ECONOMY (n.)
TERM USED AS TRANSLATIONS IN QUOTATION
ÉCONOMIE (fra.)ÉCONOMIE
{IV. Disposition ou œconomie de tout l’ouvrage}
*Il est fort à propos, en cherchant les Attitudes, de prevoir l’effet & l’harmonie des Lumieres & des Ombres avec les Couleurs qui doivent entrer dans le Tout, prenant des unes & des autres ce qui doit contribuer davantage à produire un bel effet.
74. [Où il faut disposer toute la Machine de votre Tableau.] Ce n’est pas sans raison ny par hazard que notre Auteur [ndr : Charles-Alphonse Dufresnoy] se sert du mot de Machine. Une Machine est un juste assemblage de plusieurs pieces pour produire un mesme effet. Et la disposition dans un Tableau n’est autre chose qu’un assemblage de plusieurs Parties, dont on doit prevoir l’accord & la justesse, pour produire un bel effet, comme vous verrez dans le 4. Precepte, qui est de l’Œconomie ; aussi l’appelle-t-on autrement Composition, qui veut dire la distribution & l’agencement des choses en general & en particulier.
78. [Il est fort à propos en cherchant, &c.] Voicy le plus important Precepte de tous ceux de la Peinture. Il appartient proprement au Peintre seul, & tous les autres sont empruntez, de belles Lettres, de la Medecine, des Mathematiques, ou enfin des autres Arts : car il suffit d’avoir de l’esprit & des Lettres, pour faire une tres belle Invention : Pour dessiner, il faut de l’Anatomie ; un Mathematicien mettra fort bien les bastimens & autres choses en Perspective, & les autres Arts apporteront de leur costé ce qui est necessaire pour la matiere d’un beau Tableau : Mais pour l’œconomie du Tout-ensemble, il n’y a que le Peintre seul qui l’entende ; parce que la fin du Peintre est de tromper agreablement les yeux : ce qu’il ne fera jamais, si cette Partie lui manque. Un Tableau peut faire un mauvais effet, lequel sera d’une sçavante Invention, d’un Dessein correct, & qui aura les Couleurs les plus belles & les plus fines : Et au contraire, on peut en voir d’autres mal Inventez, mal Dessinez, & peints de Couleurs les plus communes, qui feront un tres-bon effet, & qui tromperont beaucoup davantage. […]
Ce Precepte est proprement l’usage & l’application de tous les autres : c’est pourquoy il demande beaucoup de Jugement. Il faut donc tellement prevoir les choses, que vostre Tableau soit peint dans vostre teste devant que de l’estre sur la toile. […] Il est certain que ceux qui ont cette prevoyance, travaillent avec un plaisir & une facilité incroyable ; & que les autres au contraire, ne font que changer et rechanger leur Ouvrage, qui ne leur laisse au bout du conte que du chagrin.
On peut inferer de ce que je viens de dire, que l'Invention & la Disposition sont deux Parties differentes. En effet, quoy que la derniere dépende de l'autre, & qu'elle y soit communement comprise, il faut cependant bien se garder de les confondre : L'Invention trouve simplement les choses, & en fait un choix convenable à l'Histoire que l'on traite ; & la Disposition les distribuë chacune à sa place quand elles sont inventées, & accommode les Figures & les Grouppes en particulier, & le Tout-ensemble du Tableau en general ; en sorte que cette Œconomie produit le mesme effet pour les yeux, qu'un Concert de Musique pour les oreilles.
…] Il y a une chose de tres-grande consequence à observer dans l’Œconomie de tout l'Ouvrage, c'est que d'abord l'on reconnoisse la qualité du Sujet, & que le Tableau du premier coup d'œil en inspire la Passion principale : par exemple, si le Sujet que vous avez entrepris de traitter, est de joye, il faut que tout ce qui entrera dans votre Tableau contribuë à cette Passion, en sorte que ceux qui le verront en soient aussi-tost touchez. Si c’est un Sujet lugubre, tout y ressentira la tristesse, & ainsi des autres Passions & qualitez des Sujets.
330. [Le Blanc tout pur avance ou recule indifferement, il s’approche avec du Noir, & s’éloigne sans luy.] Tout le monde convient, que le Blanc peut subsister sur le devant du Tableau, & y estre employé tout pur ; la question est donc de sçavoir s’il peut également subsister & estre placé de la mesme sorte sur le derriere, la Lumiere estant universelle, & les Figures supposées dans une campagne. Nostre Auteur [ndr : Charles-Alphonse Dufresnoy] conclud affirmativement ; & la raison qui appuye ce Precepte est, Que n’y ayant rien qui participe davantage de la Lumiere que le Blanc, & la Lumiere pouvant fort bien subsister dans le lointin (comme nous le voyons tous les jours au lever & au coucher du Soleil,) il s’ensuit que le Blanc y peut subsister aussi : En Peinture la Lumiere & le Blanc ne sont quasi que la mesme chose. Ajoûtez à cela que nous n’avons point de Couleur plus approchante de l’Air que le Blanc, & par consequent point de Couleur plus legere […]. Le Titien, Tintoret, Paul Veronese, & tous ceux qui ont le mieux entendu les Lumieres, l’ont observé de la sorte, & personne ne peut aller à l’encontre de ce Precepte, à moins que de renoncer au païsage, qui nous confirme parfaitement cette verité ; & nous voyons que tous les Grands Païsagistes ont suivy en cela le Titien, qui s’est toûjours servy de Couleurs brunes & terrestres sur le devant, & qui a reservé ses plus grands Clairs pour les lointins & les derrieres de ses Païsages. […]
On peut objecter à cette opinion, Que le Blanc ne peut se tenir dans le lointin ; puisque l’on s’en sert ordinairement pour faire approcher les Objets sur le devant. Il est vray que l’on s’en sert, & mesme fort à propos, pour rendre les Objets plus sensibles par l’opposition du Brun qui le doit accompagner, & qui le retient comme malgré luy ; soit que ce Brun luy serve de fond, ou qu’il luy soit attaché. […]
Mais, il semble (direz-vous) que le Bleu est la Couleur la plus fuyante ; puisque le Ciel & les Montagnes les plus éloignées sont de cette Couleur. Il est bien vray que le Bleu est une Couleur des plus legeres & des plus douces : mais il est vray aussi qu'elle a d'autant plus toutes ces qualitez, qu’il y a de Blanc meslé dedans, comme l'exemple des lointins nous le fait connoistre. […]
Que si la Lumiere de vostre Tableau n’est point universelle, & que vous supposiez vos Figures dans une Chambre, pour lors souvenez-vous du Theorème, qui dit, que Plus un Corps est proche de la Lumière, & nous est directement opposé, plus il est éclairé ; parce que la Lumiere s’affoiblit en s’éloignant de sa source. Vous pourrez encore éteindre vostre Blanc, si vous supposez l'Air estre un peu plus épais, & si vous prevoyez que cette supposition fera un bon effet dans l’œconomie de tout l’Ouvrage : mais que cela n'aille pas jusqu'à faire vos Figures d'une demie teinte si brune, qu'il semble qu'elles soient dans un vilain brouillard, ou qu'elles paroissent attachées à leur fonds. […]
442. [Et que vous n’ayez present dans l’esprit l'effet de vostre Ouvrage.] Si vous voulez avoir du plaisir en peignant, il faut avoir tellement pensé à l'œconomie de vostre Ouvrage, qu'il soit entierement fait & disposé dans vostre teste, avant qu'il soit commencé sur la toile : il faut, dis-je, prévoir l'effet des Grouppes, le Fond, & le Clair-Obscur de chaque chose, l'Harmonie des Couleurs, & l'intelligence de tout le Sujet, de sorte que ce que vous mettrez sur la toile ne soit qu’une Copie de ce que vous avez dans l'esprit. Si vous vous servez de cette conduite, vous n'aurez pas la peine de changer & rechanger tant de fois.
BOUTET, Claude, The Art of Painting in Miniature: Teaching The speedy and perfect Acquisition of that Art without a Master. By Rules so easy, and in a Method so natural as to render this charming Accomplishment universally attainable. Containing I. The Difference between Painting in Miniature, and other Kinds of Painting. II. The Management of Colours in Draperies, Linnen, Lace, Furrs, &c. III. The Method of mixing Colours for Carnations ; for painting of Architecture, or any Building of Stone or Wood ; for Landskips, Terrasses, Water, Ruins, Rocks, &c. IV. The Art of Painting all Sorts of Flowers, with the proper Colours required to represent Nature to the highest Perfection. V. The various Methods of Painting. Translated from the Original French. The Fourth Edition. To which are now added, I. Certain Secrets of one of the greatest Italian Painters for making the finest Colours, Burnished Gold, Shell Gold, &c. II. Some general instructive Lessons for the Art of Drawing. And III. The Usefulness and Benefit of Prints, London, J. Hodges - J. James - T. Cooper, 1739.
LXXXX.
Premierement aprés avoir ordonné l’œconomie de vostre Païsage comme de vos autres Piéces, il faut ébaucher vos Terrasses les plus proches quand elles doivent paroistre brunes avec du Verd de Vessie, ou d’Iris, du Bistre, & un peu de Verd de Montagne, pour donner du corps à vostre couleur, il faut ensuite pointiller avec ce meslange, mais un peu plus brun, y ajoûtant quelques fois du Noir.
Pour celles qui sont claires, l’on fait une couche d’occre & de blanc, puis l’on ombre & l’on finit avec du bistre ; en quelques-unes on mesle un peu de Verd, particulierement pour les ombrer & finir.
Il y a aussi quelques fois sur les devans de certaines terrasses rougeâtres, elles s’ébauchent avec du brun-rouge, du Blanc, & un peu de Verd, & se finissent de mesme, y mettant un peu plus de verd.
Pour faire des herbes & autres feüillages sur les terrasses les plus proches, il faut aprés qu’elles sont finies, les Ebaucher de verd de Mer, ou de Montagne, & un peu de Blanc, & pour celles qui sont jaunâtres y méler du Massicot, ensuite on les ombre avec du verd d’Iris, ou du bistre & de la pierre de fiel, si l’on veut qu’elles paroissent mortes.
Les Terrasses qui sont un peu plus éloignées, s’ébauchent de Verd de Montagne ; on les ombre, & on les achéve avec du Verd de Vessie, y ajoûtant du Bistre, pour donner des coups par-cy par-là.
Celles qui s’éloignent encore d’avantage, se font avec du Verd de Mer & un peu de bleu, & s’ombrent de Verd de Montagne.
Enfin, plus elles fuyent, plus il les faut faire bleuâtres ; & les derniers lointains doivent estre d’outremer & de blanc, y mélant en quelques endroits de petites Teintes de Vermillon.
Dans la division que j'ai faite de la Peinture, j'ai dit que la composition qui en est la premiere partie, contenoit deux choses, l'Invention, & la Disposition. En traitant de l'Invention, j'ai fait voir qu'elle consistoit à trouver les objets convenables au sujet que le Peintre veut représenter. Mais quelque avantageux que soit le sujet, quelque ingenieuse que soit l'Invention, quelque fidelle que soit l'imitation des objets que le Peintre a choisis, s'ils ne sont bien distribués, la composition ne satisfera jamais pleinement le Spectateur desinteressé, & n'aura jamais une approbation generale. L'œconomie & le bon ordre est ce qui fait tout valoir, ce qui dans les beaux Arts attire notre attention, & ce qui tient notre esprit attaché jusqu'à ce qu'il soit rempli des choses qui peuvent dans un Ouvrage & l'instruire, & lui plaire en même tems. Et c'est cette Œconomie que j'appelle proprement Disposition.
Dans cette idée, la Disposition contient six parties.
1. La Distribution des Objets en general.
2. Les Grouppes.
3. Le Choix des Attitudes.
4. Le contraste.
5. Le jet des Draperies.
6. Et l'effet du Tout-ensemble ; où par occasion il est parlé de l'Harmonie & de l'Enthousiasme.
J'examinerai toutes ces parties dans leur rang le plus succintement & le plus nettement qu'il me sera possible.
[…] le bon sens, & la qualité de la matiere doivent déterminer le Peintre à donner aux objets qu'il aura choisis les places qui leur conviennent pour remplir les devoirs d'une bonne composition.
[…] Car l'œconomie dépend de la qualité du sujet, qui est tantôt patetique & tantôt enjoué, tantôt heroïque & tantôt populaire, tantôt tendre & tantôt terrible, & enfin qui demande plus ou moins de mouvement, selon qu'il est plus ou moins vif ou tranquille. Mais si le sujet inspire au Peintre une bonne œconomie dans la distribution des objets, la bonne distribution de son côté sert merveilleusement à exprimer le sujet. Elle donne de la force & de la grace aux choses qui sont inventées ; elle tire les figures de la confusion, & fait que ce que l'on represente est plus net, plus sensible & plus capable d'appeller, & d'arrêter son Spectateur.