LE BLON, Jacques-Christophe ( 1667-1741 )

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Graveur et auteur anglais, "inventeur de l'impression qui imite la peinture" (Charles-Nicolas Cochin, 1745, p. 117)

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[...] Ce fut vers le commencement du seizième siécle on imagina en Italie & en Allemagne l’art d’imiter en estampes les desseins lavés, & l’espece de peinture à une seule couleur, que les Italiens appellent Chiaro-Scuro, & que nous connoissons sous le nom de Camayeux : avec le secours de cette invention on exprima le passage des ombres aux lumieres, & les différentes teintes du Lavis. Cela pourroit faire croire que feu M. le Blond, Anglois, Auteur de l’Impression qui imite la Peinture, dont nous avons parlé à la fin de la troisiéme Partie de cet Ouvrage, n’a fait que perfectionner cet Art en l’étendant à la Peinture en différentes couleurs, puisque sa méthode a pour objet d’imiter le coloris des tableaux, & les différentes teintes que le Peintre forme sur sa palette. Celui qui fit cette découverte en Italie se nomme Hugo da Carpi ; on voit de lui de fort belles choses en ce genre, qu’il a exécutées d’après les desseins de Raphaël, & du Parmesan. François Perrier, Peintre originaire de Franche-Comté, connu par quantité de beaux ouvrages, & surtout par le recueil des Statues antiques qu’il a gravées à Rome d’après les originaux : donna aussi au Public, il y a environ cent ans des Estampes tirées sur du papier gris un peu brun, dont les contours & hachûres étoient imprimées de noir, & les rehauts de blancs, le tout en forme de Camayeux, ce qui parût, au rapport de M. Bosse, non-seulement nouveau, mais encore si beau qu’il en rechercha l’invention, & voici la maniere qu’il enseigne. [...]

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La maniere noire a donné occasion d’inventer une sorte de Gravûre colorée qui imite beaucoup la Peinture. Elle se fait avec plusieurs Planches qui doivent représenter un seul sujet, & qu’on imprime chacune avec sa couleur particuliere, sur le même papier. Ces couleurs par leur différens degrés & leur mélange, produisent des tons approchans des tableaux qui servent d’originaux. On a [p. 124 178] pour cet effet trois planches de cuivre de même grandeur bien égalisées & limées de façon qu’elles se rapportent exactement l’une sur l’autre. Ces trois cuivres sont gravés & préparés comme pour la maniere noire, & l’on calque sur chacun le même dessein. Chaque planche est destinée, comme on vient de le dire, à être imprimée d’une seule couleur : il y en a une pour le rouge, l’autre pour le bleu, & la derniere pour le jaune. On efface sur celle qui doit être imprimée en rouge, toutes les parties où il ne doit point entrer de rouge, comme par exemple la prunelle de l’oeil, ou des étoffes d’une autre couleur, &c. On y forme seulement les parties où le rouge domine comme les lévres, les joues, &c. & dans les autres parties qui ne demandent qu’un oeil roussâtre, comme les masses d’ombre, & en général toute la peau qui doit être vermeille, on y laisse un petit grain tendre, & seulement capable de faire étant imprimée avec les autres couleurs un ton mêlé tel qu’on le désire.

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Sur la Planche qui doit être tirée en bleu on efface tout-à-fait les choses qui sont rouges, & l’on ne fait qu’attendrir celles qui doivent participer de ces deux couleurs ; on laisse entierement celles où le bleu doit dominer. On en fait de même sur la planche destinée pour le jaune. L’on imprime ensuite chacue de ces planches sur le même papier avec la couleur qui lui convient. A l’égard de l’ordre que l’on doit suivre pour l’impression de ces trois couleurs, il varie suivant que l’exigent les sujets que l’on veut représenter. On sçaura seulement en général qu’il faut commencer par la couleur qui est la moins apparente dans le Tableau, & réserver la couleur dominante pour être imprimée la derniere. Quelquefois même on est obligé de graver deux [p. 125 179] planches pour la même couleur, pour faire un plus grand effet, & alors la seconde planche de la même couleur, s’imprime la derniere & ne sert qu’à attendrir & glacer les autres couleurs. On se sert aussi de terre d’ombre & même de noir pour former des masses d’ombre & leur donner plus de vigueur. Toutes les couleurs qu’on empoye pour cette impression doivent être transparentes, ensorte que paroissans sur l’épreuve l’un au travers de l’autre, il en résulte un mélange qui imite plus parfaitement le coloris d’un Tableau. Pour conserver plus long-tems ces épreuves & les faire mieux ressembler à la Peinture, on les colle sur toile, & on les tend sur un chassis, pour les encadrer dans une bordure, ensuite l’on passe par-dessus cette impression un beau vernis pareil à celui que l’on met sur les Tableaux.
Au reste cette espece de Peinture réussit assez bien à imiter les choses qui sont de couleur entiere comme les Plantes, les Fruits, & les Anatomies : mais pour les tons de chairs ils sont composés d’un mélange trop difficile pour qu’on puisse en attendre un grand succès. Il en est de même des Paysages & des sujets d’histoire qui ne sont pas propres à être exécutés par ce genre de gravûre.
Cette invention pourroit être portée à un certain degré de perfection, si d’habiles gens vouloient s’y exercer & y mettre leurs soins : cependant elle n’a pas encore produit jusqu’ici que des choses au-dessous du médiocre, excepé quelques portraits gravés par M. le Blon, dont on a parlé ci-dessus. Le deffaut général de presque toutes les Productions de cette espece, qui ont paru depuis la mort de cet Auteur, est qu’elles sont trop bleuës, & que cette couleur y domine de façon à effacer toutes les autres.

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Principes de la Gravûre & de l’Impression qui imite la Peinture.
Pour dire quelque chose de plus précis & de raisonné sur ce nouvel Art, nous rapporterons ici un extrait d’un Livre devenu extrêmement rare, composé par M. le Blon, & imprimé à Londres, il y a environ quinze ans, en Anglois & en François ; il a pour titre
Il Coloritto, ou l’Harmonie du Coloris dans la Peinture, réduite à des principes infaillibles, & à une pratique méchanique, avec des figures imprimées en couleur pour en faciliter l’intelligence. Par Jacques Christophe le Blon ; in quarto, orné de cinq planches.
M. le blon voulant fixer la véritable harmonie des couleurs dans la Peinture, prouve dans ce Livre que tous les objets peuvent être représentés par trois couleurs primitives, sçavoir le rouge, le jaune, & le bleu. Qu’avec le mêlange de ces trois couleurs on peut composer toutes les autres, & même le noir ; ce qui s’entend des couleurs matérielles dont on se sert dans la Peinture. Car le mélange des couleurs primitives contenues dans les rayons du Soleil, (qu’il appelle couleurs impalpables) produisent au contraire le blanc ; comme M. Newton l’a démontré dans son Traité d’Optique. Ainsi, suivant ce principe, le blanc résulte du mélange des couleurs impalpables & n’est qu’une concentration ou excès de lumiere ; le noir au contraire est une privation ou défaut de lumiere, & est causé par le mélange des couleurs matérielles.

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Ces réflexions ont conduit naturellement cet Auteur à la maniere de représenter tous les objets
[p. 127 181] avec leur couleur naturelle, par le moyen de trois planches gravées comme on vient de le dire, & des trois couleurs primitives. C’est ainsi qu’il a fait cette belle découverte, quoique depuis la naissance de l’Impression en Taille-douce on eut fait plusieurs tentatives inutiles pour réussir dans cette pratique ; on l’avoit même estimée impossible, jusqu’à ce que M. le Blon eut trouvé le moyen de la rendre publique il y a près de trente ans, par quelques morceaux de sa façon qu’il fit paroître alors.
Pour cet effet, après avoir déterminé le sujet qu’on veut représenter & avoir distribué les desseins sur chaque planche suivant l’effet qu’elle doit faire étant tirée avec les autres sur le même papier, on grave ces planches presqu’entierement en maniere noire, excepté les ombres un peu fortes & quelquefois les contours qui sont gravés au Burin, à la maniere ordinaire, lorsque la touche en doit être ferme. On ne grave point entierement le sujet sur chaque planche, mais on n’y marque que l’étendue de couleur que chacune doit recevoir pour s’accorder avec les deux autres, & rendre avec elles la Peinture complette.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.
Le premier de ces articles, qui est le plus considérable, appartient à la théorie de l’invention, & les autres sont absolument nécessaires pour la pratique mécanique ; ils sont même d’une telle importance que si la moindre chose vient à manquer, l’exécution n’a aucun succès. Quelquefois on put employer plus de trois planches, quand la beauté ou la difficulté du sujet l’exige.

Voilà à peu près tout le fin de cet Art, qu’il seroit facile de perfectionner si des personnes sçavantes dans le dessein & dans la Peinture daignoient en prendre la peine ; car sans se restraindre aux trois couleurs primitives que M. le Blon indique, on pourroit y employer différentes terres brunes pour faire des masses d’ombre, comme l’ocre, le brun rouge, la terre d’ombre, le bistre, &c. & les encrer dans l’endroit où il en seroit besoin sur chaque planche, avec un petit tampon fait exprès, & qui ne serviroit que pour cette couleur. Par ce moyen on imiteroit beaucoup mieux la peinture que par le mélange dur & mal entendu de ces trois couleurs employées pures & toutes seules, comme on le fait ordinairement dans ces sortes d’ouvrages.

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La maniere noire a donné occasion d’inventer une sorte de Gravûre colorée qui imite beaucoup la Peinture. Elle se fait avec plusieurs Planches qui doivent représenter un seul sujet, & qu’on imprime chacune avec sa couleur particuliere, sur le même papier. Ces couleurs par leur différens degrés & leur mélange, produisent des tons approchans des tableaux qui servent d’originaux.

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Voilà à peu près tout le fin de cet Art, qu’il seroit facile de perfectionner si des personnes sçavantes dans le dessein & dans la Peinture daignoient en prendre la peine ; car sans se restraindre aux trois couleurs primitives que M. le Blon indique, on pourroit y employer différentes terres brunes pour faire des masses d’ombre, comme l’ocre, le brun rouge, la terre d’ombre, le bistre, &c. & les encrer dans l’endroit où il en seroit besoin sur chaque planche, avec un petit tampon fait exprès, & qui ne serviroit que pour cette couleur. Par ce moyen on imiteroit beaucoup mieux la peinture que par le mélange dur & mal entendu de ces trois couleurs employées pures & toutes seules, comme on le fait ordinairement dans ces sortes d’ouvrages.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.
Le premier de ces articles, qui est le plus considérable, appartient à la théorie de l’invention, & les autres sont absolument nécessaires pour la pratique mécanique ; ils sont même d’une telle importance que si la moindre chose vient à manquer, l’exécution n’a aucun succès. Quelquefois on put employer plus de trois planches, quand la beauté ou la difficulté du sujet l’exige.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.
Le premier de ces articles, qui est le plus considérable, appartient à la théorie de l’invention, & les autres sont absolument nécessaires pour la pratique mécanique ; ils sont même d’une telle importance que si la moindre chose vient à manquer, l’exécution n’a aucun succès. Quelquefois on put employer plus de trois planches, quand la beauté ou la difficulté du sujet l’exige.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.
Le premier de ces articles, qui est le plus considérable, appartient à la théorie de l’invention, & les autres sont absolument nécessaires pour la pratique mécanique ; ils sont même d’une telle importance que si la moindre chose vient à manquer, l’exécution n’a aucun succès. Quelquefois on put employer plus de trois planches, quand la beauté ou la difficulté du sujet l’exige.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.
Le premier de ces articles, qui est le plus considérable, appartient à la théorie de l’invention, & les autres sont absolument nécessaires pour la pratique mécanique ; ils sont même d’une telle importance que si la moindre chose vient à manquer, l’exécution n’a aucun succès. Quelquefois on put employer plus de trois planches, quand la beauté ou la difficulté du sujet l’exige.

Voilà à peu près tout le fin de cet Art, qu’il seroit facile de perfectionner si des personnes sçavantes dans le dessein & dans la Peinture daignoient en prendre la peine ; car sans se restraindre aux trois couleurs primitives que M. le Blon indique, on pourroit y employer différentes terres brunes pour faire des masses d’ombre, comme l’ocre, le brun rouge, la terre d’ombre, le bistre, &c. & les encrer dans l’endroit où il en seroit besoin sur chaque planche, avec un petit tampon fait exprès, & qui ne serviroit que pour cette couleur. Par ce moyen on imiteroit beaucoup mieux la peinture que par le mélange dur & mal entendu de ces trois couleurs employées pures & toutes seules, comme on le fait ordinairement dans ces sortes d’ouvrages.

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[...] Ce fut vers le commencement du seizième siécle on imagina en Italie & en Allemagne l’art d’imiter en estampes les desseins lavés, & l’espece de peinture à une seule couleur, que les Italiens appellent Chiaro-Scuro, & que nous connoissons sous le nom de Camayeux : avec le secours de cette invention on exprima le passage des ombres aux lumieres, & les différentes teintes du Lavis. Cela pourroit faire croire que feu M. le Blond, Anglois, Auteur de l’Impression qui imite la Peinture, dont nous avons parlé à la fin de la troisiéme Partie de cet Ouvrage, n’a fait que perfectionner cet Art en l’étendant à la Peinture en différentes couleurs, puisque sa méthode a pour objet d’imiter le coloris des tableaux, & les différentes teintes que le Peintre forme sur sa palette. Celui qui fit cette découverte en Italie se nomme Hugo da Carpi ; on voit de lui de fort belles choses en ce genre, qu’il a exécutées d’après les desseins de Raphaël, & du Parmesan. François Perrier, Peintre originaire de Franche-Comté, connu par quantité de beaux ouvrages, & surtout par le recueil des Statues antiques qu’il a gravées à Rome d’après les originaux : donna aussi au Public, il y a environ cent ans des Estampes tirées sur du papier gris un peu brun, dont les contours & hachûres étoient imprimées de noir, & les rehauts de blancs, le tout en forme de Camayeux, ce qui parût, au rapport de M. Bosse, non-seulement nouveau, mais encore si beau qu’il en rechercha l’invention, & voici la maniere qu’il enseigne. [...]

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De la Gravûre en manière noire

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De la Gravûre en manière noire
Nous finirons ce Traité par une façon de graver particuliere, appellée
en maniere noire, qui est devenue fort à la mode depuis quelque tems, surtout dans les Pays Etrangers, & dont personne jusqu’ici, n’a encore parlé, & nous ferons voir ensuite le moyen de contrefaire avec cette espece de Gravûre les Tableaux des grands Maîtres, par une nouvelle maniere d’imprimer en plusieurs couleurs, qui imite beaucoup la peinture. M. le Blon, Anglois, passe pour l’Inventeur de cette découverte, & a gravé plusieurs portraits en grand qui ont fort bien réussi, tels que celui du Roi, du Cardinal Fleuri, de Vandeick, & quelques têtes gravées en petit, qui sont touchées avec beaucoup d’intention & de goût : ce sont sans contredits les meilleurs morceaux qui ayent paru en ce genre de Gravûre.

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La maniere noire a donné occasion d’inventer une sorte de Gravûre colorée qui imite beaucoup la Peinture. Elle se fait avec plusieurs Planches qui doivent représenter un seul sujet, & qu’on imprime chacune avec sa couleur particuliere, sur le même papier. Ces couleurs par leur différens degrés & leur mélange, produisent des tons approchans des tableaux qui servent d’originaux. On a [p. 124 178] pour cet effet trois planches de cuivre de même grandeur bien égalisées & limées de façon qu’elles se rapportent exactement l’une sur l’autre. Ces trois cuivres sont gravés & préparés comme pour la maniere noire, & l’on calque sur chacun le même dessein. Chaque planche est destinée, comme on vient de le dire, à être imprimée d’une seule couleur : il y en a une pour le rouge, l’autre pour le bleu, & la derniere pour le jaune. On efface sur celle qui doit être imprimée en rouge, toutes les parties où il ne doit point entrer de rouge, comme par exemple la prunelle de l’oeil, ou des étoffes d’une autre couleur, &c. On y forme seulement les parties où le rouge domine comme les lévres, les joues, &c. & dans les autres parties qui ne demandent qu’un oeil roussâtre, comme les masses d’ombre, & en général toute la peau qui doit être vermeille, on y laisse un petit grain tendre, & seulement capable de faire étant imprimée avec les autres couleurs un ton mêlé tel qu’on le désire.

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Toutes les couleurs qu’on empoye pour cette impression doivent être transparentes, ensorte que paroissans sur l’épreuve l’un au travers de l’autre, il en résulte un mélange qui imite plus parfaitement le coloris d’un Tableau. Pour conserver plus long-tems ces épreuves & les faire mieux ressembler à la Peinture, on les colle sur toile, & on les tend sur un chassis, pour les encadrer dans une bordure, ensuite l’on passe par-dessus cette impression un beau vernis pareil à celui que l’on met sur les Tableaux.
Au reste cette espece de Peinture réussit assez bien à imiter les choses qui sont de couleur entiere comme les Plantes, les Fruits, & les Anatomies : mais pour les tons de chairs ils sont composés d’un mélange trop difficile pour qu’on puisse en attendre un grand succès. Il en est de même des Paysages & des sujets d’histoire qui ne sont pas propres à être exécutés par ce genre de gravûre.
Cette invention pourroit être portée à un certain degré de perfection, si d’habiles gens vouloient s’y exercer & y mettre leurs soins : cependant elle n’a pas encore produit jusqu’ici que des choses au-dessous du médiocre, excepé quelques portraits gravés par M. le Blon, dont on a parlé ci-dessus. Le deffaut général de presque toutes les Productions de cette espece, qui ont paru depuis la mort de cet Auteur, est qu’elles sont trop bleuës, & que cette couleur y domine de façon à effacer toutes les autres.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.

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Plus les tailles sont serrées & plus la Gravûre paroît précieuse, pourvû que cela soit fait avec intelligence, en observant la dégradation des choses avancées à celles qui sont plus éloignés, & des objets qui se détachent à ceux qui leur servent de fonds. C’est pourquoi on gravera fin & serré pour faire un ouvrage qui plaise, ou du moins pour se conformer au goût présent de ce siécle [sic], où l’on n’estime la gravûre en petit qu’autant qu’elle paroît gravée finement, comme si le vrai mérite consistoit à avoir la vûe extrêmement bonne, & beaucoup de patience.
Les contours seront dessinés d’une maniere un peu quarrée ; ils ne doivent être équivoques, mais il faut qu’ils soient ressentis ; on se gardera bien [p. 86 139] de ne les former qu’avec les tailles qui les approchent, cette maniere peut être bonne dans le grand, au lieu qu’elle est vitieuse dans le petit, parce qu’elle en amollit trop les contours. Je répéterai encore en dépit de la mode, & du mauvais goût d’aujourd’hui, que la Gravûre en petit doit conserver une idée d’ébauche, & que plus on la fini plus on lui ôte son principal mérite, qui consiste dans l’esprit & la hardiesse de la touche.

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On ne doit point non plus s’amuser dans le petit à rendre tous les détails des têtes comme dans le grand ; quelques petits coups touchés artistement forment de jolies têtes, & même des passions, mieux que tous les soins qu’on pourroit prendre de marquer les prunelles, les paupieres, les narines, & autres minuties. Il est vrai que cela attire plus l’admiration de la multitude, ou de ces Sçavans dont l’habileté dans d’autres sciences fait regarder les décisions comme fort importante dans un Art où ils n’endendent rien ; mais cet extrême fini n’est qu’une servitude dont un habile Artiste doit se dégager, & qui n’est bonne que pour des gens médiocres & incapables de faire [p. 87 141] les choses à moins de frais.

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Cette invention pourroit être portée à un certain degré de perfection, si d’habiles gens vouloient s’y exercer & y mettre leurs soins : cependant elle n’a pas encore produit jusqu’ici que des choses au-dessous du médiocre, excepé quelques portraits gravés par M. le Blon, dont on a parlé ci-dessus. Le deffaut général de presque toutes les Productions de cette espece, qui ont paru depuis la mort de cet Auteur, est qu’elles sont trop bleuës, & que cette couleur y domine de façon à effacer toutes les autres.

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Plus les tailles sont serrées & plus la Gravûre paroît précieuse, pourvû que cela soit fait avec intelligence, en observant la dégradation des choses avancées à celles qui sont plus éloignés, & des objets qui se détachent à ceux qui leur servent de fonds. C’est pourquoi on gravera fin & serré pour faire un ouvrage qui plaise, ou du moins pour se conformer au goût présent de ce siécle [sic], où l’on n’estime la gravûre en petit qu’autant qu’elle paroît gravée finement, comme si le vrai mérite consistoit à avoir la vûe extrêmement bonne, & beaucoup de patience.
Les contours seront dessinés d’une maniere un peu quarrée ; ils ne doivent être équivoques, mais il faut qu’ils soient ressentis ; on se gardera bien [p. 86 139] de ne les former qu’avec les tailles qui les approchent, cette maniere peut être bonne dans le grand, au lieu qu’elle est vitieuse dans le petit, parce qu’elle en amollit trop les contours. Je répéterai encore en dépit de la mode, & du mauvais goût d’aujourd’hui, que la Gravûre en petit doit conserver une idée d’ébauche, & que plus on la fini plus on lui ôte son principal mérite, qui consiste dans l’esprit & la hardiesse de la touche.

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De la Gravûre en manière noire
Nous finirons ce Traité par une façon de graver particuliere, appellée
en maniere noire, qui est devenue fort à la mode depuis quelque tems, surtout dans les Pays Etrangers, & dont personne jusqu’ici, n’a encore parlé, & nous ferons voir ensuite le moyen de contrefaire avec cette espece de Gravûre les Tableaux des grands Maîtres, par une nouvelle maniere d’imprimer en plusieurs couleurs, qui imite beaucoup la peinture. M. le Blon, Anglois, passe pour l’Inventeur de cette découverte, & a gravé plusieurs portraits en grand qui ont fort bien réussi, tels que celui du Roi, du Cardinal Fleuri, de Vandeick, & quelques têtes gravées en petit, qui sont touchées avec beaucoup d’intention & de goût : ce sont sans contredits les meilleurs morceaux qui ayent paru en ce genre de Gravûre.

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La maniere noire a donné occasion d’inventer une sorte de Gravûre colorée qui imite beaucoup la Peinture. Elle se fait avec plusieurs Planches qui doivent représenter un seul sujet, & qu’on imprime chacune avec sa couleur particuliere, sur le même papier. Ces couleurs par leur différens degrés & leur mélange, produisent des tons approchans des tableaux qui servent d’originaux. On a [p. 124 178] pour cet effet trois planches de cuivre de même grandeur bien égalisées & limées de façon qu’elles se rapportent exactement l’une sur l’autre. Ces trois cuivres sont gravés & préparés comme pour la maniere noire, & l’on calque sur chacun le même dessein. Chaque planche est destinée, comme on vient de le dire, à être imprimée d’une seule couleur : il y en a une pour le rouge, l’autre pour le bleu, & la derniere pour le jaune. On efface sur celle qui doit être imprimée en rouge, toutes les parties où il ne doit point entrer de rouge, comme par exemple la prunelle de l’oeil, ou des étoffes d’une autre couleur, &c. On y forme seulement les parties où le rouge domine comme les lévres, les joues, &c. & dans les autres parties qui ne demandent qu’un oeil roussâtre, comme les masses d’ombre, & en général toute la peau qui doit être vermeille, on y laisse un petit grain tendre, & seulement capable de faire étant imprimée avec les autres couleurs un ton mêlé tel qu’on le désire.

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La maniere noire a donné occasion d’inventer une sorte de Gravûre colorée qui imite beaucoup la Peinture. Elle se fait avec plusieurs Planches qui doivent représenter un seul sujet, & qu’on imprime chacune avec sa couleur particuliere, sur le même papier. Ces couleurs par leur différens degrés & leur mélange, produisent des tons approchans des tableaux qui servent d’originaux. On a [p. 124 178] pour cet effet trois planches de cuivre de même grandeur bien égalisées & limées de façon qu’elles se rapportent exactement l’une sur l’autre. Ces trois cuivres sont gravés & préparés comme pour la maniere noire, & l’on calque sur chacun le même dessein. Chaque planche est destinée, comme on vient de le dire, à être imprimée d’une seule couleur : il y en a une pour le rouge, l’autre pour le bleu, & la derniere pour le jaune. On efface sur celle qui doit être imprimée en rouge, toutes les parties où il ne doit point entrer de rouge, comme par exemple la prunelle de l’oeil, ou des étoffes d’une autre couleur, &c. On y forme seulement les parties où le rouge domine comme les lévres, les joues, &c. & dans les autres parties qui ne demandent qu’un oeil roussâtre, comme les masses d’ombre, & en général toute la peau qui doit être vermeille, on y laisse un petit grain tendre, & seulement capable de faire étant imprimée avec les autres couleurs un ton mêlé tel qu’on le désire.

Quotation

Toutes les couleurs qu’on empoye pour cette impression doivent être transparentes, ensorte que paroissans sur l’épreuve l’un au travers de l’autre, il en résulte un mélange qui imite plus parfaitement le coloris d’un Tableau. Pour conserver plus long-tems ces épreuves & les faire mieux ressembler à la Peinture, on les colle sur toile, & on les tend sur un chassis, pour les encadrer dans une bordure, ensuite l’on passe par-dessus cette impression un beau vernis pareil à celui que l’on met sur les Tableaux.
Au reste cette espece de Peinture réussit assez bien à imiter les choses qui sont de couleur entiere comme les Plantes, les Fruits, & les Anatomies : mais pour les tons de chairs ils sont composés d’un mélange trop difficile pour qu’on puisse en attendre un grand succès. Il en est de même des Paysages & des sujets d’histoire qui ne sont pas propres à être exécutés par ce genre de gravûre.
Cette invention pourroit être portée à un certain degré de perfection, si d’habiles gens vouloient s’y exercer & y mettre leurs soins : cependant elle n’a pas encore produit jusqu’ici que des choses au-dessous du médiocre, excepé quelques portraits gravés par M. le Blon, dont on a parlé ci-dessus. Le deffaut général de presque toutes les Productions de cette espece, qui ont paru depuis la mort de cet Auteur, est qu’elles sont trop bleuës, & que cette couleur y domine de façon à effacer toutes les autres.

Quotation

Sur la Planche qui doit être tirée en bleu on efface tout-à-fait les choses qui sont rouges, & l’on ne fait qu’attendrir celles qui doivent participer de ces deux couleurs ; on laisse entierement celles où le bleu doit dominer. On en fait de même sur la planche destinée pour le jaune. L’on imprime ensuite chacue de ces planches sur le même papier avec la couleur qui lui convient. A l’égard de l’ordre que l’on doit suivre pour l’impression de ces trois couleurs, il varie suivant que l’exigent les sujets que l’on veut représenter. On sçaura seulement en général qu’il faut commencer par la couleur qui est la moins apparente dans le Tableau, & réserver la couleur dominante pour être imprimée la derniere. Quelquefois même on est obligé de graver deux [p. 125 179] planches pour la même couleur, pour faire un plus grand effet, & alors la seconde planche de la même couleur, s’imprime la derniere & ne sert qu’à attendrir & glacer les autres couleurs. On se sert aussi de terre d’ombre & même de noir pour former des masses d’ombre & leur donner plus de vigueur. Toutes les couleurs qu’on empoye pour cette impression doivent être transparentes, ensorte que paroissans sur l’épreuve l’un au travers de l’autre, il en résulte un mélange qui imite plus parfaitement le coloris d’un Tableau. Pour conserver plus long-tems ces épreuves & les faire mieux ressembler à la Peinture, on les colle sur toile, & on les tend sur un chassis, pour les encadrer dans une bordure, ensuite l’on passe par-dessus cette impression un beau vernis pareil à celui que l’on met sur les Tableaux.
Au reste cette espece de Peinture réussit assez bien à imiter les choses qui sont de couleur entiere comme les Plantes, les Fruits, & les Anatomies : mais pour les tons de chairs ils sont composés d’un mélange trop difficile pour qu’on puisse en attendre un grand succès. Il en est de même des Paysages & des sujets d’histoire qui ne sont pas propres à être exécutés par ce genre de gravûre.
Cette invention pourroit être portée à un certain degré de perfection, si d’habiles gens vouloient s’y exercer & y mettre leurs soins : cependant elle n’a pas encore produit jusqu’ici que des choses au-dessous du médiocre, excepé quelques portraits gravés par M. le Blon, dont on a parlé ci-dessus. Le deffaut général de presque toutes les Productions de cette espece, qui ont paru depuis la mort de cet Auteur, est qu’elles sont trop bleuës, & que cette couleur y domine de façon à effacer toutes les autres.

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Cette invention pourroit être portée à un certain degré de perfection, si d’habiles gens vouloient s’y exercer & y mettre leurs soins : cependant elle n’a pas encore produit jusqu’ici que des choses au-dessous du médiocre, excepé quelques portraits gravés par M. le Blon, dont on a parlé ci-dessus. Le deffaut général de presque toutes les Productions de cette espece, qui ont paru depuis la mort de cet Auteur, est qu’elles sont trop bleuës, & que cette couleur y domine de façon à effacer toutes les autres.

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Principes de la Gravûre & de l’Impression qui imite la Peinture.
Pour dire quelque chose de plus précis & de raisonné sur ce nouvel Art, nous rapporterons ici un extrait d’un Livre devenu extrêmement rare, composé par M. le Blon, & imprimé à Londres, il y a environ quinze ans, en Anglois & en François ; il a pour titre
Il Coloritto, ou l’Harmonie du Coloris dans la Peinture, réduite à des principes infaillibles, & à une pratique méchanique, avec des figures imprimées en couleur pour en faciliter l’intelligence. Par Jacques Christophe le Blon ; in quarto, orné de cinq planches.
M. le blon voulant fixer la véritable harmonie des couleurs dans la Peinture, prouve dans ce Livre que tous les objets peuvent être représentés par trois couleurs primitives, sçavoir le rouge, le jaune, & le bleu. Qu’avec le mêlange de ces trois couleurs on peut composer toutes les autres, & même le noir ; ce qui s’entend des couleurs matérielles dont on se sert dans la Peinture. Car le mélange des couleurs primitives contenues dans les rayons du Soleil, (qu’il appelle couleurs impalpables) produisent au contraire le blanc ; comme M. Newton l’a démontré dans son Traité d’Optique. Ainsi, suivant ce principe, le blanc résulte du mélange des couleurs impalpables & n’est qu’une concentration ou excès de lumiere ; le noir au contraire est une privation ou défaut de lumiere, & est causé par le mélange des couleurs matérielles.

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Ces réflexions ont conduit naturellement cet Auteur à la maniere de représenter tous les objets
[p. 127 181] avec leur couleur naturelle, par le moyen de trois planches gravées comme on vient de le dire, & des trois couleurs primitives. C’est ainsi qu’il a fait cette belle découverte, quoique depuis la naissance de l’Impression en Taille-douce on eut fait plusieurs tentatives inutiles pour réussir dans cette pratique ; on l’avoit même estimée impossible, jusqu’à ce que M. le Blon eut trouvé le moyen de la rendre publique il y a près de trente ans, par quelques morceaux de sa façon qu’il fit paroître alors.
Pour cet effet, après avoir déterminé le sujet qu’on veut représenter & avoir distribué les desseins sur chaque planche suivant l’effet qu’elle doit faire étant tirée avec les autres sur le même papier, on grave ces planches presqu’entierement en maniere noire, excepté les ombres un peu fortes & quelquefois les contours qui sont gravés au Burin, à la maniere ordinaire, lorsque la touche en doit être ferme. On ne grave point entierement le sujet sur chaque planche, mais on n’y marque que l’étendue de couleur que chacune doit recevoir pour s’accorder avec les deux autres, & rendre avec elles la Peinture complette.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.

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L’Art d’imprimer en couleur se réduit donc I°. A représenter un objet quelconque avec trois couleurs & par le moyen de trois planches qui doivent se rapporter sur le même papier. 2°. A faire les desseins sur chacune des trois planches, de façon que les trois desseins s’accordent exactement. 3°. A graver les trois planches de façon qu’elles ne puissent manquer de se rapporter ensemble. 4°. A trouver les trois vrayes couleurs matérielles primitives, & les préparer de maniere qu’elles puissent s’imprimer, être belles & durer long-tems. 5°. Enfin à tirer les trois planches avec assez d’adresse pour [p. 128 182] qu’on ne s’apperçoive point après l’Impression de la façon dont elles sont tirées.
Le premier de ces articles, qui est le plus considérable, appartient à la théorie de l’invention, & les autres sont absolument nécessaires pour la pratique mécanique ; ils sont même d’une telle importance que si la moindre chose vient à manquer, l’exécution n’a aucun succès. Quelquefois on put employer plus de trois planches, quand la beauté ou la difficulté du sujet l’exige.

Voilà à peu près tout le fin de cet Art, qu’il seroit facile de perfectionner si des personnes sçavantes dans le dessein & dans la Peinture daignoient en prendre la peine ; car sans se restraindre aux trois couleurs primitives que M. le Blon indique, on pourroit y employer différentes terres brunes pour faire des masses d’ombre, comme l’ocre, le brun rouge, la terre d’ombre, le bistre, &c. & les encrer dans l’endroit où il en seroit besoin sur chaque planche, avec un petit tampon fait exprès, & qui ne serviroit que pour cette couleur. Par ce moyen on imiteroit beaucoup mieux la peinture que par le mélange dur & mal entendu de ces trois couleurs employées pures & toutes seules, comme on le fait ordinairement dans ces sortes d’ouvrages.

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Voilà à peu près tout le fin de cet Art, qu’il seroit facile de perfectionner si des personnes sçavantes dans le dessein & dans la Peinture daignoient en prendre la peine ; car sans se restraindre aux trois couleurs primitives que M. le Blon indique, on pourroit y employer différentes terres brunes pour faire des masses d’ombre, comme l’ocre, le brun rouge, la terre d’ombre, le bistre, &c. & les encrer dans l’endroit où il en seroit besoin sur chaque planche, avec un petit tampon fait exprès, & qui ne serviroit que pour cette couleur. Par ce moyen on imiteroit beaucoup mieux la peinture que par le mélange dur & mal entendu de ces trois couleurs employées pures & toutes seules, comme on le fait ordinairement dans ces sortes d’ouvrages.

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[...] Ce fut vers le commencement du seizième siécle on imagina en Italie & en Allemagne l’art d’imiter en estampes les desseins lavés, & l’espece de peinture à une seule couleur, que les Italiens appellent Chiaro-Scuro, & que nous connoissons sous le nom de Camayeux : avec le secours de cette invention on exprima le passage des ombres aux lumieres, & les différentes teintes du Lavis. Cela pourroit faire croire que feu M. le Blond, Anglois, Auteur de l’Impression qui imite la Peinture, dont nous avons parlé à la fin de la troisiéme Partie de cet Ouvrage, n’a fait que perfectionner cet Art en l’étendant à la Peinture en différentes couleurs, puisque sa méthode a pour objet d’imiter le coloris des tableaux, & les différentes teintes que le Peintre forme sur sa palette. Celui qui fit cette découverte en Italie se nomme Hugo da Carpi ; on voit de lui de fort belles choses en ce genre, qu’il a exécutées d’après les desseins de Raphaël, & du Parmesan. François Perrier, Peintre originaire de Franche-Comté, connu par quantité de beaux ouvrages, & surtout par le recueil des Statues antiques qu’il a gravées à Rome d’après les originaux : donna aussi au Public, il y a environ cent ans des Estampes tirées sur du papier gris un peu brun, dont les contours & hachûres étoient imprimées de noir, & les rehauts de blancs, le tout en forme de Camayeux, ce qui parût, au rapport de M. Bosse, non-seulement nouveau, mais encore si beau qu’il en rechercha l’invention, & voici la maniere qu’il enseigne. [...]

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[...] Ce fut vers le commencement du seizième siécle on imagina en Italie & en Allemagne l’art d’imiter en estampes les desseins lavés, & l’espece de peinture à une seule couleur, que les Italiens appellent Chiaro-Scuro, & que nous connoissons sous le nom de Camayeux : avec le secours de cette invention on exprima le passage des ombres aux lumieres, & les différentes teintes du Lavis. Cela pourroit faire croire que feu M. le Blond, Anglois, Auteur de l’Impression qui imite la Peinture, dont nous avons parlé à la fin de la troisiéme Partie de cet Ouvrage, n’a fait que perfectionner cet Art en l’étendant à la Peinture en différentes couleurs, puisque sa méthode a pour objet d’imiter le coloris des tableaux, & les différentes teintes que le Peintre forme sur sa palette. Celui qui fit cette découverte en Italie se nomme Hugo da Carpi ; on voit de lui de fort belles choses en ce genre, qu’il a exécutées d’après les desseins de Raphaël, & du Parmesan. François Perrier, Peintre originaire de Franche-Comté, connu par quantité de beaux ouvrages, & surtout par le recueil des Statues antiques qu’il a gravées à Rome d’après les originaux : donna aussi au Public, il y a environ cent ans des Estampes tirées sur du papier gris un peu brun, dont les contours & hachûres étoient imprimées de noir, & les rehauts de blancs, le tout en forme de Camayeux, ce qui parût, au rapport de M. Bosse, non-seulement nouveau, mais encore si beau qu’il en rechercha l’invention, & voici la maniere qu’il enseigne. [...]