luy fait ressentir une joye moins vive à la verité, mais plus spirituelle & plus digne d'un homme. Il en est de mesme des Ouvrages de tous les autres Arts […]. 
Je dis donc qu'il a suffi aux Appelles & aux Zeuxis pour se faire admirer de toute la Terre d'avoir charmé les yeux & touché le cœur, sans qu'il leur ait esté necessaire de posseder cette troisiéme partie de la peinture [ndr : la composition], qui ne va qu’à satisfaire la raison ; car bien loin que cette partie serve à charmer le commun du monde, elle y nuit fort souvent, & n'aboutit qu'à luy déplaire.

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[…] L'ABBE. Tous ces effets merveilleux de la peinture antique, n’empeschent pas que je ne persiste dans ma proposition ; car ce n'est point la belle ordonnance d'un tableau, la juste dispensation des lumières, la judicieuse degradation des objets, ny tout ce qui compose cette troisiéme partie de la peinture dont j'ay parlé, qui touche, qui charme & qui enleve. Ce n'est que la juste delineation des objets revétus de leurs vrayes couleurs, & sur tout l'expression vive & naturelle des mouvemens de l'ame, qui font de fortes impressions sur ceux qui les regardent. Car il faut remarquer que comme la peinture a trois parties qui la composent, il y a aussi trois parties dans l'homme par où il en est touché, les sens, le cœur & la raison. La juste delineation des objets, accompagnée de leur couleur, frappe agreablement les yeux ; la naïve expression des mouvemens de l’ame va droit au cœur, & imprimant sur luy les mesmes passions qu'il voit representées, luy donne un plaisir tres sensible. Et enfin l'entente qui paroist dans la juste distribution des ombres & des lumieres dans la degradation des figures selon leur plan & dans le bel ordre d'une composition judicieusement ordonnée, plaist à la raison, & luy fait ressentir une joye moins vive à la verité, mais plus spirituelle & plus digne d'un homme. Il en est de mesme des Ouvrages de tous les autres Arts […]. 
Je dis donc qu'il a suffi aux Appelles & aux Zeuxis pour se faire admirer de toute la Terre d'avoir charmé les yeux & touché le cœur, sans qu'il leur ait esté necessaire de posseder cette troisiéme partie de la peinture [ndr : la composition], qui ne va qu’à satisfaire la raison ; car bien loin que cette partie serve à charmer le commun du monde, elle y nuit fort souvent, & n'aboutit qu'à luy déplaire.
En effet, combien y a-il de personnes qui voudroient qu'on fist les personnages éloignez aussi forts & aussi marquez que ceux qui sont proches ; afin de les mieux voir, qui de bon cœur quitteroient le Peintre de toute la peine qu'il se donne à composer son tableau & à dégrader les figures sélon leur plan ; mais sur tout qui seroient bien aises qu'on ne fist point d'ombres dans les visages & particulièrement dans les portraits des personnes qu'ils aiment.

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Mais revenons à la Peinture. Je puis encore prouver le peu de suffisance des Peintres anciens par quelques morceaux de peinture antique qu'on voit à Rome en deux ou trois en-droits ; car quoy que ces ouvrages ne soient pas tout à fait du temps d’Appelle & de Zeuxis, ils sont apparemment dans la mesme manière ; & tout ce qu'il peut y avoir de difference, c'est que les Maistres qui les ont faits estant un peu moins anciens, pourroient avoir sçû quelque chose davantage dans la peinture. J’ay vû celuy des Nopces qui est dans la Vigne Aldobrandine, & celuy qu'on appelle le Tombeau d'Ovide. Les figures en sont bien dessinées, les attitudes sages & naturelles, & il y a beaucoup de noblesse & de dignité dans les airs de teste, mais il y a tres-peu d'entente dans le mélange des couleurs ; & point du tout dans la perspective ny dans l’ordonnance. Toutes les teintes sont aussi fortes les unes que les autres, rien n'avance, rien ne recule dans le tableau, & toutes les figures sont presque sur la mesme ligne, en sorte que c’est bien moins un tableau qu'un bas relief antique coloré, tout y est sec & immobile sans union, sans liaison, & sans cette mollesse des corps vivans qui les distingue du marbre & de la bronze qui les représentent. Ainsi la grande difficulté n'est pas de prouver qu'on l'emporte aujourd'huy sur Zeuxis, sur les Timantes & sur les Appelles, mais de faire voir qu’on a encore quelque avantage sur les Raphaels, sur les Titiens, sur les Pauls Veroneses, & sur les autres grands Peintres du dernier siecle. Cependant j'ose avancer qu'à regarder l'Art en luy-mesme, entant qu’il est un amas & une collection de preceptes, on trouvera qu'il est plus accompli & plus parfait presentement qu'il ne l'estoit du temps de ces grands Maistres.

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Ainsi la grande difficulté n'est pas de prouver qu'on l'emporte aujourd'huy sur Zeuxis, sur les Timantes & sur les Appelles, mais de faire voir qu’on a encore quelque avantage sur les Raphaels, sur les Titiens, sur les Pauls Veroneses, & sur les autres grands Peintres du dernier siecle. Cependant j'ose avancer qu'à regarder l'Art en luy-mesme, entant qu’il est un amas & une collection de preceptes, on trouvera qu'il est plus accompli & plus parfait presentement qu'il ne l'estoit du temps de ces grands Maistres.

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Quoy-qu’un Peintre ne doive rien négliger, il doit toutefois prendre garde à ne pas tant travailler pour aquerir de l’estime par la beauté des ornemens que par l’excellence de son principal ouvrage. Et c’est de quoy Zeuxis se plaint dans Lucien, disant avec indignation que l’on loûë dans la Peinture ce qui n’est que de la fange. Apulée nomme aussi les ornemens les feuïlles de l’art, & de veritables amusemens. C’est pourquoy comme le Peintre n’en doit pas faire le capital de son travail, cela ne merite pas aussi qu’on s’attache trop à les considerer.

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There hath been a continual Altercation between Painters and Carvers for Superiority in the Excellency of Art : but that Carvers may not pretend to excel Painters in the Essential part we will lay down how far they agree and then wherein the Carvers are Excel’d.
[...].
            And as there is no
Essential difference between two particular Men, both being Rational Creatures, so there is not between Painting and Carving, for both tend to the same End, by Representing Individual Substances ; and both must observe the same Geometrical Quantity in what they Represent.
            Suppose a
Painter and Carver were to Counterfeit the same Person, doubtless both would conceive the same Idea of him, proceeding in their Minds with the same discourse of Reason and Art, and (as before) observe the same Geometrical Quantity, endeavouring to make it as like the Person they Represent as they could : and so the Draught expressing the Idea’s of both the Workmen, would agree in expressing the true Resemblance, which is the Essence of this Art.
            ’Tis true one
Painteth and the other Carveth ; but this is a Material Difference only, which argues no Specifical Difference in Art or Science, and it is the Essential Difference alone that maketh a Distinction of Species and Diversity of Science.
If it be Objected that the
Carver maketh more of the Figure then the Painter, it is answer’d, more or less makes no Specifical or Proper Difference ; therefore it is the Defect of Matter, and not of Art, thus far the Arts are Analogical.
Now that this
Art far Excels Carving is easily Demonstrated, since on a Flat, it Represents Roundness and Thickness, exceeding therein the Power of Nature it self, expressing Life and Spirit far beyond Carving, as in these Instances.
Apelles Painted Alexander the Great so to the Life, that his Horse Bucephalus brought into the Room, immediately kneeld down supposing it his Master : His Horse he likewise Painted with such Spirit that other Horses began to Neigh, when they saw him.
Andreas Mantegna represented a Servant in Porta Vercellina, so Natural, that the Horses left not Kicking at it till there was no shape of a Man left.
[...].
            A
Venus cannot be made with that Allectation in Carving, since the Complection of the skin, with Colour of Eyes, Hair, &c. are requisite to the Perfection of a Beauty.
            Nor can
History be Carvd without great Defects, since all Distances require a Faintness of Colouring, as well as Diminution of Body : with many more Observations in Nature, onely Obvious to Colouring, of absolute Necessity for the Animating of Figures.

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Cette conclusion déplut à ceux qui étoient engagés dans l’amour de la couleur, tellement, qu’il s’en émeut une contestation, celui qui entreprit le parti proposa ces trois choses. Primo, que la couleur est aussi necessaire que le dessein. Secundo, qu’en diminuant le merite de la couleur, on diminuë celui du Peintre. Tertio, que la couleur a merité des loüanges en tous tems : pour soûtenir sa premiere proposition, il dit, qu’il falloit examiner, quelle est la fin en general, que le Peintre se doit proposer, & lequel du dessein ou de la couleur le conduit plus directement à cette fin ; que de dire que la fin de la Peinture est d’imiter la nature, ce n’est pas assez, puisque plusieurs autres arts se proposent la même chose ; de dire que ce soit pour tromper les yeux, cela ne suffiroit pas encore, si on y ajoutoit que cela se fait par le moyen des couleurs. Puis qu’il n y a que cette seule difference qui rende la fin du Peintre particuliere & qui le distingue d’avec les autres arts : car de pretendre que la fin du Peintre soit de plaire & de tromper, en feignant du relief sur une superficie plate, à quoi le dessein juste, & correct, pourroit réussir simplement avec du crayon sans la couleur, s’étoit se tromper sois-même, puisque, si le but est de plaire, c’étoit à la couleur qu’appartient cet avantage ; que le dessein avec toute sa justesse n’étoit connu que de trés peu de personnes, au lieu que la couleur charme tout le monde : que c’étoit peu de chose de plaire aux ignorants, que c’étoit beaucoup de ne plaire qu’aux sçavants ; mais que c’étoit une perfection consommée de plaire à tous universellement ; qu’ainsi il étoit d’une trés grande consequence de s’étudier à bien connoître la couleur, & de se rendre ses charmes familiers, afin de ne pas s’y laisser surprendre, & de pouvoir étudier le reste avec plus de liberté : qu’un tableau dessigné mediocrement, où les couleurs seroient en tout leur éclat, feroit plus d’agreables effets à la vuë, qu’un autre où le dessein seroit en sa plus parfaite justesse où la couleur seroit negligée, parce que la couleur en sa perfection representoit toûjours la verité & que le dessein ne pouvoit representer que la possibilité. L’on ajoûta que le dessein étoit commun avec les sculpteurs & Graveurs, mais que la couleur est le propre du Peintre, & que l’on ne pouvoit prendre cette qualité qu’à cause de l’emploi des couleurs, qui sont capables de tromper les yeux en imitant les choses naturelles ; qu’étant donc la chose qui le distingue d’avec les autres Artisans, elle devoit être considerée d’une façon singuliere, qu’aussi Zeuxis avoit obtenu autant de louanges par l’intelligence des couleurs, qu’Appellés pour la justesse du dessein : que si comparant l’état auquel se trouve maintenant l’une & l’autre, la couleur avoit cet avantage d’être moins d’écheue, mais plûtôt augmentée par l’usage de l’huile, elle devoit par consequent meriter d’autant plus de loüanges, & qu’étant une partie essentielle pour conduire le Peintre à la perfection de son Ouvrage ; elle devoit être considerée aussi necessaire que le dessein.

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La PROPORTION est une juste correspondance du tout avec ses parties ; la plûpart des hommes se peuvent rendre capables de cette connoissance, & la GEOMETRIE qui est la source ou comme la guide de tous les autres Arts, est en même tems le chemin le plus assuré pour y parvenir. Entre les Peintres & les Sculpteurs anciens qui ont excellé dans cette partie Quintilien & beaucoup d’autres ont singulièrement remarqué PARRHAZIUS, PRAXITELLE, ZEUXIS, LYSIPPE, POLICRETTE, EUPHRANOR, & le celebre ASCLEPIODORE, à qui l’excellent APELLE faisoit gloire de ceder dans la justesse des proportions.

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La fin de la Peinture, comme de la Poësie, est de surprendre de telle sorte que leurs imitations paroissent des vérités. Le Tableau de Zeuxis, où il avoit peint un Garçon (a) qui portoit des raisins, & qui ne fit point de peur aux oiseaux, puisqu’ils vinrent becqueter ces fruits, est une marque que la Peinture de ces tems-là avoit accoutumé de tromper les yeux en tous les objets qu’elle representoit.

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I am sorry the Great, and Principal End of the Art has hitherto been so little Consider’d ; I don’t mean by Gentlemen only, or by Low, Pretended Connoisseurs, But by those who ought to have gone higher, and to have Taught Others to have Followed them. ‘tis no Wonder if many who are accustom’d to Think Superficially look on Pictures as they would on a Piece of Rich Hangings ; Or if such as These, (and some Painters among the rest) fix upon the Pencil, the Colouring, or perhaps the Drawing, and some little Circumstantial Parts in the Picture, or even the just Representation of common Nature, without penetrating into the Idea of the Painter, and the Beauties of the History, or Fable. I say ‘tis no wonder if this so frequently happens when those whether Ancients or Moderns, who have wrote of Painting, in describing the Works of Painters in their Lives, or on other occasions have very rarely done any more ; Or in order to give us a Great Idea of some of the Best Painters have told us such Silly Stories as that of the Curtain of Parrhasius which deceiv’d Zeuxis, of the small lines one upon the other in the Contention between Apelles and Protogenes, (as I remember, ‘tis no matter of whom the Story goes) of the Circle of Giotto, and such like ; Trifles, which if a Man were never so expert at without going many degrees higher he would not be worthy the name of a Painter, much less of being remembred by Posterity with Honour.
‘tis true there are some Kinds of Pictures which can do no more than Please, as ‘tis the Case of some Kinds of Writings ; but one may as well say a Library is only for Ornament, and Ostentation as a Collection of Pictures, or Drawings. If That is the Only End, I am sure ‘tis not from any Defect in the Nature of the Things themselves.
I repeat it again, and would inculcate it, Painting is a fine piece of Workmanship ; ‘tis a Beautiful Ornament, and as such gives us Pleasure ; But over and above this We PAINTERS are upon the Level with Writers, as being Poets, Historians, Philosophers and Divines, we Entertain, and Instruct equally with Them.
This is true and manifest beyond dispute whatever Mens Notions have been ;

To wake the Soul by tender Strokes of Art,
To raise the Genius, and to mend the Heart.

Mr. Pope.

is the business of Painting as well as of Tragedy.

Quotation

Are. [...] Le peintre doit donc s’appliquer non seulement à imiter, mais aussi à surpasser la nature ; je dis surpasser en partie ; car au reste ce seroit un prodige, non pas s’il arrivoit à l’imiter, mais meme s’il en approchoit : ce qui consiste à faire paroitre par le moien de l’art dans un seul corps toutes les perfections de la beauté, qu’a peine la nature a coutume de faire voir en mille. Parcequ’il ne se trouve point de corps humain de si parfaite beauté, qu’il ne lui en manque quelque partie. Aussi avons nous l’exemple de Zeuxis, qui aiant à peindre Helene dans le temple des Crotoniates, choisit cinq jeunes filles qu’il vit toutes nûes, & prenant les belles parties de l’une, qui manquoient à l’autre, reduisit son Helene au point de perfection que la renomée en subsiste encore aujourdhui. Ce qui peut aussi servir d’avis pour ceux qui ont la temerité de faire tous leurs ouvrages de pratique. Mais si les peintres veulent trouver sans peine le parfait modelle d’une belle femme, ils n’ont qu’a lire les stances dans les quelles l’Arioste decrit admirablement les beautés de la Fée Alcine. Il [sic] verront en même tems, combien les bons poetes sont aussi bons peintres. [...]
Elle etoit aussi bien faite que les plus industrieux peintres eussent sû la representer.
Voila pour la proportion que l’ingenieux Arioste etablit 1, la plus exacte que les plus excellents peintres puissent former : il se sert de l’epithete industrieux, pour marquer le soin, qui convient un excellent ouvrier.
[...]
Avec une blonde chevelure longue & nouée :
Il n’y a point d’or qui eclatte & brille davantage.
De la meme façon que l’Arioste a dit tresse blonde, il pouvoit dire tresse d’or : mais peut etre crut-il, que l’expression auroit trop senti son poete : d’ou on peut conclure que le peintre doit imiter l’or, & non pas l’emploier dans sa peinture comme font ceux qui peignent en mignature, ensorte qu’on puisse dire ces cheveux ne sont pas d’or, & cependant ils semblent briller comme l’or. Je suis bien aise d’avoir touché ce point, quand meme la chose ne meriteroit pas qu’on y fit reflexion. […] On doit conclure de là, que le peintre est obligé d’imiter les proprietés de chaque chose avec les distinctions qui leur conviennent.

 
1 On a encore ici prophetisé, plus pour ce tems ici, que pour aucun autre qui ce soit passè.

Quotation

Are. [...] Le peintre doit donc s’appliquer non seulement à imiter, mais aussi à surpasser la nature ; je dis surpasser en partie ; car au reste ce seroit un prodige, non pas s’il arrivoit à l’imiter, mais meme s’il en approchoit : ce qui consiste à faire paroitre par le moien de l’art dans un seul corps toutes les perfections de la beauté, qu’a peine la nature a coutume de faire voir en mille. Parcequ’il ne se trouve point de corps humain de si parfaite beauté, qu’il ne lui en manque quelque partie. Aussi avons nous l’exemple de Zeuxis, qui aiant à peindre Helene dans le temple des Crotoniates, choisit cinq jeunes filles qu’il vit toutes nûes, & prenant les belles parties de l’une, qui manquoient à l’autre, reduisit son Helene au point de perfection que la renomée en subsiste encore aujourdhui. Ce qui peut aussi servir d’avis pour ceux qui ont la temerité de faire tous leurs ouvrages de pratique. Mais si les peintres veulent trouver sans peine le parfait modelle d’une belle femme, ils n’ont qu’a lire les stances dans les quelles l’Arioste decrit admirablement les beautés de la Fée Alcine. Il [sic] verront en même tems, combien les bons poetes sont aussi bons peintres. [...]
Elle etoit aussi bien faite que les plus industrieux peintres eussent sû la representer.
Voila pour la proportion que l’ingenieux Arioste etablit 1, la plus exacte que les plus excellents peintres puissent former : il se sert de l’epithete industrieux, pour marquer le soin, qui convient un excellent ouvrier.
[...]

Quotation

On est fort éloigné du sentiment de quelques auteurs qui n’estimant que les peintres d’histoire, regardent comme fort inférieurs ceux qui peignent (a) le portrait, le païsage, les batailles, les marines, les animaux, les fruits, les fleurs, les noces de village, les tabagies & les cuisines : on prétend au contraire qu’un peintre qui a parfaitement imité la nature n’eüt-il peint qu’une vache, ou comme le peintre grec Zeuxis, qu’une grappe de raisin, est aussi parfait dans son genre que Raphaël l’est dans le sien. Chacun a taché d’exceller dans la partie vers laquelle le génie, une inspiration, une inclination naturelle l’a porté. L’Histoire, il est vrai, est le plus noble objet de la peinture, le plus instructif, & celui qui demande le plus de connoissances ; le païsage, les animaux, les fruits & les fleurs n’en sont que l’accessoire, ils ne servent le plus souvent qu’à orner les sujets d’histoire ; tout enfin consiste dans l’imitation de la belle nature, c’est l’unique point de vuë où l’on doive aspirer.
(a) On les appelle à l’Académie de peintre, des peintres de talens

Quotation

[…] si les Arts sont imitateurs de la Nature ; ce doit être une imitation sage & éclairée, qui ne la copie pas servilement ; mais qui choisissant les objets & les traits, les présente avec toute la perfection dont ils sont susceptibles. En un mot, une imitation, où on voye la Nature, non telle qu’elle est en elle-même, mais telle qu’elle peut être, & qu’on peut la concevoir par l’esprit.
Que fit Zeuxis quand il voulut peindre une beauté parfaite ? Fit-il le portrait de quelque beauté particulière, dont sa peinture fût l’histoire ? Non, il rassembla les traits séparés de plusieurs beautés existantes. Il se forma dans l’esprit une idée factice qui résulta de tous ces traits réunis : & cette idée fut le prototype, ou le modèle de son tableau, qui fut vraisemblablement & poëtique dans sa totalité, & ne fut vrai & historique que dans ses parties prises séparément. Voilà l’exemple donné à tous les Artistes : voilà la route qu’ils doivent suivre, & c’est la pratique de tous les grands Maîtres sans exception.