LICHT EN BRUIN (expr.)
TERM USED AS TRANSLATIONS IN QUOTATION
CLAIR-OBSCUR (fra.)CLAIR-OBSCUR
DU FRESNOY, Charles-Alphonse et DE PILES, Roger, De Schilderkonst eerst in Latynze Vaerzen Beschreven door C.A. Dufresnoy in't Frans gebragt en met Aantekekeningen verrykt Door den Heer De Piles Nevens een Zaammeuspraak over het koloriet, trad. par VERHOEK, Joannes, Amsterdam, Balthazar Lakeman, 1722.
CLAIR-OBSCUR.
Clair-obscur est la science de placer les jours & les ombres ; ce sont deux mots que l'on prononce comme un seul, & au lieu de dire le clair & l'obscur ; l'on dit le Clair-obscur, à l'imitation des Italiens qui disent Chiaro-scuro. Et pour dire qu'un Peintre donne à ses Figures un grand relief & une grande force, qu'il débroüille & qu'il fait connoistre distinctement tous les objets du Tableau, pour avoir choisi sa lumiere avantageuse, & pour avoir sceu disposer les corps en sorte que recevant de grandes lumières, ils soient suivis de grandes ombres, on dit, Cet homme-là entend fort-bien l'artifice du Clair-obscur.
152. [De mesme que la Comédie, &c.] Annibal Carache ne croyoit pas qu'un Tableau pust estre bien, dans lequel on faisoit entrer plus de douze Figures : c'est l'Albane qui l'a dit à nostre Autheur, de qui je l'ay appris ; & la raison qu'il en apportoit, estoit premierement qu'il ne croyoit pas qu'on deust faire plus de trois grands Grouppes de Figures dans un Tableau ; & secondement que le Silence & la Majesté y estoient necessaires pour le rendre beau : ce qui ne se peut ny l'un ny l'autre dans une multitude & dans une foule de Figures. Que si neantmoins vous y estes contraint par le Sujet, comme seroit un Jugement universel, un Massacre des Innocens, une Bataille, &c. pour lors il faudroit disposer les choses par grandes Masses de Clair-Obscur & d'union de Couleurs, sans s'amuser à finir chaque chose en particulier indépendamment l'une de l'autre, comme font ceux qui ont un petit Genie, & dont l'esprit n'est pas capable d'embrasser un grand Dessein, ny une grande Composition.
282. [Que vous fassiez paroistre les Corps éclairez par des Ombres qui arrestent vostre veuë, &c.] C’est à dire proprement, qu’apres de grands Clairs il faut de grandes Ombres, qu’on appelle des Repos ; parce que effectivement la veuë seroit fatiguée, si elle estoit attirée par une continuité d’objets petillans. Les Clairs peuvent servir de repos aux Bruns, comme les Bruns en servent aux Clairs. […]
Ces Repos se font de deux manieres, dont l’une est Naturelle, & l’autre Artificielle : La Naturelle se fait par une étenduë de Clairs ou d’Ombres, qui suivent naturellement & necessairement les Corps solides, ou les Masses de plusieurs Figures agrouppées lors que le jour vient à frapper dessus : Et l’Artificielle consiste dans les Corps des Couleurs que le Peintre donne à de certaines choses telles qu’il luy plaist, & les compose de telle sorte, qu’elles ne fassent point de tort aux Objets qui sont auprés d’elles. Une Draperie par exemple que l’on aura fait jaune ou rouge en certain endroit, pourra estre dans un autre de Couleur brune, & y conviendra mieux pour produire l’effet que l’on demande. L’on doit prendre occasion autant qu’il est possible de se servir de la premiere Maniere, & de trouver les Repos dont nous parlons par le Clair ou par l’Ombre, qui accompagnent naturellement les Corps solides […]
Ainsi le Peintre qui a de l'intelligence prendra ses avantages de l'une & de l'autre Maniere ; & s'il fait un Dessein qui doive estre gravé, il se souviendra que les Graveurs ne disposent pas des Couleurs, comme font les Peintres, & que par consequent il doit prendre occasion de trouver les Repos de son Dessein dans les Ombres naturelles des Figures, qu'il aura disposées à cet effet. Rubens en donne une parfaite connoissance dans les Estampes qu'il a fait graver ; & je ne croy pas que l'on puisse rien voir de plus beau en ce genre : Toute l'intelligence des Grouppes, du Clair-Obscur & de ces Masses que le Titien appelloit la Grappe de Raisin, y est si nettement exposée, que la veüe de ces Estampes & l'attention que l'on y apporterait contribueraient beaucoup à faire un Habile-homme. […]
Ce n'est pas que les Graveurs ne puissent & ne doivent imiter les Corps des Couleurs par les degrez du Clair-Obscur, autant qu'ils jugeront que cela doit produire un bel effet ; au contraire il est à mon avis, impossible de donner beaucoup de force à tout ce que l'on gravera d'après les Ouvrages de l'Ecole de Venise, & de tous ceux qui ont eu l'intelligence des Couleurs & du Contraste du Clair-Obscur, sans imiter en quelque façon la Couleur des Objets selon le rapport qu'elle a aux degrez du Blanc & du Noir. […]
286. [De la mesme façon que le Miroir convexe vous le montre.] Le Miroir convexe altere les Objets qui sont au milieu, de sorte qu’il semble les faire sortir hors de sa superficie. Le Peintre en usera de cette maniere à l’égard du Clair-Obscur de ses Figures, pour leur donner plus de relief & plus de force.
{XXXVI. Union.}
Il faut aussi que la pluspart des Corps, qui sont sous une Lumiere étenduë & distribuée également par tout, tiennent de la Couleur l'un de l'autre. Les Venitiens ayant en grande recommandation cette maxime (que les Anciens appellerent Rupture de Couleurs) dans la quantité de Figures dont ils ont remply leurs Tableaux, ont toûjours recherché l'union des Couleurs, de peur qu'estant trop differentes, elles ne viennent à embarasser la veuë par leur confusion avec la quantité des Membres separez par leurs Plis, qui sont encore en assez grand nombre ; & pour cet effet ils ont peint leurs Draperies de Couleurs approchantes les unes des autres, & ne les ont presque disinguées que par la diminution du Clair-Obscur, en accouplant les Objets contigus par la participation de leurs Couleurs, & en liant ainsi d'amitié les Lumieres & les Ombres.
{Le Coloris. III Partie} Que dans le Coloris, qui comprend deux choses, la Couleur locale & le Clair-obscur ; le Peintre ait grand soin de s'instruire de l'une & de l'autre : c’est ce qui le distingue des artisans qui ont de commun avec lui les mesures & les proportions ; & c’est encore ce qui le rend le plus véritable & le plus parfait imitateur de la Nature.
introduction, p. 6{Le Clair-Obscur} Et le Clair-obscur est l'art de distribuer avantageusement les lumières & les ombres, tant sur les objets particuliers, que dans le général du Tableau: sur les objets particuliers, pour leur donner le relief & la rondeur convenable : & dans le général du Tableau, pour y faire voir les objets avec plaisir, en donnant occasion à la vûe de se reposer d'espace en espace, par une distribution ingénieuse de grands clairs, & de grandes ombres, lesquels se prêtent un mutuel secours par leur opposition ; en sorte que les grands clairs sont des repos pour les grandes ombres ; comme les grandes ombres sont des repos pour les grands clairs.
introduction, p. 6-7
Je ne vois pas que l'artifice du Clair-obscur ait été connu dans l'Ecole Romaine avant Polydore de Caravage, qui le trouva & qui s’en fit un principe ; & je suis étonné que les Peintres qui l'ont suivi ne se soient pas aperçus que le grand effet de ses ouvrage
s vient des repos qu'il a observés d'espace en espace, en groupant ses lumières d'un côté & ses ombres d'un autre, ce qui ne se fait que par l'intelligence du Clair-obscur.
{Unité d’objet} Que si il y a plusieurs groupes de Clair-obscur dans un Tableau, il faut qu’il y en ait un qui soit plus sensible, & qui domine sur les autres, en sorte qu’il y ait unité d’objet, comme dans la Composition, unité de sujet.
introduction, p. 9LUMIÈRE ET OMBRE
DU FRESNOY, Charles-Alphonse et DE PILES, Roger, De Schilderkonst eerst in Latynze Vaerzen Beschreven door C.A. Dufresnoy in't Frans gebragt en met Aantekekeningen verrykt Door den Heer De Piles Nevens een Zaammeuspraak over het koloriet, trad. par VERHOEK, Joannes, Amsterdam, Balthazar Lakeman, 1722.
{IV. Disposition ou œconomie de tout l’ouvrage}
*Il est fort à propos, en cherchant les Attitudes, de prevoir l’effet & l’harmonie des Lumieres & des Ombres avec les Couleurs qui doivent entrer dans le Tout, prenant des unes & des autres ce qui doit contribuer davantage à produire un bel effet.
XXII. Les Draperies.}
*Que les Draperies soient jettées noblement, que les plis en soient amples, *& qu'ils suivent l'ordre des Parties, les faisant voir dessous par le moyen des Lumieres & des Ombres ; nonobstant que ces Parties soient souvent traversées par le coulant des Plis qui flotent à l'entour, *sans y estre trop adherans & collez ; mais qu'ils les marquent en les flatant par la discretion des ombres & des clairs. * Et si ces parties se trouvent trop écartées l'une de l'autre, en sorte qu'il y ait des vuides dans lesquels se trouvassent des bruns, il faudra prendre occasion de placer dans le vuide quelque pli pour les accoupler. *Et comme la beauté des membres ne consiste pas dans la quantité des muscles, qu'au contraire ceux qui en font moins paroistre, ont plus de majesté que les autres ; ainsi la beauté des Draperies ne consiste pas dans la quantité des plis, mais dans un ordre simple & naturel. Il y faut encore observer la qualité des personnes, *comme des Magistrats, à qui vous donnerez des Draperies fort amples ; aux Païsans & aux Esclaves, de grosses & de retroussées ; *& aux Filles, de tendres & de legeres. Il fera bon quelquefois de tirer des endroits creux quelque pli, & de le faire enfler ; afin que recevant du jour, il contribuë à étendre le clair aux endroits où la Masse le demande, & que par ce moyen il vous oste des ombres dures, qui ne font que des taches.